Dictionnaire philosophique/Garnier (1878)/Éternité

Éd. Garnier - Tome 19
◄  États généraux Éternité Eucharistie   ►



ÉTERNITÉ[1].

J’admirais, dans ma jeunesse, tous les raisonnements de Samuel Clarke ; j’aimais sa personne, quoiqu’il fût un arien déterminé ainsi que Newton, et j’aime encore sa mémoire parce qu’il était bon homme ; mais le cachet de ses idées, qu’il avait mis sur ma cervelle encore molle, s’effaça quand cette cervelle se fut un peu fortifiée. Je trouvai, par exemple, qu’il avait aussi mal combattu l’éternité du monde qu’il avait mal établi la réalité de l’espace infini.

J’ai tant de respect pour la Genèse et pour l’Église, qui l’adopte, que je la regarde comme la seule preuve de la création du monde depuis cinq mille sept cent dix-huit ans, selon le comput des Latins, et depuis sept mille deux cent soixante et dix-huit ans, selon les Grecs.

Toute l’antiquité crut au moins la matière éternelle ; et les plus grands philosophes attribuèrent aussi l’éternité à l’ordre de l’univers.

Ils se sont tous trompés, comme on sait ; mais on peut croire, sans blasphème, que l’éternel formateur de toutes choses fit d’autres mondes que le nôtre.

Voici ce que dit sur ces mondes et sur cette éternité un auteur inconnu, dans une petite feuille qui peut aisément se perdre, et qu’il est peut-être bon de conserver :

. . . . . . Foliis tantum ne carmina manda.

(Virg., Æn., VI, 74.)

S’il y a dans cet écrit quelques propositions téméraires, la petite société qui travaille à la rédaction du recueil les désavoue de tout son cœur[2].


  1. Questions sur l’Encyclopédie, cinquième partie, 1771. (B.)
  2. Dans les Questions sur l’Encyclopédie, on rapportait ici tout le premier couplet du dialogue intitulé les Adorateurs (voyez les Mélanges, année 1760). (B.)


États généraux

Éternité

Eucharistie