Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Mummol

Henri Plon (p. 481-482).
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Mummol. En 578, Frédégonde perdit un de ses fils, qui mourut de la dyssenterie. On accusa le général Mummol, qu’elle haïssait, de l’avoir fait périr par des charmes et des maléfices. Il avait eu l’imprudence de dire à quelques personnes qu’il connaissait une herbe d’une efficacité absolue contre la dyssenterie[1]. Il n’en fallut pas davantage pour qu’il fût soupçonné d’être sorcier. La reine fit arrêter plusieurs femmes de Paris, qui confessèrent qu’elles étaient sorcières, qu’elles avaient tué plusieurs personnes, que Mummol devait périr, et que le prince avait été sacrifié pour sauver Mummol. De ces sorcières, qui étaient coupables de meurtres, les unes furent brûlées, d’autres noyées ; quelques-unes expirèrent sur la roue. Après ces exécutions, Frédégonde partit pour Compiègne et accusa Mummol auprès du roi[2]. Ce prince le fit venir ; on lui lia les mains derrière le dos ; on lui demanda quel maléfice il avait employé pour tuer le prince ; il ne voulut rien avouer de ce qu’avaient déposé les sorcières ; mais il convint qu’il avait souvent charmé des onguents et des breuvages, pour gagner la faveur du roi et de la reine. Quand il fut retiré de la torture, il appela un sergent et lui commanda d’aller dire au roi qu’il n’avait éprouvé aucun mal. Chilpéric, entendant ce rapport, s’écria : « Il faut vraiment qu’il soit sorcier pour n’avoir pas souffert de la question !… » En même temps il fit reprendre Mummol ; on l’appliqua de nouveau à la torture ; mais quand on se préparait à lui trancher la tête, la reine lui fit grâce de la vie, se contentant de prendre ses biens. On le plaça sur une charrette attelée pour le conduire à Bordeaux, où il était né ; il ne devait point y mourir, tout son sang se perdit pendant la route, et il expira d’épuisement. On brûla tout ce qui avait appartenu au jeune prince, autant à cause des tristes souvenirs qui s’y attachaient, que pour anéantir tout ce qui portait avec soi l’idée du sortilège[3].

  1. Chilpéric Ier.
  2. C’est l’herbe que les paysans appellent l’herbe à cochon.
  3. Grégoire de Tours, livre IV de l'Histoire des Francs. Cité par M. Garinet, Histoire de la magie en France.