Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Ribadin

Henri Plon (p. 581-582).
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Ribadin (Jeannette), jeune personne de dix-huit ans, dont l’histoire a fait du bruit au seizième siècle. Elle était de la paroisse de Jouin de Cernes, aux environs de Bordeaux. Cueillant un dimanche des herbes dans la campagne, elle fut saisie de convulsions et réprimandée par un de ses parents, qui voulut qu’elle publiât sa faute en pleine assemblée ; il la conduisit à la paroisse après lui avoir donné ses instructions. Un grand concours arriva ; la jeune fille annonça au peuple assemblé qu’elle avait eu grand mal pour avoir travaillé le dimanche ; ce qu’il fallait éviter pour ne pas s’attirer les mêmes maux ; ensuite elle feignit des extases, se roula par terre, et prononça d’un ton prophétique que Dieu ne voulait pas que les femmes portassent des manches froncées, ni les hommes des bonnets rouges. L’affaire parvint aux oreilles de l’archevêque de Bordeaux, qui la fit arrêter avec son complice, reconnut la fraude et fit avouer à la fille que l’argent que les fidèles lui donnaient pour ses prétendues révélations était partagé entre trois suborneurs qui l’avaient engagée à contrefaire la sainte. Le juge ecclésiastique la condamna à faire amende honorable en l’église métropolitaine de Saint-André, la torche au poing, et là demander pardon à Dieu. Cette sentence fut exécutée ; mais elle fut encore renvoyée en la cour, ou, par arrêt donné à la Tournelle, elle fut condamnée, comme criminelle d’imposture, de séduction, d’impiété, d’abus et de scandale public (1587). Ses complices furent condamnés avec elle à la réclusion, comme convaincus de séductions envers cette malheureuse fille. Ce qui fait voir que] les fraudes pieuses n’étaient pas encouragées autrefois, comme le disent les menteurs qui attaquent la religion.