Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Trou du château de Carnoët

Henri Plon (p. 669).

Trou du château de Carnoët. J’ai visité, dit Cambry dans son Voyage du Finistère, les ruines massives de l’antique château de Carnoët, sur la rive droite du Laïta (c’est le nom que l’isole et l’Ellé prennent après leur réunion) ; les pans de murs, couverts de grands arbres, de ronces, d’épines, de plantes de toute nature, ne laissent apercevoir que leur grandeur ; des fossés remplis d’une eau vive l’entouraient, des tours le protégeaient. C’était sans doute un objet de terreur pour le voisinage ; il y paraît par les contes qu’on nous en rapporte.

Un de ses anciens propriétaires, type de la Barbe-Bleue, égorgeait ses femmes dès qu’elles étaient grosses. La sœur d’un saint devint son épouse. Convaincue, quand elle s’aperçut de son état, qu’il fallait cesser d’être, elle s’enfuit ; son barbare époux la poursuit, l’atteint, lui tranche la tête et retourne dans son château. Le saint, son frère, instruit de cette barbarie, la ressuscite et s’approche de Carnoët : on lui refuse d’en baisser les ponts-levis. À la troisième supplication sans succès, il prend une poignée de poussière, la lance en l’air ; le château tombe avec le prince, il s’abîme dans les enfers. Le trou par lequel il passa subsiste encore. Jamais, disent les bonnes gens, on n’essaya d’y pénétrer sans devenir la proie d’un énorme dragon.