Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Enlèvement

Henri Plon (p. 239-240).
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Enlèvement. Nous ne parlons ici que de ceux qui ont été enlevés par le diable. Une Allemande


avait contracté l’habitude de jurer et de dire des mots de corps de garde. Elle fut bientôt prise pour modèle par quelques femmes de son pays, et il fallut un exemple qui arrêtât le désordre. Un jour qu’elle prononçait avec énergie ces paroles qui sont tristes, surtout dans la bouche d’une femme : Que le diable m’emporte !… le diable arriva en hussard et l’emporta[1]. On lit en beaucoup de livres qu’un certain comte de Mâcon, homme violent et impie, exerçait une espèce de tyrannie contre les ecclésiastiques et contre ce qui leur appartenait, sans se mettre en peine de cacher ni de colorer ses violences. Un jour qu’il était assis dans son palais, bien accompagné, on y vit entrer un inconnu à cheval, qui s’avança jusqu’auprès du comte, et lui dit : — Suivez-moi, j’ai à vous parler : — Le comte suit l’étranger, entraîné par un pouvoir surnaturel. Lorsqu’il arrive à la porte, il trouve un cheval, préparé, le monte et il est transporté dans les airs, criant d’une voix terrible à ceux qui étaient présents : — À moi ! au secours !… On le perdit de vue, et on ne put douter que le diable ne l’eût emporté[2]. Dans la même ville, il y eut un bailli qui fut aussi enlevé par le diable à l’heure de son dîner et porté trois fois autour de Mâcon, à la vue de tous les habitants, qui assurent ne l’avoir pas vu revenir[3]. Ce fait est raconté par un protestant. Voy. Agrippa, Carlostad, Gabrielle d’Estrées, Luther, etc., etc.

  1. Wierus, De prœst. dœm., lib. II ; Bodin, Démonomanie, liv. III, ch. i.
  2. C’est l’histoire du comte Guillaume III, qu’on peut voir, détaillée, dans les Légendes infernales.
  3. Jean de Chassanion, huguenot, Des grands et redoutables jugements de Dieu, advenus au monde, p. 116.