Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Fischer

Henri Plon (p. 275).
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Fischer (Gertrude). M. l’abbé David, du diocèse de Liège, a conté l’histoire de cette fille, à la suite d’un récit très-remarquable intitulé le Million de l’usurière : « L’histoire d’une personne nommée Gertrude, fille de Fischer, bourgeois de Lubus, qui vivait au seizième siècle, prouve que l’amour de l’argent nous dispose quelquefois à recevoir les influences du démon. Gertrude n’avait qu’à prendre quelqu’un par son habit, ou par sa manche, ou par sa barbe, pour être sûre d’attraper toujours de l’argent ; puis elle le mettait aussitôt dans sa bouche, le mâchait et l’avalait, si on ne l’en empêchait. Plusieurs habitants de sa ville natale ont conservé longtemps des pièces de monnaie qui leur étaient venues d’elle. Son contemporain, le trop fameux docteur Martin Luther, fut consulté sur l’état de Gertrude. Il conseilla de la conduire au sermon et de prier Dieu pour elle. Les pasteurs protestants n’ayant rien pu pour la soulager, le père de Gertrude Fischer s’adressa à un prêtre catholique, qui reconnut en elle une véritable possession du démon de l’avarice, et la délivra par l’exorcisme. Gertrude servit, après sa guérison, comme domestique dans une maison où l’on n’eut qu’à se louer de sa conduite.

» Voici comment Gertrude avait été séduite par le démon. Elle était tourmentée du désir de posséder de l’or et de l’argent. Une nuit elle entend pendant son sommeil une voix qui lui dit : — De grandes richesses te seront données ; lève-toi. Gertrude obéit et voit devant elle un homme qui lui dit : — Si tu veux être mon esclave, tu posséderas tous mes trésors qui sont dans la terre. Elle avait eu l’imprudence de répondre, poussée par l’avarice : — Qui que tu sois, tu es mon maître. — Tout à coup l’apparition avait pris une forme terrible, et Gertrude était possédée. L’histoire de cette fille offre des circonstances bizarres qu’il est inutile de raconter[1]. Qu’on sache seulement qu’avant que le démon, chassé de son corps par les prières de l’Église, l’eût définitivement quittée, elle exerçait sur les métaux une attraction inimaginable. Gardons-nous (Jonc de l’avarice, qui, corroborée par des influences sataniques, peut nous attirer le même sort. »

  1. Gorres, dans sa Mystique, en rapporte quelques-unes, t. V, p. 384.