Dictionnaire des proverbes (Quitard)/Gonin

gonin. — C’est un maître Gonin.

Un homme fin, rusé, fourbe, Regnier a dit (sat. x)  :

Pour s’assurer si c’est ou laine, ou soie, ou lin,
Il faut en devinaille être maître Gonin.

Sur quoi Brossette fait cette remarque  : « Brantôme, vers la fin du premier volume de ses Dames galantes, parle d’un maître Gonin, fameux magicien, ou soi-disant tel, qui, par les tours merveilleux de son art, divertissait la cour de François Ier. Un autre maître Gonin, petit-fils du précédent, et beaucoup moins habile si l’on en croit Brantôme, vivait sous Charles IX. Delrio, tome ii de ses Disquisitions magiques, en rapporte un fait par où, s’il était véritable, le petit-fils ne cédait en rien au grand-père »[1].

Il y avait aussi, sous Louis XIII, un nouveau maître Gonin, habile joueur de gobelets qui se tenait sur le Pont-Neuf. Mais ce n’est pas la dextérité de ces personnages célèbres dans les rues de Paris qui a donné lieu à l’expression proverbiale. Elle est plus ancienne qu’eux. Le nom de Gonin d’ailleurs n’est point patronymique ; il vient de gone, qui signifiait particulièrement une robe de moine, dans l’ancienne langue romane, et il a servi à désigner ceux qui portaient cette robe. Un tour de maître Gonin, c’est proprement un tour de moine.

  1. Ce fait est que maitre Gonin ayant été condamné, en 1570, au supplice de la corde, par arrêt du parlement, usa si bien de son art magique, que le bourreau, qui croyait le pendre, pendit à sa place la mule du premier président. (Disquisit. mag., liv. iii.)