Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Scot


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SCOT (Michel), savant personnage, et fort attaché aux mathématiques et à l’astrologie, a vécu au XIIIe. siècle. Il fut aimé de l’empereur Fridéric II, et lui dédia tous ses livres. On l’a mis dans le Catalogue des magiciens, et l’on conte qu’il priait souvent à dîner plusieurs personnes, sans faire apprêter quoi que ce fût, mais qu’ayant fait asseoir à table les conviés, il contraignait des esprits à lui apporter des viandes de toutes parts, et quand elles étaient arrivées, il disait à la compagnie : Messieurs, ceci vient de la cuisine du roi de France, et ceci de celle du roi d’Espagne ; cela vient d’Angleterre, etc. [a]. Merlin Coccaie s’est diverti à décrire ses enchantemens [b][* 1]. Le poëte Dante adopta l’erreur commune (A). Fions-nous plutôt à Jean Bacon, religieux carme, Anglais de nation, et le prince des averroïstes [c], qui cite [d] notre Michel Scot comme un grand théologien. Fions-nous plutôt aussi à Pitséus qui lui a donné beaucoup de louanges (B). Quoi qu’il en soit, on raconte que ce prétendu magicien prévit de quelle manière il mourrait, et qu’il désigna le lieu où l’empereur Frideric II perdrait la vie (C). Je dirai un mot de ses livres (D).

  1. (*) Dans sa XVIIIe. Macaronée. L’endroit commence par : Ecce Michaëlis de Incantu Regula Scoti. Rem. crit.
  1. Marcel, au chap. VIII de la Délectable Folie, pag. 123, édition de Lyon, 1650.
  2. Naudé, Apologie des grands Hommes, chap. XVII, pag. m. 496.
  3. Naudé, là même.
  4. Part. III Sentent., distinct. XXXIII.

(A) Le poëte Dante adopta l’erreur commune. ] Voici ses paroles, à la fin du chant XX de son enfer :

Quell’ astro, che ne’ fianchì è così poco,
Michele Scotto fu, che veramente
Delle magiche frode seppe il gioco.


C’est-à-dire selon la version de Grangier,

C’est autre qui aux flancs faict monstre si petite,

Fut Michel l’Escossois, lequel abondamment
Des charmes de magie ha l’art au cœur escripte.

(B) Pitséus lui a donné beaucoup de louanges. ] Il a dit expressément, qu’encore que Michel Scot ait été pris pour un magicien par la populace et vulgaire des ignorans, les sages en ont jugé néanmoins d’une autre manière. [* 1] Prudentum tamen et cordatorum hominam longè aliud fuit judicium, qui potiùs perspicax ejus in scrutandis rebus abditis admirabantur ingenium, laudabant industriam, quàm reprehendendam judicabant curiositatem, inspiciebantque hominis scientiam, non suspicabantur culpam [1]

(C) Il prévit de quelle manière il mourrait, et désigna le lieu où l’empereur Frideric II perdrait la vie. ] Un commentateur de Dante sera ici mon garant. « Michel l’Escossois, dit-il [2], vescut soubz l’empereur Federic II, et lui predit le lieu où il devoit mourir, qu’il disoit estre Florence. Enquoy le susdit empereur fut trompé à cause du nom equivocque. Car il ne mourut pas à Florence, ville capitale de la Toscane, mais en la Pouille à un chasteau nommé Fiorenzola. Ce magicien preveut que sa mort adviendroit par la cheute d’une pierre qui luy briseroit la teste. Ce qui ne faillit pas, pource qu’un jour, comme il estoit à l’église, la teste decouverte pour adorer le corps et sang de Jesus-Christ, la corde de la cloche que l’on sonnoit fit tomber une grosse pierre sur sa teste, et incontinent il jugea qu’il mourroit, ce qui arriva soudainement. »

(D) Je dirai un mot de ses livres. ] Il fit un Traité de la Physionomie, et un livre de Questions sur la Sphère de Sacrobosco, et une Histoire des Animaux [3]. Par le second de ces trois ouvrages, il devait paraître dans la grande liste de Vossius [4], néanmoins je ne l’y ai pas aperçu. Le Traité de Physionomie fut composé à la prière de l’empereur Frideric II. Je l’ai en italien, en voici le titre : Physionomia laqual compilò maestro Michael Scotto, a prieghi di Federico romano imperatore, uomo di gran scienza : ed è cosa molto notabile, e da tener secreta però che l’è di grande efficacia, e comprende cose secrete della natura, bastanti ad ogni astrologo : ed è diviso in tre parti. Il fut imprimé à Venise, per Marchio Sessa, lan 1533. C’est un in-8°. de sept feuilles.

  1. (*) Pitseus, 1 volum. de Rebus anglicis.
  1. Naudé, Apologie des grands Hommes, chap. XVII, pag. 498.
  2. Grangier, Commentaires sur l’Enfer de Dante, pag. 254, 255.
  3. Voyez Naudé, Apologie des grands Hommes, chap. XVII, pag. 496.
  4. Vossius, de Scient. mathem.

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