Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Marius


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MARIUS, surnommé ÆQUICOLA, à cause qu’il était né au pays des Æques en Italie (A), a fleuri [* 1] à la fin du XVe. siècle et au commencement du XVIe. Il étudia à Paris la physique et les mathématiques sous Jacques le Fèvre d’Étaples [a]. Il fut l’un des beaux esprits de la cour de François de Gonzague marquis de Mantoue, et il composa en italien une Histoire de Mantoue (B), dans laquelle il s’étend beaucoup sur ce qui concerne l’illustre maison de Gonzague. Il fit plusieurs autres livres (C). Ce qu’il composa sur la nature de l’amour a été réimprimé plusieurs fois (D), et néanmoins on ne le trouve que malaisément. J’ai dit quelque chose de lui en un autre endroit [b]. Scaliger le père le loue beaucoup (E). L’Épitome de la Bibliothéque de Gesner mérite d’être critiqué (F).

  1. * Leclerc observe que Marius a vécu, mais non fleuri dans le XVe. siècle, puisqu’en 1506 il étudiait encore à Paris sous Jacques Lefèvre.
  1. Il le dit lui-même, comme je l’ai su par un mémoire qu’une personne qui n’a pas voulu être nommée m’a communiqué.
  2. Dans la remarque (B) du premier Vergérius, tom. XIV.

(A) Il fut surnommé Æquicola, à cause qu’il était né au pays des Æques en Italie. ] C’est le sentiment de Léandre Albert dans sa description de l’Italie. Æquicolorum nomen superiori memoriâ Marius Alvetius plurimùm nobilitavit cognomento Æquicolæ [1]. Les paroles italiennes de cet autour sont celles-ci : ha illustrato gli Equicoli, Mario di Alveto [2]. On ne doit pas s’étonner que Nicodémo [3] ne les ait pas employées à réfuter Nicolas Toppi, qui a mis ce Mario entre les auteurs napolitains [4] ; car on a pu l’y mettre avec beaucoup de raison. Marius Æquicola était d’Alvito ; et si d’un côté plusieurs géographes croient que ce lien-là état situé dans le pays des anciens Æques, il est certain de l’autre qu’il appartient présentement au royaume de Naples.

(B) Il composa en italien une histoire de Mantoue. ] Citons ces paroles de Léandre Albert : Diù inter Francisci Gonzagæ Mantuani marchionis familiares fuit, et linguâ vernaculâ pereleganter Gonzagarum vitas scripsit [5]. Ne croyez point ce qu’il dit de l’élégance de cet ouvrage ; car j’ai su de bonne part que le style en était si rude, que Benoît Osanna fut obligé de le corriger, et de le polir lorsqu’on fit une nouvelle édition de cette Histoire de Mantoue, l’an 1608. Maximam vitæ partem Mantuæ egit Marius inter familiares Isabellæ Estensis uxoris Francisci II marchionis in cujus gratiam scripsit de Mantuanâ historiâ breves commentarios à rerum origine ad sua usquè tempora linguâ italicâ, eâque rudi et rancidâ, ut ea ætas ferebat. Verùm sæculo sequenti Bened. Osanna, Mantuanus, cùm Marii historia recuderetur, voces obsoletas usitalis commutavit, et stylum rubigine squallidum limavit ornavitque [6]. Elle est divisée en cinq livres : les trois premiers sont dédiés à François II, marquis de Mantoue, qui mourut l’an 1519. Le quatrième, tout destiné à la vie de ce marquis fut dédié à Frédéric de Gonzague son fils, dont Marius était secrétaire, si l’on en croit Bonesmond. Le cinquième contient l’Histoire de ce Frédéric jusques à l’année 1521. C’est de quoi j’ai été instruit par un mémoire que monsieur... a eu la bonté de m’envoyer.

(C) Il fit plusieurs autres livres. ] Un traité de Opportunitate, imprimé à Naples en 1507, in-4°. ; Epistola ad Maximilianum Sfortiam Mediolani ducem de liberatâ Italiâ, imprimée l’an 1513, in-4°. ; une apologie latine à l’encontre des Médisans de la nation française. Elle fut traduite en français par Michel Rose, et cette version fut imprimée à Paris l’an 1550, in-8°. D. Isabellæ Estensis Mantuæ principis Iter in Galliam Narbonensem descriptum. Je parlerai ci-dessous de la description de ce voyage. L’on trouve dans la Bibliothéque de Draudius [7] un Marius Æquivolus Olivetanus, auteur d’un livre de théologie [8], imprimé à Munich l’an 1584, et [9] un Marius Æquicolius, auteur d’une harangue de Laudibus trium Philosophiæ Facultatum. Le Toppi [10] donne le premier de ces deux traités à notre Mario Æquicola : il en rapporte le titre avec une clause que Draudius a oubliée, c’est qu’Anselme Stocklius avait retiré des ténèbres cet ouvrage-là, et l’avait donné au public après l’avoir corrigé. Léonard Nicodémo [11] rapporte ce titre : Introduzione di Mario Equicole al comporre ogni sorte di rima della lingua volgare, con uno eruditissimo discorsa della pitura, e con molte segrete allegorie, intorno alle muse, ed alla poesia, à Venise 1555, in-4°. Joignez à ceci ce qui sera dit dans les remarques suivantes.

Voyons ce que monsieur....... m’a fait savoir à l’égard de la relation du voyage qu’Isabelle d’Est, marquise de Mantoue, fit en Provence pour visiter la sainte Baume, à quoi elle s’était engagée par vœu. L’auteur déclare qu’il ne suit point la raison de ce voyage, et qu’il ne la dirait point quoiqu’il la sût [12]. Voici sa dédicace. Marius Æquicola Ferdinando Gonzagæ Franc. March. Mantuæ IV filio S. D. P. in hoc scribendo non minùs equidem laboravi quàm corpore fatigabar, cùm ea adirem de quibus diximus loca : sequitur enim lassitudo ingenii, ut corporis. Jam verò arma itineraria non Herculis ad postem fiximus, sed in templo Veneris genitricis consecravimus. Illius ergò hæc ad te. Vale. Il commence sa relation par la recherche de l’origine des vœux chez les anciens. Il conduit ensuite son héroïne par Venise à travers les Alpes jusqu’en Provence, et fait une courte et assez bonne description des lieux par où elle passe. L’impression du livre est défectueuse : l’année n’en est point marquée, non plus que celle du pèlerinage. Mais il semble que ce soit avant 1512.

(D) Ce qu’il composa sur la nature de l’amour a été réimprimé plusieurs fois. ] Le Toppi ne parle que de l’édition de Venise, 1536, in-8°. Ce n’est point la première ; car il dit : Un libro di natura d’Amore, ristampato e corretto [13]. Nicodémo [14] lui marque l’édition de Venise, 1554, in-12 : elle est intitulée : Libro di natura d’Amore di Mario Equicola, di nuovo con somma diligenza ristampato, e corretto da M. Lodovico Dolce. Con una tavola delle cose piu notabili che nell’ opera si contengono. Il dit que le Doni fait mention de cet ouvrage avec éloge, dans sa première librairie, à la page 73 de l’édition de Venise, 1550. Cet ouvrage d’Équicola fut réimprimé à Venise l’an 1563, et l’an 1583. Gabriel Chapuys en fit une traduction française qui fut imprimée à Paris [15]. Ce passage d’Augustin Niphus ne sera point superflu : Temporibus nostris Marius Æquicola Olivetanus amicissimus noster meo judicio fertilissimè de amore scripsit, et licet vulgari atque materno sermone tamen nihil intentatum præteriit [16]. Ne prenez point Olivetanus pour une faute d’impression ; car l’auteur s’est nommé lui-même Æquicolam Olivetanum dans son livre de Opportunitate [17]. Ce n’est pas qu’il fût de l’ordre des religieux du mont Olivet, comme Possevin l’assure dans son apparat : c’est qu’il a cru que le lieu de sa naissance pouvait être appelé Olivetum [18], aussi bien qu’Alvitum, ou Alvetium.

(E) Scaliger le père le loue beaucoup. ] Il lui adresse une pièce de poésie dont voici le commencement :

Maxime vir, geminas cui circùm tempora laurus
Purpureâ facilis nectit Apollo manu :
Æquicola Aonidum decus, acceptissime rerum
Numinibus vestris, numinibusque meis :
Quid faciam miser. [19] ?.........


Ce poëme fut composé l’an 1517, si nous en croyons Joseph Scaliger [20], qui ajoute que son père et Matthieu Bandel, dominicain, contractèrent à Mantoue une amitié très-intime pendant qu’ils s’insinuaient l’un et l’autre dans les bonnes grâces d’Æquicola.

(F) L’Épitome de la Bibliothéque de Gesner mérite d’être critiqué. ] Marius Æquicola y est surnommé Alvelanus [21] ; c’est une faute, il fallait dire Alvetanus. On dit que son traité italien de naturâ Amoris, corrigé par Thomas Fazellus Porcaccius, fut imprimé à Venise, l’an 1563. Je ne connais point d’auteur qui ait ces trois noms. On y distingue mal à propos le Marius Æquicola Alvetanus, auteur de ce livre, d’avec Marius Æquicolus vir nobilis, Italus, eques auratus, qui scripsit pro Baptistâ Mantuano defensorium in sycophantas librum I. Item de Opportunitate. tem de Naturâ et de Amore.

  1. Leander Albertus, in Descript. Ital., pag. 225.
  2. Folio m. 149 verso.
  3. Nicodemo, Addiz. alla Biblioteca napoletana, pag. 172.
  4. Nicolo Toppi, Biblioteca napoletana, pag. 206.
  5. Leand. Albertus, in Descript. Italiæ, pag. 225.
  6. Ces paroles sont tirées d’un Mémoire que M... a eu la bonté de m’envoyer.
  7. À la page 283 de l’édition de Francfort, 1625.
  8. In quo tractatur undè antiquorum Latria, et vera catholica religio incrementum sumpserint : cum epistolâ Anshelmi Stocklii equitis.
  9. À la page 1451.
  10. Nicolo Toppi, Biblioteca napoletana, pag. 206.
  11. Nicodemo, Addiz. alla Bibliot. napoletana, pag. 171.
  12. Causas nôrint alii, non dissimulo me nescire : quod etiamsi scirem, dissimularem.
  13. Toppi, Bibliot. napoletana, pag. 206.
  14. Nicodemo, Addiz, alla Bibliot. napolet., pag. 172.
  15. Voyez la Bibliothéque française de du Verdier, pag. 433.
  16. Angust. Nipbus, de Amore, cap. I, pag. m. 285.
  17. M... dans le Mémoire cité ci-dessus.
  18. Ab Oleis, là même.
  19. Julius Cæsar Scaliger, in Lacrymis, part. I Poëmatum, pag. 535, edit., 1591.
  20. Josephus Scaliger, Confut. Fabulæ Burdonum, pag. 264. Voyez aussi pag. 240, 241.
  21. Epit. Biblioth. Gesneri, pag. 573.

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