Dictionnaire pratique et historique de la musique/Conservatoire

Console  ►

Conservatoire, n. m. Nom d’origine ital., sous lequel on range d’une façon générale tout établissement d’enseignement musical, dans lequel un cours complet d’études est donné, soit gratuitement, soit moyennant rétribution, à des élèves répondant à des conditions fixées d’âge et d’aptitudes. Les plus anciens C. furent ouvert en Italie à titre charitable. À l’exemple du C. de Santa Maria di Loreto, fondé à Naples en 1537 par le prêtre Giovanni di Tapia, trois autres écoles semblables, dites della Pietà dei Turchini, dei Poveri di Gesù Cristo et de San Onofrio, furent annexées à des hôpitaux ou à des orphelinats de la même ville et réunies en 1808 en un seul Collège royal de musique, appelé du nom de son local, C. di San Pietro a Majella. Quatre établissements semblables où des jeunes filles pauvres étaient recueillies et instruites dans la musique, furent célèbres à Venise pendant le xviiie s. Cette acception philanthropique du nom de C. a disparu à l’époque moderne, et les écoles ainsi dénommées ont pour but unique de développer des talents musicaux. Les principaux C. d’Italie sont aujourd’hui ceux de Bologne (Liceo musicale, fondé en 1804), Milan (1807), Florence (1860), Naples, Venise (1877), Pesaro (Liceo Rossini, 1883). En France, sous l’ancien régime, l’enseignement musical était donné dans les maîtrises et les écoles privées. L’École royale de chant, ouverte en 1784, avait pour unique destination de préparer des sujets pour l’Opéra. Elle fut supprimée par une loi du 16 thermidor an iii (3 août 1795) et remplacée par un Institut national, d’abord destiné au recrutement des musiciens militaires, et bientôt transformé en Conservatoire de musique. Bernard Sarrette, qui l’avait organisé, en fut nommé directeur en 1797. Le règlement de l’an viii (1800) réduisit de 125 à 70 le nombre des professeurs et fixa celui des élèves à 400. Une bibliothèque spéciale y fut ajoutée. On institua des concerts, servant d’exercices aux élèves, et des concours de fin d’année. Les classes de déclamation y furent inaugurées en 1806. Non sans de multiples refontes et modifications de ses règlements, le C. de Paris s’est maintenu dans un état presque continuellement florissant jusqu’à nos jours. Installé aujourd’hui dans les bâtiments de l’ancien collège des Jésuites, il jouit d’une subvention de l’État de 270 000 fr. L’enseignement y est distribué par 83 professeurs et répétiteurs, en 33 classes que fréquentent 800 élèves ; l’âge d’admission varie, selon les classes, entre 9 et 26 ans ; des récompenses sous forme de prix et accessits sont décernées chaque année après concours ; une bibliothèque et un musée, sans cesse enrichis depuis leur fondation, renferment d’inépuisables sujets d’étude. Les directeurs du C. ont été, après Sarrette, Cherubini (1822), Auber (1842), Ambroise Thomas (1871), Théodore Dubois (1896), G. Fauré (1905). Douze écoles de musique, établies à Boulogne-sur-Mer, Dijon, Lille, Lyon, Montpellier, Nancy, Nantes, Nîmes, Perpignan, Rennes, Roubaix et Toulouse, portent le titre de succursales du C. de Paris. Le caractère d’institution d’État appartient en Belgique aux C. de Bruxelles (1832), Liège (1832) et Gand (1879). En Angleterre, Londres à elle seule possède cinq grandes écoles de musique. En Allemagne, Berlin en compte trois. Les C. de Leipzig (1843), de Vienne (1817), de Prague (1811) passent pour les plus importants de l’Europe centrale. Des établissements similaires ont été fondés à Varsovie (1824), Madrid (1858), Moscou (1864), Petrograd (1865), et dans un grand nombre de cités de l’Ancien et du Nouveau Monde.