Dictionnaire des antiquités grecques et romaines/ACHELOÜS


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ACHELOÜS (Ἀχελῷος et Ἀχελώϊος). — Ce nom, dans la géographie ancienne, appartient à six fleuves 1[1], et il paraît avoir été à l’origine une appellation générale des eaux courantes ; les poètes, même d’une époque plus récente, l’ont employé figurativement dans ce sens (Acheloia pocula, dit Virgile 2[2]). Mais le plus célèbre fleuve de ce nom, et le seul qui joue un rôle dans la mythologie, est celui qui, sortant du Pinde, coule entre l’Acarnanie et l’Étolie, et se jette dans la mer Ionienne près des Échinades ; c’est aujourd’hui l’Aspro-Potamo. Cet Achéloüs est mentionné par Homère, qui lui donne l’épithète de ϰρείων, ce que Pausanias interprète par « le roi des fleuves 3[3] ». La célébrité de l’Achéloüs lui vint de ce qu’il était le plus grand fleuve de la Grèce, et que, sans avoir l’ampleur du Nil, il avait néanmoins fait des choses extraordinaires 4[4]. Son travail consistait dans les alluvions par lesquelles il joignit les Échinades au continent, phénomène qui excita l’admiration de l’antiquité 5[5]. Des traditions qui faisaient du fleuve le créateur des îles situées à son embouchure prirent une forme mythique dans la fable racontée par Ovide, d’après laquelle les Échinades sont des nymphes changées en îles par la colère d’Achéloüs qu’elles avaient oublié dans un sacrifice 6[6].

Quant à Achéloüs considéré comme personnage mythique, Hésiode le fait fils de l’Océan et de Téthys 7[7] ; selon d’autres, il est issu de Hélios et de Gaea 8[8]. On lui donne de nombreux enfants : 1° Les Sirènes, qu’il eut de Melpomène selon les uns 9[9], de Terpsichore suivant d’autres 10[10], ou de Sténope, fille de Porthaon, d’après une ancienne tradition 11[11] [sirènes]. 2° Callirhoé, épouse d’Alcméon et mère d’Acarnan qui fonda l’État d’Acarnanie. Poursuivi par Érinnys pour le meurtre de sa mère, Alcméon, qu’un oracle avait averti de chercher une terre que le soleil n’eût pas encore éclairée lorsque le crime avait été commis, se réfugia sur les alluvions de l’Achéloüs 12[12]. 3° La fontaine Castalie, au rapport de Panyasis dans son Héracléide 13[13]. 4° Deux fils qu’il eut de Périmède, fille d’Éole, et qui sont nommés Hippodamas et Oreste 14[14]. Suivant une autre version, Périmède (ou Périmèle) n’était pas mère, mais fille d’Hippodamas et l’une des Échinades, dont Ovide a raconté les amours avec Achéloüs et la métamorphose 15[15].

Suivant Ovide, Achéloüs donna un jour l’hospitalité à Thésée et l’instruisit de ses conseils 16[16]. Mais le grand événement de son histoire, ce fut sa lutte avec Héraclès pour la main de Déjanire, lutte fameuse par les récits des poètes et des mythographes 17[17]. Pour combattre son adversaire, le fleuve prit tantôt la forme d’un serpent, tantôt celle d’un taureau, puis celle d’un homme à tête de taureau. Mais Héraclès le vainquit et lui arracha une corne. Consacrée par les Nymphes et remplie par elles de fruits et de fleurs, la corne du fleuve devint la corne d’abondance [amalthea]. De honte, Achéloüs alla se cacher dans les roseaux de ses rives. Ce mythe a été expliqué dès l’antiquité dans le sens historique par Strabon 18[18] et par Diodore 19[19]. On y a vu une allusion à des travaux exécutés pour resserrer le lit du fleuve et dessécher ses rives afin de les rendre saines et fertiles. Achéloüs devint le symbole des

    De Achoebr. foed. orig. Glogan, 1854, 8 ; Cousinery, Monnaies de la ligue Achéenne, Paris, 1825 ; Merlecker, Achaicorum libri, III, Darmstadt, 1837 ; Droysen, Hellenismus, t. II, Hamburg, 1843, et les auteurs cités par Hermann, Lehrbuch der griech. Staatalterthum. 4e édit. Heidelberg, 1855, § 185 et sq.

  1. ACHELOÜS. 1 Pausan. VIII, 38 ; Strab. VIII, p. 342 ; IX, p. 434 ; X. p. 450 ; Schol. Iliad. XXIV, 616.
  2. 2 Aristoph. Lysist. 381 et Schol. ; Virg. Georg. I, 9 ; Artemidor. II, 38 ; Welcker, Griech. Götterlehre, III, p. 45.
  3. 3 Hom. Iliad. XVI, 194 ; Pausan. loc. cit. ; cf. Solin. Polyhistor. VII, 3.
  4. 4 Herodot. II, 10.
  5. 5 Thucyd. II, 101 ; Pausan. VIII, 21.
  6. 6 Metam. VIII, 576 sq.
  7. 7 Théog. 340.
  8. 8 Natal. Com. VII, 2 ; Serv. ad Virg. Géorg. I, 9.
  9. 9 Apollod. I, 3, 5.
  10. 10 Apollon. Argon. IV. 895, 896.
  11. 11 Apollod. I, 7, 10.
  12. 12 Thucyd. II, 102 ; Pausan. VIII, 24 ; Apollod. III, 7, 5.
  13. 13 Pausan. X, 8.
  14. 14 Apollod. I, 7, 3.
  15. 15 Metam. VIII, 689 sqq.
  16. 16 Metam. VIII, 546 sq.
  17. 17 Sophocl. Trach. 10 sq. ; Ovid. Met. IX, 1-58 ; Philost. Jun. 4 ; Diod. Sic. IV, 34, 35 ; Hygin. Fab. 31, 33 ; Apollod. 1, 8, 1 ; 11, 7, 5.
  18. 18 X, 2.
  19. 19 Loc. cit.