Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS I. Le mot

Dictionnaire de théologie catholique
Letouzey et Ané ( Tome 14.1 : ROSNY - SCHNEIDERp. 250-254).

SACREMENTS. — L’objet de cet article ne saurait être que les sacrements en général. Chaque sacrement, considéré en particulier, a déjà été l’objet d’une étude spéciale. Et encore, plusieurs questions intéressant les sacrements en général ont été précédemment étudiées, notamment celles du Caractère sacramentel, t. ii, col. 1698 ; de la Fiction dans les sacrements, t. v, col. 2291 ; de I’Intention dans l’administration et l’usage des sacrements, t. vii, col. 2271 ; de la Matière et forme dans les sacrements, t. x, col. 535 ; du Ministre des sacrements, ibid., col. 1776 ; de I’Opus operatum, t. xi, col. 1084 ; de la Reviviscence des sacrements, t. xiii, col. 2818. Tenant compte de ce qui est déjà acquis, nous n’y reviendrons que dans la mesure où il serait utile de marquer une précision nouvelle.

Nous étudierons successivement :
I. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS I. Le mot|Le mot.]]
II. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS II. La notion 1. Dans l’Ecriture Sainte|La notion (col. 494).]]
III. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS III. L’institution et le nombre septénaire. 1. L’intention du Christ suggérée par l'étude des sacrements eux-mêmes et de leur rôle respectif dans la vie surnaturelle de l’homme|L’institution et le nombre septénaire (col. 536).]]
IV. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS IV. Les explications théologiques relatives à l’institution des sacrements par le Christ et au nombre septénaire. 1. Explications hétérodoxes|Les explications théologiques (col. 558). ]]
V. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS V. Dogme et théologie de la causalité sacramentelle. 1. Les premiers tâtonnements des théologiens dans l’exposé et l’explication du dogme de la causalité des sacrements|Le dogme et la théologie de la causalité sacramentelle (col. 577).]]
VI. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS VI. Les effets des sacrements|Les effets des sacrements (col. 621).]]
VII. [(Dictionnaire de théologie catholique/SACREMENTS VII. Validité, licéité, fructuosité :problèmes moraux et canoniques 1. Définitions|La validité, la licéité, la fructuosité et les problèmes moraux et canoniques s’y rapportant (col. 635).]]

I. Le mot.

Le terme grec musterion. —

Dans la théologie grecque, c’est le terme jjluctt/)P(.ov qui désigne les sacrements. Aujourd’hui encore, les théologiens orientaux dissidents n’emploient pas d’autre expression. Voir Kimmel, Monumenta fidei Ecclesiæ orienlalis, pars I a, Iéna, 1850 : Confessio orthudoxa (de Moghila), pars l a, q. xcvm sq., p. 170 sq. ; Synodus hierosolymitana, p. 344 ; Décréta synodi Constant inop., p. 404 ; Acta synodi apud Giasium (Jassy), p. 414 ;

Dosithœi confessio, p. 448 ; et pars II a, Iéna, 1850 : Metrophanis Critopuli confessio, c. v, p. 89 sq. ; c. vii, p. 107 ; c. xi, p. 140 ; c. xxii, p. 201.

Le sens primordial de jjwo--7]ptov est « secret » ; c’est le sens qu’on trouve chez les classiques, poètes, littérateurs, historiens, philosophes. Par extension, (xuo-TY)ptov, au pluriel surtout, se disait des initiations religieuses qui imposaient le secret le plus absolu. D’où l’on peut déduire que la définition donnée par Théodoret à propos de Rom., xi, 25, est juste : M’jo-T^p’.ov tazi tô [AT] TtSai yvcôpi.u, ov àXXà u.ôvov toîç Œwpouijisvoti ;, P. G., t. lxxxii, col. 180 B.

La Bible retient ce sens primitif et ne fait que lui ajouter des nuances secondaires. On le trouve 45 fois dans les écrits de l’Ancien et du Nouveau Testament : Dan., 9 fois ; Judith, 1 fois ; Eccli., 2 fois ; Prov., 1 fois ; Sap., 3 fois ; Tob., 1 fois ; II Mac, 1 fois ; Apoc., 4 fois ; Mat th., Luc, Marc, chacun 1 fois ; et 20 fois dans les épîtres de saint Paul. D’après F. Prat, La théologie de saint Paul, t. ii, Paris, 1912, p. 394, on peut ramener à trois acceptions les diverses nuances qui se sont greffées sur la notion générique : 1° Secret de Dieu relatif au salut des hommes par le Christ, secret aujourd’hui dévoilé : Rom., xvi, 25 ; 2° Sens caché, symbolique ou typique, d’une institution : Eph., v, 32 (sens du mariage), d’un récit, Dan., ii, 18, 27, 30 (sens du songe de Nabuchodonosor), d’une chose ou d’un nom ; Apoc, i, 20 (sens des sept étoiles et des sept candélabres) ; ibid., xvii, 5-7 (sens du nom de la grande Babylone) ; 3° Action cachée : II Thess., ii, 7 (le mystère d’iniquité), ou qui n’est pas connue, I Cor., xv, 51 (le mystère de la résurrection future). On pourrait indiquer d’autres exemples.

Rien d’étonnant donc que la langue ecclésiastique se soit emparée de ce mot désignant philosophiquement la nature intime et secrète d’une chose, pour l’appliquer au rite symbolique produisant la grâce qu’il figure, puis aux vérités incompréhensibles qui dépassent les lumières de la raison.

Toutefois, dans la sainte Ecriture, on ne trouve pas le mot (jio<TT7)pt.ov, même quand il est traduit par sacramentum, appliqué au rite sacré qui constitue le sacrement. Même dans Eph., v, 32. le mot sacramentum ne vise pas le « sacrement » du mariage. Voir ici Mariage, t. ix, col. 2070. Les seize fois où ji.’joT/jpi.ov est traduit par sacramentum ne comportent aucune nuance spéciale, modifiant le sens général de mysterium. Dans l’Ancien Testament : Tob., xii, 7 ; Sap., ii, 22 ; vi, 24 ; xii, 5 ; Dan., ii, 18 ; n. 30 ; ii, 47 ; iv, 6 ; dans le Nouveau Testament, Eph., i, 9 ; iii, 3 ; m, 9 ; v, 32 ; Col., i, 27 ; I Tim., iii, 16 ; Apoc, i, 20 ; xvii, 7.

Avant le ive siècle le mot jjwottjplov garde sous la plume des écrivains chrétiens son sens classique de chose sacrée, mystérieuse.

Chez les Pères apostoliques, en effet, nous trouvons peu de lumières : MoaTrjpiov est absent de la Lettre aux Corinthiens de saint Clément, de l’épître du pseudo-Barnabe, du Pasteur d’Hermas. Dans la Didachè, xi, 11, on lit que le vrai prophète agit eîç fi.ijo-Tirpi.ov >cGo-[i, ixov sxxXï)o-iocç, ce qui est vraisemblablement une allusion à Eph., v, 32. Funk, Patres apostolici, t. i, p. 28. Pour Ignace d’Antioche, la mort du Christ est le mystère de notre salut, puisqu’elle est le principe de notre foi. Magn., ix, 1, ibid., p. 258. « La virginité de Marie, son enfantement, avec la mort du Sauveur, sont les trois mystères de clameur, qui ont été perpétrés dans le silence de Dieu. » Eph., xix, 1, ibid., p. 228. Peut-être Trall., ii, 3, 81axôvouç…u.uo-T7)pteov’I. X., offrirait-il un sens plus précis, encore qu’il soit difficile d’y voir une mention de l’administration de certains sacrements (cf. I Cor., iv, 4), Funk, ibid., p. 244. Dans l’Épitre à Diognète, à part peutêtre iv, (i. 0so<Te6£’! aç (i.uaTr, ptov, ibid., p. 396, rien de saillant dans les autres emplois de pL’jrrT7jp !.ov, vii, 2 ; vin, 11) ; x, 7 ; xi, 2, 5, i’ft/7L, p. 402, 404, 408, 110.

Chez les I’ères apologistes, il serait pareillement difficile de trouver le mot |i.ua-rr ; piov employé avec le sens moderne du mol o sacrement ». Le sens ordinaire se rapporte aux « mystères » païens, avec une note d’infamie à l’égard des faits et Restes attribués aux faux dieux. Cf. Athénagore, Lcgatio, n. 4 (mystères d’Eleusis), n. 28, 32, P. G., t. vi, col. 897 B, 956 C, 964 A ; Théophile, Ad Autolycum, I. I, n. 9 (mystères d’Osiris), ibid., col. 1037 C ; Tatien, Adv. Grsecos, n. 8, ibid., col. 825 A. Justin est plus abondant. Dans le Dialogue, « il emploie fréquemment ii, u(rr()piov, « sens caché », comme synonyme de parabole, de symbole, de type. Il dit par exemple que « le mystère de l’agneau était le type du Christ ». Dial., xl, P. G., t. vi, col. 562 B. Il appelle mystère le sens typique ou allégorique de certaines prophéties. Dial., xxiv, xi.iv, i. wiii. i.xxviii, i.xxxv, cxxxviii, col. 528 B, 569 B, 633 D, 660 C, 680 A, 793 A. Il parle assez souvent du mvstère de la croix. Dial., lxxiv, xci, evi, c.xxxi ; Apol., i, xiii, col. 649 B, 692 B, 721 C, 780 C, 318 A, c’est-à-dire de sa signification et de sa valeur sotériologique. Dans V Apologie, il signale l’immoralité des mystères païens, cf. Apol., i, xxv, xxvii ; Apol., II, xii, col. 365 A, 372 A, 464 C ; il mentionne, en l’approuvant, un écrit destiné à montrer que le christianisme ne connaît pas ces sortes de mystères, Apol., i, xxix, col. 373 A ; en même temps, il soutient la thèse que les prophètes mal compris ont suggéré certaines idées aux inventeurs des mystères de Bacchus, Apol., i, liv, col. 409 AB, et que les mystères de Mithra sont une imitation diabolique du rite chrétien de l’eucharistie. Apol., i, lxvi, col. 429 A. Cf. F. Prat, op. cit., p. 392-396.

En ce qui concerne saint Irénée, la traduction latine de son ouvrage offre des exemples de mysterium, traduction vraisemblable de jjma-rrypiov. Voir plus loin, col. 492. À l’exemple d’Irénée, saint Hippolyte n’emploie guère le mot « mystère » qu’en connexion avec l’hérésie des gnostiques qui s’étaient appropriés ce terme. Philosophumena, Proœmium, P. G., t. xvic, col. 3017 B ; cf. S. Irénée, Cont. luvr., t. I, c. i, n. 1 ; c. xx, n. 3, P. G., t. vii, col. 437, 657.

Chez Clément d’Alexandrie et chez Origène, nous trouvons une première adaptation du mot mystère aux croyances et pratiques religieuses du christ ianisme. Sans doute, ces auteurs connaissent les « mystères » de la gnose ; mais ils lui ravissent ce mot pour lui donner un sens chrétien. Clément appelle mystères le culte rendu aux faux dieux. Cohortalio ad gentes (Protreptique), c. iv ; cf. c. ii, P. G., t. viii, col. 152 li, 76 15. C’est que le mystère est une représentation des choses sacrées par des signes sensibles. Ainsi les mystères des Égyptiens. Strom., t. V, c. vii, P. G., t. ix, col. 68 H. Cꝟ. t. II, c. xiv, t. viii, col. 997 C. Le passage se fait donc facilement à la désignation des vérités et des pratiques chrétiennes par le mot mystère. L’initiation chrétienne constitue les « petits mystères » préparant la connaissance des grands. Strom., t. IV, c. I, t. viii, col. 1216 C. Ainsi les « mystères » du Christ sont cachés aux profanes, Strom., 1. Y, c. ix, t. ix.col. 88 C. Qui plus c t, ils ont été cachés aux prophètes eux-mêmes, et le Christ ne les a livrés qu’en paraboles. Strom., VI, c. xv, t. ix, col. 348 C. Commentant Is., n, K), Clément enseigne qu’on ne doit pas révéler les « mystères de la foi ». Strom., t. V, c. x, t. ix, col. 93 sq. Et tous ces mystères doivent être enseignés mystiquement, zy. vjnzrjpiy. |A>.><rnxcô< ; TrocpaStSoToa, Strom., t. I, c. i, t. viii, col. 701 C.

On pourrait relever chez Origène une exégèse analogue du mot « mystère ». Il suffit de rappeler ici la

distinction des simples et des parfaits, voir ici t. xi, col. 1514 sq., pour saisir toute l’adaptation faite au christianisme des mystères de la gnose.

On comprend plus facilement comment désormais le mot mystère, sans perdre aucune de ses autres significations, pourra être appliqué aux rites sanctificateurs. Saint Jean (Jirysostome l’explique parfaitement : « Il y a mystère, quand nous considérons des choses autres que celles que nous voyons… Autre est ici le jugement du fidèle, autre celui de l’infidèle. Moi, j’entends que le Christ a été crucifié et aussitôt j’admire son amour pour les hommes ; l’infidèle l’entend aussi et estime que ce fut folie… L’infidèle connaissant le baptême, pense que ce n’est que de l’eau ; moi, ne considérant pas simplement ce que je vois, je contemple la purification de l’âme effectuée par l’Ksprit-Saint. L’infidèle estime le baptême comme une simple lotion faite sur le corps ; moi, je crois qu’il rend aussi l’âme pure et sainte, et je pense au sépulcre, à la résurrection, à la sanctification, à la justice, à la rédemption, à l’adoption des fils, à l’héritage céleste, au royaume des cieux, au don du Saint-Esprit. » In / am epist. ad Cor., hom. i, n. 7, P. G., t. lxi, col. 55. On trouve semblables doctrines chez saint Épiphane, Hwr., xl, n. 2, P. G., t. xi.i, col. 680 CD.

Évolution sémantique du mot » sacramentum » chez les Pères latins.

— On peut se demander comment le mot jjuj<rrr)pt.ov a été traduit de préférence par sacramentum, alors que d’autres termes, tel arcanum, pouvaient paraître plus indiqués.

La solution de ce problème dépend, avant tout, de l’usage qui fut fait, en langue latine, du mot sacramentum appliqué aux choses religieuses du christianisme. Les auteurs qui se sont appliqués à cette étude sont assez nombreux. Dans l’introduction générale du recueil Pour l’histoire du mot « sacramentum », I. Les anténicéens, Louvain, 1924, le P. de Ghcllinck en fait une énumération exhaustive, depuis les lexiques et dictionnaires philologiques jusqu’aux travaux spéciaux et aux monographies, en passant par les dictionnaires bibliques et théologiques et les histoires des dogmes. Deux études monographiques paraissent surtout devoir retenir l’attention, celle de Valentin t irone, Sacramentum oder Begrif] und Bedeulung von Sac rament bis zur Scholastik, Brilon, 1853, et celle de H. von Soden, Moa-^ptov und Sacramentum in der erslen drci Jahrhunderten der Kirche, dans la Zeitschrijt fur die A’. T. Wissenschajt, t.xii, 1911, p. 188-227. On doit ajouter aujourd’hui les trois monographies du recueil publié sous la direction du P. de Ghellinck, savoir Tcrtullien, par Emile de Backer, Cyprien et ses contemporains, par J.-B. Poukens, S. J., et Les derniers anténicéens, par G. Lebacqz, S. J., et J. de Ghellinck, S. J.

Dans la langue latine, sacramentum désigne juridiquement l’argent qui, déposé à X’œrarium par la partie qui perd le procès, est consacré par le fait même à la divinité. Militairement, c’est le serment prêté par les recrues à leur entrée au service. Mais dépôt ou serment sont des engagements vis-à-vis du dieu ; argent déposé et personne assermentée sont désormais chose ou personne consacrées. L’existence du sacramentum militiæ, parfois attestée par un signe (/iilci signaculum) a exercé par son symbolisme une certaine influence sur la notion de mystère qui s’est attachée au concept du sacrement chrétien.

1. Tertullien.

En cette matière, Tertullien fut un initiateur, dont la prépondérance s’affirme incontestée. Sa pensée sur le sacramentum marque une évolution certaine : elle part du sens classique de sacramentum militise. S’inspirant de la militia Christi, si souvent exploitée par saint Paul, Tcrtullien applique le mot sacramentum au baptême, qu’il considère comme le serment par excellence, contradictoirement opposé aux obligations de l’idolâtrie ; il y voit une consécration, un engagement comparable à la devolio et ouvre ainsi la voie à l’adaptation ultérieure du mot sacramentum au concept d’initiation, chrétienne ou païenne, à l’objet de la promesse baptismale, la foi, et à la synonymie de sacramentum et de signaculum. Ce qui étend le sens de sacramentum aux choses et aux actions que nous appellerions aujourd’hui sacramentaux. Voir ce mot, col. ^65.

C’est à cet instant de l’évolution de la pensée de Tertullien que le mot se charge du concept de « mystère », car les rites d’initiation sont des « mystères » : ils ont un caractère symbolique et une efficacité purificatrice et eschatologique. Sacramentum ne sera donc plus simplement le serment ou l’initiation, mais l’objet de ce serment ou de cette initiation ; il traduira les idées de foi, de doctrine catholique, de discipline. L’idée de mystère contenue en germe dans le concept du serment baptismal se fortifiera au contact des concepts grecs de teXety] et de [i.ij<TT7)p’.ov. Les sens nouveaux attachés au mot sacramentum accusent de plus en plus l’idée de mystère et finiront par la dégager complètement, avec le sens de rcs occulta, de res mysteriosa et sacra.

Pour mieux marquer la progression en ce sens de la pensée de Tertullien, les textes de cet auteur, dans lesquels on peut relever le mot sacramentum, au nombre de 134, ont été divisés par É. de Backer en deux groupes : groupe sacramentum-serment (84 exemples), avec les idées successives de serment militaire ou autre, de rite d’initiation aux mystères, de religion au sens objectif, de vérité et de doctrine religieuse, de consécration (au sens étymologique de sacramentum), de rite et sacrifice sacramentel, de rite non sacramentel et de marque ou garantie de la foi (signaculum) ; — groupe sacramentum-mystère (50 exemples), avec les idées successives de symbole, figure, allégorie, de mystère ou chose secrète et cachée, de disposition, plan, ordre divin, de prophétie.

Deux sacrements — au sens actuel du mot — le baptême et l’eucharistie, trouvent place, dans la pensée de Tertullien, en ces significations diverses du même mot sacramentum. Dans le sens de serment militaire, allusion au baptême, De spect., c. xxiv, P. L. (édit. de 1844), t. i, col. 656 AH ; avec la nuance d’abjuration, De idol., c. vi, col. 608 B ; avec le sens de fanion, étendard, ibid., c. xix, col. (i !)0 B ; dans le sens de chose sanctifiante (application au baptême), dans De bapt., c. iv, col. 1204 A ; ibid., c. v, col. 1205 B ; (application au désir du baptême dans la foi justifiante), ibid., c.xii, xiii, col. 1213 B. 1214 C ; avec le sens de consécration (allusion à l’eucharistie), Adv. Marcionem, t. V, c. viii, t. ii, col. 489 A ; dans le sens des rites purement extérieurs qui servent de cadre à l’administration des sacrements divins, De prxscript., c. xl, t. ii, col. 54 A (ici il semble que Tertullien approche de l’idée théologique du rite sensible, auquel est attachée la production d’effets surnaturels, ce qui est le concept essentiel du sacrement chrétien) ; cf. De bapt., c. i, iii, ix, t. i, col. 1197 A, 1202 C, 1209 B ; avec la pensée des rites qui accompagnent l’administration du sacrement de baptême, De virg. vel., c. ii, t. ii, col. 891 A ; avec allusion aux signes sensibles et aux effets des sacrements de l’initiation solennelle des adultes, Adv. Marcionem, t. I, c. xiv, col. 262 ; avec indication du baptême, de la matière et des effets du baptême, ibid., t. I, c. xxviii, col. 280 AB ; avec désignation du baptême qui marque d’un signe les fidèles et allusion à la prophétie de Malachie relative à l’eucharistie, ibid., t. III, c. viii, col. 353 ; avec indication très nette des deux sacrements, baptême et eucharistie, ibid.A. IV, c. xxxiv, col.442 C ; avec indication, en général, des sacrements chrétiens, notamment le baptême et l’eucharistie, De resur., c. ix, t. i, col. 806 AC ; Exhort. cast., c. vii, t. ii, col. 923 A ; De corona., c. iii, col. 79 A ; De pudic, c. ix, col. 997 C ; c. x, col. 1000 BC ; c. XV, col. 1009 C. On a indiqué à Sacramentaux quelques textes se rapportant à cette signification ; cf. col. 467.

Dans un certain nombre de ces exemples, notamment De pnvscripl., c. xl, et De baptismo, c. i, iii, ix, « sinon formellement, du moins en fait, les grandes lignes du concept sacramentel, reprises plus tard par saint Augustin, sont désormais fixées ». De Backer, op. cit., p. 148.

2. Chez saint Cyprien et les écrivains qui gravitent autour de lui.

Ici, l’on n’a plus à observer d’évolution dans la pensée des écrivains ecclésiastiques sur le mot sacramentum. Les différentes significations sont acquises. H. von Soden a pu dire que, si le mot sacramentum, appliqué à nos rites, est vraiment dérivé du sens militaire de serment, Cyprien marque l’aboutissement de cette évolution, dont Tertullien est le point de départ. Les traductions bibliques anciennes sont une confirmation de ce fait. J.-B. Poukens a recueilli dans les œuvres de Cyprien et de ses contemporains, Novatien, Firmilien, Némésien, le diacre Pontius et quelques anonymes, 116 exemples de l’emploi du mot sacramentum. On y retrouve les deux acceptions fondamentales de sacramentum : sacrementserment et sacrement-mystère. Et même, dans le sens de sacrement-mystère, on découvre nettement deux sens assez divergents : le sacrement-mystère proprement dit et le sacrement-figure, symbole, signe. Non pas certes qu’on trouve déjà au iiie siècle notre concept théologique de sacrement, signe et cause de la grâce : mais la conception de « choses sanctifiantes » se trouve déjà d’une manière vague présente à l’esprit de Cyprien et de ses contemporains.

Le sens de serinent militaire est encore très vivant et, en dépendance de ce sens primitif et classique, les sens de serment, d’initiation ou de profession de foi, d’obligation, d’engagement. De ce chef, on trouve une allusion très nette au baptême (sacramentum interrogare, dans Sententise episcoporum, édit. Hartel, p. 437) ; à la profession de foi baptismale, Epist., i.iv, n. 1, p. 621, bien plus à la profession de foi baptismale en la Trinité, Epist., lxxiii, n. 5, p. 782. La catégorie de sacrement-mystère et mieux sacrement-signe, avec ses différents dérivés, symboles, figures, révélation, précepte, ne contient guère d’application directe du mot sacramentum aux sacrements proprement dits, tels que nous les concevons aujourd’hui. Tout au plus, peut-on signaler le sacramentum calicis, allusion évidente à l’eucharistie. Epist., lxiii, n. 1-2, p. 702 ; cf. ibid., n. 13, p. 712. Cependant, dans cette catégorie, de loin la plus nombreuse, le concept de signe est mis en relief. Or, ce concept deviendra plus tard un des éléments de la définition fies sacrements.

Ce qui est plus intéressant encore chez ces auteurs, c’est qu’on y trouve le mot sacramentum désignant expressément les sacrements proprement dits, non certes dans la plénitude de la signification actuelle, mais déjà avec le sens très déterminé de « moyens producteurs de la grâce ». Cela surtout pour le baptême : Cyprien, Ad Quirinum, Testimoniorum I. III, édit. Hartel, p. 35 (il s’agit ici de sulutaria sacramenta, au pluriel, parce que Cyprien y parle aussi vraisemblablement de l’imposition des mains, qu’on administrait ensemble avec le baptême) ; Ad Demetrianum, n. 26, p. 370 (passage dans lequel le mot sacramentum présente un sens discuté des auteurs, mais que Poukens estime devoir interpréter du baptême lui-même, cf. op. cit., p. 207) ; Epist., lxix, n. 12, p. 761 ; lxxiii, n. 22, p. 795 ; Epist., lxxv (en réalité de Firmilien), n. 9, p. 810 ; ibid., n. 13, p. 819 ; ibid., n. 17, p. 821 ; l’auteur de Y Ad Novatianum, e. iii, édit. Hartel, p. 55 (ici le pluriel sacramenta fait allusion, outre le baptême, à d’autres sacrements) ; l’auteur du De rebaptismate. c. x, p. 81 ; la Passio SS. Mariani et Jæobi, n. 11, édit. von Gebhardt, p. 144, 1. 9 (utriusque sacramenti = baptême de sang, baptême d’eau).

Mais les exemples existent aussi pour le baptême et la confirmation réunis : Cyprien, Epist., lxx, n. 3, édit. Hartel, p. 770 ; lxxii, n. 1, p. 775 ; lxxiii, n. 20, p. 794 ; ibid., n. 21, p. 795 ; Sententim episc, n. 5, p. 139. Le premier et le troisième de ces passages ne se comprennent qu’en fonction de la théorie de Cyprien sur l’admission des hérétiques convertis : il faut les rendre à la vraie foi, non seulement par l’imposition des mains, mais par omnia sacramentel.

Enfin l’eucharistie est clairement indiquée en quelques autres textes : Cyprien, De catholicæ Ecclesise unilate, c. xv, p. 224 ; De lapsis, c. xxv, p. 255 ; De zelo et livorc, c. xvii, p. 131 ; Epist., lxiii, n. 14, p. 713 (précepte d’employer le vin pour le saint sacrifice ) ; ibid., n. 10, p. 714 ; la Passio SS. Mariani et Jæobi, n. 8, édit. von Gebhardt, p. 141, 1. 5. Pour d’autres textes, dans le sens de sacramentaux, voir ce mot, col. 467.

3. Les derniers auteurs anténicéens : Arnobe l’Ancien, Lactance, Commodien de Gaza, la traduction latine de saint Irénée.

Ce sont les auteurs étudiés dans la troisième partie du recueil de J. de Ghellinck.

Chez Arnobe, le mot sacramentum est employé presque uniquement dans son sens classique et païen de sacrement-serment. Adv. nationes, I. II, c. v (salutaris militiee sacramenta), P. L., t. v, col. 810 B ; 817 A ; t. III, c. vi (sacramenta… numinum), col. 944 A, et approximativement, t. IV, c. xx (sacramenta eondicunt), col. 1040 A. On note un sens se rapprochant de doctrine mystérieuse, supérieure, preuve du christianisme (immensi nominis hujus (Christi) sacramenta diffusa), t. II, c. v, col. 816 B, et enfin le sens de sacrement-mystère (verilatis absconditts sacramenta), t. I, c. iii, col. 24 A. Voir G. Lebacqz et J. de Ghellinck, op. cit., p. 226-234.

Lactance nous présente le mot sacramentum sous un jour nouveau. On trouve chez lui vingt-six exemples du mot sacrement : vingt-trois fois dans les Institutiones, deux fois dans le De opifteio Dei et trois fois seulement dans YEpitome. Dans ce dernier ouvrage, qui est un résumé des Institutions, on rencontre des synonymes et des périphrases utiles pour l’intelligence du mot sacramentum. Mais vingt-quatre fois sur vingt-six, le mot gravite autour d’une même signification fondamentale : « D’après Lactance lui-même, on peut donner, du mot sacramentum tel qu’il l’entend, la description suivante : c’est la seule vraie doctrine (sacramentum verilatis), qui ne peut être connue que par révélation (mysterium sacramenti) et qui ouvre des aperçus inconnus de la seule raison humaine, sur la nature de Dieu (sacramentum Dei), sur les rapports du Fils avec le Père (sacramentum natiuitatis sase), sur les destinées de l’homme (sacramentum liominis)vi du monde entier (sacramentum mundi et hominis) : doctrine mystérieuse, parce que révélée, et sacrée, parce que venant de Dieu. (Test tout le thème des Institutions et de YEpitome… Quant aux autres sens du mot, qui apparaissent à l’état isolé, nous n’en rencontrons que deux, le premier se traduisant par « rite symbolique ». (sacramentum ignis et aqiur), Inslil.. t. ii, c. ix (x), P. L., t. vi, col. 310 A, le second par < engagement sacré i (casti et inviolabilis cubilis sacramenta), Epitome, lxi (i.xvi), col. 1080 AH. Lebacqz-de Ghellinck, op. cit.. p. 205. Un seul cas représente donc, chez Lactance. l’évolution du mot siicranwntum dans le sens de rite sacré opérant le salut. Cet auteur est dès lors de minime importance dans le présent sujet.

Commodien de Gaza n’emploie qu’une fois le mot sacramentum, au vers 230 du Carmen apologeticum : sacramenta legis amittunt (Judeei), les Juifs perdent l’intelligence des prophéties relatives au Messie. Dans un autre vers, sacramenta de Sap., ii, 22, est remplacé par sécréta ; cette exégèse indique le sens que lui accorde Commodien. Un troisième passage rend par mijsterium le sens de sacrement, Inslrucliones, t. I, xxxviii, vers 1, P. L., t. v, col. 230. Les deux autres textes dans le Corpus de Vienne, t. xv, p. 129, 148. Lebacqz-de Ghellinck, p. 267-269.

La traduction latine du Contra hæreses d’Irénée (dont la date — fort approximative — peut se placer « entre le début du iiie siècle et le premier quart du v siècle) n’offre, à première vue, rien de bien particulier. La nature même du sujet traité par Irénée aurait dû amener plus souvent sous la plume de son traducteur le mot sacramentum. Or, contre une cinquantaine de cas où se rencontre le mot mijsterium, cinq seulement donnent sacramentum, avec le sens de sacré, mystérieux (plus exactement sacramenta, au pluriel), Cont. hter., t. II, c. xxx, n. 7, P. G., t. vii, col. 820 B ; cf. n. 6, col. 818 C (il s’agit des créatures spirituelles) ; t. IV, c. xxxv. n. 3 (les sacramenta des prophètes s’opposent à ceux de la gnose), col. 1088 B et C. Enfin, au 1. III. c. i, les sacramenta des apôtres, c’est-à-dire les mystères enseignés par eux, sont mis également en opposition avec les mystères de la gnose, col. 9Il Ji. Il semble bien, en l’absence du texte grec, que ce soit toujours le mot y.iùorr]çioi que le traducteur rende par son équivalent latin mysterium et parfois sacramentum. Si le traducteur avait employé la langue de Tertullien, de Cyprien, d’Hilaire ou d’Augustin, nul doute que sacramentum eût paru aussi fréquemment que mysterium. Mais jamais chez le traducteur d’Irénée, sacramentum ne se présente nettement avec le sens de rite sacré, de « sacrement », au sens moderne du mot. Lebacqz-de Ghellinck, p. 272 sq.

Les Actes des martyrs — un exemple dans les Acta sancti Maximiliani et trois dans les Acta sancti Marcelli — se réfèrent au sens de « serment militaire » et n’intéressent pas directement la présente recherche. Ibid., p. 281-288.

Enfin, les premiers documents donatistes fournissent trois exemples de l’emploi du mot sacramentum, sacramenta équivalant dans le premier (Acta martyrum Saturnini, 2, P. L., t. viii, col. 690 À et 705 A) à Scriptura sacra. Plus loin, col. 691 A, dominica sacramenta ne peut signifier que l’office liturgique du dimanche. Mais voici que, dans son réquisitoire contre les catholiques, l’auteur affirme la nullité des sacrements de ses adversaires : ce sens est très net puisqu’on accuse le pécheur de « célébrer des mystères pour la perte des misérables, cum erigit altare sacrilegus, célébrai sacramenta profanus, baptizat reus », etc. Acta martyrum Saturnini, 19, col. 702 C. Qu’il s’agisse ici de l’administration des sacrements en général ou de la célébration de l’eucharistie en particulier, peu importe : nous tenons le sens actuel de sacramentum.

Le Sermo de passione Donati fournit également trois exemples de l’emploi du mot sacramentum. L’auteur y parle tout d’abord des déserteurs des sacrements célestes, sacramentorum cœlestium desertores. Serm., 2. P. L., t. viii, col. 735 C. On peut traduire par sacrements divins, ou par serments divins. Un peu plus loin, il s’agit des mystères liturgiques : profanantur sacramenta. 3. col. 751 H : il s’agit de profanation des mystères liturgiques dans la basilique dont s’emparent de force les légionnaires. Le sermon a été pro nonce, en elTet.au joui’anniversaire. 12 mars 320 ( ?), où la force armée avait enlevé aux donatistes leurs églises. Le dernier texte de la Passio Donati présente, dans une description pathétique, un jeune catéchumène qui demande le baptême, parce qu’il est encore expers sacramentorum, au milieu de la scène de violence et de carnage dont l’église est le théâtre. Ibid., 1 1, col. 757 A.

Un dernier texte, peu sur, parle de ceux qui n’ont pas livré le sacrement, et sacramentum non tradiderunt : il s’agit vraisemblablement de la Bible. Pseudo-Cyprien, Epist., iii, édit. Hartel, p. 274. Voir Lebacqzde Ghellinck, p. 289 sq.

4. Saint Hilaire.

Avec saint Hilaire, au ive siècle, le mot sacramentum s’adapte déjà parfaitement au signe efficace producteur de la grâce. C’est ainsi que l’évêque de Poitiers parle des sacrements de l’Église, Tract, in ps. CXXXI, n. 23, P. L., t. ix, col. 7Il H. Il appelle formellement le baptême un sacrement, In ps. lxvii, n. 33 ; CXVIII, lit. iii, n. 5 ; cxxxri, n. 7, col. 466 G, 519 A, 780 B ; ou encore le sacrement de la nouvelle naissance, In ps. xci, n. 9, col. 499 1) ; de la nouvelle génération, In ps.cxxix, n. 8, col. 723 A ; le sacrement de l’eau et du feu, In Matth., c. iv, n. 10 ou encore, au pluriel, les sacrements du baptême et de l’Esprit (peut-être ici s’agit-il du baptême et de la confirmation), ibid., n. 27, P. L., t. ix, col. 931 B, 942 B. L’eucharistie, elle aussi, est un sacrement, le sacrement de la chair et du sang, De Trinitate, t. VIII, n. 17, qu’il appelle encore le sacrement de la parfaite unité, ibid., t. x, col. 249 B ; cf. n. 16, col. 248 B, ou encore sacrement de la divine communion. In ps. LXVIII, n. 17, t. ix, col. 480 BD. Ce sont là les sacrements du salut humain, De Trinitate, t. V, n. 35, t. x, col. 153 B, sacrements de la grâce nouvelle que le vieil homme, attaché au péché, ne saluait recevoir, In Matth., c. ix, n. 4, t. ix, col. 963 C, mais sacrement du pain céleste qu’on reçoit en foi de la résurrection future, In Matth., c. iv, n. 3, t. ix, col. 963 B.

Ce n’est pas que saint Hilaire ait rompu avec les autres significations du mot sacrement. On retrouve, en effet, très nettement la signification du sacrementserment. In ps. IXII, n. 12, P. L., t. îx. col. 406 CD ; xci, n. 2, col. 495 A ; ibid., n. 8, col. 499 A ; v.xviu. lit. xiv, n. 6, col. 592 A ; cxxxi, n. 4, col. 730 B ; ibid., n. 12, col. 735 C ; In Matth., c. v, n. 23, col. 940 A. Toute proche de cette signification, celle de profession de foi, signe sacré de salut : la foi au Fils est un sacrement, De Trinitate, t. VII, n. 6, t. x, col. 201 H ; la croix est un sacrement de la foi. In Matth., c. xi, n. 25, t. ix, col. 977 B ; ainsi que les cérémonies du culte, In ps. cxxxvi, n. 6, ibid., col. 780 CD ; sacrement de la foi, la confession de la divinité du Fils, De Trinitate, t. VII, n. 6, t. x, col. 204 BC ; aussi la confession de Pierre à Césarée de Philippe est-elle appelée confessio sacramenti (ici, l’idée de mystère entre déjà dans la signification du mot), ibid., t. VI, n. 20, col. 172 BC ; sacrement, la confession de la foi des apôtres en la Trinité, ibid., t. VIII, n. 36. t. x, col. 264 A. Cf. Evangelicæ fidei sacramentum, ibid.. t. XI, n. 1, col. 399 B. En plusieurs textes, nous trouvons le sens de symbole, figure, type : In Matth.. c. xxii, n. 3, t. ix, col. 1042 C ; le ps. i.xviii est un sacrement, c’est-à-dire une figure de la passion à venir du Christ, n. 1, t. ix, col. 476 A ; nous connaissons aussi le sacrement, c’est-à-dire l’expression, le signe de la prudence vraie et céleste de Dieu, In ps. lxvii, n. 21, t. ix, col. 457 C.

Mais c’est au sens de sacrement-mystère qu’Hilaire demeure surtout attaché. Innombrables sont les textes, relatifs à Dieu, à la Trinité ou à l’incarnation ou à quelque vérité dépendant de ces mystères, où le mot sacrement intervient en ce sens : Sacrement de l’unité de Dieu, De Trinitate, t. IX, n. 19, t. x, col. 295 B ; n. 26, col. 302 A ; de la substance divine, ibid., t. VI, n. 19, col. 171 C ; des dispositions (décrets) éternelles de Dieu, // ! ps. lxi, n. 2, t. ix, col. 396 AB ; de la science divine. De Trinitate. I. VII, n. 27. t., col. 223 B. Sacrement de la Trinité : ne pas diviser ce qui est un, ibid., col. 223 A ; ni solitude (seule), ni diversité (seule), ibid., 1. IX. n. 36, col. 508 A. Sacrement de l’unité dans chaque propriété divine, De Trin., t. XI, n. 1, col. 400 A ; sacrement du Père, ibid.. 1. X 1. n. 31, col. 405 A ; sacrement du Fils, ibid., I. VII, n.7 ; cf. I. IX, n. 72, col. 204 C et 338 B ; voir aussi le sacrement de la naissance (du Fils), De Trinitate. t. VII, n. 6, col. 204 A ; cf. n. 11, col. 207 C ; 1. IX. n. 23. 20. col. 299 A, 302 AB ; sacrement ignoré de plusieurs, ibid., t. VII, n. 5, col. 203 A.

De nombreux textes signalent le sacrement de l’incarnation, sacrement approché par la Loi, consommé par l’Évangile, sacrement (mystère) non pour Dieu, mais pour nous. De Trinitate. t. IX, n. 25-26, n. 4, P. L., t. X, col. 301 B, 302 A, 284 A. Sacrement de la divinité du Christ, t. X, n. 48, col. 381 C ; où Dieu se trouve tout en tous, non par nécessité, mais par sacrement (mystère), t. XII, n. 48, col. 431 C ; sacrement, selon le corps pris par la divinité, 1. XI. n. 18, col. 412 A : cꝟ. t. IX, n. 39, n. 00, col. 311 C, 334 B ; dans lequel Dieu, demeurant dans sa nature, est cependant né homme, t. X, n. 22, col. 359 B ; sacrement des actions théandriques, t. VIII, n. 50, col 273 B ; des dénominations à donner au Christ, t. IX, n. 0, col. 283 AB ; sacrement dans lequel le Christ a souffert, t. X, n. 60, col. 391 C.

5. Zenon de Vérone.

Il connaît, lui aussi, plusieurs de ces différentes acceptions ; ses œuvres nous en fournissent quelques exemples. Dans le sens de mystère (pour l’incarnation) : Tract., t. I, ii, n. 9 ; xii, n. 1 ; t. II, xiv, n. 4, P. L., t. xi, col. 278 B, 339 B, 438 B ; (pour la Trinité) : Tract., t. II, i.xxi, col. 524 A ; lxxiii, col. 525 B ; lxxvi (sacrement du nombre trois), col. 526 B. Dans un sens plus large de figure mystique, type, t. I, xii, n. 3, col. 341 B ; t. ii, x. n. 2, col. 119 A ; XIII, n. 2, col. 450 B ; n. 3, col. 451 C ; LXIX, col. 523 A. Mais le baptême reçoit aussi le nom de sacrement : per sacramenta unda jam parturit. t. II, xxxii, col. 478.

6. Saint Optât.

Avec saint Optât, tout entier absorbé par la controverse donatiste, le mot sacrement semble réservé au baptême. De schismate donat., 1. I. c. x, xi, xii, P. L., t. xi, col. 899, 905 A, 907 B. Sans aucun doute, l’évolution sémantique est terminée. Si l’on peut encore relever chez les auteurs des sens différents du mot sacrement — il en sera ainsi jusqu’au xiie siècle — du moins, appliqué aux rites sanctificateurs, ce mot a un sens bien déterminé que l’on ne peut plus contester.

Ainsi saint Ambroise et l’Ambrosiaster, nous offrent plusieurs exemples de ces précisions définitives. On trouve encore sacramentum avec le sens de décrets divins, sacramenta divina, De Spiritu Sancto. t. II, prol., n. 11, P. L.. t. xvi, col. 775, ou avec le sens de serment : sacram-ntum ne verearis, Epist.. XL, n. 31, P. L., t. xvi, col. 1159 ; cf. De officiis, t. I, c. iv, n. 254, ibid., col. 108. Le sens actuel de sacrement est nettement indiqué, n. 247, col. 104, et principalement dans le De mysteriis, où ce mot, emprunté au grec, prend exactement la signification définitive. Voir c. i, n. 2, 3 : c. ii, col. 406, 407. On pourrait relever des indications semblables chez l’auteur du De sacramentis, t. xvi, col. 435 sq.