Dictionnaire infernal/6e éd., 1863/Despilliers

Henri Plon (p. 207).
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Despilliers. Le comte Despilliers le père, qui mourut avec le grade de maréchal de camp de l’empereur Charles VI, n’était encore que capitaine de cuirassiers lorsque, se trouvant en quartier d’hiver en Flandre, un de ses cavaliers vint un jour le prier de le changer de logement, disant que toutes les nuits il revenait dans sa chambre un esprit qui ne le laissait pas dormir. Despilliers se moqua de sa simplicité et le renvoya. Mais le militaire revint au bout de quelques jours et répéta la même prière ; il fut encore moqué. Enfin il revint une troisième fois et assura à son capitaine qu’il serait obligé de déserter si on ne le changeait pas de logis. Despilliers, qui connaissait cet homme pour bon soldat, lui dit en jurant : — « Je veux aller cette nuit coucher avec toi et voir ce qui en est. » Sur les dix heures du soir, le capitaine se rend au logis de son cavalier. Ayant mis ses pistolets armés sur la table, il se couche tout vêtu, son épée à côté de lui. Vers minuit il entend quelqu’un qui entre dans la chambre, qui, en un instant, met le lit sens dessus dessous, et enferme le capitaine et le soldat sous le matelas et la paillasse. Après s’être dégagé de son mieux, le comte Despilliers, qui était cependant très-brave, s’en retourna tout confus et fit déloger le cavalier. Il raconta depuis son aventure, pensant bien qu’il avait eu affaire avec quelque démon. Néanmoins il se trouva, dit-on, que le lutin n’était qu’un grand singe.