Dictionnaire de théologie catholique/CONSERVATION

Dictionnaire de théologie catholique
Texte établi par Alfred Vacant et Eugène MangenotLetouzey et Ané (Tome 3.1 : CLARKE - CONSTANTINOPLEp. 602-607).
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CONSERVATION, Les scolastiques rattachent à l'étude de la providence la question de la conservation. Ils désignent ainsi l’action divine qui maintient dans l’existence tous les êtres créés. -
I. Fait.
II. Nature.
III. Agent.
IV. Objections.

I. FAIT. 1° Le problème.

Certaines manières de concevoir la conservation font difficulté seulement dans quelques systèmes philosophiques que nous n’avons pas à discuter ici. Ainsi, à moins de nier la toute-puisi, il. imaine du créateur, on admettra que nulle créature ne peut persévérer dans l’être sans sa permission. De ce chef, il la conserve en tant qu’il lient de l’anéantir negativa per missiva. De même, & moins de nier toute providence, on concédera que Dieu, en réglant le cours des cl prévient l’absolue disparition des êtres dont il veut la survivance. Action p es) une providence ; mais

indirecte : Bans influer sur lu créature, elle seulement ce qui pourrait la détruire : conte) vatio positiva indirecta. s. Thomas, Sum. theol., P. q. civ, a. I. 2. A moins d’admettre l’occasionalisme et de rejeter le concours de Dieu, voir CONCOURS, on reconnaîtra que I)ieu conserve les cuuses secondes les unes pur les autres, en coopérant à leur action, par exemple la nutrition des vivants : conservalio direcla mediata. S. Thomas, ibid.

.Mais, avant d’agir, il faut exister ; qui conserve aux éléments leur existence.’Suffit-il que le créateur leur ait donné l’être une fois pour toutes, de telle sorte qu’ils se soutiennent ensuite par leur propre vertu, ou bien faut-il que la cause première, en quelque manière, les soutienne par une action continue ? conservalio positiva direcla et immediata. Tel est le point précis du problème.

Preuves scripturaires.


Les premiers âges auraient eu des préoccupations bien scolastiques, si les premiers livres de la Bible apportaient à ce problème une réponse directe et précise. Dieu acheva son œuvre le septième jour, dit la Genèse, u. i, et se reposa,

hasM mot à mot, il cessa de travailler. C’est en apparence la contradictoire de la thèse, et cela donnera précisément plus tard aux exégètes occasion de préciser et de distinguer.

Si les Psaumes insistent sur notre dépendance vis-àvis de Dieu, c’est sa toute-puissance qu’ils affirment, plutôt qu’une action incessante constitutive de notre être. Auferes spiritum eorwnx et déficient ; emittes spiritum tuum et creabuntur. Ps. ciii, 29, 30.

A une époque bien tardive, dans la Sagesse : L’esprit du Seigneur a rempli l’univers, et lui qui contient toutes choses, t’o otjve^ov ~k navra, sait tout ce qui se dit. Sap., i, 7. Et encore : puisque toutes les créatures ne doivent l’être qu’au bon plaisir du Seigneur, « quel être subsisterait, si vous ne le vouliez’.' ou comment serait-il conservé, si vous ne l’appeliez [à l’existence] ?

y, TÔ |Aï] x).J)8sv)1tb CO’J ô : £T/, pr, 0r, ; » Sap., Il, 2(5. Cꝟ. 1s.,

xi.i, 4 : Vocans generationes ab exordio. C’est bien, semble-t-il, une dépendance dans l’existence même.

Pour résumer ce discours, dit l’Ecclésiastique, Dieu est le tout, t’o rcâv èotiv kùt<5{, xi.iii, 29, c’est-à-dire, connue il n’y a pas trace de panthéisme dans ce livre, il est toute la raison d’être de tout ce qui est.

L’idée est plus précise dans saint Paul. Dieu n’est pas loin de nous, àv x-t-tô yàp Ç<o|iev xsù xivoJusOa xi ! liai-I. Act., xvii, 28. Nous sommes en lui, non seulement parce qu’il est partout, mais parce qu’il opère incessamment en nous, aC-rô ; 8180ùc tïai ï^t.v xaï itvot)v xaï -ra 7t « vta, Act., XVII, 20 ; si bien que nous sommes sa progéniture et sa race, roC - ; ’àp xai -Édptév. Act., xvii, -JS. Plus explicite encore : Quoniam ea ipso et per ipsuni et in ipso (gr. ; ’. ; aùvejv) sunt omnia, Rom., XI, 30, où les trois prépositions désignent

plus probablement, ! ’.. la

la cause de leur con* rvation n ultime,

i je nii.ini et nombi de Lalin :

tin voient dan m la triple dépend

d’une même cause, mais la relation des créatun

Plusignificatif, étant donné le but de 1 Lpltn tière, le teste, Col. i. Ii. 17. où le I ilest distii de tout éon ou démiurge créé lui-nu me ou imin - i monde omnia per i/.*<m, i et m i/.i reata tant… sal -.-i r.,

Même doctrine dans l’Epi tre aux ll>'-breux, ave< image souvent reprise par les Pères ei les scolastiq hrist, a qui est attribuée, i, lu rvation aucune, ce qui est dit au Ps. ci, 26, du créateur lui-même, soutient par >., parole l’uni qu’une parole a créi. : a t.j <-.%

3vv2t|iepe kûtoû, i, 3.

Enfin, danle quatrième Évangile. Notre-Seigneui pose la même pensée d’une manière toute conci’Pater usque modo operalui et rgo operor. Joa.. v. 17. Ce ne sont pas les miracles qui -< ; iit I ouvre incess du l’ère. Il s’agit d’une autre action, ordinaire et continuelle.

Le fait d’une action conservatrice incessante, quelle que soit sa nature intime, semble donc a--, z net dans l’Écriture.

A noter de plus ce qui est dit de l’Être propre « le Dieu : A.’; /" «  « ni gui sum. Fxod., ni, 1 i. Cf. Sap., xiii, 1 Is.. xl, 17 ; xi.l, i. Pieu seul est véritablement. I conduit à rechercher dans quelle mesure et [comment l’existence appartient aux créatures. La doctrine d conservation est encore impliquée dans celle de ludion divine dans et par les causes secondes. A moins d’èt : effet conçu comme une contrainte extérieure, le concours de Dieu présuppose la conservation : c’est parce qu. principe in essendo, que Dieu forme avec l’agent lini un seul principe adéquat in opérande Voir i

Doctrine des Pères.


1. /’— Il suffirait de relever chez b.s Pères, et notamment dai : chaînes bibliques les plus répandui précédents, pour suivre la tradition de cette doct : Les théories de Platon sur l’être fini, mêlé d i non-être, sur la matière qui n’est par elle-même qu’un pur déterminable. et celles du néoplatonisme alexandrin devaient favoriser plutôt qu’entraver son développement.

llermus écrit avec allusion assez probable à Hel 3 : « Le nom du Fils de Pieu est grand et immens il supporte, fJaT : a ; îi. l’univers entier.’Ei oùv -asa r, xti’di ; ctà ?&C uloû [toO] 0£oC ^aTT^sra :. r : coxe :  ; xexXpu, £vou ; dit’ocjtoO, xaï -o ovou.a çopoCvTa ; to., toC 0eoO. Sim., IX, xiv. 5. Funk, Patres a/ioit 2e édit., Tubingue, 1901, t. i. p. COI.

Le vieillard qui convertit saint Justin lui parle ain-i : « Autre chose est ce qu’on possède en participation, autre chose la réalite même à laquelle on participe. Or l’âme participe à la vie, puisque [Dieu veut qu’elle vive ; de même elle cessera d’v participer, quand Pieu ne voudra pas qu’elle vive. Car. à la différence de I l’âme n’a pas la vie en propre. » Dial. cum Tryph., 6, /’. (.’.. t. vi. col. 189. « Toutes choses, dit Athénaprore, ont élé ci données, conservées par le Verbe rïv xa’i Siax£XOO|rr ; Tai xa : T-- ; x->aT ;  ;.Tï :. Légat., 10, / t. vi, col. 908. Cf. S. Théophile..4c/ Autol., I. I. n 4. ibid., col. I

Saint Irénée écrit : i Tentes choses qui ont éU | duites ont eu un commencement de leur produclion.it elles demeurent, tant que Dieu veut qu’elles soient et qu’elles demeurent, » Cont. hier., I. 11. c. xxxiv. n. 3, P. G., t. vu. col. 836.

La providence, Clément d’Alexandrie 1 comme un dogme essentiel du christianisme ; il veut, à la différence de Philon, qu’elle s’étende aux moindres choses. Strom., I, 11, P. G., t. viii, col. 749. Le repos du créateur au septième jour doit donc s’entendre non pas en ce sens que Dieu ne fait plus rien, car cesser de faire du bien serait pour lui cesser d’être, Strom., VI, 16, P. G., t. ix, col. 369 ; mais en ce sens qu’ordonner la matière et lui donner des lois est un travail achevé : ""Eort S’ouv xaxaTCETtauxE’vat xb xr, v xâSjiv twv yevo|j.Évcov ei ; Ttâvxa -/pdvov àTtapaoixto ; cfjXâffffEGÔai xsray_£va !. Ibid. Dieu ne hait rien de ce qui existe, puisque rien ne peut exister de ce qu’il hait : O-jSè j3&û).exai (aév xi (j.y) Eivai, ai’xto ; ûà fevexai xoO stvae aùxb ô (30ûXExai (j-ï) elvai… ouôÈv Sk èiTT’.v, ou fj.r) xrjv acxi’av xoû Eivai 6 ©eôç TtapÉyExai. Pœd., I. I, 8, P. G., t. viii, col. 325. Cf. Strom., VII, 12, P. G., t. ix, col. 496 ; Pœd., 1. III, 12, P. G., t. viii, col. 680. Cette volonté du Verbe est-elle une pure permission, une condition que rien d’ailleurs ne peut suppléer, ou Clément la conçoit-il de plus comme la raison d’être de la créature à chaque moment de sa durée, C’est ce qu’on aflirmerait avec plus de certitude, s’il avait marqué plus nettement les conséquences de cette action divine en nous. On trouvera incomplètes, en ce sens, ses réflexions. Strom., 1, 18, P. G., t. vin.col. 801 ; Strom., IV, 12, col. 1293 ; Pœd., 1. II, 10, col. 517.

Avec plus de raison encore, se demandera-t-on si Origène a affirmé bien explicitement le fait de la conservation. Il n’interprète pas en ce sens les textes connus, In Gen., homil. ni, n. 2, P. G., t. xii, col. 175 ; le Ps. ciii, 29, est appliqué à la vie de la grâce, In Joa., tom. xiii, n. 24, P. G., t. xiv, col. 437 ; Rom., ii, 36, à la Trinité. Cf. P. G., t. xi, col. 154-155. Il nous manque, il est vrai, des commentaires d’Origène qui pourraient être décisifs, mais il est à noter que saint Ambroise, si souvent dépendant de son exégèse et qui pouvait se référer aux ouvrages complets, demeure aussi imprécis ou inexact que le docteur alexandrin. Cf. Ilcxæm., 1. VI, c. x, P. L., t. xiv, col. 272 ; édit. de Vienne, t. xxxii b, fasc. 1, p. 260, 261. Le texte parfois invoqué, In Luc, vii, 13, n. 173, P. L., t. xv, col. 1745 ; édit. de Vienne, t. xxxii d, p. 359 : Denique et Deus ab operibus mundi quievit, Gen., il, 2, sed non ab operibus cujus sempiterna et jugis operatio est, sicut Filins ail : Pater meus usque modo operatur et ego operor, , loa., v, 17, ut ad similitudinem Dei sœcularia noslra opéra non religiosa cessarent, ferait bien plutôt difficulté. On a peine à croire qu’il regarde la création comme une œuvre temporelle, et la conservation comme d’une nature toute différente. Rien de plus, ce semble, dans l’Ainbrosiaster. Cf. In Rom., ii, 36, P. L., t. xvii, col. 155 ; In Col., i, 16, col. 423, 424 ; Origène, P. G., t. xi, col. 155.

On trouve très catégorique, il est vrai, chez Origène aussi, l’affirmation de la providence. Cf. In Num., homil. xxin, n. 4, P. G., t. xv, col. 750, où sont expliqués Gen., ii, 2, et.Joa., v, 17. On lit, Cont. Cels., 1. VI, n. 71, P. G-, t. XI, col. 1105 : Sirj/.ei (J.ÈV yàp - ïrac%0Tir xoù t, -povoia xoù Œo’j S t à Tidé/Tiov…, xoà Ttâvxa (jiév 71spiÉy_Ei… tï npovo6u|*.eva u>t Bûvaju ; Ûsia za’i 7uEpiecXr) : p, jïa xà zïpiî/oiJîvot. Dieu régit toutes choses ; il n’est pas dit qu’il ait besoin de les soutenir. Quant au texte que cite Lessius : Quomodo ergo in Deo vivimus, movemur et tumus, nisi quod virtute sua universum constringit et continet mundum ? De princ, 1. II, c. i, n. 3, P. G., t. xi, col. 181, Origène prend soin lui-même de renvoyer à l’explication qu’il vient de donner : Vna namque virltes est, quæ omnem mundi diversitatem constringit et continet algue in unum opus varias agit moins, ne Sciticet tant immensum mundi opus dissidiis solreretur auimorum. Ibid., col. 183. Peut-être verra-t-on la conservation dans ces paroles sur Sap., vii, 25, 26 : Vapor est quidam virtutis Dei. C’est le Verbe : Intel* ligenda est ergo virlus Dei, qua vigel, quaomnia visi bilia et invisibilia vel instilint, vel continet, velgubernat, quæ ad ornnia sufjiciens est… quibus velut uni ita omnibus adest. De princ, 1. I, c. II, n. 9, P. G., t. xi, col. 138. Mais n’est-ce pas plutôt une nouvelle affirmation du gouvernement universel et absolu de Dieu, Ttpôvota, o ! xovop.ta ? Cf. Cont. Cels., 1. IV, 14, P. G., t. xi, col. 1045. On sera tenté de le croire en rapprochant sa pensée de celle de Philon, toute stoïcienne aussi en nombre de cas. « C’est lui [le Logos], qui tendu du centre aux extrémités et des extrémités au centre dirige la course infaillible de la nature, maintenant et reliant entre elles toutes les parties, fiE<7(ibv yàp auxbv appr, xxov xoO Ttavxbç ô YevvT|<7aç ÈTtoiEi naxr, p. » Philon, De plantât. Noe, 2, édit. Cohn-Wendland, t. il, p. 135. Moïse, dit-il encore, a cru que « tout cet univers était soutenu par des puissances invisibles que le démiurge a tendues depuis les extrémités de la terre » , xoû (iT) àvs6r|Vae xà Seôévxa xaXtô ; upo|ju60-j|XEvoç. De migratione Abrahami/àl, t. il, p. 303. Voir J. Lebreton, Les théories du Logos au début de l’ère chrétienne, dans les Etudes religieuses, 1906, t. evi, p. 777 sq. On voit quelles différences et quelles analogies séparent et rapprochent ces conceptions. Cette loi du monde est, selon Chrysippe, immanente ; elle est distincte du monde pour Philon ; elle est même sûrement pour Origène personne distincte : c’est le Verbe de la Trinité chrétienne. Mais pour le stoïcien son panthéisme, pour Philon sa matière éternelle, ayant donc une existence propre, les ont empêchés de concevoir la nécessité d’une conservation au sens de Chrysostome et d’Augustin. Clément et Origène, préoccupés avant tout d’opposer au Dieu immanent du stoïcisme le Dieu transcendant du christianisme, ont dépeint la providence comme une loi éternelle, toute-puissante, extérieure aux choses ; il se pourrait par contre qu’ils ne soient pas allés jusqu’aux dernières conséquences de la création ex nihilo, qu’ils n’aient pas vii, ou pas noté cette exigence d’une action constante de Dieu dans ses créatures, qui le rend, mais de toute autre manière que le logos stoïcien, comme immanent en nous par sa vertu.

On retrouve chez saint Athanase la même influence des spéculations philosophiques, dans les attributions qu’il donne au Logos, (jltjSïv k’prijxov xr, ; èa-jxoû o - jviu.E(oç à710), EÀotuâ)ç, Orat. conlra gentes, n. 42, P. G., t. xxv, col. 84 ; mais l’action conservatrice qui atteint l’intime de l’être est bien plus nettement marquée. Le Logos est venu aux créatures, parce que leur nature, « xe 8r, â| oux ô’vttov ÙTto<7x5c7a, est pe’JTx-n, xoù auôevi, ;. Dieu qui seul est véritablement, cf. Exod., iii, 14, 15 ; Platon, Limée, 27. 37, 38, édit. Didot, 1846, p. 204, 209, loin d’être jaloux de ses prérogatives, ’A-raOtô yàp irep’i oùSsvbç xv yévoixo çOdvo ;, Timée, 30, ibid., p. 205, a voulu en effet que toutes choses soient, mais il ne les abandonne pas à elles-mêmes, "va |iï] xtvSvvevvi) rcdtXiv Et ; zb |at] Etvat ; il leur envoie donc son Verbe, pour qu’elles subsistent, axe 8ï) xoù ovxioç ex llaxpb ; Abvo’J inxx/x|j.81vo-jira xa’t porjOo’jp.évi, St’aùxo-j eiç xb EÎvai. Ibid., n. 41, col. 81 ; cf. ii, 28, col. 56.

Eusèbe de Césarée, suivant la méthode des premiers apologistes, veut prouver l’accord parfait des plus grands penseurs païens avec la philosophie de la Bible. Tîydtp eux ! ID.ixtov y) MbxTïj ; àxTixiÇtov ; Præp. ev., 1. II, c. x, P. G., t. xxi, col. 873. Numénius le Pythagoricien, tout comme Plutarque et Platon, s’accorde à dire que Dieu seul est véritablement : c’est le mot de l’Exod., III, 14 : Ego sum qui sum. Les différences son) grandes pourtant ; Eusèbe ne les indique pas. Ibid., c. ix-xii, col. 868 sq.

Citons des Pères Cappadociens ce passage de Grégoire de Nazianze. C’est avec raison, dit-il, que le Verbe est nommé Sûvapte coc a)VTT|pir)Ttxbç rûv -evvjevmv xal xr, v 700 (rwl/eaBott xaOxx yopr--f.iv Svva(jLtv. <hal.. xxx, n. 20, PG., t. xxxvi, col. 129. C’est encore le Verbe seul qui possède : Tv v nemoirxev olxovouíav re xa ! GUVTýprav, ibid., n. 11, col. 117, et il insiste, a mainte reprise, sur cette idée bien platonicienne, que Dieu est, puisque seul il est sans changement. Etre, c’est donc le nom qui lui convient le mieux. Cf. col. 125, 317, 477, 629. Saint Grégoire de Nysse écrit, établissant que tous les attributs sont en Dieu une seule et cominune essence : a mpóvoz xai xčepovia xai rob mavrog iniaragia… te din Tv Tv… pía lal xai ouyi rpeic. Quod non sint tres dii, P. G., t. XLV, col. 128. Saint Chrysostome, à leur suite, insiste avec grande éloquence, sur l’absolue dépendance de la créature : 09 yap mapyaye povov Tiv xrigiv, ax xai auyxporci… xiv prua yévrta : s vepyetaç ixeivne tappei xxi anóndurat. Cont. anom., homil. XII, n. 4, P. G., t. XLVIII, col. 810-811. Sur le texte, Heb., 1, 3 : OUTEST : xubepvv xai rà dianinrovia vyzparov, et c’est auvre plus merveilleuse encore, dit-il, de conserver tous les êtres que de les tirer du néant. In Epist. ad Heb., homil. II, n. 3. P. G., t. LXIII, col. 23. Cf. In Gen., homil. XI, n. 8, P. G., t. LIII, col. 89.

Ce sont les écrits de Chrysostome que Théophylacte utilisera de préférence. Tandis que Procope ne nous transmet presque rien sur la conservation, il reproduira et amplifiera les assertions de saint Jean. In Joa., P. G., t. CXXIII, col. 1266 ; In Act., t. cxxv, col. 748. Commentant Heb., 1, 3, il note qu’en un sens conserver est plus que créer : Mazov de peitov To napaya yeiva návta, To Eixotassátovra xai eic tò un sivat μéhova apoyphozt guyxpareiv. P. G., t. cxxv, col. 193. On reconnaitra son inodèle : Chrysostome, In Epist. ad Heb., homil. II, P. G., t. LXIII, col. 23. Et Théophylacte, en passant, prend occasion de cette grande pensée, si analogue à Rom., II, 36, et à Col., 1, 16, pour revendiquer l’attribution paulinienne de la lettre aux Hébreux. P. G., t. cxxv, col. 193. Expliquant un peu plus loin, lleb., 1, 7 z eine, remarque-t-il, motý, a TOLOV, TOUTÉOTI GUYApoy to hoyw zab' ûvéyévovTo. P. G., 1. cxxv, col. 197. La conservation est un acte toujours présent. Cf. In Epist. ad Rom., P. G., t. CXXIV, col. 495 ; ad Col., col. 1222.

2. Pères latins.

Si nous revenons aux Pères latins, nous nous étonnerons peu de ne rien voir chez Tertullien qui réponde à un problème aussi abstrait. Saint Jérôme observe sans doute que Dieu seul est dans toute la force du terme : Cætera quæ creata sunt, etiamsi videntur esse, non sunt ; mais voici la raison qu’il en donne : quia aliquando non fuerunt et potest rursum non esse quod non fuit. Epist. ad Damas., 4. P. L., t. XXII, col. 357. L’insuffisance de la créature à subsister par ses propres forces semble hors de sa pensée ; l’eut-il comprise, qu’il n’eut pas refusé à Dieu la connaissance des plus minimes détails, par exemple, du nombre de tous ces pucerons qu’il doit soutenir par lui-même dans l’existence, tout autant que les êtres raisonnables. Cf. In Habac., 1, 1, P. L., t. xxv, col. 1286. On notera, pour la rapprocher de celle d’Augustin, son exégèse de Gen., 11, 2 : Complevitque Deus…, Dieu, ce jour-là, parachève son œuvre. P. L., t. xxIII, col. 910. Saint Augustin, au contraire, a traité de la contingence de l'ètre avec une netteté et une profondeur singulières. Il écrit, commentant Gen.. 11, 2 : Potest etiam intelligi Deum quievisse a condendis generibus creaturæ, quia ultra jam non condidit aliqua genera nova ; mais Dieu travaille toujours à conserver ce qu’il a créé : Creatoris namque potentia causa est subsistendi omni creaturæ. Quæ ab eis quæ creata sunt regendis, si aliquando cessaret, simul et eorum cessarent species, omnisque natura concideret, car il n’en va pas de Dieu comme d’un architecte qui peut se retirer, sa maison construite. De Genesi ad litteram, 1. IV, c. XII, P. L., t. XXXIV, col. 304 ; 1. V, c. xx, n. 40, col. 333 ; 1. VIII. c. XXVI, col. 391. Les démons mème ne subsistent que parce qu’il leur donne la vie, que subministratio si auferatur continuo interibunt. Enchiridion, c. XXVII, P. L., t. 1, col. 245. On sait l’admiration du grand évéque pour Plotin ; on comparera donc volontiers ces deux passages : « Toutes choses, dit Plotin, ont besoin d’etre édifiées sur Dieu, » xivnbeians yapixelvre : Upac] zweto av atá anchouévre autov Tic Bages : X2 : 05 armpitovros aura, Enneades, VI, 5, 9, édit. Didot, p. 453 ; et saint Augustin : Quid peto ut venias in me, qui non essem nisi esses in me ? An polius non essem, nisi essem in te ex quo omnia, per quem omnia, in quo omnia. Confes., 1. I, c. 1, P. L., t. xxxII, col. GGI. Cf. Grandgeorge, Saint Augustin et le néo-platonisme, c. 11, p. 70 sq. On remarquera de plus que les Confessions et les premiers livres du De Genesi ad litteram ayant été écrits avant l'étude attentive de saint Jean Chrysostome, qu’Augustin dut entreprendre pour repondre à Julien d’Eclane, ses vues sur la conservation doivent être attribuées à la lecture de l’Ecriture sainte et des philosophes, plutôt qu'à celle de Chrysostome. L’influence de saint Augustin en Occident semble considérable. Son explication du texte, Gen., 11. 2, ultra non condidit aliqua genera nova, etc., est souvent reprise. Cf. S. Prosper, Sent., 278, P. L., t. LI, col. 467 ; S. Grégoire le Grand. eorum essentia rursum ad nihilum tenderet, nisi eam auctor omnium regiminis manu retineret, Moral., 1. II, c. xII, n. 20, P. L., t. LXXV, col. 565 ; cf. ibid., 1. VI, c. xxxvII, n. 45, col. 1143 ; Raban Maur, In Gen., 1. I, c. Ix, P. L., t. CVII, col. 465, 466 ; Alcuin, In Joa., I. III. c. ix, P. L., t. c, col. 808 ; V. Bede, In Hexæm., 1. I, P. L., t. XCI, col. 34. Elle est notaminent vulgarisée par la Glose ordinaire et, par elle, elle influe sur tous les Sententiaires. Cf. Walafrid Strabon, In Gen., P. L., 1. CXIII, col. 82. Le fait de la conservation est d’ailleurs ordinairement noté par Strabon, quand l’Ecriture en offre l’occasion. In Gen., P. L., t. CXIII, col. 82 ; In Sap., col. 1168 ; In Act., t. CXIV, col. 460 ; In Joa., col. 377 ; In Epist. ad Heb., col. 641. Cf. De civ. Dei, I. X, t. xv, P. L., t. XLI. col. 293.

4° Les scolastiques.

On reconnaîtra la même dépendance de saint Augustin dans l’exégèse d’Abélard, In Hexæm., P. L., t. CLXXVII, col. 769, 770 : Dieu conserve les espèces anciennes sans créer de types nouveaux ; et ailleurs, In Epist. ad Rom., ibid., col. 937, il explique comment sont conservées même les âmes des bêtes après la mort : non tamen desinunt esse substantiæ.

Plus profond est l’enseignement de saint Anselme : Dubiuni nonnisi irrationali menti esse potest, quod cuncta quæ facta sunt, eodem ipso sustinente vigent et perseverant in esse quamdiu sunt, quo faciente de nihilo habent esse quod sunt, Monol., c. xIII. P. L., t. CLVIII, col. 161 ; et saint Bernard aime à revenir sur cette pensée : Quid item Deus ? sine quo nihil est. Tant nihil esse sine ipso, quani nec ipse sine se potest. Ipse sibi, ipse omnibus est, ac per hoc quodammodo solus est, qui suum ipsius est et omnium esse. De consideratione, 1. V. c. vi, n. 13, 14, P. L., t. CLXXXII, col. 796 ; Serm., IV, in dedicatione, n. 2, P. L., t. CLXXXIII, col. 536 ; In Ps. Qui habitat, n. 1, ibid., col. 185.

On notera cette disposition bien naturelle des grands mystiques, après Augustin, Gregoire le Grand et le pseudo-Denys. De dir. nom., 10, P. G., t. 111, col. 936, à méditer avec amour le néant de la créature, sans en venir pourtant aux exagérations de maitre Ekkard : Omnes creaturæ sunt purum nihil. Denzinger, Enchiridion, n. 453.

C’est encore Augustin et Abélard à la fois que l’on retrouve dans tout ce groupe de Sententiaires apparentés, Roland Bandinelli et Ognibene. Cf. Gietl, Die Sentenzen Rolands, p. 107-108 ; disciple de Hugues de SaintVictor, Sumnia Sent., tr. III, c. I, P. L., t. clxxvi, col. 90 ; Hugues lui-même, Erudit. aidasc, 1. VII, c. i, ibid., col. 811 ; Pierre Lombard, Sent., 1. II, dist. XV, c. vii, P. L., t. cxcii, col. 683 ; Muitre Bandini, In IV Sent., 1. II, dist. XV, P. L., ibid., col. 1043. Mais à vrai dire ils se perdent à expliquer comment, loin de se reposer depuis le sixième jour de la Genèse, Dieu crée toujours non nova, sed nota. Les vues profondes d’Augustin sur la contingence de l’être sont plus ou moins négligées. Cf. Pierre Lombard, Sent., 1. II, dist. XII, XV, P. L., t. cxcii, col. 677, 683 ; Bandini, In IV Sent., 1. ii, dist. XII, ibid., col. 1040 (où il faut lire de modis, pour de malis, et inforniiter pour uniformité )-) ; Alexandre de Ilalès, Summa, part. I, q. lvi, m. I. Il est vrai du moins que ce dernier parle ailleurs de la conservation, part. I, q. xxvi, m. ii, avec citation de Slrabon, P. L., t. cxiv, col. 644, et plus spécialement Summa, part. II, q. xxiii, m. iii, De mutabilitate creaturarum.

Les commentateurs du Maître des Sentences traitent ordinairement de la conservation In I Sent., dist. I ou II, ou omettent la question. Cf. S. Bonaventure, Opéra, édit. Quaraccbi, t. il, p. 866, schol. il. Le texte de saint Augustin, In Gen., 1. IV, c. xii, P. L., t. xxxiv, col. 304 ; sa comparaison de la lumière qui ne subsiste pas sans source lumineuse, la plupart des passages de l’Écriture que nous avons cités, notamment Sap., il, 26 ; Joa., v, 17 ; Heb., i, 3 ; quelques textes de saint Grégoire le Grand, Moral., 1. II, c. xii, n. 20, P. L., t. lxxv. col. 565 ; de saint Jean Damascène, et un texte attribué à tort à saint Jérôme, cf. S. Bonaventure, Opéra, édit. Quaracchi, t. I, p. 146, note 4, forment en général les preuves positives principales.

Le catéchisme du concile de Trente résume la théorie de la conservation. De symbvlo, in-8°, 1890, t. i, n. 22, p. 22.

Au XVIe siècle, la question est traitée avec ampleur par Suarez, Disput. met., xxi, et par Lessius, De perfectionnais nuiribusque divinis, 1. X. Llle demeure encombrée d’exemples et d’objections empruntés à la physique aristotélicienne : inlluence des corps célestes incorruptibles, théories de la chaleur et de la lumière, etc. Au reste, tous les scolastiques pour le fond sont d’accord : Idem docent omnes scholastici, écrit Lessius, nemine excepto, etiam Durandus. De perfectionibus, 1. X, c. iii, n. 23.

Preuves de raison.

Voici les principaux arguments

de l’École. La conservalion est en somme une pure conséquence de la création.

On argue de la nature même de l’être créé. Puisqu’il n’a pas l’existence en propre, comme la cause première, mais qu’il l’a reçue ab alio, il ne peut durer que par la continuation de l’acte même qui, au premier instant de son existence, a suppléé à son insuffisance essentielle. S. Ilonaventure, In IV Sent., 1. II, dist. XXXVII, a. 1, q. n ; S. Thomas, Sum. theol., I a, q. civ, a. 1 : oportet quod idem sit causa rei et conservationis ipsius, na>ti conservatio rei non est nisi continuatio esse ipsius. Cont. genl., 1. III, c. i.xv, n. 2, 7. En effet, la même indigence qui caractérise l’être de la créature au premier instant de sa production, d’où il résulte qu’elle ne peut exister que par la vertu d’un autre, subsiste en elle tant qu’elle est ce qu’elle est. Suarez, disp. XXI, sect. i, n. 16 : quia semper est idem et quod per se primo ei convenit, semper ci convenit. Cf. n. 12. Ce qui suppose que l’aptitude à se soutenir par soi-même dans l’être, fût-ce pour un instant, la sufficienta essendi, est une perfection incommunicable. S. Thomas, Sum. theol., I q. xiv, a. 2, ad 2um. Au fait, si on la conçoit comme une perfection simple, puisqu’elle est en Dieu le principe de perfections simples, ou comme infinie, puisqu’elle est l’essence même de l’être infini, comment concevoir qu’elle puisse être

participée à un degré fini, et donc de manière non univoque mais analogue, en demeurant en rigueur de définition vera suf/îcienlia essendi ?

On argue encore, et c’est au fond une autre forme du raisonnement précédent, de l’essentielle dépendance qui existe entre l’effet et la cause. Aucune modification, aucun devenir ne se poursuit que durant l’application de la cause : impossibile est quod fieri alicujus rei maneat cessante motione moventis. On en conclut a pari qu’aucune existence ne peut se soutenir sans l’action continue de la cause première. S. Thomas, Cont. gent., 1. III, c. lxv, a. 4 ; Suarez, disp. XXI, sect. I, n. II. Cette preuve est soumise par Cajetan, / » Sum. theol., I a, q. civ, a. 1, et par Suarez, disp. XXI, sect. I, n. 7, à une critique minutieuse. Cf. Th. de Bégnon, Métaphysique des causes, 1. VIII, c. iv, Paris, 1886, p. 584-594. Les scolastiques voient d’ailleurs cette répugnance à ce que l’être fini puisse durer par sa propre vertu, qu’il serait ainsi, à la fois et sous le même rapport de l’existence, cause et effet de lui-même. S. Thomas, Sum. theol., I a, q. civ, a. 2, ad 2um.

Suarez, loc. cit., n. 14, tire encore un argument de la toute-puissance divine. Tous affirment le souverain domaine de Dieu ; or Dieu ne le possède pas, si son action n’est pas essentielle à la durée des choses ; car il n’est pas maître absolu de ce qu’il ne peut annihiler, et il ne peut annihiler, s’il ne, conserve pas au sens même de la thèse. Qu’on laisse, en effet, les métaphores : annihiler d’un mot, réduire au néant, etc. On ne peut annihiler par une action positive, détruire de l’être comme on disperse au vent des fragments d’argile ; le résultat d’une action positive doit se chiffrer par un ellet positif, non par zéro. Si donc Dieu ne peut annihiler en agissant, il ne lui reste qu’un moyen d’y parvenir, c’est en cessant d’agir, c’est-à-dire par soustraclion d’une action indispensable à la durée des êtres : cette action c’est la conservation.

Note de la thèse.

Le concile du Vatican, const.

De fide, sess. III, c. i, Denzinger, n. 1633, dit : Universel vero qu.se condidit, Deus providentia sua tuetur atque gubernat, attingens a fine usque ad finem former, et disponens omniasuaviler. Ce texte ne concerne pas la conservation, mais le dogme, plus général de la providence. Cf. Collect. Lacens., Acla concil. Vat., Fribourg-en-Brisgau, 1890, t. vii, p. 105, 1018. Hérétique sans doute toute doctrine qui nierait la providence ; théologiquement erronée, celle qui lui refuserait un influx positif au moins indirect sur la conservalion des êtres. S’il s’agit, comme dans ces pages, d’une action intime directe et immédiate, il semble que cette doctrine, doivent être qualifiée de très commune et de certaine.

! I. Nature. —Un léger désaccord partage les scolastiques sur ce point. Pour le plus grand nombre la conservation n’est pas en Dieu un acte nouveau, c’est la continuation de l’acte créateur, non est per novam aclionem, sed per continuationem actionis quai dut esse. S. Thomas, Sum. theol., I a, q. civ. a. I, ad i">" ; Lessius, loc. cit., n. 30. Voici la seule différence : le concept de création implique que l’être n’existait pas l’instant précédent, esse post non esse ; celui de conservation qu’il existait déjà, esse pos t jam esse. L’action divine ne diffère donc dans les deux cas que ralione, connotar tione : unique en soi, elle comporte drus noms suivant les rapports divers de son effet avec le temps et avec notre manière de concevoir. Suarez. disp. XXI, sect. ii, n. 2 sq. Et c’est encore l’infirmité de notre intelligence qui nous obligea parler de création continuée, comme si l’action de Dieu se prolongeai ! dans le temps : il n’y a pas de durée en Dieu, puisqu’il n’j a pas de changement, Scot, /// IV Sent., 1. II, dist. 11, q. i, ii, i, 17-25.

Quelques-uns font « les restrictions, et semblent requérir, entre la création et la conservation, une différence spécifique. Cf. Henri de Gand, Quodlib., X, q. vit ; Quodlib., 1. q. 1x ; Aureolus, In IV Sent., 1. II. dist. 1, q. iv, a. 2 ; Gregoire de Rimini, In IV Sent., 1. 11, dist. I. q. VI, tous deux cités et réfutés par Capreolus, In iv Sent., 1. II, dist. 1, q. 11, a. 2, concl. 3ª, édit. Pégues, t. II, p. 1 sq., et Suarez, loc. cit., sect. II. Pour certsins, la conservation demande seulement un influx géneral et comme un moindre effort de la part de Dieu. Opinion illogique, puisqu’elle ne se soutient qu’en admettant la contradictoire même des arguments qui ont établi la thèse : possibilité pour la creature de se maintenir dans l'étre, au moins à quelque degré, par soimême, et possibilité d'étre cause d’elle-même, au moins dans une certaine nesure. Elle est inintelligible, si l’on entend par concours général une influence indéterminée de Dieu que spécifierait la cause seconde. Voir la réfutation dans Lessius, op. cit., c. IV, n. 26 sq. En somme, il convient de parler exactement de même manière de la création et de la conservation, et la meilleure forinule n’est-elle pas celle de saint Jean Damascène : monix El auto úvapis xai i suvEXTIX xxi povonix n ayahn autos noi ; tot… Oiket avviaTaoba : rov xóopov xai ouviotaтx xxi návra Gox bes : YiveTx :. De fide orthodoxa, 1. II, c. XXIX, P. G., t. XCIV, col. 961.

III. AGENT. Où l’action est rigoureusement la même, le même agent est requis. Voir CREATION. Cette question n’offre donc pas de difficulté spéciale : c’est un corollaire de la précédente.

Saint Thomas cependant, Sum. theol., I, q. civ, a. 2, fait remarquer que Dieu conserve toutes choses, sans exclure l’influence des causes secondes, bien qu’il soit toujours cause principale ; et saint Bonaventure, In IV Sent., 1. I, dist. IX, q. iv ; 1. II, dist. XXXVII, q. II. observe aussi que la conservation n’appartient pas à Dieu ut a tota causa. Si l’on veut éviter les confusions, il y a lieu de distinguer dans les choses avec Valentia, In IV Sent., 1. 1. disp. VIII, q. II, p. 11, leur être substantiel (esse simpliciter) et leur nature spécifique (esse specificum) : créatures changeantes, muables, elles peuvent en effet exister, sans exister toujours sous la même forme et dans la même espèce. Il est clair dès lors que l’action et la réaction réciproques des causes secondes expliquent seulement la permanence de leur état spécifique ou accidentel ; ainsi, dans l’appareil d’une voûte, toutes les pierres s’entresoutiennent, Clément d’Alexandrie, Strom., VIII, 9, P. G., t. 1x, col. 597 ; ainsi les affinités chimiques rendent bien raison de la stabilité plus ou moins grande de tels composés définis, non de l’existence même des éléments. Malgré l’influence mutuelle qui fait de l'âme et du corps humain un homme vivant, ni celui-ci, ni celle-là ne se donnent mutuellement l’existence. Il faut en dire autant de tous les composés dans le système aristotélicien de la matière et de la forme. Si ces composants sont, avec Dieu comme cause principale, causes partielles de la conservation, cela doit donc s’entendre dans ce sens précis que, maintenus par Dieu et par Dieu seul dans l’existence (esse simpliciter), ils concourent avec lui au maintien de l'état specifique du composé. Si la conservation n’est qu’une création continuée, elle relève uniquement de celui qui seul peut créer. S. Thomas, Sum. theol., III, q. xIII, a. 2.

IV. OBJECTIONS.

Leurs sources principales sont :

1 L’ignorance de la question. - Puisque la question de la conservation se pose pour expliquer la persévérance des êtres dans l’existence, elle concerne strictement les choses à qui convient proprement le concept d'être et par conséquent les seules substances complètes, ou, dans les systèmes philosophiques qui leur reconnaissent une existence propre, les parties substantielles, matière et forme. Dès lors, en revendiquant pour la cause première seule la conservation des substances, on n’entend exclure ni la coopération des substances à la conservation de certains états accidentels ou spécifiques, ni les modifications des substances les unes par les autres.

1. Ainsi, quand avec le concours de Dieu, l’artiste a terminé sa statue, la forme subsiste dans le marbre par l’action de Dieu qui la conserve seul, c’est-à-dire sans l’artiste, mais non sans l’intermédiaire de la substance : conservation immédiate pour celle-ci, médiate pour celle-là. Voir col. 1187. Les accidents, n’ayant pas de ríalité indépendante de la substance, sont conservés en elle et par son moyen.

2. Mais la conservation contredit les modifications pourtant évidentes et l'évolution de toutes choses ! Nullement. Ce qui la contredirait ce serait l’annihilation ; or on constate partout transformation, non annihilation. S. Thomas, Sum. theol., I. q. civ, a. 4. Bien plus, c’est parce que Dieu conserve les éléments substantiels et par conséquent les énergies et vertus qui ulent de leur nature, que la création 'est pas ligée dans l’immobilité évolution et conservation ne s’opposent pas. Dieu maintient toute la quantité d'être qu’il a tirée du néant, et l’on ne voit pas pourquoi il l’annihilerait jamais, mais il se contredirait, en empèchant des substances qu’il a faites actives de réagir les unes sur les autres, ou d'évoluer dans la mesure de la plasticité qu’il leur a donnée : les éléments chimiques s’attaquent, s’altèrent, se dissocient, se combinent à nouveau ; les causes raisonnables, sans créer ni annihiler jamais, modifient, façonnent, agencent les matériaux existants. Les choses ne sont donc stables qu’en proportion de leurs qualités ou énergies naturelles, et des vues trés sages de Dieu.

2⁰ L’illusion du concept vulgaire. C’est là une cause plus profonde des objections ordinaires. Nous n’avons pas de notion plus abstraite que le concept d'être ; c’est donc par elle que nous concevons toutes choses, c’est notre unité de pensée. devient tout naturel que nous la regardions comme représentant quelque chose d’absolu et de subsistant. Rien de plus tolérable dans le commerce ordinaire ; dans une recherche philosophique, au contraire, il y a lieu de remarquer que la créature n’existe que par participation ; dès lors, il ne peut y avoir qu’une pure analogie entre l'être contingent et l’absolu véritable, entre l’analogatum princeps, dirait l’Ecole et ses inférieurs. Il convient donc de ne pas partir d une conception de l'étre fini a priori, pour obvie et sûre qu’elle paraisse, mais, après avoir posé comme l'Être en qui se vérifie la notion parfaite de subsistance, la cause première, il faut rechercher sans parti pris ce que peut être la subsistance des êtres créés. Ils semblent, il est vrai, se soutenir par eux-mêmes ; la raison montre et la foi prévient que ce ne peut être qu’une apparence. « C’est donc une erreur, écrit Lessius, d’imaginer la créature comme je ne sais quel solide réellement distinct de l’influx de Dieu, capable de subsister après soustraction ou partielle ou totale de sou influence. Ce n’est pas ainsi qu’il faut la concevoir à l'égard de Dieu. mais comme le terme intrinsèque de l’action divine, tout comme la lumière est le terme intrinsèque de l’action du soleil. » Op. cit., 1. X, c. iv, n. 39. Dieu remplit sa créature de l'être qu’il lui donne sans discontinuer ; il la retient pour l’approcher de la source de vie ; il la soutient, pour qu’elle ne tombe dans le neant ; il la contient, pour qu’elle ne se désagrége pas. Cf. S. Grégoire le Grand, Moral., 1. II. c. xII, P. L., t. 1.XXV, col. 565 ; Lessius, op. cit., n. 25, 61. Au fait, n’est-ce pas par cette voie seule que peut se résoudre ou s’atténuer le problème si ardu, même la création une fois prouvée, de la coexistence du fini et de l’infini ? En rigueur, on n’a plus devant soi étre et être, mais un seul être : Ego sum qui sttm, Exod., iii, 14, 15, et le reste, reliqua quasi non sint. Et ces deux ordres de réalités ne peuvent s’additionner dans une somme commune, puisqu’il n’y a rien dans les êtres créés qui ne relève adéquatement de l’incréé. Ainsi d’une lumière qui se réfléchit en de nombreux miroirs : plusieurs images, une seule lumière ; plura entia, disent les manuels, non plus entis.

S. Bonaventure, In IV Sent., édit. Quaracchi, t. II, p. 806, scholion ; Suarez, Disput. metaph., disp. XXI, Opéra, Paris, 1866, t. xxv, p. 785-802 ; Lessius, Opuscula, Paris, 1881, t. I, De perfectionnais moribusque divinis, 1. X, et chez ces trois auteurs nombreuses références aux scolastiques ; Petau, De Deo uno, 1. VIII, c. n ; Wirceburgenses, Theulogia doymatica, Paris, 1880, t. III, appendix, p. 407-515 ; Hontheim, Theodicea, 1893, p. 766 ; Urraburu, Theodicea, disp. VI, ciii, t. ii, p.707 sq. ; Kleutgen, S. J., La philosophie scolastique, Paris, 1868, t. II, p. 476-519 ; t. III, p. 7-27 ; Scheeben, La dogmatique, Paris, 1881, t. III, p. 21-29 ; t. II, p. 241-259 ; Heinrich, Dugmatische Théologie, Mayence, 1888, t. v, p. 279-296.

H. Pinard.

CONSISTOIRE. Voir Cardinaux, t. ii, col. 17221723 ; et Canonisation, t. ii, col. 11352-1034.

CONSOBRINUS Jean, ou Sobrinus ou encore Sobrinho, carme portugais, né à Lisbonne, au commencement du xv, | ? sièele, de parents aussi illustres par leur piété que par leur origine. Très dévot envers la très sainte Vierge Marie, il ne cessa de revendiquer pour elle, par la plume et par la parole, le privilège de la conception immaculée. Sa subtilité et sa logique dans les discussions en faisaient un adversaire redoutable et lui méritèrent le nom de magnus magister. Le roi de Portugal, Alphonse V, l’avait en haute estime et aimait aie visiter et à le consulter en son couvent de Lisbonne. Il mourut empoisonné par les hérétiques vers 1475. Trithème, Descriptor. eccles., n. 867, et, après lui, d’autres écrivains prétendent, nous ne savons sur quel fondement, que Consobrinus passa en Angleterre et professa les lettres à Oxford, et que plus tard, il fut créé docteur en théologie à Bologne. Jean Consobrinus a laissé entre autres un excellent traité De juslitia commutativa, arte campsoria ac alearum ludo, in-8°, Paris, 1496.

Cosme de Villiers, Bibliotheca carmelitana, Orléans, 1752, t. I, col. 827.

P. Servais.

1. CONSTANCE, vertu morale. —
I. Nature.
II. Définition.
III. Importance.
IV. Vices opposés.
V. Moyens de l’acquérir.

I. Nature. —

Le mot constance désigne la fermeté ou la continuité dans le bien, avec une nuance différente suivant qu’on le fait dériver de constave, être solidement établi, ou de sibi conslare, être d’accord avec soimême. Saint Thomas s’attache à la première explication : Aliguis dicitur esse conslans ex eo quod in aliguo stat. Sun}. Iheol., IIa-IIæ, q. cxxxvii, a. 3, sed contra. Lessius préfère la seconde. De juslilia et jure, 1. III, c. Il, dub. VI, Louvain, 1605, p. 613. Dans les deux cas, il y a affinité étroite entre la constance et la persévérance, considérée comme vertu morale. L’une et l’autre ont pour fin d’affermir dans le bien entrepris en dépit des difficultés qui surviennent, persévérantia et constantia conveniunt guidem in fine, guia ad utrumque perlincl firmiter persistere in aliguo bono. S. Thomas, loc. cit., in corp. Mais la constance affermit contre les obstacles venant de l’extérieur, tandis que la persévérance soutient le courage contre la difficulté inhérente à la durée même de l’effort exigé. Ces deux vertus diffèrent donc uniquement à raison du genre des obstacles qu’elles ont à surmonter, differunt autetn secundum ea quse difficultatem afferunt ad persistendum m bono. S. Thomas, loc. cit. La différence se réduil par conséquent à bien peu de chose. Aussi Lessius, loc. cit., fait-il observer que. <r ni les auteurs ni Le vulgaire n’ont coutume de tenir compte de cette distinction, d’ailleurs peu importante au point de vue moral » . Nous parlerons donc ici de ces deux vertus à la fois.

II. Définition. —

On peut donc définir la constance : la vertu qui donne à l’Ame la continuité dans le bien, malgré les difficultés provenant de l’extérieur, et la persévérance : la vertu qui donne à l’âme la continuité dans le bien, malgré la difficulté provenant de la durée elle-même de l’effort exigé.

D’après le docteur angélique, Sum. theol., II a II æ, q. cxxxvii, a. 2, la persévérance, comme d’ailleurs sa compagne, la constance, se rattache à la vertu cardinale de force. Elle s’y ratlache soit comme partie intégrante, soit comme partie potentielle. Voir Vertu. — 1° Comme partie intégrante de la force, la persévérance n’est pas une vertu spéciale, mais un élément de la vertu de force, élément indispensable pour que l’acte de cette vertu soit parfait dans son genre. Ainsi, par exemple, un martyr, mourant à petit feu ou traîné de supplice en supplice, ne sera vraiment fort dans toute l’acception du terme, que s’il persévère jusqu’au bout. Cf. S. Thomas, Sum. theol., IIa-IIæ, q. xlviii, a. 1. Le portrait de l’homme fort tracé par Horace dans ses Odes, 1. III, carm. ni, convient à la constance ainsi envisagée :

Justum et tenacem propositi virum

Non civium ardor prava jubentium

Non vultus instantis tyranni

Mente quatit solida…

Impavidum ferient ruinæ.

2° Comme partie potentielle de la force, la persévérance est une vertu ayant son domaine à elle, son objet propre. Cet objet, ce sont les actes de toutes les vertus, en tant que rendus difficiles par des obstacles extérieurs ou par la durée. L’objet formel, qui en fait une vertu spéciale, est précisément le mérite, la beauté morale de cette fermeté, de cette continuité malgré la difficulté.

III. Importance. —

L’importance de ces deux vertus est souveraine. Sans elles, les autres vertus sont appelées à disparaître à brève échéance, car, pour la nature déchue, où n’y a-t-il pas des difficultés dans la pratique du bien ? D’abord, tout homme doit vaincre sa versatilité naturelle. Hoc ipsutn guod est diu bisislere alicut dif/icili specialem difficultatem habet. S. Thomas, Sum. theol., II a II K, q. cxxxvii, a. 1. Puis, il faut triompher des obstacles, qui proviennent de l’intérieur, des critiques du monde, de ses scandales, parfois même de ses persécutions. C’est pourquoi la sainte Ecriture est pleine d’éloges pour les deux vertus de constance et de persévérance et de pressantes exhortations à les pratiquer : Sta in testamento tuo…. et in opère mandatorum luorum vclerasce, Eccli., xi, 21 ; slabilesestotecl immobiles, abundantes in opère Domini semper. I Cor., xv, 53. Cf. Tob., ii, 18 ; Ps. XVII, 38 ; civ, 4 ; Eccli., ii, 16 ; XXVII, 12 ; Matth., x, 22 ; Luc, ix, 62 ; Joa., iv, 34 ; XVII, 4 ; I Cor., ix, 24 ; Gal., vi, 9 ; II Thess., iii, 13 ; Il Tim., iv, 7 ; Heb., iii, 14 ; vi, 11 ; II Joa., viii, 9 ; Apoc, ii, 26 ; ni, 11. Que si quelques-uns de ces textes ont directement en vue la persévérance effective, ils s’appliquent cependant aussi aux vertus de constance et de persévérance qui sont un des plus puissants moyens pour persévérer en réalité. Cf. Merz, Thésaurus biblicus, Paris, 1892, p. 103-101, 477-’180.

IV. Vices OPPOSÉS. —

La vertu de constance et de persévérance tient le juste milieu entre deux extrêmes : l’inconstance ou mollesse et l’opiniâtreté. L’une pèche par défaut, l’autre par excès. S. Thomas, Sum. theol., ll a II » , q. CXXXVIII, a. 2.

L’inconstance est le vice qui nous fait abandonner sans motif raisonnable la poursuite d’un bien. S’il s’agit d’un bien à faire qui n’est encore qu’en projet, c’est 1’inconslance proprement dite ; s’il s’.i-il d’un bien que l’on a déjà entrepris et que l’on abandonne à cause des