Dictionnaire pratique et historique de la musique/Diapason
Diapason, n. m. 1. Nom grec de
l’intervalle d’octave, maintenu dans
les langues latine et française par les
théoriciens du moyen âge et jusque
par Pierre Maillart (1610). || 2. Anciennement,
synonyme d’ambitus ou de
tessiture. Francœur a intitulé « Diapason
général des voix et des instruments »
un tableau réunissant l’étendue
comparée de chacun d’eux. || 3.
Dans la facture d’orgues : a. rapport
entre le diamètre du tuyau et sa
longueur. On dresse, sous le nom de
D., pour chaque sorte de jeux, des
tableaux contenant tous les chiffres
relatifs aux dimensions des tuyaux et
au débit de l’air employé dans un
espace de temps et sous une pression
donnés ; b. terme de la facture anglaise
pour désigner un jeu analogue à la
montre et au prestant des organiers
français. || 4. Norme adoptée pour
l’accord des voix et des instruments.
|| 5. Instrument servant d’étalon sonore
et sur lequel se règle l’accord des voix
et des instruments. Depuis les commencements
de l’art harmonique, il
est devenu nécessaire de fixer un
point de repère devant guider l’exécution
et la facture. On ignore sur
quelles bases il pouvait s’établir
dans les époques anciennes. Le premier
renseignement précis est offert
par l’orgue d’Halberstadt, mais ne
remonte pas plus haut que 1495 ; à
cette date le la, fixé actuellement à
870 vibrations simples par seconde,
sonnait beaucoup plus haut, à 1 010 vibrations
simples. En 1713, les orgues
de la cathédrale de Strasbourg donnaient
un la de 784 vibrations simples,
et celles de Notre-Dame de Paris, un la
de 810 vibrations simples. Dans un
même pays, dans une même ville,
existaient des habitudes différentes,
selon qu’il s’agissait du ton d’église et
du ton de chambre. Tosi (1723) recommandait
aux maîtres de chant de faire
étudier leurs élèves d’après
le ton de Lombardie et
non d’après celui de Rome,
afin de leur faire acquérir
des notes aiguës et de
leur éviter tout embarras
lorsqu’ils se trouveraient
accompagnés par des instruments
élevés. Un demi-siècle
plus tard, l’écart
entre ces deux D. était
d’une tierce mineure : le ré
lombard correspondait au
fa romain. On constatait,
durant la première moitié
du xixe s., une tendance
générale à l’élévation du
D., due en grande partie
à l’importance prise par
les instruments à vent, auxquels les
sonorités aiguës prêtaient plus de netteté
et d’éclat. Pour mettre fin à l’indécision
régnante, le physicien allemand
Scheibler fit approuver par un congrès
scientifique tenu à Stuttgart en
1834, l’adoption d’un D. de 880 vibrations
simples pour le la ; mais cette
proposition eut peu d’influence. Vers
1840, le la se tenait à Paris aux environs de 900 vibrations simples,
à Vienne entre 868 et 890, à Berlin à
884, à Londres à 900 ou 910 ; il montait
à 920 en Russie. Une commission
de physiciens et de musiciens, qui eut
Lissajous pour principale autorité et
Halévy pour rapporteur, se réunit à
Paris en 1859 pour étudier la possibilité
de la fixation d’un D. universel
ou qui pût le devenir. Elle s’arrêta au
la de 870 vibrations simples, ou
435 vibrations doubles par seconde.
Cette décision fut rendue obligatoire
en France par décret, et un D. type
fut construit et déposé au Conservatoire
des Arts et Métiers, pour
servir d’étalon : chaque D. fabriqué
et mis en vente en France est
vérifié conforme à ce D. type, par
le moyen d’un comparateur optique
inventé par Lissajous, qui contrôle
l’exactitude du nombre des vibrations.
Diapason.
L’instrument officiellement
choisi et désigné sous
le nom de D. normal est
une verge vibrante, faite
d’une tige d’acier quadrangulaire,
courbée en forme
d’un U allongé ou d’une
fourchette à deux dents.
Inventé par l’Anglais
Shore en 1711, il fait entendre,
dès qu’on le met en
vibration par le choc d’un
corps dur, un son fixe,
constant et distinct des
harmoniques qui l’accompagnent.
Le son est renforcé
quand on dispose le D. sur
une caisse de résonance. Les D. portatifs,
à l’usage des accordeurs, des
chefs de chœur, etc., sont pourvus
d’un court manche en acier. On construit
des D. ou des séries de D. accordés
aux sons que l’on veut obtenir.
Sizes et Massol se sont servi, pour leurs
expériences sur les sons harmoniques,
d’un énorme D. donnant l’ut de 32
vibrations simples. On établit des
D. électriques dont les vibrations
sont prolongées par un petit électro-aimant
agissant comme celui d’une
sonnette électrique. Ils sont employés
dans la construction des appareils télégraphiques
destinés à transmettre ou
recevoir plusieurs dépêches à la fois
sur un seul fil ; ce système, qui porte le
nom de ses inventeurs, Mercadier et
Magunna, est basé sur le phénomène
de la résonance sympathique : les
courants ondulatoires étant caractérisés
par le plus ou moins de fréquence
de leurs vibrations et, musicalement,
par la hauteur relative des sons fournis
par les électro-diapasons qui leur
donnent naissance, trois appareils
Hughes fonctionnant en même temps
et émettant respectivement les sons
ut, ré, mi, de 1 034, 1 161 et 1 303 vibrations
simples par seconde, ceux-ci
seront reçus par trois monophones
différents accordés à l’unisson de chacun
d’eux.