Dictionnaire philosophique/Garnier (1878)/Hauteur

Éd. Garnier - Tome 19
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HAUTEUR[1].

GRAMMAIRE, MORALE.

Si hautain est pris en mal, hauteur est tantôt une bonne, tantôt une mauvaise qualité, selon la place qu’on tient, l’occasion où l’on se trouve, et ceux avec qui l’on traite. Le plus bel exemple d’une hauteur noble et bien placée est celui de Popilius, qui trace un cercle autour d’un puissant roi de Syrie, et lui dit : « Vous ne sortirez pas de ce cercle sans satisfaire à la république, ou sans attirer sa vengeance. » Un particulier qui en userait ainsi serait un impudent. Popilius, qui représentait Rome, mettait toute la grandeur de Rome dans son procédé, et pouvait être un homme modeste.

Il y a des hauteurs généreuses, et le lecteur dira que ce sont les plus estimables. Le duc d’Orléans, régent du royaume, pressé par M. Sum, envoyé de Pologne, de ne point recevoir le roi Stanislas, lui répondit : « Dites à votre maître que la France a toujours été l’asile des rois. »

La hauteur avec laquelle Louis XIV traita quelquefois ses ennemis est d’un autre genre, et moins sublime.

On ne peut s’empêcher de remarquer ici ce que le P. Bouhours dit du ministre d’État Pomponne : « Il avait une hauteur, une fermeté d’âme que rien ne faisait ployer. » Louis XIV, dans un Mémoire de sa main[2], dit de ce même ministre qu’il n’avait ni fermeté ni dignité.

On a souvent employé au pluriel le mot hauteur dans le style relevé, les hauteurs de l’esprit humain ; et on dit dans le style simple : il a eu des hauteurs, il s’est fait des ennemis par ses hauteurs.

Ceux qui ont approfondi le cœur humain en diront davantage sur ce petit article.


  1. Encyclopédie, tome VIII, 1765. (B.)
  2. On trouve ce Mémoire dans le Siècle de Louis XIV (chapitre xxviii).


Hautain

Hauteur

Hémistiche