Dictionnaire national et anecdotique par M. De l’Épithète/VOYAGER

VOYAGER : dans l’ancien régime on faisoit voyager les jeunes seigneurs pour les former ; les voyages faisoient partie de leur éducation. Un mentor les promenoit dans toutes les cours de l’Europe, où ces jeunes messieurs persistoient & étoient persifflés.

Dans le nouveau régime ce sont les peres qui voyagent au lieu des enfans ; loin d’aller s’instruire dans les cours étrangeres, ce sont eux qui vont instruire les cours. Ces missionnaire politiques qui n’aiment point les révolutions, y causent cependant quelqu’espèce de révolution. C’est à leur persuasion que la cour d’Espagne s’est réconciliée avec son inquisition pour frapper d’anathême nos écrits patriotiques qui feroient ressouvenir aux Arragonnois qu’ils disent à leurs rois : nosostros que somos mas que vos, nous qui sommes plus que vous. À Turin, c’est à l’instigation des illustres cosmopolites qu’il a été défendu aux porteurs du Mont-Cénis de lier aucune conversation avec les portés qui venoient de Lanebourg[1].

  1. Les porteurs du Mont-Cénis sont des hommes vigoureux qui transportent les voyageurs sur leurs épaules d’un côté du Mont-Cénis à l’autre. Lanebourg est le village ou bourg situé au pied des Alpes du côté de la France.