Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Prédictions

Henri Plon (p. 556-557).
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Prédictions. D’habiles astrologues avaient assuré à Pompée, à César et à Grassus qu’ils mourraient chez eux comblés de gloire, de biens et d’années, et tous trois périrent misérablement. Charles-Quint, François I er et Henri VIII, tous trois contemporains, furent menacés de mort violente, et leur mort ne fut que naturelle. Le Grand Seigneur Osman voulant déclarer la guerre à la Pologne en 1621, malgré les remontrances de ses ministres, un santon aborda ce sultan et lui dit :

« Dieu m’a révélé la nuit dernière, dans une vision, que si Ta Hautesse va plus loin, elle est en danger de perdre son empire ; ton épée ne peut cette année faire de mal à qui que ce soit. » « Voyons, dit Osman, si la prédiction est certaine. » Et donnant son cimeterre à un janissaire, il lui commanda de couper la tête à ce prétendu prophète, ce qui fut exécuté sur-le-champ. Cependant Osman réussit mal dans son entreprise contre la Pologne, et perdit, peu de temps après, la vie avec l’empire.

On cite encore le fait suivant, comme exemple de prédiction accomplie : Un ancien coureur, nommé Languille, s’était retiré sur ses vieux jours à Aubagne, près de Marseille. Il se prit de querelle avec le bedeau de la paroisse, qui était en même temps fossoyeur ; cette dispute avait produit une haine si vive, que Languille avait signifié au bedeau qu’il ne mourrait jamais que par lui ; de sorte que le pauvre bedeau, effrayé, l’évitait comme un ennemi formidable. Peu de temps après, Languille mourut, âgé de soixante-quinze ans. Il logeait dans une espèce de chambre haute, où l’on montait par un escalier étroit et très-roide. Quand il fut question de l’enterrer, le bedeau, bien joyeux, alla le chercher et chargea sur ses épaules la bière dans laquelle était le corps de Languille, qui était devenu assez gros. Mais, en le descendant d’un air triomphal, il fit un faux pas, glissa en avant ; la bière, tombant sur lui, l’écrasa. Ainsi s’accomplit la menace de Languille, autrement sans doute qu’il ne l’avait entendu.

On avait prédit à un duc de Choiseul qu’il périrait dans une sédition. On a prétendu que cette prédiction s’était accomplie, quoique le duc soit mort de maladie, parce qu’il expira dans le moment où douze médecins, rassemblés pour une consultation à son sujet, se battaient à propos des moyens divers proposés pour le guérir.

Alvaro de Luna, favori de Jean II, roi de Castille, fut mis à mort pour avoir gouverné l’État en despote. Après avoir consulté un astrologue sur sa destinée, il lui avait été répondu qu’il eût à se garder de Cadahalso. Il crut que c’était d’un village près de Tolède, qui portait ce nom ; il s’abstint d’y aller. Mais ayant été condamné à perdre la tête sur un échafaud, que les Espagnols appellent aussi cadahalso, on dit qu’il s’était trompé sur le sens du mot.

En 1382, un astrologue anglais fit crier par la ville de Londres que la veille de l’Ascension personne ne sortît de sa maison sans avoir dit cinq fois le Pater noster, et sans avoir déjeuné, à cause du brouillard pestilentiel qui arriverait ce jour-là ; parce que ceux qui ne le feraient pas mourraient infailliblement. Plusieurs, se fiant à cette prédiction, firent ce que l’astrologue avait prescrit ; mais, comme on reconnut après qu’il avait trompé le peuple, on le mit sur un cheval à reculons, tenant la queue en place de bride, avec deux marmites au cou, et on le promena ainsi par toute la ville.

Wecker, dans les Secrets merveilleux, donne ce procédé comme infaillible pour prédire l’avenir :

Qu’on brûle de la graine de lin, des racines de persil et de violette ; qu’on se mette dans cette fumée, on prédira les choses futures. Voy. Astrologie, Prophéties, Bohémiens, etc.