Dictionnaire historique et critique/11e éd., 1820/Euripide


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EURIPIDE, poëte grec, l’un de ceux qui ont excellé dans la tragédie, naquit l’an 1er. de la 75e. olympiade, à l’île de Salamine, où son père et sa mère s’étaient retirés (A), un peu avant que Xerxès entrât dans l’Attique. On dispute sur leur condition (B) ; les uns la font noble, et les autres roturière. Un certain oracle mal entendu fut cause que l’on éleva Euripide comme ceux dont les Grecs voulaient faire des athlètes (C) ; mais la suite témoigna qu’il était plus propre à d’autres choses. Il apprit la rhétorique sous Prodicus, la morale sous Socrate (D), et la physique sous Anaxagoras ; et quand il eut vu les persécutions qu’Anaxagoras souffrit pour avoir dogmatisé contre l’opinion populaire, il abandonna la philosophie, et s’appliqua à la poésie dramatique [a]. Il était alors âgé de dix-huit ans [b]. Que ceci ne nous porte point à croire qu’il négligea dans la suite de sa vie l’étude de la morale et de la physique : ses ouvrages témoignent tout le contraire (E). Il composa un grand nombre de tragédies qui furent fort estimées, et pendant sa vie et après sa mort ; et l’on peut nommer de bons connaisseurs qui le regardent comme le plus accompli de tous les poëtes tragiques (F). Ceux qui croient que si les poëtes de Rome n’ont guère parlé de lui, c’est à cause que les syllabes de son nom n’avaient pas la quantité qui le pouvaient rendre propre à entrer dans les vers latins (G), donnent une conjecture vraisemblable. Ses vers rendirent un très-grand service aux soldats athéniens, dans la Sicile (H), et c’est une preuve que ses pièces jouissaient d’une merveilleuse approbation, et néanmoins elles remportèrent le prix assez rarement (I). L’émulation et enfin l’inimitié qui s’éleva entre lui et le grand Sophocle (K), lui causa peut-être moins de chagrins que les moqueries d’Aristophane, qui se plaisait à le maltraiter dans ses comédies. On croit que la principale raison qui le porta à se retirer à la cour d’Archélaüs, roi de Macédoine, fut de voir les poëtes comiques divertir les Athéniens à ses dépens [c]. Il y a dans ses tragédies plusieurs rôles contre les femmes, et l’on ne saurait disconvenir qu’il ne se soit plu à médire du beau sexe. Cela fit qu’on lui affecta le titre d’ennemi des femmes [d] (L). Il se maria néanmoins (M), non-seulement avant que d’avoir éprouvé chez lui la vérité de ses lieux communs de théâtre, mais aussi après que la vie déréglée de sa première l’eut contraint de la répudier. La seconde qu’il épousa fut pour le moins aussi débauchée que la première [e]. Je ne sais avec laquelle des deux il trouva un jour l’un de ses propres comédiens ; mais il y a beaucoup d’apparence que ce fut avec la dernière, puisqu’on dit que l’ignominie à quoi cela l’exposait, et les railleries qu’en firent souvent les poëtes comiques, m’obligèrent à sortir d’Athènes [f]. Il y en a qui disent qu’ayant voulu se prévaloir de la permission que l’on donnait dans Athènes d’épouser deux femmes, il en prit deux tout à la fois, et les choisit si mal qu’elles mirent sa patience à bout, et lui firent concevoir de l’aversion contre tout le sexe [g]. Quoi qu’il en soit, il fut très-bien accueilli à la cour d’Archélaüs. Ce prince aimait les savans, et les attirait par ses libéralités. Il éleva Euripide à de grands honneurs (N). L’âge de ce poëte, et la chasteté que plusieurs lui attribuent, font qu’il ne faut pas croire légèrement ce que l’on conte de ses aventures de Macédoine (O). Il y fit une fin tragique : il se promenait dans un bois, et à sa manière il méditait profondément. Sa rêverie le mena sans doute trop loin : il fut rencontré un peu à l’écart par les chiens du prince qui était alors à la chasse. Ces maudits chiens le déchirèrent en pièces. Archélaüs le fit enterrer magnifiquement (P). La nouvelle de sa mort affligea de telle sorte les Athéniens, que toute la ville en prit le deuil [h]. Un de ses anis, nommé Philémon en fut si touché, qu’il déclara que s’il croyait, comme quelques-uns l’assurent, que les morts conservent le sentiment, il se pendrait pour aller jouir de la vue d’Euripide (Q). Ce grand poëte avait près de soixante-quinze ans lorsqu’il mourut. On a rapporté diversement les circonstances de sa mort (R). Il ne fut jamais avec Platon en Égypte (S), quoi qu’en dise M. le Fèvre. Il ne nous reste qu’une vingtaine de ses tragédies ; bien qu’il en eût composé quatre-vingt douze [i]. Il aimait à débiter plusieurs sentences (T) pleines d’une bonne morale, et il se peignait lui-même par-là ; car c’était un homme sévère et grave, et indifférent pour les plaisirs. Il s’enfermait dans une affreuse caverne pour y composer ses ouvrages (U). Mais au reste toutes ses maximes n’étaient pas bonnes. Il en débita une sur la religion du serment (X), qui parut si cavalière, qu’on lui en fit un procès. Dans une autre rencontre il dogmatisa si gravement pour les avares, que toute la compagnie s’en émut (Y). Une autre fois on s’offensa tellement des deux premiers vers de sa Ménalippe, qui semblaient attaquer l’existence du plus grand des dieux (Z), qu’il fut obligé de changer cela. Il a débité quelquefois des propositions impies : c’est le fondement sur quoi quelques-uns le font passer pour athée (AA). Je n’entre pas dans la discussion de ce point de fait ; je dis seulement en général, qu’il est absurde d’imputer à l’auteur d’une tragédie les sentimens qu’il fait débiter par ses personnages (BB). La manière dont Euripide reçut les avis du peuple, sur la correction d’un endroit de ses tragédies, et ce qu’il répondit à un poëte qui se glorifiait de composer aisément, sont deux choses qui peuvent recevoir un bon et un mauvais tour (CC). On l’a accusé d’avoir maltraité Médée par complaisance pour les Corinthiens (DD). Il n’est pas vrai qu’il y eût dans son Palamède quelque reproche tacite touchant la mort de Socrate (EE). Je n’étonne que si peu de gens fassent mention d’une chose qu’on lit dans Eusèbe (FF). Quelques-unes des fautes de M. Moréri sont très-lourdes (GG). La meilleure édition d’Euripide est celle qu’un docteur de Cambridge publia in-folio, l’an 1694 (HH).

(A) Il naquit... à l’île de Salamine, où son père et sa mère s’étaient retirés. ] Le père d’Euripide se nommait Mnésarchus ; il était Athénien, de la tribu Oenoïde, et du bourg ou du peuple [1] qu’on nommait Phyle. C’est ce que je trouve dans la Vie d’Euripide que le docte M. Barnes a composée, et qu’il a mise à la tête de son excellente édition de ce poëte. Mais d’autres savans [2] assurent que Phlya, de la tribu Ptolémaïde [3], était la patrie d’Euripide. J’aimerais mieux dire que c’était la patrie de Mnésarchus, père d’Euripide, et marquer expressément que l’île de Salamine est le lieu de la naissance de ce poëte. M. le Fèvre eût mieux fait de s’exprimer de la sorte, que de dire le lieu de sa naissance s’appelait Phlya, bourg de l’Attique [4]. Je sais bien que Clito, mère d’Euripide, n’accoucha de lui à Salamine que par accident, c’est-à-dire, qu’à cause qu’elle s’y réfugia avec plusieurs autres Athéniens, lorsqu’il fut jugé à propos de quitter la ville d’Athènes, au temps de l’irruption de Xerxès. Je sais bien encore que cette raison est très-bonne pour soutenir qu’Euripide est Athénien, et de la même patrie que son père ; mais enfin nous voulons savoir où les grands hommes sont nés, et ainsi il ne faut pas que l’on nous allègue la patrie de leurs pères dans des rencontres comme celle-ci, où les enfans naissent pendant une fuite ou un voyage de leurs mères. Clito était grosse d’Euripide quand elle sortit d’Athènes avec son mari, pour se sauver à Salamine [5] : elle accoucha le jour même que les Grecs défirent la flotte du roi des Perses auprès de cette île [6], et l’on veut que parce que cette victoire fut gagnée proche de l’Euripe, l’enfant que Clito avait mis au monde fut appelé Euripide [7]. Cette étymologie ne s’accorde point avec Suidas, qui fait mention de deux Euripides différens de celui-ci, et plus âgés que celui-ci. Ils étaient poëtes tragiques tous deux ; et l’un était le neveu de l’autre. Joignez à cela qu’il est fait mention d’un capitaine athénien, nommé Xénophon, fils d’Euripide, sous la seconde année de la guerre du Péloponnèse. Thucydide qui en parle [8] aurait apparemment ajouté que cet Euripide était le poëte, si cela eût été vrai. Son silence m’empêche de croire que M. Barnes [9] suppose légitimement que ce Xénophon était fils de notre Euripide.

(B)..... On dispute sur leur condition. ] Quelques-uns disent que Mnésarchus, père d’Euripide, était un Béotien, qui selon toutes les apparences avait souffert en son pays la peine des banqueroutiers [10]. On avait accoutumé, dans quelques endroits de la Béotie, d’amener sur la grande place les personnes qui ne payaient point leurs dettes ; on leur commandait de s’asseoir, et de jeter un boisseau. C’était une note d’infamie. Quant à Clito, femme de Mnésarchus, on veut qu’elle soit une revendeuse d’herbes : et l’on se fonde non-seulement sur l’autorité d’un poëte comique médisant de profession, mais aussi sur celle d’un historien. Le poëte comique dont je parle est Aristophane [11] : on verra le nom de l’historien dans ces paroles du chapitre XX du XVe. livre d’Aulu-Gelle. Euripidi poëtæ matrem Theopompus agrestia olera vendentem victum quæsîsse dicit. Joignez à cela le témoignage de Valère Maxime : Quam matrem Euripides aut quem patrem Demosthenes habuerit, ipsorum quoque seculo ignotum fuit : alterius autem matrem olera, alterius patrem cultellos venditâsse omnium penè doctorun literæ loquuntur [12]. Suidas ne dit rien de particulier touchant la naissance de Mnésarchus ; mais il dit qu’il n’est point vrai que la mère d’Euripide vendît des herbes : elle était, dit-il, très-noble, comme Philochorus le prouve. Οὐκ ἀληθὲς δὲ ὡς λαχανόπωλις ἦν ἡ μήτερ αὐτοῦ· καὶ γὰρ τῶν σϕόδρα εὐγενῶν ἐτύγχανεν, ὡς ἀποδείκνυσι Φιλόχορος. Il avoue que Mnésarchus et sa femme s’enfuirent dans la Béotie, et qu’ensuite ils habitèrent dans l’Attique. Cela laisse plutôt une mauvaise impression qu’une bonne, et confirme en quelque façon ce que dit Stobée. Notez qu’Aristophane, pour mieux empoisonner ses traits satiriques, suppose que la mère d’Euripide ne vendait que de très-mauvaises herbes. Hæc est (scandix) quam Aristophanes Euripidi poëtæ objicit joculariter, matrem ejus ne olus quidem legitimum venditâsse, sed scandicem [13]. Les notes du père Hardouin nous apprennent en quel endroit Aristophane a plaisanté sur ce sujet, et ce que le scoliaste observe, et d’autres choses encore. Il cite la scène IV de l’acte II de la comédie Acharnenses, page 394. Il eût pu citer aussi le même poëte, in Equitibus, Act. I, Sc. I, page 289 ; et in Cerealibus, page 786, G, et page 790, F. M. Drelincourt m’en a averti.

(C) Un... oracle mal entendu fut cause que l’on éleva Euripide comme.... les athlètes. ] S’il était vrai, comme le prétend M. Barnes, que l’oracle d’Apollon fut consulté sur la destinée d’Euripide, pendant que Clito était grosse [14], il serait assez vraisemblable que ce n’était pas une vendeuse de choux ; car le mari d’une telle femme ne s’avisait guère d’importuner Apollon touchant le sort d’un enfant qui n’était point né. Je ne dis pas la même chose d’un enfant de six ou sept ans : il pouvait donner tant de marques singulières de grand esprit, ou de grand cœur, que son père, de quelque condition qu’il fût, pouvait avoir beaucoup d’impatience de savoir ce que deviendraient tant de belles espérances. Ainsi, pendant qu’on ignore en quel temps fut rendu l’oracle qui concerne notre Euripide, on n’en saurait rien conclure en faveur de sa noblesse, et contre ceux qui le font fils d’une revendeuse d’herbes. Or il est sûr que l’on ne sait rien touchant ce temps-là : l’auteur [15] que M. Barnes cite n’en dit pas un mot, il dit simplement que l’oracle fit cette réponse :

Ἔςαι σοι κοῦρος Μνησαρχίδη, ὅν τινα πάντες
Ἄνθρωποι τίσουσι, καὶ ἐς κλέος ἐσθλὸν ὀρούσει,
Καὶ ςεϕέων ἱερῶν γλυκερὴν χάριν ἀμϕιϐαλεῖται.

Te, Mnesarche, manet summo cumulandus honore
Filius, ac meritæ summa ad fastigia laudis
Conscendens, lætas sacro ex certamine palmas
Auferet...........................


Il pouvait critiquer cet oracle mieux qu’il ne l’a critiqué : et j’admire que puisqu’il prenait à tâche de convaincre d’imposture la divinité d’Apollon, il lui a laissé passer le mensonge contenu dans ces trois vers grecs. Il faudrait être un grand chicaneur pour nier que cet oracle ne promette les couronnes que l’on gagnait aux jeux olympiques, pythiques, etc. Or nous ne lisons point [16] qu’Euripide ait gagné de ces sortes de couronnes : dès la première fois qu’il se présenta pour les disputer, il fut renvoyé [17]. On me dira peut-être qu’Euripide gagna des couronnes dans des combats poétiques. Je répondrai qu’il en gagna peu, et que sa gloire serait très-petite si on la mesurait à cela [18], et qu’en tous cas ce n’est pas ainsi qu’il fallait promettre les triomphes dramatiques. On pouvait donc reprocher à Apollon qu’il s’était trompé, et ne se pas contenter de ce reproche, c’est qu’il donnait l’épithète de sacrées à des couronnes qui ne la méritaient point [19]. Quand donc j’assure dans le texte de cette remarque, que l’oracle fut mal entendu, je ne prétends pas nier que le sens qu’on donna aux termes ne soit le plus naturel ; je prétends seulement dire qu’on se trompa, à cause qu’on n’attrapa point l’intention mal exprimée de celui qui avait parlé. Ce ne fut donc point Mnésarchus qui eut tort de se promettre que son fils deviendrait un grand athlète, ce fut Apollon qui eut tort de le lui prédire. Quoi qu’il en soit, Mnésarchus éleva son fils selon cette vue. Nous allons entendre un auteur qui n’attribue cette promesse qu’à des discours de bonne aventure, qu’à des astrologues, qu’à des Chaldéens en un mot. Patri autem ejus (Euripidis) nato illo responsum est à Chaldæis, eum puerum, quùm adolevisset, victorem in certaminibus fore. Id ei puero fatum esse. Pater interpretatus athletam debere esse, roborato exercitatoque filii sui corpore, Olympiam certaturum eum inter athletas pueros deduxit. Ac primò quidem in certamen per ambiguam ætatem receptus non est. Post Eleusinio et Theseo certamine pugnavit, et coronatus est. Mox, à corporis curâ ad excolendi animi studium transgressus, auditor fuit physici Anaxagoræ et Prodici rhetoris, in morali autem philosophiâ Socratis, tragœdiam scribere natus annos duodeviginti adortus est [20].

(D) Il apprit la morale sous Socrate. ] J’ai cité ceux qui le disent : mais je dois observer ici qu’il y a beaucoup d’apparence qu’ils se trompent ; car Socrate était plus jeune qu’Euripide de près de treize ans. Cette différence d’âge a pu souffrir que quand le plus jeune de ces deux grands hommes eut atteint sa maturité, l’autre liât avec lui une amitié très-étroite, et profitât de sa docte conversation : mais ce n’est pas ce que l’on appelle faire son cours de morale sous un professeur en philosophie, être son écolier, son disciple. Je crois aisément avec M. Barnes, que Socrate profita beaucoup des conversations d’Euripide : Haud benè temporum rationes considerârunt, dit-il [21], qui Socratem Euripidis in Moralibus magistrum affirmant, ipso nempè discipulo duodecim ferè annis juniorem. Videtur potiùs is ex Euripide multa hausisse, quem et apud Platonem haud rarò laudure deprehenditur. Je ne voudrais pas révoquer en doute ce qu’on lit dans Diogène Laërce [22] que Socrate aidait Euripide à composer ses tragédies ; et, cela posé, je ne serais pas surpris que Socrate n’allât presque jamais à la comédie que quand on jouait quelque pièce d Euripide. Ὅ δὲ Σωκράτης σπάνιον μὲν ἐπεϕοίτα τοῖς θεάτροις, εἴ ποτε δὲ Εὐριπίδης ὁ τῆς τραγῳδίας ποιητὴς ἠγωνίζετο καινοῖς τραγῳδοῖς, τότε γε ἀϕικνεῖτο. Καὶ Πειραιοῖ δὲ ἀγωνιζομένου τοῦ Εὐριπίδου καὶ ἐκεῖ κατῄει· ἔχαιρε γὰρ τῷ ἀνδρὶ, δηλονότι διά τε τὴν σοϕίαν αὐτοῦ, καὶ τὴν ἐν τοῖς μέτροῖς ἀρετήν. Socrates verò rarò veniebat in theatra, nisi quandò Euripides tragicus poëta cum novis tragœdiis certaret : tùm enim accedere solebat. Et tunc quoque, cùm Euripides in Piræo contenderet, eò descendebat. Nam amabat hominem ; tùm propter sapientiam, tùm propter carminum virtutem et bonitatem [23]. Je n’en serais pas même surpris, quoique je fusse persuadé que le philosophe n’avait nulle part aux productions du poëte ; car les tragédies d’Euripide contenaient tant de belles moralités, qu’elles étaient infiniment propres à plaire à Socrate. On a nommé Euripide le philosophe du théâtre, σκηνικὸς ϕιλόσοϕος [24] ὁ ἐπὶ τῆς σκηνῆς ϕιλόσοϕος [25]. Au reste, c’est à tort que le père Schottus veut prouver par Diogène Laërce qu’Euripide choisit Socrate pour son maître, après la condamnation d’Anaxagoras. Anaxagorè præceptore capitis damnato, ad Socratem se in academiam contulit, non intelligendi modò, sed et dicendi magistrum eâ tempestate optimum. Ita enim Laërtius Diogenes [26]. Je ne copie point le long passage que le père Schottus a cousu à ces paroles. Je dis seulement que ce passage de Laërce ne nous apprend autre chose, si ce n’est que l’on a cru que Socrate aidait Euripide à faire des tragédies, et qu’après la condamnation d’Anaxagoras, il devint disciple d’Archélaüs. La grande faute de ce jésuite est d’avoir appliqué à Euripide ce que Laërce a dit de Socrate ; car c’est de Socrate qu’il faut entendre qu’après la condamnation d’Anaxagoras, il fut entendre Archélaüs, Cette faute d’André Schottus est compliquée de plusieurs autres. Il n’a point su qu’Euripide, voyant le péril d’Anaxagoras, quitta la philosophie, et s’attacha au théâtre et non pas au philosophe Socrate. Il n’a point su qu’Euripide n’avait alors que dix-huit ans : jugez si Socrate beaucoup plus jeune qu’Euripide pouvait être le plus habile professeur de ce temps-là. Ce n’est point lui, mais Platon, qui a enseigné dans l’académie. Clément Alexandrin [27] et Eusèbe [28] ont erré avec bien d’autres : ils ont cru qu’Euripide avait été le disciple de Socrate.

(E) Ses ouvrages témoignent tout le contraire. ] Ils sont pleins d’aphorismes de morale, comme on l’a dit dans la remarque précédente. Ils contiennent aussi plusieurs dogmes de physique. Voyez Diodore de Sicile [29], qui a rapporté deux fois le sentiment de ce poëte sur des choses qui concernent la philosophie naturelle. Mais rien ne témoigne mieux l’attachement d’Euripide à cette science, que la peine qu’il se donna pour savoir les opinions d’Héraclite. Ce philosophe cacha ses écrits au temple de Diane, et crut qu’un jour on les tirerait de là pour les publier comme un ouvrage mystérieux, mais Euripide prévint l’effet de cette espérance : il se rendit assidu au temple de Diane, et à force de relire ce qu’Héraclite y avait mis, il le retint par cœur et le divulgua. C’est dans Tatien que j’ai lu ce conte ; car pour Diogène Laërce, il dit bien [30] que notre poëte fut plus curieux que Socrate de recouvrer les ouvrages d’Héraclite, puisque ce fut lui qui en procura la lecture à Socrate ; mais il ne dit rien de cette grande assiduité au temple de Diane. Voyons les paroles de Tatien [31] : Οὔτ᾽ ἄν ἐπαινέσαιμι κατακρύψαντα τὴν ποίησιν ἐν τῷ τῆς Ἀρτέμιδος ναῷ, μυςηριωδῶς ὅπως ὕςερον ἡ ταύτης ἔκδοσις γένηται. Καὶ γὰρ οἷς μέλον ἐςὶ περὶ τούτων, ϕασὶν Εὐριπίδην τὸν τραγῳδοποιὸν κατιόντα, καὶ ἀναγινώσκοντα διὰ μνήμης κατ᾽ ὀλίγον τὸ Ἡρακλείτου σκότος σπουδαίως παραδεδωκέναι. Neque hoc in eo laudaverim quòd carmina sua in fano Dianæ occultavit [32], ut olim veluti per mysterium ederentur. Nam quibus ista curæ sunt Euripidem poëtam tragicum ædem Dianæ frequentâsse, et paulatim tenebras istas Heracliti relegendo memoriæ prorsùs infixisse produnt. J’ajoute ce que plusieurs ont observé [33], c’est qu’Euripide fit souvent paraître dans ses tragédies qu’il suivait les opinions d’Anaxagoras, son maître. J’ai déjà dit qu’il fut nommé le Philosophe du théâtre : Origène, Clément d’Alexandrie [34] et Eusèbe [35] le témoignent : Vitruve, que je devais nommer avant eux, le dit positivement : Euripides auditor Anaxagoræ, quem Philosophum Athenienses scenicum appellaverunt [36]. Je ne crois point, quoique M. Ménage [37] l’assure, qu’Athénée et Diodore de Sicile l’aient aussi témoigné.

(F) De bons connaisseurs... le regardent comme le plus accompli de tous les poëtes tragiques. ] J’ai dit ailleurs [38] qu’il y a partage parmi les critiques, sur la primauté d’Eschyle, de Sophocle et d’Euripide. Chacun de ces poëtes a des partisans qui lui donnent la première place : il y a aussi des connaisseurs qui ne veulent rien décider. Quintilien semble choisir ce parti : cependant il est aisé de connaître, qu’à tout prendre, il donne la principauté à Euripide. Voici ce qu’il dit [39] : Longè clariùs (quàm Æschylus) illustraverunt hoc opus Sophocles atque Euripides : quorum in dispari dicendi viâ uter sit poëta melior, inter plurimos quæritur. Idque ego sanè, quoniam ad præsentem materiam nihil pertinet, injudicatum relinquo. Illud quidem nemo non fateatur necesse est, iis qui se ad agendum comparant, utiliorem longè Euripidem fore. Namque is et in sermone (quod ipsum reprehendunt, quibus gravitas et cothurnus et sonus Sophoclis videtur esse sublimior) magis accedit oratorio generi ; et sententiis densus ; et in iis quæ à sapientibus tradita sunt, penè ipsis par ; et in dicendo ac respondendo, cuilibet eorum qui fuerunt in foro diserti, comparandus. In affectibus verò cùm omnibus mirus, tùm in is qui miseratione constant, facilè præcipuus, Hunc et admiratus maximè est (ut sæpè testatur) et secutus, quamquam in opere diverso, Menander. M. Barnes a recueilli [40] plusieurs éloges que les plus savans hommes de l’antiquité ont donnés à Euripide. Consultez-le, vous verrez que si ce poëte n’a pas égalé Sophocle dans la majesté et dans la grandeur, il a compensé cela par tant d’autres perfections, qu’il peut aspirer au premier rang. Nous verrons bientôt que c’est suivant les conclusions d’un oracle. Les partisans de Sophocle se glorifient du jugement de Lucien : ils disent qu’il a pesé dans une balance les vers de Sophocle et ceux d’Euripide, et qu’il a trouvé les premiers plus pesans que les derniers, et par conséquent plus excellens, comme le bon or est plus pesant que le faux or. Lucianus sophista, qui auctore Lactantio nec diis nec hominibus pepercit unquàm, in librili suspendit carmina tragicorum poëtarum, Sophoclis scilicet et Euripidis, comminis citurque Sophoclis versus tanquam plus gravitatis habentes terram petere, Euripidis verò veluti leviores ad cœlum tendere, tanquàm in tragico scribendi genere Sophocles sit Euripidi præferendus. Nec mirum igitur si Virgilius ait,

Sola Sophoclæo tua carmina digna cothurno,


hoc est gravi et excocto, plus habente medullæ quàm corticis, gravitatis quàm levitatis [41]. M. Barnes a cherché cela inutilement dans Lucien [42] ; et, quoi qu’il en soit, il prétend qu’on n’a point compris l’intention de cet auteur : il la croit plus favorable à Euripide qu’à Sophocle : il croit que Lucien s’est réglé sur ce qu’on lit dans Homère [43] touchant la destinée d’Achille, et la destinée d’Hector, mises dans une balance de Jupiter. Celle d’Achille, comme supérieure, tendit vers le ciel ; celle d’Hector tendit vers la terre. Ma conjecture est qu’on a pris Lucien pour Aristophane [44]. C’est Aristophane [45] qui suppose que Bacchus faisant mettre dans une balance un vers d’Euripide contre un vers d’Eschyle, trouva toujours que celui d’Eschyle pesa davantage. Or il est certain que le but d’Aristophane, dans cette pièce, est de faire voir que le premier rang parmi les poëtes tragiques était dû à Eschyle, et le second à Sophocle. C’est ce que j’observe contre l’explication de M. Barnes.

(G) Les syllabes de son nom ne..... pouvaient.... entrer dans les vers latins. ] Floridus Sabinus, répondant à Béroalde, qui avait médit d’Euripide, se sert entre autres observations de celle-ci [46] : Cùmque Virgilius Sophoclem nominavit, hoc nempe versu,

Sola Sophoclæo tua carmina digna cothurno,


non ideò factum reor quòd eum Euripidi anteponere voluerit, sed quia id nomen heroïco metro meliùs conveniret. Cui et simile est Propertianum illud ad Lynceum poëtam,

Desine et Eschyleo componere verba cothurno.


Non Æschylum scilicet quasi aliis præstantiorem nominavit Propertius, quem [* 1] rudem in plerisque et incompositum fuisse scimus, ut cujus fabulas in certamen correctas deferre posterioribus poëtis permiserint Athenienses ; sed quòd ab ejus nomine deductum nomen versu rectè clauderetur. An cùm Horatius de Romano populo sic inquit :

Serus enim Græcis admovit lumina chartis,
Et post Punica bella quietus quærere cœpit,
Quid Sophocles, quid Thespis et Æschylus utile ferrent [* 2],


an idcircò Euripidem non nonminavit, quod vel Thespi eum vel Æschylo duxerit postponendum ? hoc ne ipse quidem Beroaldus per somnium affirmaret. M. Barnes adopte cette raison : Quòd autem Virgilius, dit-il [47], tanto elogio Sophoclem ornet, Euripidem verò ne nominet quidem, id non tam illius judicio tribuendum (nam et sæpè eum imitatus est, ut in [* 3] annotationibus ostendimus) quàm legum metricarum necessitati, quandoquidem, ut supra diximus, Euripides apud Latinos, ut et apud Græcos sit vox minùs apta versui heroïco. Le dieu même de la poésie, l’Apollon de Delphes, fut contraint de céder aux lois de la quantité : il ne trouva point d’autre expédient que de renoncer aux vers hexamètres, et de répondre en vers ïambiques, quand il fallut nommer Euripide : de sorte que s’il n’eût su faire que des hexamètres, il aurait fallu qu’il eût supprimé la sentence définitive qui régla les rangs entre trois illustres personnages [48]. Nec absonum prorsùs erit in hâc controversiâ Pythii Apollinis judicium audire ; qui Chærephonti tragico poëtæ de amico suo Socrate consulenti hoc oraculum traditur dedisse [49] :

Σοϕὸς Σοϕοκλῆς, σοϕώτερός γ᾽ Εὐριπίδης,
Ἀνδρῶν δ᾽ ἁπάντων Σωϰράτης σοϕώτατος.


C’est-à-dire, Sophocle est sage, Euripide l’est encore plus ; mais le plus sage de tous les hommes c’est Socrate. Le Giraldi s’est étonné que la prêtresse de Delphes se soit servie de l’ïambe dans cette réponse, et non pas de l’hexamètre, selon la coutume [50]. Il fallait bien qu’elle dérogeât à la coutume, puisque la nécessité n’a point de loi : Euripide et Socrate sont deux noms tout-à-fait mal propres au vers héroïque, les muses en corps ne sauraient les y ployer. Nec mirari debuit Lilius Giraldus [* 4] Pythiam Sacerdotem ïambico jam trimetro respondisse, cùm heroïco solita esset oracula reddere : nomina enim certè Socrates et Euripides heroïco versui aptare nec ipse potuit Apollo, nec musæ ipsæ [51]. Qu’on aille dire après cela qu’il importe peu d’avoir un tel nom plutôt qu’un autre [52]. Voilà Euripide qui a eu peut-être plus de part à l’admiration de Virgile, et à celle des autres poëtes de la cour d’Auguste, que Sophocle ; le voilà, dis-je, dépouillé de cet avantage, parce qu’ils n’ont pu faire entrer son nom dans leurs hexamètres, et qu’à cause de cette impossibilité il a fallu immortaliser à son préjudice ceux qu’on croyait au-dessous de lui : mais les lois de la prosodie parlaient pour eux. Voilà un de ces combats de la raison et de la rime, dont M. Despréaux a si bien parlé [53]. Horace, ayant à nommer une petite ville d’Italie, ne le put faire ; il fut obligé de la désigner par certaines propriétés : elle s’appelait Equotutium, ce mot ne pouvait être placé dans un hexamètre.

Quattuor hinc rapimur vigenti et millia rhedis
Mansuri oppidulo, quod versu dicere non est,
Signis perfacile est [54]...........


Quelquefois c’est un bonheur d’avoir un nom intraitable par rapport aux lois poétiques [55].

(H) Ses vers rendirent un très-grand service aux soldats athéniens, dans la Sicile. ] L’armée des Athéniens, commandée par Nicias, éprouva dans la Sicile tout ce que la mauvaise fortune peut faire sentir de plus funeste. Les vainqueurs abusèrent de leur avantage avec la dernière cruauté : mais quelque durement qu’ils traitassent les soldats athéniens, ils firent cent honnêtetés à tous ceux qui leur pouvaient réciter des vers d’Euripide. Plusieurs, qui après s’être sauvés de la bataille ne savaient que devenir, et erraient de lieu en lieu, trouvèrent une ressource en chantant les vers de ce poëte. Ils gagnèrent leur vie à cela : on leur donnait et à manger et à boire, en récompense de ces chansons. Τότε γοῦν ϕασὶ τῶν σωθέντων οἴκαδε συχνοὺς ἀσπασάσθαι τὸν Εὐριπίδην ϕιλοϕρόνως, καὶ διηγεῖσθαι τοὺς μέν, ὅτι δουλεύοντες ἀϕείθησαν, ἐκδιδάξαντες ὅσα τῶν ἐκείνου ποιημάτων ἐμέμνηντο, τοὺς δ᾽ ὅτι πλανώμενοι μετὰ τὴν μάχην, τροϕῆς καὶ ὕδατος μετέλαϐον τῶν μελῶν ᾄσαντες. Plures autem tunc commemorant, qui sospites domum reversi sunt, Euripidem benignè salutavisse, ac prædicâsse alios fuisse se manumissos, quòd quæ ipsius carmina tenuerant memoriâ, illos ea docuissent, alios palantes post pugnam fuisse cibo et potu adjutos, quùm versus illius canerent [56]. Ce fut sans doute un très-grand plaisir à Euripide, que de voir venir chez lui plusieurs de ces malheureux, pour lui témoigner leur reconnaissance de ce que ses vers leur avaient sauvé la vie et la liberté. Les Siciliens donnèrent une autre marque bien éclatante de leur estime pour Euripide. Un bâtiment caunien, poursuivi par des pirates, tâchait de se sauver dans quelque port de Sicile, et ne put en obtenir la permission, qu’après qu’on eut su qu’il y avait des personnes sur ce bâtiment, qui savaient des vers d’Euripide [57]. Il ne faut pas oublier qu’on leur demanda s’ils en savaient. Cette seule question signifie plus que je ne saurais exprimer. Rapportons au passage de M. le Fèvre [58]. « Euripide devait être touché d’un sentiment de gloire bien doux, quand il voyait chaque jour quelques-uns de ces misérables, qui le venaient remercier comme leur libérateur, et lui dire que ses vers avaient changé leur mauvais destin, et leur avaient plus servi que s’ils eussent eu un passe-port signé de la main des cinq éphores, et des deux rois de Lacédémone [59] ! C’était donc un grand et glorieux poëte qu’Euripide ; mais que dirons-nous des Siciliens de ce temps-là ? n’était-ce pas d’honnêtes gens ? Le mal est qu’un si bel exemple n’a point eu de suite, et qu’aujourd’hui telles histoires ne passeraient en France et en Espagne que pour des contes de la vieille Grèce, que l’on a toujours appelée mensongère. »

(I) Ses pièces remportèrent le prix assez rarement. ] De soixante-quinze tragédies qu’il avait faites, il n’y en eut que cinq qui le remportassent. C’est Varron qui dit cela. Euripidem quoque M. Varro ait cùm quinque et septuaginta tragœdias scripserit, in quinque solis vicisse, cùm eum sæpè vincerent aliqui poëtæ ignavissimi [60]. Ceux qui vainquaient Euripide étaient la plupart du temps des poëtes à la douzaine, comme Varron le remarque. Il ne s’en faut pas étonner : car alors la cabale [61], encore plus peut-être que présentement, décidait du sort des pièces ; et il n’y avait point de mauvaises voies que l’on n’employât pour gagner la voix des juges. Voyez l’indignation d’Élien [62] sur ce qu’un certain Xénoclès, poëte de nul mérite, fut préféré à Euripide, dans un combat de quatre pièces contre quatre pièces, lorsqu’on célébra la 80e. olympiade. On pourrait s’imaginer qu’il y a deux fautes dans les paroles de Varron ; car il y a des auteurs qui disent qu’Euripide composa quatre-vingt-douze tragédies, et qu’il vainquit quinze fois [63]. M. Barnes a fourni le titre de quatre-vingt-quatre pièces de cet auteur. Voilà donc Varron convaincu de fausseté sur l’un de ces deux articles. Quant à l’autre, il y a des critiques qui lisent quindecim au lieu de quinque dans Aulu-Gelle [64] : leur raison est que les auteurs grecs témoignent qu’Euripide gagna quinze fois le prix. Cette raison est faible, puisque Suidas et Moschopulus, qui sont Grecs, ne parlent que de cinq victoires. Leur autorité vaut bien autant que celle de Thomas Magister, qui en compte quinze.

(K) Il y eut de l’inimitié entre lui et le grand Sophocle. ] Il était presque impossible que deux si excellens poëtes, qui aspiraient à la même gloire, s’aimassent. Athénée rapporte, sur leur querelle, je ne sais quelles particularités qui ne leur font point d’honneur [65]. Si Euripide a écrit les lettres qu’on lui attribue, il faut qu’il ait vécu avec Sophocle dans une très-bonne intelligence. M. Barnes [66], qui donne ces lettres à Euripide, prétend que ces deux poëtes furent mal ensemble assez long-temps, mais qu’enfin ils devinrent bons amis. Sophocle marqua une grande estime pour Euripide, quand il apprit la nouvelle de sa mort. Il faisait jouer une tragédie, et il y parut en habit de deuil, et fit ôter leurs couronnes à ses acteurs [67]. C’est dans le fond une preuve très-équivoque d’amitié et de regret. Deux grands hommes qui aspirent à la même gloire, c’est-à-dire, à s’exclure l’un l’autre de la supériorité, s’entr’estiment intérieurement plus qu’ils ne voudraient, mais ils ne s’entr’aiment pas. L’un d’eux vient-il à mourir ? le survivant sera le premier à lui jeter de l’eau bénite. Il le loue alors et l’honore d’assez bon cœur : il est délivré des épines de la concurrence, et il rend justice de bonne grâce au mérite du défunt, parce qu’il a le plaisir de ne le plus craindre. Ajoutez à cela qu’il se ferait un grand tort auprès du public : s’il ne s’intéressait pas à la perte qu’on vient de faire : il montrerait trop sa jalousie.

(L) On lui affecta le titre d’ennemi des femmes. ] Suidas, et Moschopulus assurent qu’on le lui donna, à cause de son naturel austère et indifférent [68]. Il ne riait point, et ne se souciait point des plaisirs que l’on peut prendre avec une femme. Voilà donc l’origine de cette épithète. Si dans la suite on le vit pousser cent lieux communs contre les femmes, dans ses tragédies, et se plaire à découvrir aigrement les mauvaises qualités de quelques-unes, sous des descriptions générales, cela ne fit que confirmer la possession de ce titre ; et il ne faut point douter qu’à cause que son étoile l’engagea à un fâcheux mariage, cette raison personnelle et domestique n’ait nourri sa mauvaise humeur, et ne lui ait fourni des pensées médisantes. Mulieres ferè omnes in majorem modum exosus fuisse dicitur, sie quòd natura abhorruit à mulierum cœtu, sive quòd duas simul uxores habuerat, quùm id decreto ab Atheniensibus facto jus esset ; quarum matrimonii pertædebat [69]. Mais d’ailleurs il n’y a rien de plus faux que de soutenir, qu’ayant quitté sa patrie à cause du déshonneur dont ses deux femmes l’avaient couvert, il conçut une haine générale contre le sexe, et se mit à les satiriser toutes pour la faute de quelques-unes. On réfute cela sans réplique en montrant qu’il ne quitta sa patrie que peu d’années avant sa mort, et après que le théâtre d’Athènes avait retenti cent et cent fois de ses invectives contre les femmes. Hâc ignominiâ motus Euripides in Macedoniam se contulisse dicitur, et perpetuò in omne genus mulieres odio exarsisse, suarum nimirùm uxorum adulterarum gratiâ. Sed pace Grammaticasticorum liceat dicere, quod et probaturus sum, aliud huic nomini originem et causam dari. Euripides enim non modò quia tot scelestas mulieres, tot veneficas, tot adulteras, et viricidas et incestas in scenam induxerit, verùm etiam quòd tot aculeatis omnem illum sexum confoderet sententiis, apud veteres Μισογύνης audiebat....... et plures certè, si non omnes, illius tragœdiæ in quibus tantoperè mulieres perstrinsit, actæ erant antequàm ad iter in Macedoniam animum applicaret [70]. Il faut bien se souvenir que si Euripide a introduit sur la scène quelques femmes très-méchantes, il y a introduit aussi des héroïnes, et qu’il a parlé honorablement du sexe en plusieurs rencontres ; mais cela n’a point effacé la note qu’il avait déjà encourue ; le souvenir des offenses étouffe celui des bienfaits. Disons-le en latin après M. Barnes : Quanquam idem, cùm res ferret haud minùs honorificis fœminas testimoniis ornaverit, plurimas heroïnas ob virtutem eximias fabulis suis populo exhibendo, ut ostendimus plus semel in annotationibus nostris [* 5], mansit tamen affixum poetæ vocabulum, quia plus mordent paucæ offensiunculæ, quàm multa beneficia [71]. Souvenons-nous aussi qu’Aristophane, en faisant semblant de prendre parti pour le beau sexe contre Euripide, a plus outragé les femmes qu’Euripide ne l’avait fait. Je parle de la comédie où Aristophane suppose que les femmes intentèrent un procès à Euripide. Fatendum est in Thesmophoriazusis non tam Euripidem adversùs quem drama illud institutum putatur, quàm totum fœmineun genus hunc comicum perstringere videri, peculiari sibi cavillandi charactere usum, et quàsi genio suo obsecundatum. Dùm enim Euripidem à mulieribus condemnatum fingit, quòd de iis malè esset in suis tragœdiis locutus, multò plura istius sexûs flagitia in unicâ illâ comœdiâ profert, quàm in omnibus suis tragœdiis Euripides unquàm memoraverit, atque ita Euripidem accusando absolvit, mulieres verò laudando excusandoque maximè denigrat [72]. Mais voulez-vous voir un homme qui, en trois mots, dit plus de mal du beau sexe qu’Euripide dans cinquante tragédies ? considérez cette réponse de Sophocle. On lui demanda un jour pourquoi les femmes qu’il introduisait sur le théâtre étaient de bonnes et d’honnêtes femmes, au lieu que celles d’Euripide étaient très-méchantes : Euripide, répondit-il, les représente comme elles sont, et mot comme elles devraient être. Fertur Sophocles nonnihil de hâc quæstione haud minùs in fœminas aculeatum strinxisse ; interrogatus enim quandoquidem Euripidis personæ mulieres malæ essent, cur ipsius è contra forent bonæ, Αὐτὸς μὲν ἔϕη ποεῖν οἵας δεῖ, Εὐριπίδης δὲ οἵαί εἰσιν. [73]. Notez qu’Aristote rapporte généralement, et sans distinction de sexes, que Sophocle disait, je représente les personnes telles qu’il faut qu’elles soient, et Euripide les représente telles qu’elles sont [74].

(M)... Il se maria néanmoins. ] Ce même homme qui fuyait tant le congrès [75], s’humanisa d’assez bonne heure, et s’y engagea par contrat à l’âge de vingt-trois ans [76], afin de mettre à couvert sa chasteté. Ut castitati quam unicè colebat meliùs consuleret [77]. La femme qu’il épousa se nommait Chœrine [78], il en eut trois fils. Après qu’il l’eut répudiée, il en épousa une autre dont je ne sais pas le nom. Celui qui a fait l’Index des matières dans l’Athénée de Dalechamp, dit qu’Euripide perdit en un même jour sa femme, deux fils et une fille, et nous renvoie à la page 60, où l’on ne trouve rien de semblable ; mais on trouve à la page 61, qu’Euripide allant à Icare, fit une épigramme sur le désastre qui était avenu chez un paysan. Une femme y était morte avec deux fils et une fille, pour avoir mangé des champignons. Jugez à quoi l’on s’expose quand on se fixe aux faiseurs des tables alphabétiques. Si l’on s’en rapportait à Athénée, l’on n’aurait pas bonne opinion de la chasteté d’Euripide. Il assure que ce poëte aimait fort les femmes [79], et que Sophocle entendant dire à quelqu’un qu’Euripide les haïssait furieusement : dans les tragédies, répondit-il, j’en tombe d’accord ; mais au lit il les aime passionnément. Ἱερώνυμος γοῦν ἐν ἱςορικοῖς ὑπομνήμασι ϕησί οὕτως, εἰπόντος Σοφοκλεῖ τινὸς ὅτι μισογύνης ἐςὶν Εὐριπίδης, ἔνγε ταῖς τραγῳδίαις, ἔϕη ὁ Σοϕοκλῆς ἐπεὶ, ἔνγε τῇ κλίνῃ ϕιλογύνης. Hieronyinus in historicis commentariis scribit, cùm Sophocli diceret quidam Euripidem fœminas aversari, eum respondisse, in tragœdiis quidem, at in cubili esse illarum amantissimum [80]. Stobée [81] rapporte la même chose, et l’emprunte des livres de Serin. Voyez la remarque (R). J’ai cité l’endroit d’Aulu-Gelle qui nous apprend qu’Euripide avait deux femmes tout à la fois. C’est le chapitre XX du XVe. livre.

(N) Archélaüs éleva Euripide à de grands honneurs. ] Il le fit premier ministre d’état, si nous en croyons Solin. Hic Archelaüs in tantum litterarum miré amator fuit, ut Euripidi tragico consiliorum summam concrederet : cujus suprema non contentus prosequi sumptu funeris, crines tonsus est, et mœrorem quem animo conceperat vultu publicavit [82]. Thomas Magister ne s’éloigne pas de cela, quoiqu’il n’ait rien spécifié. Ab illo (Archelao) honestissimè susceptus est, honoribusque auctus ad summam dignitatem pervenit [83]. Peut-on voir une marque plus expresse d’une grande considération, que ce que fit Archélaüs contre un homme qui avait choqué Euripide ? Cet homme avait nom Décamnichus : il offensa un jour ce poëte, en le traitant de punais. Le poëte ne demeura point sans repartie, et donna à ce défaut de son haleine une cause glorieuse, je veux dire la fidélité avec laquelle il avait gardé des secrets qu’on lui avait confiés. Εὐριπίδης ὀνειδίζοντος αὐτῷ τίνος, ὅτι τὸ ςόμα δυσῶδες ἦν, πολλὰ γὰρ, εἶπεν, αὐτῷ ἀπόῤῥητα ἐγκατεσάπη. Euripides quùm oris graveolentia illi à quodam objiceretur, multa enim, dixit, secreta in eo computruerunt [84]. Archélaüs, ne le trouvant pas assez vengé par cette réponse, lui livra Décamnichus, afin que l’offense fût expiée par de bons coups d’étrivière. On prétend qu’Euripide se servit de la permission du prince, et l’on n’en saurait douter, si l’on veut croire le témoignage d’Aristote, car voici comme il parle : Τῆς Ἀρχελάου δ᾽ ἐπιθέσεως Δεκάμνιχος ἡγεμὼν ἐγένετο παροξύνων τοὺς ἐπιθεμένους πρῶτος. Ἄιτιον δὲ τῆς ὀργῆς ὅτι, αὐτὸν ἐξέδωκε μαςιγῶσαι Εὐριπίδῃ τῷ ποιητῇ· ὁ δ᾽ Εὐριπίδης ἐχαλέπαινεν εἰπόντος τι αὐτοῦ εἰς δυσωδίαν τοῦ ςόματος : c’est-à-dire, Décamnichus fut le chef de l’entreprise formée contre Archélaüs, car il fut le premier qui excita, et qui irrita ceux qui tuèrent ce prince. La cause de sa colère fut qu’Archélaüs l’avait livré à Euripide pour être fouetté ; et la cause de la colère d’Euripide était que Décamnichus lui avait dit quelque chose sur l’odeur désagréable de son haleine [85]. M. Barnes ne veut point qu’on ajoute foi à Aristote : sa raison est qu’Archélaüs ne fut tué que six ans aprés la mort d’Euripide [86]. Cette raison ne me persuade pas ; et il est aisé de comprendre que la mort du poëte n’a pas dû éteindre le ressentiment de Décamnichus contre le roi. Supposez tant qu’il vous plaira, encore qu’Aristote ne le dise pas, que Décamnichus fit périr le pauvre Éuripide, cela n’empêchera point qu’il ne soit très-vraisemblable que la colère de cet homme contre le prince qui l’avait soumis à ce grand affront, conserva toute sa force et l’engagea à ménager au bout de six ans les occasions de vengeance qui se présentèrent. Nous verrons ci-dessous [87] s’il fit périr Euripide.

N’oublions pas la coupe d’or qui fut donnée à ce poëte par Archélaüs, avec un éloge très-honorable. Ce prince, l’ayant refusée à celui qui la demandait, la fit porter à Euripide, et dit à l’autre : Tu es propre à demander, et indigne de recevoir ; mais pour lui, il mérite de recevoir sans qu’il le demande. Σὺ μὲν (εἶπεν) αἰτεῖν ἐπιτήδειος εἶ καὶ μὴ λαμϐάνειν· οὗτος δὲ λαμϐάνειν καὶ μὴ αἰτῶν. Tu quidem, inquit, ad petendum idoneus es, non accipiendum : ille autem ad accipiendum etiam non petens [88].

(O) Il ne faut pas croire légèrement ce que l’on conte de ses aventures de Macédoine. ] Il avait soixante-douze ans lorsqu’il s’en alla à la cour de Macédoine, et on lui a rendu témoignage qu’il avait toujours été éloigné des galanteries criminelles, Σκοτίης Κυπρίδος ἀλλότριος [89]. Quoi qu’il en soit, rapportons ce que l’on conte de lui. On [90] veut que dans un festin que le roi de Macédoine fit à ses amis, Euripide, ayant bu plus qu’il ne fallait, se mit à baiser le poëte Agathon, assis à côté de lui, et âgé d’environ quarante ans, et que, sur la demande du prince, si Agathon lui semblait encore un objet aimable, il répondit : Par Jupiter, je le trouve tout-à-fait aimable, car dans les belles personnes l’automne même est quelque chose de beau [91]. Plutarque prétend que ce fut Archélaüs qui dit cela afin d’excuser Euripide que l’on voyait caresser un homme bien fourni de barbe [92] ; mais dans d’autres endroits [93] il attribue à Euripide cette pensée : tant il est vrai qu’il était en possession de faire servir une même historiette à divers usages. Il en faisait présent tantôt à l’un, tantôt à l’autre ; il s’en servait à deux mains, et y faisait même des changemens, selon le besoin [94]. Neque enim inusitatum Plutarcho easdem res et sententias aliquando narrando variare, aliquando diversis authoribus tribuere, non memoriâ lapsus, sed ut in rem suam lapsus præsens ornat, torqueat [95]. Le docte Schefférus a ignoré les variations de Plutarque sur l’automne des belles personnes ; il croit que Plutarque a toujours attribué cette pensée à Archélaüs ; et néanmoins dans l’un des endroits qu’il cite [96] on voit qu’Euripide prononça cette sentence, au sujet de ses baisers d’Agathon, Voyez Cœlius Rhodiginus [97] qui a censuré un traducteur de Plutarque d’avoir très-mal entendu l’endroit de la vie d’Alcibiade, où ce mot d’Euripide est rapporté. L’aventure de ce festin n’est pas la plus noire faute de ce poëte. On a dit [98] qu’il eut de l’amour pour Agathon, et qu’il composa pour lui complaire la tragédie de Chrysippe. On a dit qu’il eut de sales intrigues avec le mignon d’Archélaüs, et qu’il allait le trouver de nuit, lorsqu’il fut rencontré par quelques femmes qui le mirent en pièces. D’autres disent qu’il allait trouver la femme de Nicodème l’Aréthusien. Οἱ δὲ ἱςόρησαν οὐχ ὐπὸ κυνῶν, ἀλλ᾽ ὐπὸ γυναικῶν νύκτωρ διασπασθῆναι, πορευόμενον ἀωρὶ πρὸς Κρατερὸν τὸν ἐρώμενον Ἀρχελάου, καὶ γὰρ σχεῖν αὐτὸν καὶ περὶ τοὺς τοιούτους ἔρωτας· οἰ δὲ, πρὸς τὴν γαμετὴν Νικοδήμου τοῦ Ἀρεθουσίου. Alii verò non à canibus, sed à mulieribus noctu laceratum fuisse tradunt, dùm intempestâ nocte ad Craterum Archelai delicias iret. Nam illum et hujusmodi amoribus addictum fuisse ferunt. Alii verò, ad uxorem Nicodemi Arethusii [99]. Voilà les choses dont j’ai prétendu parler dans le texte de cette remarque.

(P) Archélaüs le fit enterrer magnifiquement. ] Ces paroles d’une épitaphe d’Euripide, Ἀλλ᾽ ἔμολες Πελλαῖον ὐπ᾽ ἠρίον, cæspite Pelleo ast tegeris ; ont sans doute donné lieu à M. Barnes de dire que le roi de Macédoine voulut que ce poëte fût enterré dans sa ville capitale. Designaverat inter Macedonicorum regum tumulos Euripidem reponere, atque ita paulò post in urbe Pellâ quam nonnulli Berœam putant, Macedoniæ metropoli nobile illi extructum sepulchrum [100]. Voyez ci-dessus le passage de Solin [101], et joignez-y celui d’Aulu-Gelle, que je m’en vais rapporter. Il témoigne en même temps la vénération que l’on avait pour Euripide dans Athènes et dans la Macédoine. Les Athéniens envoyèrent une ambassade en Macédoine, pour avoir ses os, et ne purent les obtenir. Sepulchrum autem ejus et memorian Macedones eo dignati sunt honore, ut in gloriæ quoque loco prædicarent, οὔποτε σον μνῆμα Εὐριπίδης ὤλετο ποῦ, quòd egregius poëta morte obitâ sepultus in eorum terrâ foret. Quamobrem quùm legati ad eos ab Atheniensibus missi petîssent, ut ossa Athenas in terram illius patriam permitterent transferri, maximo consensu Macedones in eâ re denegandâ perstiterunt [102]. Il paraît par un passage de Vitruve [103], que le tombeau d’Euripide était en rase campagne, sur le confluent de deux petites rivières dont les eaux se ressemblaient peu. L’eau de l’une était mortelle, et celle de l’autre était si bonne que les voyageurs choisissaient ce lieu pour y dîner. Pourrait-on dire cela, si le tombeau d’Euripide eût été dans la ville capitale de Macédoine ? Et en ce cas-là, Vitruve et Pline [104] n’eussent-ils point mieux marqué la situation de ces deux rivières ? N’eussent-ils point dit qu’elles passaient, ou par la ville de Pella, ou tout auprès ? Et Plutarque aurait-il dit que ce poëte fut enterré proche d’Aréthuse [105] ? La foudre tomba sur le tombeau de ce poëte, ce qui fût regardé comme un accident glorieux, parce qu’il n’y avait eu que Lycurgue à qui une pareille chose fût arrivée : Ὥςε ἀπολόγημα καὶ μαρτύριον μέγα εἶναι τοῖς ἀγαπῶσιν τὸν Εὐριπίδην, τὸ μόνῳ συμπεσεῖν αὐτῷ μετὰ τελευτὴν : καὶ γενέσθαι ἃ τῷ θεοϕιλεςάτῳ καὶ ὁσιωτάτῳ πρότερον συνέπεσε. Hoc quidem suppetit magnum argumentum et testimonium studiosis Euripidis, quòd soli ei post fata evenerit et delatum fuerit illud, quod Diis gratissimo, et sanctissimo viro antè evenerat [106]. Les Athéniens, n’ayant pu avoir les os d’Euripide, lui dressèrent un superbe cénotaphe [107] qui subsistait encore du temps de Pausanias. Ceux qui ont dit que les Argiens lui en dressèrent aussi un se sont lourdement trompés. Cœlius Rhodiginus, et ab eo deceptus Lilius Giraldus, aliud Euripidis sepulchrum memorat in medio Argivorum foro ; et Palinthum nuncupatum ex Strabone refert ; sed optandum est ut inter tot lectiones antiquas nullos novos errores proseminaret Cœlii incuria, nam Strabo [108] hoc sepulchrum Danai fuisse ait, quanquam eodem loci Euripidem authorem laudat [109].

(Q) Philémon,... déclara qu’... il se pendrait pour aller jouir de la vue d’Euripide. ] Les vers de ce tendre, mais un peu trop mécréant ami, méritent d’être rapportés. Tantoperè autem Philemon eum adamavit, ut hæc de eo dicere non dubitaverit :

Εἰ ταῖς ἀληθείαισιν οἱ τεθνηκότες
Αἴσθησιν εἶχον ἄνδρες, ὡς ϕασίν τινες,
Ἀπηγξάμην ἂν, ὥς᾽ ἰδεῖν Εὐριπίδην.

Si sensum haberent mortui, ut quidam volunt,

Finire vitam mihi laqueo meam velim,
Ut pascerem oculos intuendo Euripidem [110].

(R) On a rapporté diversement les circonstances de sa mort. ] On a pu voir dans le corps de cet article que, le roi étant à la chasse, quelques chiens se jetèrent sur Euripide qui méditait dans un bois [111], et le déchirèrent. Cela est tiré de Thomas Magister, dans la vie de ce poëte. Voyez aussi Diodore de Sicile au chapitre CIII du XIIIe. livre. D’autres disent que ce ne fut pas le hasard qui l’exposa à la fureur de ces chiens, mais qu’on les lâcha tout exprès sur lui, et que ce fut par les artifices de deux poëtes [112] jaloux de sa gloire, qui, avec une somme d’argent, engagèrent à cela celui qui gardait les chiens du roi [113]. Valère Maxime dit seulement qu’Euripide ayant soupé avec le roi, et se retirant chez lui, fut tant mordu par des chiens qu’il en mourut [114]. Aulu-Gelle marque expressément que ce tour lui fut joué par un envieux. Is cùm in Macedoniâ apud Archelaum regem esset utereturque eo rex familariter, rediens nocte ab ejus cœnâ canibus à quodam æmulo immissis dilaceratus est, et ex his vulneribus mors secuta est [115]. Je ne répète point ce que j’ai déjà touché dans la remarque (O), c’est qu’on a dit qu’allant voir à une heure indue quelqu’un ou quelqu’une, pour un mauvais dessein, il tomba entre les mains de quelques femmes qui l’assommèrent ; mais je puis bien rapporter ici la réflexion de M. le Fèvre. D’autres ont voulu faire croire, dit-il [116], qu’il avait été déchiré et mis en pièces par des femmes qui voulurent venger l’honneur de leur sexe, dont il n’avait jamais parlé qu’en assez mauvais termes ; mais il y a bien de l’apparence que cette histoire a été copiée sur la fable d’Orphée.

Finissons cette remarque par une petite érudition qu’Érasme [117] nous fournira. Il y avait, dans la Macédoine, un village qu’on nommait le village des Thraces, à cause qu’il était habité par des gens de cette nation. Un chien d’Archelaüs s’égara un jour, et s’en alla dans ce village, et y fut sacrifié et mangé, selon la coutume des habitans. Le roi, l’ayant su, les condamna à l’amende d’un talent. Ne se voyant pas en état de la payer, ils supplièrent Euripide de la leur faire remettre, et obtinrent cette grâce par sa recommandation. Il en fut puni quelque temps après, car il fut tué par les chiens du roi dans une forêt [118], et l’on se persuada que les chiens qui le tuèrent étaient issus de celui que les Thraces avaient immolé. Cela donna lieu à un proverbe [119] parmi les Macédoniens. Voici une autre érudition du même Érasme : il prétend [120] que le proverbe Promeri canes doit son origine à la vengeance que Promerus, officier chez Archélaüs, tira d’une pièce qu’Euripide qui avait faite. Il lâcha sur lui des chiens qui le déchirèrent. Érasme a oublié de nous dire ce qu’Étienne de Byzance nous apprend. Le malheureux Euripide fut fort maltraité des chiens, dans un endroit de la Macédoine nommé Bormiscus. Il ne mourut pas sur-le-champ, mais il ne guérit jamais de ces morsures. Βορμίσκος χωρίον Μακεδονίας· ἐν ᾧ κυνοσπάρακτος γέγονεν Εὐριπίδης...... ἐκ δὲ τῶν δηγμάτων ἀῤῥωςήσαντα αὐτὸν ἀποθανεῖν. Bormiscus, oppidum (regiuncula, selon Berkélius) Macedoniæ, ubi à canibus discerptus fuit Euripides.…. ex morsibus verò quùm ægrotaret, aiunt obiisse. Je ne doute point que les vers 597 et 598 de l’Ibis d’Ovide, sur lesquels M. de Boissieu n’a eu rien à observer, ne se rapportent à la fin tragique de notre poëte :

Utque cothurnatum vatem tutela Dianæ
Dilaniet vigilum te quoque turba canum.

(S) Il ne fut jamais avec Platon, en Égypte. ] Les auteurs ne s’accordent pas sur l’année de la naissance de Platon ; mais on peut, sans crainte de se tromper, la mettre dans la 88e. ou dans la 89e. olympiade. Je ne conseillerais à personne de contredire M. Barnes, qui assure [121] que Platon n’avait que dix-sept ans lorsqu’Euripide s’en alla en Macédoine, et que vingt lorsqu’Euripide mourut. Quelle absurdité de dire, comme a fait Laërce, qu’Euripide suivit Platon dans le voyage d’Égypte [122] ! S’ils y avaient été ensemble, l’ordre et la justice eussent voulu qu’Euripide, vieillard vénérable, eût été le conducteur, et que Platon, jeune barbe encore, eût suivi comme un disciple, à peu près comme quand les jeunes milords d’Angleterre et les jeunes comtes de l’Empire passent les Alpes, menés par un gouverneur. Mais laissons passer l’incongruité absurde de soutenir que Platon et Euripide ont été ensemble en Égypte. Euripide sortit d’Athènes, fatigué par les railleries des poëtes comiques, et s’en alla à la cour d’Archélaüs : il avait alors environ soixante et douze ans. Il est bien certain que son voyage d’Égypte n’est pas postérieur à celui de Macédoine ; il faut donc, ou qu’il ne soit qu’une chimère, ou qu’il ait précédé l’an soixante et douze d’Euripide. Or, on ne saurait nier que pendant les cinq ou six ans qui précédèrent le voyage de Macédoine, Euripide n’ait demeuré dans sa patrie. Il donna l’Oreste à l’âge de soixante et neuf ans [123]. Il recevait dans Athènes à l’âge de soixante-sept ans [124] les actions de grâces de ceux qui avaient sauvé leur vie en Sicile par le récit de ses vers. Est-il bien croyable qu’à l’âge de soixante et dix ans il ait entrepris d’aller en Égypte ? et si l’on veut avaler cette absurdité, qu’on me dise donc comment il a pu se faire que Platon, n’ayant pas encore vingt ans, l’accompagnât en Égypte, lui qui ne fit ce voyage qu’après [125] la mort de Socrate [126], postérieure de quelques années à celle d’Euripide ; lui, en un mot, qui n’entreprit de voyager en Égypte qu’après avoir vu l’Italie [127] ; et qui ne sortit d’Athènes qu’à l’âge de vingt-huit ans [128] ? Quand Diogène Laërce affirmerait avec serment le voyage dont il s’agit, il ne mériterait pas d’être cru contre les raisons claires et solides que l’on emprunte de la chronologie. À plus forte raison doit-on se donner la liberté de rejeter cette fable, puisqu’il ne la rapporte que sur un on dit. Et néanmoins vous voyez Joseph Scaliger, M. le Fèvre, M. Ménage, très-persuadés de cette jonction de Platon et d’Euripide pour le voyage d’Égypte. Je ne prétends point excuser Laërce ; car lorsqu’un on dit est manifestement faux, il ne le faut point rapporter sans le contredire. Laërce me fournit une preuve contre son on dit. Il remarque qu’Euripide tomba malade en Égypte, et que les prêtres le guérirent par des remèdes de mer ; ce qui l’obligea de dire quelque temps après :

Θάλασσα κλύζει πάντα τ᾽ ἀνθρπων κακὰ,

Mare universa proluit hominum mala.

C’est le 1193e. vers de la tragédie d’Iphigénie in Tauris, antérieure à l’an soixante-neuf de la vie d’Euripide, puisque la tragédie d’Oreste qu’il donna à l’âge de soixante-neuf ans, fut la dernière pièce qu’il composa dans Athènes [129]. Il faut donc nécessairement que son voyage d’Égypte soit antérieur à sa soixante-neuvième année, et ainsi Platon serait allé en Égypte avant l’âge de puberté ; ce qui est absurde. Les savans d’Angleterre [130] n’ont pas été si faciles à duper que ceux de France : ils n’ont point dit, comme le grand Scaliger : Plato, Eudoxus, Euripides profectionis in Ægyptum socii planetarum cursum ab Ægyptiis didicêre ; et primi omnium Græcorum populares suos id docuerunt, Plato quidem in Timæo, Eudoxus ἐν ἐνόπτρῳ, Euripides in Thyeste. Verba sunt magni Scaligeri in Notis ad Sphæram Manilii [131]. Ils n’ont point dit comme Tanaquil le Fèvre [132], qu’Euripide, après avoir été instruit dans la rhétorique par Prodicus, fit le voyage d’Égypte avec Platon, pour y jouir de la conversation des prêtres de ce pays-là, qui avaient alors plus de réputation pour la connaissance des bonnes lettres que les prêtres d’Espagne ou d’Italie. Il se passa plus de trente ans depuis qu’Euripide eut appris la rhétorique, jusqu’à la naissance de Platon. Voilà qui aggrave la faute de M. le Févre.

(T) Il aimait à débiter plusieurs sentences. ] La chose n’a pas besoin de preuves : on n’a qu’à lire ce qui nous reste de lui. Mais si quelqu’un veut savoir cela par la voie du témoignage, il n’a qu’à joindre au passage de Quintilien, cité ci-dessus [133], ces paroles de Cicéron [134] : Cui (Euripidi) tu quantùm credas nescio : ego certè singulos ejus versus singula ejus testimonia puto. Autant de vers d’Euripide, autant de maximes et de sentences, au jugement de Cicéron. Faut-il s’étonner, après cela, que cet illustre orateur se soit préparé à la mort par la lecture de ce poëte ? On a remarqué [135] que les assassins qui le poursuivaient et qui le tuèrent, le trouvèrent qui lisait dans sa litière la Médée d’Euripide. Or, comme les meilleures choses gâtent un livre, si on ne les sait pas ménager, on a eu peut-être beaucoup de raisons de condamner, dans ce poëte, l’usage un peu trop fréquent des aphorismes philosophiques. On a trouvé nommément que son Hécube philosophe jusqu’à l’excès et à contretemps. Τὸν Εὐριπίδην καταμεμϕόμεθα ὅτι παρὰ καιρὸν αὐτῷ Ἑκάϐη ϕιλοσοϕεῖ. Euripidem vituperare solemus, quòd intempestiviùs apud illum philosophetur Hecuba [136].

(U) Il s’enfermait dans une affreuse caverne, pour y composer ses ouvrages. ] Elle était dans l’île de Salamine : Aulu-Gelle eut la curiosité d’y entrer. Philochorus refert, dit-il [137], in insulâ Salamine speluncam esse tetram et horridam quam nos vidimus, in quâ Euripides tragœdias scriptitavit.

(X) Il débita une maxime... sur la religion du serment. ] Il introduit Hippolyte armé d’une distinction, quand on lui remet en mémoire son serment :

Ἡ γλῶσσ᾽ ὀμῶμοχ᾽, ἡ δὲ ϕρὴν ἀνώμοτος [138].

Lingua juravit, mens verò manet injurata.

J’ai juré de la langue, et non pas de l’esprit [139].


Voilà justement le sophisme, ou plutôt la trahison des réticences mentales. Il y eut un certain Hygiænon qui ne put souffrir ce vers : il fit un procès d’impiété à Euripide, comme à un docteur, à un protecteur du parjure. Le poëte demanda d’être renvoyé à ses juges naturels. Il réclama la juridiction des juges préposés aux controverses du théâtre, et dit qu’il avait rendu, ou qu’il était près de rendre raison de sa foi et de sa doctrine devant ce tribunal ; et que c’était là, et non pas au barreau ordinaire, qu’il avait dû être accusé. Ἔϕη γὰρ αὐτὸν ἀδικεῖν τὰς ἐκ τοῦ Διονυσιακοῦ ἀγῶνος κρίσεις εἰς τὰ δικαςήρια ἄγοντα· ἐκεῖ γὰρ αὐτὸν δεδωκέναι λόγον ἢ δώσειν εἰ βούλεται κατηγορεῖν. Dixit enim injustè agere ex Dionysiaco certamine judicia in forum traducentem, ibi enim se reddidisse rationem aut red liturum si voluerit accusare [140]. Aristote, qui nous apprend cette circonstance, nous laisse là : il ne nous dit point les suites, ni l’issue de cette cause : son sujet ne souffrait pas qu’il s’étendît là dessus. Mais si Euripide se tira d’affaire par ce conflit de juridiction, et s’il n’eut rien de plus spécieux à alléguer, il faut convenir que sa cause n’était guère bonne, et qu’il a trouvé des amis et des défenseurs qui l’ont mieux plaidée que lui. Je ne mets point Cicéron parmi ses apologistes ; car il n’a point pris la peine de justifier que la distinction d’Hippolyte fût dans le cas de la règle que lui, Cicéron, venait d’établir, il s’est contenté d’alléguer en général cette distinction, avec un adverbe d’éloge : Non falsum jurare perjurare est, dit-il [141], sed quod ex animi tui sententiâ juraris, sicut verbis concipitur more nostro, id non facere perjurium est. Scitè enim Euripides, juravi linguâ, mentem injuratam gero. Le scoliaste d’Euripide a donné un meilleur éclaircissement ; il veut que la pensée du poëte soit celle-ci. Hippolyte n’avait point compris de quoi il était question, quand on l’avait fait jurer : on lui avait déguisé les choses, et de bonne foi, il les avait entendues d’une certaine manière, et il avait juré selon l’état de la question qu’il entendait. Après cela, on lui fit voir un autre état de l’affaire, et l’on prétendit qu’il s’était lié par son serment : il répondit que jamais son intention n’avait été de jurer cela, et qu’ainsi sa langue seule avait juré. Il me semble que voilà un cas bien différent des équivoques et des restrictions mentales. Hippolyte, selon cette hypothèse, doit jouir des prérogatives de l’ignorance, qui disculpe dans le barreau. Si certum est eum qui juravit, aliquod factum supposuisse, quod reverà se ita non habeat, ac nisi id credidisset non fuisse juraturum, non obligavit juramentum [142]. Mais néanmoins la maxime d’Euripide, généralement parlant, est très-mauvaise : il n’y a point de parjure que l’on ne pût excuser par-là. Ceux qui usent d’équivoques ne peuvent-ils pas dire que leur pensée et leur langue n’étaient point d’accord, que celle-ci a juré, et que celle-là n’a point juré ? M. Barnes, pour justifier Euripide, observe [143] entre autres choses, qu’Hippolyte aima mieux mourir que de violer ce serment verbal.

(Y) Il dogmatisa si gravement pour les avares, que toute la compagnie s’en ému. ] On aurait chassé l’acteur, si Euripide ne fût venu lui-même prier le peuple de se donner un peu de patience, l’assurant qu’on verrait bientôt la fin malheureuse de cet avare, dont les maximes avaient tant choqué la compagnie. C’est à Sénèque que nous sommes redevables de cette particularité. Il rapporte en vers latins les maximes de cet avare, et puis il ajoute : Cùm hi novissimi versus in tragœdiâ Euripidis pronuntiati essent, totus populus ad ejiciendum et actorem et carmen consurrexit uno impetu : donec Euripides in medium ipse prosiluit, petens, ut exspectarent, viderentque quem admirator auri exitum faceret. Dabat in illâ fabulâ pœnas Bellerophontes, quas in suâ quisque dat. Nulla enim avaritia sine pœnâ est, quamvis satis sit ipsa pœnarum [144]. L’équité veut que l’on se contente de cette sorte d’apologie. Le même poëte s’en servit pour son Ixion. Quelques personnes trouvèrent mauvais qu’il représentât sur le théâtre un homme aussi méchant et aussi impie que celui-là ; prenez garde, leur répondit-il, qu’avant que de le laisser disparaître je l’attache sur une roue [145]. C’est ce qu’il y avait de meilleur dans les tragédies ; on voyait triompher la vertu persécutée ; on y voyait enfin le châtiment des méchans : mais néanmoins il était à craindre que certains exemples et certains discours ne devinssent contagieux. Voyez le reproche qu’on fait à notre Euripide dans Aristophane [146] à l’occasion de sa Phèdre. Notez que dans le Ménagiana on confond les deux affaires qui furent faites à Euripide ; car on y assure [147], que les cinq juges établis chez les Athéniens, pour régler les différens qui pouvaient naître au sujet de la comédie... ayant [148] un jour cité Euripide pour rendre compte d’un vers de quelqu’une de ses pièces, où il faisait dire à un acteur qu’il avait juré de la langue et non pas de l’esprit, Euripide se défendit en disant qu’ils attendissent à la fin de la pièce, et qu’ils verraient que cet acteur serait roue.

(Z) On s’offensa tellement des deux premiers vers de sa Ménalippe,..... qu’il fut obligé de changer cela. ] La preuve de ceci se voit dans Plutarque : Je rapporterai ses paroles un peu au long, parce qu’elles nous apprennent le poids que le paganisme donnait à la tradition [149] quand il s’agissait des preuves de l’existence divine. Plutarque avoue assez nettement qu’il y avait du danger à ne se point tenir ferme sur cette preuve, et qu’il était difficile d’en donner de plus certaines. Les philosophes d’aujourd’hui ne sont pas réduits à cet embarras ; ils donnent des preuves très-évidentes, et tout autrement démonstratives que ne le peut être la tradition. Mais laissons parler Plutarque [150] : « Tu me sembles toucher une grande et hardie question, ou, pour mieux dire, remuer un point auquel on ne deust aucunement toucher, c’est l’opinion et creance que nous avons des dieux, en nous demandant la preuve et la raison de chacun d’iceux. Car l’ancienne foi et creance, que nous en avons de nos ancestres en ce païs, nous doit suffire, ne s’en pouvant dire ne imaginer de plus suffisante ne plus évidente preuve.

» Dont sens humain par subtile finesse,
» N’inventa onc la profonde sagesse.


» Ains estant ceste tradition le fondement et la base commune le toute religion, si la fermeté et la creance d’icelle reçeuë de main en main vient à estre esbranlée et remuée en un seul point, elle devient suspecte et douteuse en tous les autres. Tu peux bien avoir ouï dire comment Euripide fut sifflé et rabroué pour le commencement de sa tragedie Menahippe qu’il avoit ainsi commencée,

» O Jupiter, car de toi rien sinon

» Je ne connais seulement que le nom.
» Il se fioit fort de ceste tragedie-là, comme estant magnifiquement et exquisement bien escrite, mais pour le tumulte et murmure qu’en fit le peuple, il changea les premiers vers ainsi comme il se lit maintenant,

» O Jupiter, combien en vérité
» Ce nom convient à la divinité.

(AA) Quelques-uns le font passer pour athée. ] Plutarque entre les anciens, et Brown [151] entre les modernes, ont parlé ainsi d’Euripide. Voyez la remarque (H) de l’article Critias. Aristophane dit une chose qui me fait songer à la crainte que certaines gens eurent dans Éphèse, au sujet des prédicateurs de l’Évangile [152]. Il introduit [153] une veuve qui avait gagné sa vie à vendre des bouquets sacrés ; mais, disait-elle, depuis qu’Euripide a persuadé aux hommes, par ses vers impies, qu’il n’y avait point de dieux, je ne vends presque plus rien. Prenez bien garde que les dieux du paganisme étaient si risibles, qu’on pouvait bien, sans être athée, les tourner en ridicule. Ainsi le passage d’Euripide, rapporté par Clément Alexandrin, ne prouve rien : j’entends celui où ce poëte dit que, si les dieux étaient appelés à rendre compte de leurs adultères, Neptune et Jupiter même évacueraient leurs temples, en exécution de la sentence qu’on prononcerait contre eux ; mais, ajoute-t-il, je ne pense pas qu’on en vienne jamais là [154] : Ἤδη δὲ ἐν Ἱώνι τῷ δράματι γυμνῇ τῇ κεϕαλῇ ἐγκυκλεῖ τῷ θεάτρῳ τοὺς Θεούς.

Πῶς οὖν δίκαιον, τοὺς νόμους ὑμᾶς βροτοῖς
Γράψαντας, αὐτοὺς ἀδικίας ὀϕλισκάνειν ;
Εἰ, δ᾽ οὐ γὰρ ἔςαι, τῷ λόγῳ δὲ χρήσομαι
Δίκας βιαίων δώσετ᾽ ἀνθρώποις γάμων,
Σὺ καὶ Ποσειδῶν, Ζεὺς θ᾽̓ ὃς οὐρανοῦ κρατεῖ,
Ναοὺς τίνοντες ἀδικία κενώσετε.


Jam verò in dramate, cui nomen est Ion, capite nudo Deos in theatrum inducit.

An hoc videtur, qui datis mortalibus
Leges, ut ipsi criminis sitis rei !
Quòd si (futurum quod quidem nunquàm reor)
Reddenda vobis ratio sit stupri et probri :
Neptunus, et tu, rexque Jupiter poli,
Templis relictis jure abibitis foras.


Le père Thomassin [155] a raisonné juste sur la contradiction qui se trouve dans la conduite des païens. Ils adoraient dans les temples les mêmes divinités que l’on bafouait impunément sur leurs théâtres.

Notez une grosse faute de Théophile Raynaud. Il dit que l’athée Euripide attaqua le philosophe Anaxagoras, à cause du dogme de l’unité de Dieu [156] : et il cite le VIe. chapitre du XIVe. livre de la Préparation évangélique d’Eusèbe. Il fallait citer le chapitre XVI ; mais cela n’eût point réparé la faute : car voici ce qu’a dit Eusèbe en abrégeant le récit qu’a fait Plutarque des opinions des anciens sur la nature de Dieu. Euripide n’osant marquer sa pensée, parce qu’il craignait l’aréopage, l’insinua en introduisant Sisyphe, qui niait qu’il y eût des dieux. Plutarque fait venir ensuite Anaxagoras, comme le premier qui eût eu des sentimens orthodoxes touchant la divinité. Voilà ce que dit Eusèbe [157].

(BB) Il est absurde d’imputer à l’auteur d’une tragédie les sentimens qu’il fait débiter par ses personnages. ] M. Barnes observe que, pour soutenir le caractère de Sisyphe, il a fallu qu’Euripide le fit raisonner comme un athée, et qu’ainsi Plutarque n’a point eu raison de trouver là une ruse d’écrivain ; la ruse, dis-je, de débiter sûrement, sous le nom d’autrui, ses propres pensées [158]. Miror autem plurimùm quid tanto viro persuaserit hæc vafrè ab Euripide dicta sub Sisyphi personâ, et poëtæ ipsius esse sensus, cùm nemo unquàm extitit nostro poëta pientior, ut ex innumeris ejus locis colligi potest, et Sisyphi characterem maximè docuit impiè loqui : ut observavimus ad Bellerophon. [159] v. 8. Grotius a dit judicieusement [160], Multa in tragœdiis sunt non ex poëtæ sensu dicta sed congruenter personæ quæ loquens inducitur. Voyez la chimère de la cabale de Rotterdam démontrée [161], et ce que nous avons dit dans la remarque (Q) de l’article Érasme, page 235.

(CC) Deux choses... peuvent recevoir un bon et un mauvais tour. ] Un jour le peuple d’Athènes souhaita qu’il retranchât un certain endroit de l’une de ses tragédies : il se présenta sur la scène pour dire au peuple : Je ne compose point mes ouvrages afin d’apprendre de vous, mais afin de vous enseigner. Il se plaignit une fois au poëte Alcestis que, pendant les trois derniers jours, il n’avait pu faire que trois vers, quoiqu’il eût travaillé de toutes ses forces. L’autre lui répondit avec un grand air de vanité, qu’il en avait fait une centaine fort aisément : mais, reprit Euripide, il y a cette différence entre les miens et les vôtres, que les miens perceront toute l’étendue des siècles, et que les vôtres ne dureront que trois jours. Valère Maxime a interprété tout ceci fort favorablement : il n’y a trouvé aucune trace d’orgueil : il n’y a trouvé que la confiance raisonnable qu’un grand homme doit avoir en son mérite. Il assure même à l’égard du premier fait, que l’on en jugea dans Athènes comme il en juge. Nec Euripides quidem Athenis, dit-il [162], arrogans visus est, cùm postulante populo, ut ex tragœdiâ quandam sententiam tolleret, progressus in scenam, dixit : Se, ut eum doceret, non ut ab eo disceret, fabulas componere solere. Laudanda profectò fiducia est, quæ æstimationem sui certo pondere examinat, tantùm sibi arrogans, quantum à contemptu et insolentiâ distare satis est. Itaque etiam quod Alcestidi tragico poëtæ respondit, probabile ; apud quem cùm quereretur, quôd eo triduo non ultra tres versus maximo impenso labore deducere potuisset, atque is se centum perfacilè scripsisse gloriaretur : Sed hoc, inquit, interest, quod tuî in triduum tantummodò, meî verò in omne tempus sufficient. Alterius enim fœcundi cursus scripta intra primas memoriæ metas corruerunt, alterius cunctante stylo elucubratum opus per omne œvi lempus plenis gloriæ velis feretur. Personne n’est obligé d’assujettir son franc arbitre au jugement de cet écrivain latin, ni de croire sur sa parole qu’on reçut en bonne part dans Athènes la déclaration désobligeante d’Euripide. On ne doit donc pas être surpris que le Giraldi, se servant de ses lumières, ait trouvé trop de fierté et trop d’amour-propre dans ces réponses du poëte grec. Il n’est blâmable qu’en ce qu’il a prétendu que l’auteur latin les a rapportées comme une preuve d’orgueil. C’est du moins la faute que M. Barnes lui a reprochée [163] ; après quoi il a fait cette réflexion sur la dernière partie du passage de Valère Maxime : Verè hæc quidem Valerius : nam quùm hodiè ne tres quidem versus nedum unicus ullus ex innumeris jactabundi istius poëtæ extemporanei versibus superesse videatur, sed neque ullum illorum vestigium ad Valerii ætatem perduravit, ad quam tamen omnia Euripidis opera salva et integra permanserunt, etiam post Valerii tempora jam mille et octingentos annos supersunt plures istius fabulæ integræ, quam omnes Æschyli, Sophoclis, et Aristophanis tragœdiæ et comœdiæ simul sumptæ. Il me semble qu’on pourrait censurer deux choses dans ce discours. L’une est, que Valère Maxime ayant vécu sous Tibère, on ne peut pas dire l’an 1694, qu’il vivait il y a dix-huit cents ans. L’autre qu’il nous reste sept tragédies d’Eschyle, autant de Sophocle, et onze comédies d’Aristophane. Toutes ces pièces jointes ensemble surpassent en nombre les vingt tragédies d’Euripide qui nous restent.

(DD) On l’a accusé d’avoir maltraité Médée par complaisance pour les Corinthiens. ] Ce furent, dit-on, les Corinthiens qui tuèrent les fils de Médée, et qui, long-temps après, engagèrent Euripide à supposer qu’elle-même les avait tués. On ajoute qu’à cause de la grande réputation de ce poëte, la fiction prévalut sur la vérité [164], et que la ville de Corinthe se déchargea de l’infamie de son crime sur la mémoire de l’innocente Médée. L’auteur que je cite ne dit point qu’il en ait coûté autre chose aux Corinthiens que des prières, pour obtenir cette translation d’infamie ; mais d’autres assurent qu’il leur en coûta cinq talens. C’est la somme qu’ils donnèrent à Euripide, si l’on en croit Parméniscus [165]. Il y a plusieurs auteurs qui ont dit que Médée ne tua point ses enfans, et qu’au contraire, ne pouvant les emmener avec soi quand elle s’enfuit de Corinthe, elle eut soin de les mettre dans un temple, où elle espéra qu’ils trouveraient un asile inviolable, mais que les Corinthiens les y massacrèrent [166]. On allègue [167], pour justifier Euripide, qu’il n’a pas été le premier qui ait accusé Médée du meurtre de ses enfans, puisque Carcinus [168] l’a introduite plaidant sa cause contre ceux qui l’en accusaient, et qu’Apollodore [169] dit nettement qu’elle tua les deux fils qu’elle avait de Jason. De ces deux témoins il n’y a que le premier qui puisse servir, car le premier a vécu deux cent cinquante ans après Euripide. Pour Carcinus, il a précédé ce poëte ; il eut un fils nommé Xenoclès, qui disputa le prix de la tragédie contre Euripide [170].

(EE) Il n’est pas vrai qu’il y eût dans son Palamède quelque reproche tacite touchant la mort de Socrate. ] Ce qu’il y a de plus uniforme dans les auteurs, par rapport au temps d’Euripide, est qu’il naquit la 1re. année de la 75e. olympiade, et qu’il vécut environ soixante et quinze ans. Il faut donc placer sa mort dans la 93e. olympiade, comme Suidas a fait. Or, il est certain que Socrate ne mourut que dans la 95e. olympiade : il n’est donc pas vrai qu’Euripide ait pu reprocher aux Athéniens le supplice de ce philosophe. Notez que Diodore de Sicile ayant dit qu’Apollodore mettait la mort d’Euripide en la même année que la mort de Sophocle, c’est-à-dire, à l’an 3 de la 95e. olympiade, ajoute que, selon d’autres, Euripide avait été déchiré par des chiens, dans la Macédoine, quelque temps auparavant [171]. Remarquez aussi, je vous prie, ces paroles de M. le Fèvre [172] : Je suis fort assuré qu’Aristophane fit jouer la comédie intitulée les Grenouilles en cette même olympiade 92, et qu’en cette pièce il parle d’Euripide comme d’un homme qui était déja mort. Samuel Petit [173] prétend prouver que cette pièce parut la 3e. année de la 93e. olympiade. Cela me suffit. J’ajoute que l’anonyme qui a fait la description des olympiades, marque sous la 91e. le combat d’Euripide et de Xénoclès, dans lequel combat, le Palamède fut l’une des quatre pièces produites par Euripide [174]. Joignez à cela l’autorité de Philochorus, qui avait fait un livre particulier sur la vie d’Euripide [175]. Il marqua en termes précis que le supplice de Socrate fut postérieur à la mort de ce grand poëte [176] : et néanmoins on a osé publier, et cela depuis très-long-temps, qu’Euripide fit pleurer tous les spectateurs pour avoir coulé deux vers dans son Palamède, qui désignaient la mort de Socrate. Voici le Ὅθεν λοιπὸν ἐκέλευσαν μηδένα δημοσίᾳ, οἵον ἐν κοινῷ θεάτρῳ, λέγειν περὶ Σωκράτους· ἀμέλει λέγεταί τι τοιοῦτον, ὡς ὅτι Εὐριπίδου βουλομένου εἰπεῖν περὶ αὐτοῦ, καὶ δεδιότος, ἀναπλάσασθαι Παλαμήδην, ἵνα διὰ τούτου σχοίη καιρὸν τοῦ αἰ νίξασθαι εἰς τὸν Σωκράτη, καὶ εἰς τοὺς Ἀθηναίους, ἐκάνετε, ἐκάνετε τῶν Ἑλλήνων τὸν ἂριςον, ὃ ἔςίν ἐϕονεύσατε. καὶ νοῆσαν, τὸ θέατρον ἅπαν ἐδάκρυσε, διότι περὶ Σωκράτους ᾐνίττετο [177]. Undè post edixerunt, ne quis in posterum Socratis publicè, ut in communi theatro, meminisset. Narratur autem hujusmodi quiddam accidisse : Euripidem, cùm aliquid de eo dicere vellet, nec id tamen auderet, finxisse fabulam de Palamede, ut sub ejus personâ occasionem haberet obscurè ad Socratis interitum et factum Atheniensium alludendi, his verbis : « Occidistis, occidistis Græcorum optimum. » Animadvertente autem populo, hæc verba ad Socratem pertinere, ortam in toto theatro esse complorationem. Diogène Laërce [178] a rapporté en peu de mots le principal de cette fausse aventure. Plusieurs de nos plus savans modernes [179] l’ont adoptée.

Par la vraie date de la mort d’Euripide, l’on peut convaincre Cœlius Rhodiginus d’une insigne fausseté. Il dit [180] que le jeu des osselets contenait un nombre qui valait 40, et qui s’appelait Euripides ; et il en donne pour raison qu’Euripide fut l’un des quarante magistrats que l’on établit dans Athènes après l’expulsion des trente tyrans. Comment aurait-il pu être l’un de ces quarante, puisqu’il était mort avant que Lysandre se fût rendu maître d’Athènes ? Charles Étienne, Lloyd et Hofman ont conservé en son entier cette erreur de Rhodiginus.

(FF) Peu de gens font mention d’une chose qu’on lit dans Eusèbe. ] Il semble que l’on en pourrait conclure qu’Euripide avait un appartement dans la citadelle d’Athènes, avec une pension du public. Je rapporterai les paroles d’Œnomaüs : les savans y feront les commentaires qu’ils jugeront à propos. Εἰ μὲν οὖν ὀ κρότος ἱκανὸς κριτὴς, καὶ ἡ ἐν Ἀκροπόλει τράπεζα, οὐδὲν ἔτι λέγω, βλέπων ἐν Ἀκροπόλει δειπνοῦντα τὸν Εὐριπίδην, καὶ τὸν Ἀθηναίων ἅμα καὶ τὸν Μακεδόνων δῆμον ἐπιψοϕοῦντα. Si ergò vel isti plausus, vel instructa in arce mensa, idonei sunt hoc in genere arbitri, nihil addo : novi enim et in arce Euripidem cœnâsse, et Atheniensium atque Macedonum plausu celebratum eundem fuisse [181].

(GG) Quelques-unes des fautes de M. Moréri sont très-lourdes. ] 1o. Il ne fallait pas dire qu’on appelait notre poëte le philosophe tragique ; mais le philosophe du théâtre. 2o. Au lieu d’assurer qu’il naquit à Phlya [182], il fallait dire dans l’île de Salamine. 3o. Puisqu’il naquit la 1re. année de la 75e. olympiade, il est absurde de dire qu’il vivait en cette olympiade ; car on ne parle ainsi que pour désigner le temps où un homme fait le plus parler de lui. 4o. J’ai déjà marqué [183] l’erreur de ceux qui l’envoient en Égypte avec Platon ; 5o. et qui observent en particulier qu’il y alla après avoir achevé ses études de rhétorique. 6o. On aurait bien de la peine à justifier que Décamnique fût celui qui fit mourir Euripide. Les auteurs qui ont conservé les noms de ceux qu’on accuse de l’avoir exposé aux Chiens ne nomment jamais ce Décamnique. Je m’étonne donc que M. le Fèvre ne se soit attaché qu’à ce nom-là. 7o. En tout cas, il ne fallait point placer la vengeance de Décamnique contre Euripide après la mort d’Archélaüs. M. le Fèvre s’en était fort bien gardé : si M. Moréri avait été bon copiste, il eût fait la même chose ; car il est sûr qu’Euripide mourut quelques années avant ce prince. 8o. Dire qu’Euripide mourut âgé d’environ soixante-quinze ans, en la 93e. olympiade, lorsque l’on a déjà dit qu’il vivait en la 75e. olympiade, est ignorer les élémens de son métier, et ceux de l’arithmétique. Les plus mauvais historiens ne diront jamais qu’un homme qui vit dans la 75e. olympiade (c’est-à-dire, qui est alors dans son état florissant), et qui meurt dans la 93e., meurt âgé d’environ soixante-quinze ans. Un tel homme aurait vécu pour le moins un siècle entier. 9o. Il ne fallait pas dire que ce poëte se retira après l’an 338 de Rome chez Archélaüs, roi de Macédoine ; car puisque l’on devait dire qu’il mourut l’an 348 de Rome, on s’engageait à soutenir qu’il vécut environ dix ans à la cour de Macédoine, fausseté que tous les auteurs condamnent, puisqu’ils ne donnent qu’environ trois ans de séjour à Euripide, dans la cour d’Archélaüs. Et nous avons vu [184] qu’à l’âge de soixante-neuf ans il fit jouer son Oreste dans Athènes. 10o La citation de Diodore de Sicile, l. 13., et celle d’Aulu-Gelle, l. 11, c. 4, sont tout-à-fait inutiles.

(HH) La meilleure édition....... est celle qu’un docteur de Cambridge publia in-folio, l’an 1694. ] Il se nomme Josué Barnes. Il y a joint des scolies et tous les fragmens qu’il a pu trouver. Il a éclairci plusieurs choses par des notes fort savantes, et il a mis en tête une vie d’Euripide toute pleine d’érudition.

Disons un mot sur quelques-unes des éditions précédentes. Gesner [185] observe que la première édition de dix-huit tragédies d’Euripide est celle de Venise, chez Alde Manuce. Elle n’est qu’en grec : il n’en marque ni l’année ni la forme. J’ai su d’ailleurs qu’Alde imprima ce poëte sans version latine, l’an 1503, in-8o. Hervagius renouvela cette édition à Bâle, l’an 1537, in-8o., et l’an 1544 et l’an 1551 [186]. On y joignit une traduction latine de mot à mot dans l’édition de Bâle, chez Robert Winter, l’an 1541 [187]. Le traducteur se déguisa sous le faux nom de Dorotheus Camillus [188]. Jean Oporin donna une édition d’Euripide, in-folio, l’an 1562, en grec et en latin, laquelle contient les notes et les préfaces de Gaspar Stiblinus, les Prolégomènes de Jacques Micyllus, et quelques remarques de Jean Brodeau. L’édition de Plantin, in-16, à Anvers, 1571, contient une chose qui manquait aux précédentes : les vers y sont démêlés, chacun est placé dans sa ligne selon sa mesure et sa longueur. Guillaume Cantérus fit ce partage. Paul Étienne publia Euripide en grec et en latin, avec l’ancien scoliaste, et avec les Commentaires de Brodeau, de Cantérus, de Stiblinus et de Portus, l’an 1602, in-4o. L’édition dont je me sers est d’Heidelberg, chez Jérôme Commelin, 1597, in-8o. Elle est en grec et en latin : les vers y sont rangés selon l’ordre que Cantérus leur donna ; la traduction fut retouchée par Æmilius Portus ; on joignit aux dix-neuf tragédies d’Euripide le commencement de la vingtième, intitulée Danaë. Il y a quelques tragédies qui ont paru à part, traduites par différens auteurs. On en imprima quatre [189] à Anvers, l’an 1581, traduites en vers latins par Ratallérus. Érasme traduisit en vers ïambiques, l’Hécube et l’Iphigénie in Tauris, et cette version fut imprimée à Venise, chez Alde, l’an 1507, in-8o. Florent Chrétien a traduit en vers latins l’Andromaque et le Cyclope.

  1. (*) Ita Quinul., Institut. Oratoriar. lib. X, cap. I.
  2. (*) II, epist. I, vs. 161.
  3. (*) Hecub., vs. 992. Orest., vs. 1134. Phœniss., vs. 18, etc.
  4. (*) Poët. Histor., dialog. VII, folio 271.
  5. (*) Ad Troad., vs. 651, et Menalip., vs. 54, Protesilaum, vs. 5, etc.
  1. Suidas, in Εὐριπίδης. Manuel Moschopulus, in Vitâ Euripidis. Voyez aussi Aulu-Gelle, lib. XV, cap. XX.
  2. Aulus Gellius, ibid.
  3. Thomas Magister, in ejus Vitâ.
  4. Μισογύνης, mulierum osor.
  5. Suidas, in Εὐριπίδης. Manuel Moschopulus, Thomas Magister, in Vitâ Euripidis.
  6. Φωράσας δε τὸν αὐτοῦ ὑποκριτὴν Κηϕισοϕῶντα ἐπὶ τῇ γυναικὶ, καὶ τὴν ἐντεῦθεν μὴ ϕέρων αἰσχύνην, σκωπτόμενος ὑπὸ τῶν κωμῳδοποιῶν ἀϕεὶς τὴν Ἀθήνησι διατριϐὴν εἰς Μακεδονίαν ἀπῆρε. Cæterùm quùm suum proprium histrionem Cephisophontem cum uxore deprehendisset, et contumeliam exindè partam minimè ferret, sæpè taxatus à comœdis, relictis Athenis in Macedoniam se contulit. Thom. Magister, in Vitâ Eurip.
  7. Aulus Gellius, lib. XV, cap. XX.
  8. Thomas Magister, in Vitâ Euripidis.
  9. Suidas, qui le rapporte, dit aussi que selon d’autres il n’en composa que 75. M. Barnes a trouvé le titre de 84 pièces d’Euripide. Voyez son édition, pag. 55.
  1. En grec δῆμος, sorte de division qui avait lieu dans Athènes.
  2. Spon, Voyage de Grèce, tom. II, pag. m. 478.
  3. M. Spon, là même, pag. 477, remarque que Stéphanus et d’autres auteurs mettent Phlya sous la tribu Cécropide : pour lui, fondé sur un marbre et sur Hésychius, il la met sous la Ptolémaïde.
  4. Le Fèvre, Vie des Poëtes grecs, pag. m. 97.
  5. Suidas, in Εὐριπίδης et Manuel Moschopulus, in Vitâ Euripidis.
  6. Idem, ibid. Hesychius Illustrius, in Εὐριπίδης, et Thom. Magister, in Vitâ Euripidis.
  7. Josua Barnesius, in Vitâ Euripidis editioni Cantabrigiensi, 1694, præfixâ, num. 3.
  8. Lib. II.
  9. In Vitâ Euripidis, pag. 24.
  10. Stobæus, in sermone περὶ νόμων, folio 293, apud Barnesium, ibidem, pag. 4.
  11. Ὑπὸ Εὐριπίδου τοῦ τῆς λαχανοπωλητρίας. Ab Euripide filio olerum venditricis. Aristoph., in Thesmophorias, pag. m. 772. Ἄγρια γάρ ἠμᾶς, ὦ γυναῖκες δρᾷ κακὰ. Ἅτ᾽ ἐν ἀγρίοισι λαχάνοις αὐτὸς τραϕείς. Agrestibus enim nos, ô mulieres, afficit malis, utpote inter agrestia olera ipse enutritus. Idem, ibid., pag. 776. Aulu-Gelle, liv. XV, chap. XX, rapporte ces vers.
  12. Valer. Maximus, lib. III, cap. IV.
  13. Plin., lib. XXII, cap. XXII, pag. m. 203, 204.
  14. Quùm adhuc Clio mater illum in utero gereret, consulenti de eo oraculum patri hoc responsum dedit Apollo. Barnes., in Vitâ Euripidis, num. 3. Nous verrons ci-dessous qu’Aulu-Gelle dit que ce furent des Chaldéens qui firent cette prédiction, après la naissance d’Euripide.
  15. Œnomaüs, apud Eusebium de Præpar. Evangel., lib. V, cap. XXXIII, pag. m. 227.
  16. Voyez Barnes, in Vitâ Euripid., pag. 10.
  17. Voyez ci-dessous Aulu-Gelle, citation (20). Il dit pourtant qu’Euripide, depuis ce renvoi, disputa le prix, et l’obtint dans les combats moins célèbres.
  18. Voyez la remarque (I).
  19. C’est sur cela qu’Œnomaüs a fait rouler sa critique, apud Eusebium, Præparat. Evangel., lib. V, cap. XXXIII, pag. 228.
  20. Aulus Gellius, lib. XV, cap. XX.
  21. Barnes, in Vitâ Euripidis, num. 13, sub finem.
  22. Lib. II, in Socrate, init.
  23. Ælian. Var., Hist., lib. II, cap. XIII.
  24. Origenes contra Celsum, lib. IV, pag. 214. Voyez la remarque suivante.
  25. Clem. Alexandr., Stromat., lib. V, pag. 581, C.
  26. Schott. Nodor., Ciceronianor., lib. II, cap. XV.
  27. Admonit. ad Gentes, pag. 60, A.
  28. De Præparat. Evangel., lib. V, cap. XXXII, pag. 227, A.
  29. Lib. I, cap. VII et XXXVIII.
  30. Lib. II, in Socrate, num. 22.
  31. Orat. contra Græcos, pag. 143, B.
  32. Diog. Laërce parle de cela, liv. IX, num. 6. M. Ménage, ibi, remarque contre M. Cuper, que Clément d’Alexandrie n’en a point parlé.
  33. Vide Casaubon. et Menag., in Diogen. Laërt., lib. II, num. 10.
  34. Voyez la remarque précédente, citation (25).
  35. Præp. Evangel., lib. X, cap. ultimo, pag. 504.
  36. Vitruv., lib. VIII, in præfat.
  37. In Diogen. Laërt., lib. II, num. 10.
  38. Dans l’article d’Eschyle, remarque (K) pag. 268.
  39. Instit. Orator., lib. X, cap. I, pag. m. 468, 469.
  40. In Vitâ Euripidis, num. 20, 21.
  41. Johan. Baptista Pius, Annotat. posterior., cap. XXVIII, apud Barnes., in Vitâ Euripidis, pag. 19. Thomas Stanleius, Comment., in Æschyl., folio 701, et Lilius Gyrald, Poët. Hist., dialog. VII, sont aussi cités par Barnes, là même.
  42. Je ne crois pas que Lucien ait fait mention de cela. M. Drelincourt m’a écrit qu’on peut décider hardiment que Lucien n’en a rien dit.
  43. Iliad., χ, vs. 212.
  44. Cœlius Rhodigin., lib. XXIV, cap. X, est apparemment la source de la méprise.
  45. In Ranis, act. V, sc. III.
  46. Franc. Floridus Sabinus, Lectionum subcisivar. lib. II, cap. XIII, apud Barnes., in Vitâ Eurip., pag. 17.
  47. In Vitâ Euripidis, pag. 19.
  48. Barnes., pag. 20.
  49. Suidas, in voce Σοϕὸς.
  50. M. Barnes, pag. 20, remarque que cette prêtresse ne répondait pas toujours en vers hexamètres : Quinimò fallitur vir doctus quòd putet Pythiam non nisi heroïcis uti solitam, nam ut cætera taceam extat etiamnum apud Pausaniam oraculum Delphicum ïambico metro ab ipsâ Pychiâ datum Tisidi Messenio. Il met en marge, Quare Anton. van Dalen hunc errorem errat cum aliis.
  51. Barnes., in Vitâ Eurip., pag. 20.
  52. Voyez l’article Balzac, (Jean-Louis Guez de) remarque (A) tome III, pag. 68.
  53. Dans sa IIe. satire. Joignez-y cette exclamation de MM. de Port-Royal, Combien la rime a-t-elle engagé de gens à mentir ! Art de penser, IIIe. part., chap. XIX, pag. m. 366.
  54. Horat., sat. V, lib. I, vs. 86.
  55. Voyez tome III, pag. 60, la fin de la remarque (C) de l’article Balesdens.
  56. Plut., in Niciâ, sub finem, pag. 542, C.
  57. Idem, ibidem.
  58. Vie des Poëtes grecs, pag. 96.
  59. Gylippus, général des Lacédémoniens, avait battu les Athéniens en Sicile.
  60. Aulus Gellius, lib. XVII, cap. IV.
  61. Menander à Philemone nequaquam pari scriptore in certaminibus comœdiarum ambitu, gratiâque et factionibus sæpenumero vincebatur.
  62. Ælian., Var. Hist., lib. II, cap. VIII.
  63. Thom. Magister le dit in Vitâ Euripidis.
  64. Isaacus Casaubonus in Agellio pro quinque legit quindecim, quoniam Græci, inquit, scriptores testantur Euripidem νίκας νικῆσαι πεντεκαίδεκα. Barnes., pag. 26.
  65. Athen., lib. XIII, pag. 604.
  66. In Vitâ Euripid., pag. 27.
  67. Thom. Magister, in Vitâ Euripid.
  68. Σκυθρωπὸς δὲ τὸ εἶδος ἦν, καὶ ἀμειδὴς καὶ ϕεύγων τὰς συνουσίας, ὅθεν καὶ μισογύνης ἐδοξάσθη. Subtristis autem erat et risui minimè deditus, nec coïtus appetebat, undè et mulierum osor vocabatur. Voyez les vers grecs rapportés par Aulu-Gelle, au chap. XX du XVe. livre.
  69. Aulus Gellius, lib. XV, cap. XX.
  70. Barnes., pag. 19.
  71. Ibidem.
  72. Barnes., pag. 4.
  73. Idem, pag. 17.
  74. Aristot. de Poët., cap. XX, pag. m. 518, E.
  75. Φεύγων τὰς συνουσίας, qui congressus fugiebat. Suidas, in Εὐριπίδης.
  76. C’est la conjecture de Barnes, pag. 24.
  77. Barnes., in Vitâ Euripid., pag. 24.
  78. Suidas, in Εὐριπίδης.
  79. Φιλογύνης δ᾽ ἦν καὶ Εὐριπίδης ὸ ποιητής. Fuit et mulierosus Euripides. Athen., lib. XIII, pag. 557. Voyez aussi pag. 603.
  80. Athen., lib. XIII, pag. 557.
  81. Sermone de Intemperantiâ.
  82. Solin., cap. IX, pag. m. 26.
  83. Thom. Magister, in Vitâ Eurip.
  84. Stobæus, serm. XXXIX, περὶ ἀποῤῥήτων.
  85. Aristot., lib. V de Republicâ, cap. X, pag. m. 305, F.
  86. Barnes., in Vitâ Euripidis, num. 30, sub fin.
  87. Dans la remarque (R), où il ne se trouve pas nommé parmi ceux à qui l’on impute la mort de ce poëte.
  88. Plut., de vitioso Pudore, pag. 531, D.
  89. Dionysius Byzantinus, in Anthologiâ, lib. II, folio 274.
  90. Ælian., Var. Hist., lib. XIII, cap. IV.
  91. Ναὶ μὰ Δία, οὐ γὰρ μόνον τὸ ἔαρ τῶν καλῶν κάλλιςον, ἀλλὰ καὶ τὸ μετόπωρον. Per Jovem, inquit, omninò, non enim ver solum formosorun est pulchrum, verùm etiam autumnus. Idem, ibid.
  92. Plutarch., in Apophth., pag. 177, A.
  93. Idem, in Vitâ Alcibiadis, pag. 192, A ; et in Amatorio, pag. 770, C.
  94. Voyez, tome I, pag. 164, la remarque (M) de l’article Achille, entre les citations (137) et (138).
  95. Barnes., in Vità Euripidis, pag. 30.
  96. Schefferus, in Ælian., lib. XIII, cap. IV, cite Plutarque in Amatorio (c’est là que le mot est attribué à Euripide), et in Apophth. Lacon. Ce n’est point dans les Apophthegmes des Lacédémoniens qu’on trouve cela.
  97. Antiq. Lect., lib. XXIV, cap. VII.
  98. Ælian., Var. Hist., lib. II, cap. XXI.
  99. Suidas, in Εὐριπίδης.
  100. Barnes., in Vitâ Euripidis, pag. 32.
  101. Citation (82).
  102. Aulus Gellius, lib. XV, cap. XX,
  103. Lib. VIII, cap. III, pag. m. 163.
  104. Lib. XXXI, cap. II, sub fin.
  105. Plut., in Lycurgo, sub fin., pag. 59.
  106. Plut., ibidem.
  107. Pausanias, lib. I, pag. 2.
  108. Lib. VIII, pag. 256.
  109. Barnes., in Vitâ Euripid., pag. 33. Il cite Celius Rhodigin. Antiq. Lect., lib. XXIII, cap. X, et Gyraldus, Poët. Hist., dial. VII, folio 268. Je n’ai point trouvé cela dans mon édition de Rhodiginus, (qui est de Francfort, 1666,) au lieu marqué. Il fallait citer lib. XXIV, cap. X.
  110. Thom. Magister, in Vitâ Euripidis.
  111. Ἐπειδὴ ἔν τινι ἄλσει ϕροντιζων ἔτυχε. Quando forte fortunâ per nemus quoddam cogitabundus ambularet.
  112. Aridée, Macédonien, et Cratevas, Thessalien.
  113. Suidas, in Εὐριπίδης, et Manuel Moschopulus, in Vitâ Euripidis.
  114. Val. Maxim., lib. IX, cap. XII, ext. 4.
  115. Aulus Gellius, lib. XV, cap. XX.
  116. Vie des Poëtes grecs, pag. m. 98, 99.
  117. Sur le proverbe Κυνὸς δίκην. Canis vindictam. Adagior. chil. I, cent. VII, num. 47, pag. m. 245.
  118. Cùm Euripides in sylvâ quadam solus esset, et Archelaüs à venatu reverteretur, canes Euripidem cinctun discerpserunt devorâruntque. Erasm., Adagior. chil. I, cent. VII, num. 47. Il a tort de dire qu’ils le dévorèrent, ce que nous avons dit touchant le tombeau d’Euripide réfute cela.
  119. Voyez-le ci-dessus, citation (117).
  120. Chil. II, cent. VII, num. 88, pag. 561. Apostolius dit en général la même chose, cent. XVI, num. 70.
  121. In Vitâ Euripidis, pag. 27.
  122. Οῦ ϕασι καὶ Εὐριπίδην αὐτῷ συνακολουθῆσαι. Quo et Euripidem unà sequutum esse aiunt. Diog. Laërt, lib. III, in Plat., num. 6.
  123. Barnes., pag. 28, ex Scholiaste Eurip., et Joan. Meursio.
  124. Barnes., ibid.
  125. Diog. Laërt., in Platone, num. 6.
  126. Voyez la remarque (DD).
  127. Diog. Laërt., in Platone, num. 6. Cicéron, V de Finibus, dit le contraire ; mais comme Apulée observe que Platon alla deux fois en Italie, et la seconde fois après le voyage d’Égypte, il est aisé d’accorder Cicéron avec Hermodore, dans Diogène Laërce.
  128. Diog. Laërt., in Platone, num. 6.
  129. Barnes., in Vitâ Euripidis, pag. 30.
  130. Voyez Barnes., ibid, pag. 27.
  131. Menagius, ad Diog. Laërtium, lib. III, num. 6, pag. 140. Puisqu’il cite cela sans y trouver rien à redire, il est complice de la faute de Scaliger, et de celle de le Fèvre de Saumur.
  132. Vie des Poëtes grecs, pag. 97.
  133. Remarque (F), citation (39).
  134. Epist. VIII, lib. XI ad Famil.
  135. Ptolemæus Hephæst., lib. V, variæ Histor., apud Photium, pag. m. 485.
  136. Theo, in Progymnasmatis, cap. I, pag. 4.
  137. Lib. XV, cap. XX.
  138. C’est le vers 612 de l’Hippolyte.
  139. Voyez le Prince de Balzac, num. 262, pag. m. 191.
  140. Aristotel., Rhetor., lib. III, cap. X, pag. m. 464.
  141. Cicero, Officior. lib. III, cap. XXIX.
  142. Grotius, de Jure Belli et Pacis, lib. II, cap. XIII, num. 4. Dans la note, il applique sa maxime à Hippolyte.
  143. In Vitâ Eurip., pag. 22.
  144. Seneca, epist. CXV, pag. m. 452.
  145. Ὥσπερ ὁ Εὐριπίδης εἰπεῖν λέγεται πρὸς τοὺς τὸν Ἰξίωνα λοιδοροῦτας ὡς ἀσεϐῆ καὶ μιαρόν, Οὐ μέν τοι πρότερον αὐτὸν ἐκ τῆς σκηνῆς ἐξήγαγον ἢ τῷ τροχῷ προσηλῶσαι. Quemadmodum Euripides fertur Ixionem ut impium flagitiosemque conviciantibus dixisse, enimvero non antè eum è scenâ eduxi, quam rotæ affligerem. Plutarch., de Audiendis Poëtis, pag. 19.
  146. In Ranis, act. IV, scen. II, pag. m. 243.
  147. Ménagiana, pag. m. 119.
  148. Là même, pag. 120.
  149. Voyez les Pensées diverses sur les Comètes, num. 137.
  150. Plutarch., in Amatorio, pag. 756 : je me sers de la version d’Amyot.
  151. Relig. Medici, sect. XLVI. Vide notas in eum locum.
  152. Actes des apôtres, chap. XIX, vs. 24 et suiv.
  153. In Thesmophorias, pag. m. 777.
  154. Clem. Alexandrin., Admonit. ad Centes, pag. 50.
  155. Méthode de lire chrétiennement les poëtes, tom. I, pag. 173.
  156. Quin etiam Euseb., 14 Præpar., cap. 6, refert Anaxagoram ab Euripide Atheo idcircò impugnatum. Theoph. Raynaud., Theol. Natur., distinct. V, num. 155, pag. m. 525.
  157. Euseb., Præp., lib. XIV, cap. XVI, pag. 753.
  158. Barnes., Not. in Euripid. Sisyphi Fragm., pag. 492.
  159. Les fragmens de cette pièce contiennent le discours d’un homme qui nie tout net la providence, sous prétexte que les méchans sont plus riches que les gens de bien.
  160. In præfat. ad Excerpta, apud Barnes., in Vitâ Euripid., pag. 22.
  161. À la préface, pag. 110.
  162. Val. Maxim., lib. III, cap. VII, ext, num. 1.
  163. Lilius Gyraldus incogitanter nimis dixit quòd poëtam nostrum arrogantem et superbum Valerius Maximus prodat, quùm tamen nobilis is author in eo capite et loco quem Gyraldus designat, nihil omninò tale, imò planè contrarium statuat. Barnes., in Vitâ Euripidis, pag. 20.
  164. Ælian., Var. Hist., lib. V, cap. XXI.
  165. Apud Scholiasten Euripidis, in Medæam, vs. 9. M. Barnes, pag. 15, assure que Plutarque, dans la Vie d’Alexandre, rapporte la même chose, l’empruntant de Parméniscus. Je n’ai point trouvé cela dans Plutarque.
  166. Parmeniscus et Didymus, apud Scholiasten Euripid., ibid., vs. 273. Didymus cite Créophylus. Voyez Elien, Var. Hist., lib. V, cap. XXI, et Apollodore, Biblioth., lib. I.
  167. Barnes., in Vitâ Euripid., pag. 15.
  168. Apud Aristotel. Rhetor., lib. II, cap. XXIII, pag. 447.
  169. Biblioth., lib. I.
  170. Barnes., in Vitâ Euripid., pag. 15.
  171. Diodor. Sicul., lib. XIII, cap. CIII, pag. m. 554.
  172. Vie des Poëtes grecs, pag. 85.
  173. Miscellan., lib. I, cap. XIV.
  174. Ælianus, Var. Histor., lib. II, cap. VIII, où il faut lire ἐννεκοςήν et non pas ἕκτην, et alors on trouvera la 91e. olympiade. Voyez Schefférus, in hunc locum Æliani.
  175. Suidas, in ϕιλόκορος.
  176. Apud Diogen. Laërtium, lib. II, in Socrate, num. 44.
  177. Anonymus, in Argumento Orationis Isocratis cui titulus Busiris, pag. m. 322.
  178. Lib. II, in Socrate, num. 44.
  179. Daniel Heinsius, entre autres, in dedic. Tragœd. Senecæ, apud Barnes., pag. 15.
  180. Antiq. Lection., lib. XX, cap. XXVII, pag. m. 1135. (M. Barnes, pag. 23, a relevé cette bévue, qu’il attribue, non-seulement à Rhodiginus, mais aussi à Eustathius, in Homer., folio 1289, lin. 61.
  181. Œnomaüs, apud Eusebium, de Præparat. Evangel., lib. V, cap. XXXIII, pag. 228.
  182. Voyez la remarque (A).
  183. Dans la remarque (S).
  184. Ci-dessus, remarque (S), citation (123), pag. 364.
  185. Gesner., in Biblioth., folio 229 verso.
  186. Voyez le Catalogue de la Bibliothéque de Nicolas Heinsius, part. II, pag. 118.
  187. Gesner., Biblioth., folio 229 verso.
  188. Idem, ibid.
  189. Savoir : Phœnissæ, Hippolytus, Coronatus et Andromacha.

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