Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Pronostics populaires

Henri Plon (p. 560-561).
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Pronostics populaires. Quand les chênes portent beaucoup de glands, ils pronostiquent un hiver long et rigoureux. Tel vendredi, tel dimanche. Le peuple croit qu’un vendredi pluvieux ne peut être suivi d’un dimanche serein. Racine a dit au contraire :

            Ma foi, sur l’avenir bien fou qui se fiera :
            Tel qui rit vendredi, dimanche pleurera.

Si la huppe chante avant que les vignes germent, c’est un signe d’abondance de vin :

            De saint Paul la claire journée
            Nous dénote une bonne année.
            Si l’on voit épais les brouillards,
            Mortalité de toutes parts.
            S’il fait vent, nous aurons la guerre ;
            S’il neige ou pleut, cherté sur terre ;
            Si beaucoup d’eau tombe en ce mois,
            Lors peu de vin croître tu vois.

Des étoiles en plein jour pronostiquent des incendies et des guerres. Sous le règne de Constance, il y eut un jour de ténèbres pendant lequel on vit les étoiles ; le soleil à son lever était aussi pâle que la lune : ce qui présageait la famine et la peste.

            Du jour de saint Médard, en juin,
            Le laboureur se donne soin ;

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           Car les anciens disent : S’il pleut,
           Quarante jours pleuvoir il peut. 
           Et s’il fait beau, sois tout certain 
           D’avoir abondamment de grain. 

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On lit dans les Mélanges tirés d’une grande bibliothèque que, les habitants de Salency ayant, dans un temps de sécheresse, invoqué particulièrement saint Médard, évêque de Noyon, pour obtenir de la pluie, il arriva qu’en effet cette sécheresse fut suivie d’une pluie de quarante jours. C’est là, dit-on, l’origine du pronostic attribué à saint Médard. On dit encore que :

            S’il pleut le jour de saint Gervais,
            Il pleuvra quinze jours après.

Les tonnerres du soir amènent un orage ; les tonnerres du matin promettent des vents ; ceux qu’on entend vers midi annoncent la pluie. Les pluies de pierres pronostiquent des charges et des surcroîts d’impôts.

            Quiconque en août dormira
            Sur midi s’en repentira.
            Bref, en tout temps je te prédi
            Qu’il ne faut dormir à midi.

Trois soleils pronostiquent un triumvirat. On vit trois soleils, dit Cardan, après la mort de Jules César ; la même chose eut lieu un peu avant le règne de François Ier, Charles-Quint et Henri VIII.

Si le soleil luit avant la messe le jour de la Chandeleur, c’est un signe que l’hiver sera encore bien long. — Qui se couche avec les chiens se lève avec les puces.

Les paysans ont mille signes que nous n’avons pas pour prévoir le beau ou le mauvais temps ; leurs baromètres naturels sont souvent plus infaillibles que les nôtres ; leurs signes, en effet, sont fondés sur une constante observation. Newton, se promenant à la campagne avec un livre à la main, passa devant un pâtre, à qui il entendit marmotter ; — Ce gentleman ne lira pas tout le long de sa promenade, ou bien son livre sera mouillé ; et le philosophe ne tarda pas à voir tomber La pluie. Il repasse et demande au pâtre : — À quoi, mon ami, avez-vous donc jugé qu’il allait pleuvoir ? C’est, répondit-il, que mes vaches fourraient leurs museaux dans les haies[1].

  1. Voyez les pronostics populaires plus étendus dans les Légendes du Calendrier.