Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/Tome 1/081-090

Fascicules du tome 1
pages 071 à 080

Dictionnaire de Trévoux, 1771
Tome 1, pages 081 à 090

pages 091 à 100


ACH.

ACH, dans la terminaison des noms Géographiques Allemands, vient du mot Aquæ, & signifie que les lieux dont le nom a cette syllabe finale, sont au bord de l’eau, comme Ach, ou Achen, Aquisgranum. Rufach, Aquæ rubeæ. Biberach, Crentzenach, Rotach, & quantité d’autres.

ACHA, ou ACHZA. Rivière d’Allemagne. Acha, Achzo. Elle a sa source dans le Comté de Tirol, d’où elle passe en Bavière, traverse le lac de Chiemsée, & se jette dans l’In, un peu au-dessus de l’embouchure de la rivière de Saltz. Après la sortie du Lac, elle se nomme Altza.

Acha. Petite rivière du Duché de Bavière. Acha. Elle coule à l’orient du Lech, & se décharge dans le Danube, presque vis-à-vis de Neubourg.

Il y a une troisième Acha à l’orient de la seconde, & qui se mêle au Danube au-dessus d’Ingolstad.

ACHACHICA. Petite ville de l’Amérique septentrionale. Achachica. Elle est dans la province de Mexique, vers les confins de Tlascola & de Panuco. Les mines d’Achachica sont des mines d’argent, qui rendent cette ville considérable.

ACHAD. Une des villes que Nemrod bâtit. Achad. On n’en sait point la situation, & c’est sans fondement que quelques Géographes la placent au confluent de l’Euphrate & du Tigre. Gen. X. 10.

ACHAÏE. s. f. Achaia, Hellas. Ancienne province de Grèce, entre l’Epire, la Thessalie, la mer Ægée, & le Péloponèse. On l’appelle aujourd’hui Livadie. On prétend que son nom lui vient d’ἀπὸ τοὺς ἄχους qui signifie douleur, parce qu’elle étoit sujète, dit-on, à de grandes inondations. Si cela est, ne seroit-il pas plus naturel de tirer son nom de אחו, achou, qui signifie un lieu humide, marécageux, plein de roseaux ? Cadmus & ses Phéniciens lui avoient donné ce nom. Mais d’autres prétendent que ce pays a été ainsi nommé d’Achéus, fils de Xurhus, fils d’Hellen, & petit-fils de Deucalion, qui chassé de Thessalie s’empara du Péloponèse, et eut de Creüse fille d’Erectée, Roi d’Athènes, Achéus & Ion, dont l’un fut chef des Achéens, & l’autre des Ioniens. On a encore appelé Achaïe proprement dite, une province du Péloponèse, qu’on nomme aujourd’hui Duché de Clarence. On donne aussi quelquefois ce nom à tout le Péloponèse.

ACHAÏENS, ou ACHÉENS, ACHÉES. Ainsi qu’écrit M. Corneille. Achæi. Peuples de l’Achaïe, & généralement les Grecs, qui sont souvent ainsi nommés dans les Poëtes. M. Tourreil écrit & dit Achaïens dans sa Table, & Achéens dans sa Préface sur sa traduction des Oraisons de Démosthène. Les habitans du Péloponèse, jusqu’aux Héraclides, se divisoient proprement en Achéens & en Ioniens. Les premiers possédoient les terres que les Héraclides assignerent aux Doriens, & aux autres peuples qui les avoient accompagnés. » Ceux des Achéens qui descendoient d’Æolus, & que l’on chassa de Lacédémone, se retirèrent d’abord en Thrace sous le commandement de Penthile, & après la mort allèrent s’établir dans le canton de l’Asie mineure, qu’ils appelèrent Æolide. Quant aux Achéens de Mycènes, comme ils se voyoient contraints par les Héraclides d’abandonner leur pays, ils s’emparèrent de celui des Ioniens. Tourr. Polybe a écrit assez amplement de la République des Achéens, dans le prélude de son Histoire. Un Hollandois, nommé Martin Schockius, a fait un Traité Latin de la République des Achéens & des Veïens, dans lequel, parce que le gouvernement des 'Achéens a toujours été un des plus estimés de la Grèce, il affecte de lui comparer celui des Provinces-Unies.

ACHAÏQUE. adj. m. & f. Achaicus, a. Qui appartient, qui a rapport à l’Achaïe. L. Mummius, qui détruisit Corinthe, l’an de Rome 607, fut surnommé l’Achaïque, parce qu’il soumit l’Achaïe.

ACHAÏSONNER. v. a. Vieux mot qui signifioit, prendre occasion d’exiger injustement de quelqu’un la chose qui lui appartient, le vexer, l’inquiéter. Rag. Vexare, iniquam exigendi occasionem captare.

ACHALANDER. v. a. Attirer les chalands, accréditer, mettre une boutique, ou une maison, en réputation d’avoir de bonne marchandise, & à bon prix. Emptores allicere. Toute la fortune d’un marchand consiste à bien achalander sa boutique. Ce terme ne peut trouver place que dans la conversation.

Achalander, est quelquefois réciproque. Cette boutique s’est bien achalandée. Cet homme commence à s’achalander. On le dit aussi en badinant, d’une personne qui a beaucoup d’intrigues : cette fille est fort achalandée.

ACHALANDÉ, ÉE. part. Qui a des chalands. On le dit également du marchand, & de la boutique. Un marchand achalandé, celui qui fait un grand débit. Une boutique achalandée, celle où il vient quantité de marchands pour acheter des marchandises.

☞ ACHAMECH ou ACAMECH. selon quelques Chimistes, signifie l’écume, ou la litharge d’argent.

ACHANACA. Plante des Indes, dont la feuille ressemble au chou ; mais elle est plus mince, & les côtes en sont plus tendres. Son fruit est gros comme un œuf, & de couleur jaune ; on le nomme Alfard : il croit au royaume de Mély ; on emploie sa décoction dans les maladies vénériennes. Voyez Thevet.

ACHANAMASI. s. m. Terme de Relation. Nom de la quatrième prière que les Turcs font tous les jours, & qui se fait quand le soleil est couché. Quarta Turcarum precatio. Mahomet a ordonné cinq prières en vingt-quatre heures : l’Achanamasi est la quatrième, ou la prière du soir. A. D. S. M.

☞ ACHANE. s. f. Ancienne mesure de blé dont on se servoit en Perse, qui contenoit quarante-cinq médimnes Attiques.

ACHAOVAN, ou ACHAOVA. s. m. Quelques personnes donnent ce nom à une plante semblable à la camomille, qu’ils appellent Achave, Achove, Achoavan, & quelquefois Alacuan. Cette plante est fort abondante en Egypte, sur-tout au Caire, dans un lieu appelé Sbéchie. Dict. de James.

☞ ACHARNAR. Voyez Acherner.

☞ ACHARNEMENT. s. m. Dans le sens propre, action d’un animal qui s’attache opiniâtrement à sa proie. Pertinax prædæ inhæsio. L’acharnement d’un loup.

On le dit aussi de la fureur opiniâtre avec laquelle les hommes & les animaux se battent les uns contre les autres. Ces deux hommes, ces deux dogues se sont battus avec acharnement.

☞ Dans le sens figuré, forte passion, attachement opiniâtre à quelque chose. Libido, propensio. On le dit en mauvaise part. Il a un furieux acharnement pour le jeu, pour la débauche.

☞ On le dit encore de l’animosité opiniâtre avec laquelle on persécute quelqu’un. Infectatio vehemens, acerba. L’acharnement de deux plaideurs, qui cherchent à s’écraser. Ces deux auteurs se déchirent avec acharnement.

Tous les dévots de cœur font aisés à connoître.
Jamais contre un pécheur ils n’ont d’acharnement ;
Ils attachent leur haine au péché seulement. Mol.

Arracher ce levain des fureurs parricides,
Qu’enfantent les esprits de nouveautés avides,
Dont les coups inhumains sont d’autant plus mortels,
Que leur acharnement croit servir les autels.

La Bastide.

ACHARNER. v. a. Terme de Vénerie. Donner aux bêtes le goût, l’appétit de la chair. Carnis famem, ou appetitum, excitare, irritare, ciere. On acharne les chiens, les oiseaux de proie à la curée. On dit aussi en Fauconnerie, acharner l’oiseau sur le tiroir, soit au poing avec le tiroir, qui est une aile de chapon ou de coq-d’inde ; soit en attachant le tiroir au leurre. Accipitres oblatâ escâ pascere Il y a des oiseaux farouches qui ne s’acharnent jamais, & qui se laissent plutôt mourir de faim.

On dit aussi en Fauconnerie, Acharner le lièvre, mettre un morceau de chair dessus.

Acharner. Animer. Irritare. On les a acharnés les uns contre les autres.

Acharner. Avec le pronom personnel, s’attacher avec fureur. Le lion s’acharne sur sa proie.

Dans un sens figuré, il signifie s’attacher avec fureur, avec opiniâtreté à persécuter quelqu’un, à le blâmer. Acriter infectari. Ces deux plaideurs sont furieusement acharnés l’un contre l’autre.

Il déchire l’Eglise il s’acharne contre elle ;
Et voulant s’affranchir des droits qu’elle a sur nous.
Il se les attribue & les prodigue à tous.

La Bastide.

Il signifie quelquefois s’attacher avec excès. Ferri immoderatiùs. Il est dangereux de s’acharner au jeu. Ce Docteur est si fort acharné à l’étude, qu’il se desseche sur les Livres. S. Evr. Ce mot est composé, & dérive de chair.

ACHARNÉ, ÉE. part. & adj. Animal acharné sur sa proie. Combat acharné. Homme acharné au jeu.

ACHART. s. m. Nom propre d’homme. Aicadrus. Saint Aicadres, que nous appelons plus communément Saint Achart, & que d’autres nomment encore S. Acaire, étoit issu d’une des meilleures maisons de Poitou, & fut second Abbé de Jumièges.

ACHASSES. Rivière de Languedoc, en France, Achassia, Achassius. Elle a sa source dans les montagnes, près de Viviers. Elle arrose le Vivarais, & au-dessous de Teil elle se jette dans le Rhône.

ACHAT. s. m. Acquisition d’une chose moyennant le payement de sa valeur. Contrat par lequel le vendeur promet & s’oblige de livrer quelque chose à l’acheteur, pour un certain prix dont ils sont convenus. Trois choses font la substance d’un contrat, le consentement du vendeur & de l’acheteur, la chose vendue & le prix. Emptio. Il a fait aujourd’hui l’achat d’une terre à sa bienséance. Il a fait un mauvais achat. Il se prend aussi pour la chose achetée. Je veux vous montrer mon achat. Achat passe louage, est un proverbe tiré des Coutumes de Namur, c’est-à dire, que celui qui a acheté un héritage, peut jouir malgré le bail fait à un tiers, & déposséder le locataire, sauf à celui-ci à se pourvoir pour les dommages & intérêts. Ce mot vient du Latin adcaptare, ou adceptare. L’achat diffère de l’échange, en ce que dans l’achat on livre, ou l’on promet de livrer une chose pour un certain prix ; & dans l’échange on donne une chose pour une autre, qui n’est pas de l’argent ; par exemple, du blé pour du vin, du bois pour du fer. Vente est le contraire d’achat.

ACHATE. s. m. (prononcez Akate.) Achates. Nom d’un des compagnons d’Enée, son ami & son confident, qui, dans Virgile, ne le quitte presque jamais. C’est de-là que ce mot a passé dans notre Langue pour signifier un ami constant, un compagnon fidèle, un homme avec lequel on est toujours.

Sans ce fidèle Achate il n’eût su faire un pas ;
L’un étoit le David, l’autre le Jonathas.

ACHATES. s. m. Ancien nom de la rivière du Drillo en Sicile. Achates.

ACHATOU. Village de l’île de Chipre. Aphrodisium. Il est sur la côte septentrionale. C’étoit autrefois une ville célèbre consacrée à Venus, que les Grecs appellent Aphrodite. Elle étoit à neuf milles de Salamine, entre Carpasium & Ceraunia.

ACHAZIB, ACZIBA. Ancienne ville de la Terre-Sainte, dans la tribu d’Aser. S. Jérôme dit que dans la suite elle fut nommée Ecdippe, & il la place dans la Phénicie. Elle étoit près du lieu qui s’appelle aujourd’hui Sadderia, entre Ptolémaïde, & Tyr.

ACHBAATS. s. m. Terme de Relation. Officier dans les villes de Perse. C’est le Commandant du guet, qui a soin des prisons, & qui fait la ronde toutes les nuits. Dux Vigilum.

☞ ACHBALUC-MANGI. Ville située sur les confins de la Chine, ce qui est exprimé par son nom, qui veut dire la Ville Blanche des confins de Mangi, ou de la Chine.

ACHE. s. f. ou bien API. s. m. Plante ombellifére dont les racines sont chevelues, fibreuses & blanchâtres ; les feuilles approchent de celles du persil ordinaire, mais sont plus amples, plus épaisses, & d’un autre vert ; les tiges sont branchues, médiocrement hautes, & portent à leurs extrémités des bouquets de fleurs disposées en parasol. Ses semences sont menues, arrondies, & cannelées sur le dos. Cette plante croît dans les marais & le long des ruisseaux ; transportée dans les jardins, d’âcre & d’amère qu’elle étoit, elle devient douce, & d’un âcre aromatique fort agréable. Le port de toute la plante change aussi par la culture ; c’est ce qui a trompé ceux qui ont cru que l’ache de marais & l’ache cultivée, étoient deux plantes différentes. On nomme en Latin l’ache de marais, ou ache simplement, Apium palustre ; & l’ache cultivée, ou api, & plus ordinairement céleri, Apium dulce, Celeri Italorum. L’ache est apéritive, diurétique, & bonne pour le scorbut. Ses deux espèces, la blanche & la jaune, dans l’extrémité de leur tige, forment un grand panache rempli de fleurs semblables à celles du lilas. Elles fleurissent dans le printemps, & sentent fort bon. La jaune a les racines rougeâtres, & en forme de glands. La blanche les a toutes blanches. Elle se plante de la profondeur de trois doigts à un demi-pied de distance. On la lève tous les trois ans pour en ôter le peuple. L’ache demande médiocrement le soleil, avec une terre grasse & humide. Quelques-uns distinguent quatre sortes d’ache. D’autres en comptent six. 1o L’ache de Macédoine, Apium Macedonicum, 2o L’ache de jardin, Apium hortense, qui est le persil ordinaire. 3o L’ache de montagne, Apium montanum. 4o L’ache de marais, Apium palustre. D’autres ajoutent, 5o l’ache de Smyrne, Apium Smyrnicum, 6o celui qu’ils appellent Hipposclinum. Les Grecs en certains jeux donnoient une couronne d’ache au vainqueur. De-là vient que sur les médailles de Néron on trouve Isthmia dans une courone d’ache. Voyez Patin, Vaillant dans ses Colonies, & M. Spanheim, p. 314, de l’édit. de Londres.

Néanmoins cette plante étoit de celles que les Anciens regardoient comme funèbres ou fatales. Ils en répandoient dans les sépulcres. De-là est venu le proverbe:Il ne lui faut plus que de l’ache, Apio eget, lorsque l’on parloit d’un malade désespéré. Dans les Jeux Néméens institués en mémoire de la mort d’Achemorus, c’étoit l’ache qui couronnoit les vainqueurs, pour conserver l’origine de cette fête lugubre. Plin. Hist. Nat. l. 19. c. 8.

☞ ACHECAMBEY. île de l’Amérique, l’une des Lucayes, près de celle d’Abacoa.

ACHÉE. s. f. On donne ce nom & celui de Laiche à certains vers qui servent à nourrir des oiseaux, ou pour amorcer les hameçons des pêcheurs. Dict. Économique.

ACHÉENNE. s. f. Achæa. C’est-à-dire, la triste, la désolée. C’est un surnom qu’on a donné, 1o. à Cérès, à cause de la douleur que lui causa l’enlèvement de Proserpine sa fille. Plutarque, dans son Livre sur Isis & Osiris, dit que les Bœotiens avoient un Temple de Cérès Achéenne. 2o. Aristote, L. de mirabil. dit que les Dauniens, ancien peuple d’Italie, avoient un Temple dédié à Pallas Achéenne.

Ce mot a deux origines différentes. Quand il se donne à Cérès, il vient du mot Grec ἄχος, qui signifie douleur. Mais quand il a été donné à Pallas par les Dauniens, je crois qu’il signifie, qui est venu d’Achaïe, & que ce n’est que le féminin d’Achéen. En effet, ce Temple des Dauniens étoit vraisemblablement bâti par Dioméde & les Achéens; c’est-à-dire, les Grecs qui vinrent avec lui en Italie, puisqu’Aristote dit qu’on y conservoit les armes de ce Capitaine & de ses compagnons. Ils y déposerent apparemment une statue de Pallas qu’ils avoient apportée, & qui, ou parce qu’ils l’apportoient d’Achaïe, ou parce qu’elle fut mise là par des Achéens, fut surnommée Achéenne.

ACHEIROPOËTE. adj. Pris substantivement. Nom Grec, formé de l’α privatif, de χεὶρ, la main, & de ποίητις, fait de ποιῶ, faire, signifie, qui n’est pas fait avec la main. On désigne par ce mot un portrait de Notre-Seigneur qui se voit à Rome dans l’église de S. Jean de Latran, & qui, à ce que l’on dit, ayant été ébauché par S. Luc, fut achevé par les Anges, & ne fut point fait de main d’homme.

ACHÉLOÉ. s. f. C’est le nom d’une des Harpies, à qui on donne pour sœurs Alope & Ocypéte.

ACHÉLOUS. s. m. Fleuve célèbre dans l’Antiquité, Achéloüs. Il a sa source dans le mont Pinde, en Thessalie. Il séparoit l’Acarnanie de l’Étolie, & déchargeoit ses eaux dans le Sinus Maliacus, aujourd’hui golfe de Ziton. Achéloüs, selon les Poëtes, étoit fils de l’Océan & de la Terre, ou de Thétis ; & selon d’autres, du Soleil & de la Terre. Il eut un démêlé avec Hercule au sujet de Déjanire, fille d’Œnéus, Roi de Calydonie. Hercule vainquit Achéloüs, qui fut obligé de se cacher dans ses eaux. Dans ce combat Achéloüs sentant qu’il n’étoit pas de la force d’Hercule, se changea en serpent, puis en taureau. Hercule lui rompit ou lui coupa une corne ; & Achéloüs dans la suite, pour retirer sa corne des mains du vainqueur, lui donna en échange celle d’Amalthée.

Étienne de Bysance dit que ce fleuve s’appelait d’abord Thoas, & qu’ensuite il fut nommé Achéloüs, du nom d'Achéloüs, à son retour de Thessalie avec Alcmaon. La fable confond ce fleuve avec Achéloüs, & dit qu’il avoit, comme Prothée, le don de prendre telle forme qu’il vouloit.

ACHEM ou ACHIM. Achemum, Acemum. Nom d’une ville & d’un royaume qui occupe la partie septentrionale de l’île de Sumatra. Achem est le plus grand royaume de l’île de Sumatra, éloignée d’environ douze lieues de la terre ferme où est Malaca. Bouh. M. Corneille écrit dans un endroit Achen, & dans un autre Achen, & le P. Bouhours Achen. J’ai vû des relations qui écrivoient toujours de même.

ACHÉMENIDE. s. m. plus souvent au pl. Achœmenides. Achœmenides, Achœmenidæ. C’est un nom Patronimique, qui signifie, un homme descendu d’Achœmenes, père de Cambyse, & grand père d’un Cyrus, différent du grand Cyrus, homme de la famille royale de ces anciens Perses. Pline & Solin ont prétendu que c’étoit un nom de peuple. Ils se sont trompés ; c’est un nom de famille. Xerxès dit dans Hérodote, Livre vii. Chap. ii. qu’il est fils de Darius, fils d’Hystaspe, fils d’Arsames, fils d’Ariamnes, fils de Theispes Cyrus, fils de Cambyse, fils d’Achœmenes. C’est de là qu’on appelle les Rois Perses Achœmenidas, ainsi que le dit Hérodote, Liv. i. Ch. cxxv. Les Poëtes étendent encore la signification de ce nom ; & comme ils appellent Æneadæ, & Romulidæ, les Romains en général, ils appellent de même les Perses Achœmenides, & ils disent Achœmenien ; pour dire Persan.

☞ ACHEMENIS. s. f. Plante dont Pline fait mention, à laquelle la fable attribuoit la vertu de jeter la terreur dans les armées.

Achemens. s. m. pl. Terme de Blason, se dit des lambrequins découpés ou chaperons, qui enveloppent le calque & l’écu. Fluentes circa scutum & galeam laciniæ. Ils font découpés d’étoffe & ornés de perles, & de broderie ; parce qu’en vieux François on appeloit achêmes toutes sortes d’ornemens, & particulièrement ceux des femmes ; comme coiffes, guimpes, atours, chaînes, anneaux, &c.

ACHEMINEMENT. s. m. Il ne se dit point dans le propre. Disposition à une chose, préparation qui en fait espérer le succès. Gradus, via. Le mépris des grandeurs de ce monde est un acheminement à la perfection. Le gain de la bataille fait un acheminement à la paix. Sar. Un premier pas si heureux fut un acheminement à une plus grande fortune. M. Scud.

ACHEMINER. v. a. On disoit autrefois acheminer quelqu’un, le mettre dans son chemin. Aliquem in viam deducere. Aujourd’hui on ne le dit au propre qu’avec le pronom personnel. Se mettre en chemin. In viam se dare, contendere, tendere, pergere. Iter instituere, intendere. Ces voyageurs se sont enfin acheminés. Il s’achemina vers la Cappadoce. Vaug. Il s’achemina par les déserts, pour surprendre l’ennemi à l’improviste. Ablanc. Les Croisés s’acheminoient gais & gaillards à l’entreprise de la guerre sainte, comme assurés d’acquérir le paradis. Pasq.

Acheminer. v. a. se dit figurément en parlant des affaires, des entreprises, pour signifier les avancer, les mettre en bon train, en état de pouvoir réussir. Le gain d’une bataille peut acheminer la paix. Mon Avocat a bien acheminé mon affaire, il l’a mise en bon train. Perducere, procurare, administrare.

☞ Je trouve dans le grand Vocabulaire acheminer son entreprise jusqu’à la fin. Les termes d’acheminer & de fin paroissent pas faits pour aller ensemble. On achemine une affaire, une entreprise ; c’est-à-dire, qu’on la met en bon train ; on en prépare le succès ; & on la conduit jusqu’à la fin, on la finit, on la termine, mais acheminer jusqu’à la fin présente des idées non-seulement in-cohérentes, mais même qui s’excluent l’une & l’autre.

☞ Au reste, quoique le Dict. de l’Acad. ne dise rien de l’usage de ce mot, je ne crois pas qu’il puisse entrer dans le style noble.

Acheminer un cheval. Terme de Manège. Accoutumer un poulain à aller droit devant lui. Voy. Acheminé.

ACHEMINÉ, ÉE. part.

On appelle en termes de Manège, un cheval acheminé, celui qui est accoutumé à aller droit devant lui, qui connoit la bride, & répond aux éperons ; qui est dégourdi, & rompu. Aptus, idoneus. Ces mots se tirent du primitif chemin.

ACHENOIS, ou ACHEMOIS, OISE. s. m. & f. Qui est d’Achem ou Achen. M. Corneille, dans l’endroit où il écrit Achin, dit Achinois ; mais le P. Bouhours, dans la Vie de S. François Xavier, dit Achénois. Le P. Prémare Jésuite, dans une relation fort ingénieuse & fort bien écrite, qui parut en 1701, dit aussi Achénois. On n’eut point d’autres nouvelles à Malaca de l’armée des Achénois, que celles qu’elle y apporta elle-même. Bouh. Les Achénois sont fort superstitieux à l’égard de se laver & de se purifier pour leurs souillures, ce qui fait qu’ils aiment à demeurer auprès de quelque ruisseau. T. Corn.

ACHERNER. Terme d’Astronomie. C’est le nom d’une étoile fixe de la première grandeur dans Eridanus, & dont la longitude est de 10 d. 31. min. & la latitude de 56. d.

ACHÉRON. s. m. Acheron, Acheros. C’est le nom de plusieurs fleuves. On en met un dans l’Epire, nommé aujourd’hui Verlichi nigro, ou Vanas, que Ptolomée appelle Acheron, & Tite-Live Acheros. Strabon en met un dans l’Epire, contrée du Péloponèse, & un autre dans le pays des Brutiens en Italie ; c’est-à-dire, dans la Calabre, que Barrius, dans sa Calabre, prétend être celui qu’on nomme aujourd’hui Campaniano. Il se déchargeoit dans la mer à Butrinto dans le Sinus Ambracius, Auguste ayant conduit une Colonie à Butrinto, fit un pont de mille pieds de long sur l’embouchure de l’Achéron. Tout le monde admiroit cet ouvrage, dit Pline, Liv. iv. C. i. Nous en avons une médaille. August. Butr. La tête d’Auguste nue : au revers P. Pompon. Un pont, Voyez M. Vaillant, Méd. des Emper. T. I. p. 19. Strabon met un autre fleuve Achéron en Bithynie, proche d’Héraclée, &c. Mais le plus fameux de ce nom est celui que les Poëtes comptent parmi les fleuves de l’enfer : si cependant il est différent de l’Achéron de l’Epire, car on prétend que les anciens ont mis l’enfer en Epire, parce que les premiers Epirotes travailloient aux mines qu’ils trouvèrent dans leur pays, & y faisoient périr beaucoup d’esclaves.

Achéron, est aussi quelquefois un Dieu qui nâquit de Cérès dans l’île de Crète, & qui ne pouvant soutenir la lumière du jour, se retira aux enfers, & y devint un fleuve infernal, Voyez Bocace, L. 3. de la Généal. des Dieux, C. 4. Rudbecks, qui dans son Atlantique, attribue à la Suéde tout ce que les anciens ont dit de quelque pays que ce soit, prétend que l’Achéron, l’enfer, les champs élisées, sont la Suéde, & soutient que la manière dont on rendoit anciennement la justice parmi les peuples du septentrion, est l’original d’après lequel les Poëtes ont tiré toutes les descriptions qu’ils ont données de la justice infernale ou des procédures de Minos, d’Æaque, & de Rhadamante. Hofman dérive ce mot Achéron de l’Hébreu אחרון, qui signifie dernier, ce qui est après, ce qui est éloigné. D’autres le tirent du Grec, c’est-à-dire, de l’α privatif, & de χαίρω, se réjouir, ou bien de ἄχος douleur, tristesse, & ρεω, je coule ; comme qui diroit, un fleuve qui roule des larmes & des pleurs. Les Poëtes prennent figurément l’Achéron pour tout l’enfer.

Et l’avare Achéron ne lâche point sa proie.

☞ ACHÉRONTIQUE. adj. qui a rapport à l’Achéron. L’art de deviner avoit plusieurs branches, & les Etrusques excelloient en toutes. Tagès passoit pour l’inventeur de cet art. Il avoit composé quinze volumes qu’on nomma Achérontiques, parce qu’ils étoient capables d’épouvanter les Lecteurs. On conservoit chez les Etrusques ces volumes avec autant de soin que les Romains conservoient les livres Sybillins. Mém. de l’Acad. Etrusque.

ACHÉRUSE. s. m. Etoit un lac d’Egypte près de Memphis, aux environs duquel il y avoit de belles campagnes, où les anciens Egyptiens venoient déposer leurs morts dans des tombeaux creusés exprès. Dans ces campagnes il y avoit un Temple consacré à Hécate la ténébreuse, & deux marais appelés le Cocyte & le Léthé. Et voilà ce qui a donné aux Poëtes l’idée de leur enfer, & de leurs champs élisées.

ACHETER. v. Ceux qui prononcent ajetter, prononcent très-mal. Acquérir quelque chose à prix d’argent dont on convient. Emere. Voyez Achat. Il a acheté une terre, & l’a bien payée : il l’a achetée à beaux deniers comptans. Il a acheté les droits de cette succession. Il a acheté beaucoup d’étoffes à crédit. J’achèterois cela au poids de l’or, pour dire, chèrement. Il est permis par le Droit civil, d’acheter l’espérance. De Roch. Voyez ESPÉRANCE. Celui qui achete des charges publiques, se met dans une nécessité de vendre en détail ce qu’il a acquis en gros. C’est ce que disoit autrefois l’Empereur Sévère. De Roch.

Dès que l’impression fait éclore un Poëte,
Il est esclave-né de quiconque l’achete. Boil.

On dit aussi, acheter des bans ; pour dire, obtenir la dispense de les publier. Quelques-uns dérivent ce mot de acceptare, parce que le consentement de l’acheteur est ce qui rend parfait le contrat de vente. Ménage & du Cange veulent qu’il vienne de accaptare, qui se trouve dans les Capitulaires, & signifie petere & acquirere. D’autres le dérivent de l’Italien cattare & accattare. Les Picards disent encore acater.

Acheter comptant. C’est payer sur le champ en monnoie réelle les marchandises qu’on vient d’acheter.

Acheter au comptant ou pour comptant. C’est une manière de parler des Négocians, qui semble signifier qu’on devroit payer comptant ; cependant elle signifie que quand on achete de cette façon, on a quelquefois jusqu’à trois mois de terme pour payer.

Acheter à crédit ou à terme. C’est-à-dire, acheter à condition de payer dans un certain temps dont on convient.

Acheter, partie comptant, & partie à temps, ou à crédit. C’est payer une partie sur le champ, & prendre du temps pour l’autre.

Acheter à crédit pour un temps, à charge d’escompte, ou de discompte, ou à tant pour cent par mois pour le prompt payement. C’est une convention par laquelle le vendeur s’oblige de faire une diminution ou rabais sur le payement des marchandises qu’il a vendues, supposée que l’acheteur veuille les lui payer avant le temps, & cela à proportion de ce qu’il en restera à expirer, à compter du jour du payement.

Acheter à profit. C’est acheter suivant le livre journal d’achat du vendeur, à tant pour cent de bénéfice.

Acheter pour payer d’une foire à l’autre, ou pour payer de foire en foire, C’est proprement acheter à crédit pour un temps.

Acheter pour son compte : c’est acheter pour soi-même.

Acheter par commission. C’est acheter pour le compte d’autrui, moyennant un droit que l’on appelle de commission.

On dit proverbialement : qui achete ce qu’il ne peut, vend après ce qu’il ne veut ; pour dire, qu’on ne doit rien acheter au-dessus de ses forces. Et en parlant du vin : qui bon l’achete, bon le boit.

On dit familièrement, acheter tête & queue ; pour dire, acheter bien cher.

Acheter, se dit figurément en morale, pour marquer les difficultés qu’il a fallu lever, les obstacles qu’il a fallu surmonter, les peines qu’il a fallu essuyer pour obtenir une chose. Redimere carè. Il m’a fait acheter bien cher la grâce que je demandois. Carè vendidit. Prenez garde d’acheter un bien imaginaire, aux dépens d’un vrai bien. Je n’achete point si cher des espérances. Dac. Les hommes sont tellement amoureux de la liberté, qu’ils l’achètent au prix de la vie. Dur. Ce partisan enrichi par les concussions, a acheté de la naissance, & un nom. La Bruy.

ACHETÉ, ÉE. part. Emptus, a.

ACHETEUR. s. m. Celui qui achete. Emptor. (On dit acquéreur quand il est question d’un immeuble ; acquéreur d’un fonds, d’une maison). C’est une espèce de revenu, que de n’être pas grand acheteur. Dur. On dit en proverbe, qu’il y a plus de fous acheteurs que de fous vendeurs. Acheteur & vendeur sont termes corrélatifs.

☞ ACHETEUSE. s. f. Femme qui achete. Emptrix. Cette femme est une grande acheteuse : elle a envie d’acheter tout ce qu’elle voit.

ACHETIVER. v. Vieux mot, qui veut dire, captiver. Captivum facere.

ACHÉVEMENT. s. m. Fin d’un ouvrage ; la perfection qu’on donne à une chose. Conduite d’une chose jusqu’à son dernier période. Perfectio, consummatio. Nous ne verrons pas l’achévement du Louvre.

Achévement. Terme de Teinture. Il se dit particulièrement des étoffes teintes en noir, qui sont commencées par les Teinturiers du grand teint, & achevées par ceux du petit teint. On fait des débouillis pour bien juger du bon achévement des noirs. Perfectio.

Achévement, au figuré, synonyme de perfection. On dit l’achévement d’un tableau, d’un ouvrage ; pour marquer toute la perfection dont il est susceptible. Dans les ouvrages de l’art, c’est le travail & l’achévement que l’on considère. Boil.

Achévement. Terme de Poëtique. C’est dans le poëme épique le dernier passage de l’agitation & du trouble, au repos & à la tranquillité ; le point qui termine le dénouement. Il y a de la différence entre le dénouement & l’achévement. L’achévement est un point & un instant sans étendue & sans durée, au lieu que le dénouement n’est pas sans longueur. L’achévement est donc la fin du dernier dénouement. Dans l’Eneïde, la mort de Turnus fait l’achévement, parce qu’elle fait cesser l’action d’Enée. Le Bossu. On dispute si l’achévement doit laisser le héros dans une tranquillité heureuse, ou s’il est libre de le laisser Malheureux. A peine voit-on de poësie qui finisse par le malheur de son héros. Id.

ACHEVER. v. Au propre, c’est finir ce que l’on a commencé : conduire une chose jusqu’à son dernier période. Perficere, absolvere, consummare. Dieu acheva l’ouvrage de la création en six jours, & confiera le septième au repos. Achever comme on a commencé. Rarement on acheve bien ce que l’on a mal commencé.

☞ On le dit aussi avec le pronom personnel. Ce livre s’acheve.

On acheve, dit M. l’Abbé Girard, ce qui est commencé est continuant à y travailler. On finit ce qui est avancé en y mettant la dernière main. On termine ce qui ne doit pas durer en le faisant discontinuer. Ainsi l’idée caractéristique d’achever est la conduite de la chose jusqu’à son dernier période ; celle de finir est l’arrivée de ce période ; & celle de terminer est la cessation de la chose.

Achever, n’a proprement rapport qu’à l’ouvrage permanent, soit de la main, soit de l’esprit. Finir, se place particulièrement à l’égard de l’occupation passagère. Terminer, ne se dit guère que pour les discussions, les différens & les courses.

Achever, au figuré, synonyme de perfectionner, donner à une chose toutes les perfections, toutes les bonnes qualités de son genre. Perficere. Souvent les auteurs ne se donnent pas la peine d’achever leurs ouvrages. L’étude commence un honnête homme, & le commerce du monde l’acheve. S. Evr. Dans ce sens il est plus souvent employé comme adjectif. Voyez Achevé.

☞ On dit, achever les jours, achever sa carrière, pour dire mourir. Vitam finire, supremum diem obire.

Achever quelqu’un, signifie quelquefois le tuer, lui donner le dernier coup. Conficere. Le Commandant se jeta des Tours en bas, où le Général le fit achever en sa présence. Mém. de M. de la Rochef. Il trouva son ennemi blessé à mort, & il eut la cruauté de l’achever.

Quelquefois il est synonyme de ruiner. Il ne falloit plus que ce malheur pour m’achever, ou pour m’achever de peindre.

Bientôt pour m’achever, un homme à mine austère.
Un exploit à la main, entre en mon Presbytère.

☞ Quelquefois encore on l’emploie comme synonyme d’enivrer entièrement. Il ne falloit plus que cette santé pour l’achever.

☞ Dans ces acceptions il est du style familier, & s’emploie également avec le pronom personnel.

☞ On dit qu’un homme s’est achevé ; qu’il s’est achevé de peindre ; pour dire, qu’il s’est enivré, ou qu’il s’est ruiné.

☞ Il est inutile d’avertir que s’achever de peindre, & achever de se peindre, signifient des choses tout-à-fait différentes.

Achever un cheval (terme de Manége). Voyez Achevé.

Achever, terme de Potier d’étain, se dit de ce qui reste à faire depuis que l’ouvrage est tourné, jusqu’à ce qu’il soit fini.

☞ ACHEVÉ, ÉE. part. & adj. Dans le sens propre fini, conduit à son dernier période. Finitus, absolutus. Cet ouvrage, ce bâtiment n’est pas encore achevé.

Achevé, dans le sens figuré, synonyme de parfait, perfectus, numeris omnibus absolutus, s’applique à ce qui a toutes les bonnes qualités de son genre, sans aucun défaut. Une chose est achevée, quand elle ne peut pas être mieux. C’est une pièce achevée. Une beauté achevée. Il arrive souvent que les choses se présentent plus achevées à notre esprit, qu’il ne les pourroit faire avec beaucoup d’art. La Rochef.

☞ Ce terme appliqué aux choses, ne se prend jamais en mauvaise part. Appliqué aux personnes, il se prend ordinairement en bonne part. C’est un Prince achevé, qui a toutes les perfections requises, auquel il ne manque aucune des bonnes qualités qu’il doit avoir.

☞ Mais quelquefois aussi on s’en sert pour désigner ce qui est extrêmement mauvais dans son espèce. C’est un fou achevé, un sot achevé, c’est-à-dire, auquel il ne manque rien pour être ce qu’il est.

☞ Les Auteurs du grand Vocabulaire prétendent qu’achevé au figuré désigne ce qui est parfait, accompli, & qui a toutes les qualités requises pour être supérieur dans son espèce. Ces dernières paroles renferment une erreur évidente. Cela ne se dit que de ce qui excelle, parce qu’exceller suppose une comparaison, & met au-dessus de tout ce qui est de la même espèce : mais être achevé, suppose & désigne seulement le degré de perfection qui convient à la chose, sans faire de comparaison, & n’exclut point les égaux. L’Athalie de Racine est une Tragédie achevée, sans doute : mais on pourroit dire la même chose d’une autre Tragédie sur le même sujet. La Descente de croix de Rubens est un tableau achevé : mais on pourroit dire la même chose du tableau d’un grand Peintre qui auroit traité le même sujet, & l’on diroit de ces deux tableaux qu’ils sont achevés. Ainsi achevé ne suppose point de comparaison, ne met point une chose au-dessus de celles de son espèce, ou ne la rend point supérieure dans son espèce. Lorsqu’on se monte sur le ton critique, & qu’on s’érige en réformateurs, il faut avoir l’esprit de justesse & de distinction. On ne trouve pas dans cet exemple, ainsi que dans bien d’autres, cette gradation philosophique dont se vantent ces auteurs, qui fait apercevoir d’un coup-d’œil l’origine, la filiation, les sens différens, la vraie valeur, & le meilleur emploi d’un mot pris séparement ou réuni avec d’autres.

En termes de Manège, on appelle un cheval achevé, celui qui est bien dressé, & qui ne manque point à faire un certain manège. On dit, un cheval commencé, acheminé, & achevé ; pour exprimer les diverses dispositions & états d’un cheval qui a de l’école.

Ces mots viennent de chef, comme qui diroit, mettre à chef, mettre à perfection.

ACHEVOIR. s. m. Terme de manufacture. En certains lieux, en parlant d’une toile ou d’une étoffe, on dit qu’elle est à l’achevoir, quand il n’en reste que peu d’aunes à faire. Finitio.

ACHIA. s. f. Sorte de canne qui croît dans les Indes orientales, que l’on confit en vert dans le pays avec de fort vinaigre, du poivre, quelques épices, & autres ingrédiens.

ACHIER. s. m. Vieux mot. C’étoit le lieu où l’on mettoit les ruches des abeilles. On trouve dans une ancienne Coutume : l’essain d’Aviettes est mien, & le vy partir de mon achier. Il vient d’apiarium, lieu où l’on entretient des abeilles, en le prononçant de quatre syllabes, apiarium, au lieu de cinq. De cette manière on a dit d’abord apchier, & par corruption achier. C’est ainsi que l’on dit S. Poange, de Sanctus Potamius. Ces étymologies & d’autres semblables, font voir que nos anciens Gaulois prononçoient i devant une voyelle, de la manière que nous prononçons ge, gi, & justifient en même temps plusieurs étymologies qui paroissent ridicules aux ignorans.

ACHILLE. s. m. Achilles. Nom propre d’un Prince Grec, fils de Pelé & de Thétis, & que sa mère, en le plongeant dans le Styx, rendit invulnérable, excepté par le talon, par lequel elle le tenoit, & par où il fut tué d’un coup de flèche que lui tira Pâris. Un ancien Poëte, nommé Euphorien, & cité par l’Etymologiste, dit que ce nom lui fut donné par les Myrmidons, parce qu’il n’avoit point été nourri comme les autres de pain, qu’il appelle en Grec χιλὸς. Eustasius, au contraire, veut qu’il soit formé d’ἄχος, tristesse, douleur, parce qu’il en causoit beaucoup aux ennemis qu’il attaquoit. D’autres le tirent de ἄχος, douleur, & λύω, je résous, je dissous, parce qu’il ôtoit la douleur, étant habile en Médecine, qu’il avoit apprise du Centaure Chiron, qui eut soin de son éducation. D’autres enfin disent qu’il vient de l’α privatif, & χεῖλος, lèvre, parce qu’il avoit une lèvre brûlée. Tout cela n’a pas grande apparence.

Des héros de Roman fuyez les petitesses,
Toutefois aux grands cœurs donnez quelques foiblesses.
Achille déplairoit, moins bouillant & moins prompt :
J’aime à lui voir verser des pleurs pour un affront

Boil
.

La Thessalie entière ou vaincue, ou calmée,
Lesbos même conquise en attendant l’armée,
De toute autre valeur éternels monumens,
Ne font d’Achille oisif que les amusemens.

Rac.

Achille, est encore le nom de quelques autres personnages connus dans l’Histoire. S. Irénée envoya un Achille à Valence en Espagne, pour y prêcher l’Evangile. Un Achille Statius, ou Statio, Portugais. Un Achille Tatius, ou Tatii, qui avoit écrit une histoire mêlée, un traité de la Sphère, un roman des amours de Leucippe & de Clitophon, & un ouvrage sur les phénomènes d’Aratus, dont il nous reste un fragment, que Victorius a imprimé le premier sur un manuscrit de la Bibliothèque de Florence, & que le P. Petau a traduit & réimprimé. Photius parle de cet Auteur dans sa Bibliot. C. 87. aussi bien que Vossius, de Hist. Gr. L. III. & de Scient. Mathem. C. 33. §. 29.

Achille, se dit figurément de ceux qui ressemblent à Achille. C’est un Achille ; c’est-à-dire, un grand homme de guerre, un homme brave comme Achille.

De jeunes conquérans que la gloire a charmés,
Savent l’art de ranger des bataillons armés,
Et de forcer les murs des plus superbes villes ;
Mais il faut des Nestors à ces jeunes Achilles.

Flech.

L’empereur Maximin fut appelé un Hercule, un Achille, un Ajax, dit Capitolin dans la vie des deux Maximins. Albert, Électeur de Brandebourg, fils de Frédéric I, fut surnommé pour les belles actions, l’Achille d’Allemagne.

Achille. Terme d’Anatomie. Le tendon d’Achille est la corde dans laquelle se confondent les tendons des quatre muscles du pied, appelés extenseurs ; c’est-à-dire, des deux gémeaux, du solaire, & du plantaire. On la nomme Tendon d’Achille parce que l’on dit qu’il mourut d’une blessure qu’il y avoit reçue. Les plaies de cette partie sont fort dangereuses, & causent de fâcheux accidens. Dionis.

Achille. Nom qu’on donnoit dans les écoles à l’argument principal de chaque Secte. Achilles. Voila son Achille ; c’est-à-dire, une raison invincible, un argument auquel on ne peut rien opposer. En particulier on appelait Achille, le fameux argument de Zenon d’Élée contre le mouvement. Ce Philosophe mettoit en comparaison la lenteur d’une tortue avec la vitesse d’Achille, pour montrer qu’un mobile lent, qui précède tant soit peu un mobile vite, n’en peut jamais être devancé.

ACHILLÆA. s. f. Nom que les anciens Botanistes ont donné à plusieurs plantes de différens genres. On prétend que l’Achilæa de Dioscoride & de Pline, n’est autre chose que notre Millefeuille ; conjecture dont on pourroit faire voir le foible, en montrant que les descriptions que nous en ont laissées Dioscoride & Pline, conviennent tout aussi bien à d’autres plantes, auxquelles on n’a jamais attribué aucune qualité excellemment vulnéraire. On croit qu’elle a pris son nom d’Achille, disciple de Chiron Centaure, qu’on dit être le premier qui l’a mis en usage pour guérir les plaies & les ulcères. La plante qu’on nomme Achillæa, en latin, Achillæa montana, à présent est une espèce de Jacobée, appelée Jacobæa foliis ferulaceis, &c. Inst R. Herb. Ses racines sont fibreuses & noirâtres, & donnent beaucoup de feuilles découpées menu comme celles de l’aurone ; mais elles sont plus amples, d’un vert gai, & d’une odeur qui n’est pas désagréable lorsqu’on les écrase ; leur goût est amer & désagréable. Les tiges qui s’élèvent d’entre ces feuilles, ont un ou deux pieds environ de hauteur : elles sont quelquefois branchues, toujours garnies de feuilles semblables à celles du bas de la tige, mais un peu plus courtes. Ses fleurs naissent à l’extrémité des tiges en manière de bouquet : elles sont jaunes, radiées, un peu plus petites que celles de la matricaire. Ses semences sont oblongues, grêles & chargées d’une aigrette. On ordonne aux asthmatiques, & à ceux qui ont des durillons dans le poumon, d’user de cette plante en fumée, comme du tabac.

☞ ACHILLÉES. adj. pl. Pris substantivement. C’est le nom qu’on donnoit aux fêtes instituées en l’honneur d’Achille. Achillæa.

ACHILLÉIDE. s. f. Achilleis. C’est le nom d’un Poëme de Stace, dans lequel il devoit décrire toute la vie d’Achille. Il n’a décrit que son enfance. La mort l’empêcha de continuer.

☞ ACHIM & ACHIN. Voyez Achem.

ACHIOTE. s. f. Fruit fort estimé par les Indiens, qui vient de la nouvelle Espagne, qui croît à un arbre nommé Achiote, ou Pamaqua, qui est assez semblable à l’oranger. Le tronc est roux & les branches aussi. Ses feuilles sont comme celles de l’orme pour la couleur & l’âpreté, ses fleurs blanches & purpurines distinguées en cinq feuilles, taillées en étoile. Son fruit est gros comme une petite amande verte, quadrangulaire, avec une écorce semblable à la première écorce de la châtaigne, contenant plusieurs grains rouges, comme des raisins, mais plus ronds. Il est vert toute l’année, & porte son fruit au printemps, & alors on le taille. On tire du feu de son bois comme d’un caillou. De son écorce on fait des cordes plus fortes que celles de chanvre. De sa semence on fait de la teinture pour colorer en rouge cramoisi, & on la mêle avec succès dans toutes les potions réfrigérantes. On en fait une pâte à mesure qu’elle sèche. On en fait des boules, des tourteaux, & on les vend en forme de brique. Ceci est tiré de François de Ximénez, de Laed, & d’Eusébe de Nuremberg, qui en ont fait la description. Voyez Rocou.

ACHIOTI. s. m. Nom que les Brésiliens donnent à la drogue des Teinturiers, qu’on appelle plus communément Rocou. Voyez ce mot.

ACHIR. Ville de la basse Volhinie, en Pologne. Achirum. Elle est sur le Voraklo, sur les confins du duché de Worotin.

ACHIT, ou ACHITH. s. m. Espèce de vigne qui croît à Madagascar, & dont le raisin est de la grosseur de notre verjus. Cette vigne donne beaucoup de grappes vers les mois de Décembre, Janvier & Février. Ses sarmens sont toujours verts ; ses feuilles sont arrondies, entières & semblables à celles du lierre. Les Sauvages appellent son fruit Voachis. Flacourt, Hist. Madag. 138.

ACHLYS. s. m. C’est le nom du premier Être, qui existoit, suivant quelques Auteurs Grecs, avant le monde, même avant le chaos ; le seul qui fut éternel, & duquel tous les autres Dieux avoient été produits.

☞ ACHOAVAN. Voyez Achaovan.

ACHOISON. s. f. Vieux mot. Occasion heureuse ou malheureuse, aventure, accident. Occasio, Fortuna. S’il en a l’achoison. Marot. C’est-à-dire, s’il en a l’occasion. Ce mot vient d’Occasio. Huet. On disoit aussi, achaison, acoison, aquoison.

ACHONRI. Petite ville de la Connacie, en Irlande. Achonrita, Achada. Elle est sur la rivière du Shennon, dans le comté de Letrim.

ACHOPPEMENT. Occasion de se tromper ; sujet de scandale. Offensaculum, Offendiculum. Il ne se dit qu’au figuré, & presque toujours dans cette phrase : Pierre d’achoppement. Cet Auteur raisonne sur un faux principe ; c’est une pierre d’achoppement qui le fait broncher partout. Quelques-uns emploient ce mot seul. C’est l’achoppement de l’antiquité, pour dire, l’écueil. On ne doit pas les imiter. On disoit autrefois achopper, pour arrêter.

ACHOR. Vallée de la Terre-Sainte. Vallis Achor. Elle étoit de la tribu de Benjamin, & avoit au midi la plaine de Jéricho, & au nord la ville de Galgala, peu loin du Jourdain.

ACHORES. s. m. C’est la troisième espèce de teigne. Les achores sont des ulcères de la tête qui s’étendent toujours, perçant la peau de plusieurs petits trous, dont il sort une ordure visqueuse. La cause prochaine des achores est une humeur acre, séreuse, nitreuse & piquante, jointe à une humeur grossière. Degori. Achores, um. Ce mot signifie, croûte, lait. Il vient de l’α privatif, & de χῶρος, lieu, espace ; parce que chaque ulcère en particulier n’occupe qu’un très-petit espace : mais ils se joignent plusieurs ensemble.

ACHORUS, ou ACHOR. s. m. Dieu du Paganisme, que ceux de Cyrène avoient coutume d’invoquer, afin qu’il fît mourir les mouches, qui, par leur nombre prodigieux infectoient l’air, & causoient la peste dans leur pays. Pline le nomme Achorus ; mais S. Grégoire de Nazianze le nomme Acharon.

ACHOUROU. s. m. Espèce de laurier qui croît en Amérique, que l’on appelle Bois d’Inde. Il s’élève beaucoup, son bois est très-dur, de couleur rouge, & on l’emploie dans les ouvrages auxquels on veut donner la plus grande solidité. Ses feuilles & son fruit, qui sont aromatiques, entrent dans les ragoûts, qu’ils rendent plus agréables au goût. Les feuilles, qui sont très-succulentes, sont employées en décoction pour fortifier les nerfs, & guérir l’hydropisie. Dict. de James.

ACHRONIQUE. adj. Terme d’Astronomie, qui se dit d’un astre ou d’un point du ciel qui est opposé au soleil dans son lever, ou dans son coucher ; c’est-à-dire, que l’un se leve, quand l’autre se couche, & que l’étoile étant en opposition au soleil, se fait voir toute la nuit. Achronicus. Le lever achronique de Mars, lequel se trouve alors plus près de la terre que le soleil, a fait abandonner l’ancien système de Ptolomée, qui place la terre dans le centre du monde, & Mars au-delà du soleil. Ce mot vient de l’α privatif & de ϰρόνος, tempus, temps.

ACHSAPH. Les Grecs ont dit ΑΧΑΡΗ. Nom d’une ville royale des Chananéens. Après que les Israélites les eurent chassés, elle fut donnée à la tribu d’Aser. Elle étoit au pied des montagnes de Tyr, du côté du midi. S. Jérôme la nomme Acisap.

ACHSIKET, ou ACHSICASH. Ville du Zagatay, dans la grande Tartarie. Achsichetum. Cette ville est sur la rivière d’Ashash, dans la province de Fargana, entre les villes de Fargana & d’Ashash.

ACHSTÉEDE. Petite ville du duché de Brème, en basse Saxe. Acstede. Elle est sur la rivière de Lun, à l’occident de Bremerforde.

ACHTELING. s. m. Mesure des liqueurs dont on se sert en Allemagne. Il faut trente-deux Achtelings pour un Hécmer. Quatre Sciltems font un Achteling. Voyez Féoder.

ACHTENDÉELEN, ou ACTHELING. s. m. Mesure des grains dont on se sert en quelques endroits de la Hollande. Deux Hoëds de Gormiheng font cinq Achtendéelens.

ACI.

ACIAPONDA. Ville de la Péninsule de l’Inde au-delà du Gange. Aciaponda. Elle est dans le royaume & au midi de la ville d’Airacan, sur le golfe de Bengale, où elle a un bon port.

ACICOCA. s. f. Herbe qui croît dans le Pérou, & que l’on substitue quelquefois à l’herbe du Paraguay, dont elle a, dit-on, toutes les propriétés.

ACIDALIENNE. adj. f. Acidalia. Surnom de Vénus, que les Grecs lui donnèrent, ou parce qu’elle cause des chagrins & des soins, en Grec ἀϰίδας, ou d’une fontaine de Béotie qui lui étoit dédiée, & qui se nommoit Acidale, & étoit dans la ville d’Orchomène.

ACIDE. adj. m. & f. Epithète qui s’applique à ce qui pique la langue, & lui cause en même-temps un sentiment d’aigreur ; tels sont les citrons, les grenades, & les fruits qui ne sont pas mûrs. Acidus. Les liqueurs acides sont rafraîchissantes. Toutes les choses aigres font maigrir, parce que leurs parties acides sont comme autant de petits couteaux tranchans, qui brisent & subtilisent trop les parties du chyle propres à la nourriture, & les entraînent dehors avec elles. Par la même raison, les liqueurs mêlées d’esprits acides tempèrent l’ardeur de la fièvre, parce que ces particules acides rompent & atténuent les parties du sang qui fermentent avec trop de violence.

Suc Acide. Terme de Médecine, est un suc séparé par le pancréas. Succus acidus. L’usage du pancréas est de séparer & de filtrer, par le moyen des glandes dont il est composé, un suc acide, qui est porté ensuite par son canal dans le duodénum, où ce suc sert de dissolvant, conjointement avec la bile, pour y donner au chyle sa dernière perfection. On l’appelle aussi Suc pancréatique.

Acide. s. m. Terme de Chimie. Acidum. Sel piquant, & dissolvant. Il est en ce sens opposé à l’alkali : & sur ces deux principes, quelques Chimistes, & quelques Médecins modernes ont fondé une nouvelle explication de toutes les causes physiques. Ils définissent les acides, des corps roides, longs, pointus, tranchans, & tout-à-fait propres à s’insinuer dans des espèces de gaines ou de corps poreux & spongieux qu’ils nomment alkalis. Pour donner une idée sensible des uns & des autres, ils ont coutume de comparer un acide enfermé dans son alkali à une épée que l’on fait entrer dans son fourreau. A cette occasion ils remarquent que tels corps sont acides par rapport aux uns, & alkalis par rapport aux autres. Voyez au mot fermentation de quel secours sont dans la nature les acides & les alkalis, & quelle est la cause physique qui pousse les uns dans les autres. L’eau prise immodérément émousse les acides de l’estomac, & lui ôte la force de cuire les alimens. On le fait venir du Grec ἀϰίς, pointe, parce que les acides piquent la langue. Les acides ont les parties longues, flexibles, pénétrantes, & atténuantes qui ont des pointes aiguës & perçantes. Il y a des acides naturels, & des acides artificiels. Les acides naturels sont ceux qui ont l’acidité de leur propre nature, comme le jus de citron, &c. Les acides artificiels sont ceux qui le sont par le moyen du feu dans les opérations de Chimie. Ainsi les esprits acides, ou liqueurs infernales, comme les Chimistes les appellent, à cause de la force qu’elles ont de détruire ou de dissoudre les corps ; ces liqueurs, dis-je, ne sont autre chose qu’un sel acide dissous, & mis dans un violent mouvement par le moyen du feu. Harris.

Le vitriol est le plus grand des acides, ensuite le sel marin, & puis le salpêtre, le soufre, le vinaigre, & enfin l’alun. Cet acide diffère de ce qu’on appelle au propre aigre ; parce que l’aigre ne se dit proprement que de la saveur, au lieu que l’acide des Philosophes se dit de tout ce qui est corrosif, & qui pénètre, dissout, ou corrompt la substance des choses. Il est composé de petites parties aiguës qui s’insinuent dans les pores des corps qu’elles rencontrent, & en font la désunion, & la séparation Les liqueurs acides rougissent la teinture de tournesol. Pour connoitre si une liqueur contient quelque acide, il ne faut qu’en verser un peu sur du sirop de violettes étendu sur du papier, ou sur une dissolution de fleurs de bluet ; car alors le bleu se changera tout d’un coup en rouge, ou en couleur de pourpre ; & s’il se change en vert, c’est un signe que la liqueur abonde en sels urineux, ou lixiviels. Harris. Voyez l’effet des acides, pour le changement des couleurs & des saveurs, dans les Mémoires de l’Académie des Sciences, écrits par M. Dodart, ou dans le traité de M. Boyle, de la nature des couleurs.

Les acides tempèrent l’ardeur des fièvres ; à cause qu’en épaississant la masse du sang, ils en ralentissent les mouvemens impétueux. Les acides versés sur les matières huileuses y causent des changemens qui varient, suivant la nature différente des acides & des matières grasses qu’on veut mêler. La plûpart des acides coagulent, & figent le lait. Le mélange d’esprit de nitre & d’esprit de vin, donne une effervescence considérable, accompagnée d’une grande chaleur & d’une raréfaction très-sensible. L’esprit de nitre bien deflegmé & versé sur l’huile de gayac, ou sur celles de girofle & d’ambre, enflamme tout aussitôt ces matières huileuses.

Ce mot est pris du Latin acidus, qui signifie la même chose que aigre ; quoiqu’il y ait cette différence, que aigre n’est que pour la saveur, au lieu qu’une chose est quelquefois appelée acide, quoiqu’elle n’ait aucune saveur manifeste, & seulement parce qu’elle fait les autres effets qui se rencontrent dans celles qui sont aigres au goût, comme de pénétrer, de dissoudre, de rougir le tournesol. On se sert du mot acide dans les sciences, plutôt que du mot aigre, peut-être parce qu’aigre a des significations figurées, qui le rendent équivoque : car on le prend quelquefois pour ce qu’il y a de piquant dans l’esprit, dans l’humeur, dans les paroles. Perrault.

ACIDITÉ. s. f. Qualité aigre & piquante qu’on trouve dans tous les acides. Sentiment d’aigreur qu’excitent les acides en piquant la langue. Acor. Un peu de vitriol laisse dans l’eau une acidité agréable. Le vinaigre & le verjus ont des acidités différentes. L’acidité des câpres réveille l’appétit. On corrige l’acidité des limons par le sucre. Les alimens, qui par leur acidité, produisent une fermentation, causent la fièvre.

☞ ACIDULE. adj. de tout genre. Terme de Médecine, Qui est, qui tient de la nature des acides. On appelle eaux acidules, aquæ acidulæ, des eaux minérales qui ne sont point chaudes. Hofman dit qu’on les appelle ainsi, parce qu’elles sont un peu acides. Cependant on désigne par ce nom des eaux minérales froides, qui ne contiennent point de sel acide, apparemment pour les distinguer des eaux minérales chaudes, que l’on nomme eaux Thermales. C’est ainsi que l’on dit que les eaux de Passy sont acidules. Mais il faut convenir que dans ce sens ce terme est très-impropre. L’usage ne s’accorde pas toujours avec la raison.

ACIDULER. v. a. Terme de Médecine. Ce mot n’est guère en usage : il signifie, mettre des sucs acides dans quelque chose. Jus acidum infundere, succo acido perfundere. Aciduler une tisane, une boisson.

ACIDULÉ, ÉE. part. Il est plus en usage que son verbe. On dit, il faut donner à ce malade des bouillons médiocrement acidulés — c’est-à-dire, dans lesquels on aura mis un peu de verjus, ou un peu de jus de citron, Acido succo perfusus, tinctus, mistus.

ACIER, s. m. Fer rafiné, purifié par l’art, & conduit à une plus parfaite mixtion, par la coction du feu, & par l’attraction d’une humidité convenable qui engraisse sa sécheresse naturelle, & le rend plus blanc & plus solide, avec un grain plus petit & plus fin. Acies, Chalybs. C’est celui de tous les métaux qui est susceptible d’une plus grande dureté, quand il est bien préparé. On le fait en le tenant dans un grand feu parmi des cornes de bœuf, & des charbons de saule, ou de hêtre, & en le plongeant dans des eaux ou décoctions astringentes & fort froides, après l’avoir coupé en plusieurs parties, & fait fondre plusieurs fois. On fait l’acier de deux façons, par la fonte, ou par la cémentation. Voyez ces mots. M. Felibien en compte de cinq forces. Il y a un acier naturel, & qui en a toutes les qualités en sortant de la mine. On peut voir dans le Mercure de Septembre 1736, la description d’une mine d’acier trouvée près de Strasbourg en Alsace.

Le petit Acier commun, qu’on appelle Soret, Clamecy, ou Limosin, est le moindre de tous, & le moins cher. On le vend par carreaux, ou billes. Le meilleur est celui qui est sans pailles, ni surchauffures, & qui paroit net, & d’un grain blanc & délié, quand on le casse. Mais s’il est plein de veines noires, ou de pailles, que l’on apperçoit aisément en le rompant ; ou s’il est surchauffé, c’est-à-dire, s’il a eu trop chaud, en sorte qu’il paroisse comme grillé & en petits grumeaux, il ne vaut rien.

L’Acier de Piémont est aussi en carreaux, plus gros que le clamecy. Pour le bien choisir, il faut prendre garde si les carreaux sont nets, sans pailles & sans surchauffures. S’il a des taches jaunâtres, c’est une marque qu’il est difficile à souder & à allier avec le fer. Il vient de Piémont deux sortes d'acier. L’un artificiel, & l’autre naturel. L’artificiel est le moins bon. Pourvu cependant qu’il soit bien trempé & affiné deux fois, il sert à acérer des marteaux, & autres outils propres à un travail de force & de violence.

L’acier qui vient d’Allemagne, est en petites bandes. On l’emploie à faire des épées, des ressorts, &c.

L’Acier de Carme, ou à la Rose, vient aussi d’Allemagne & de Hongrie. Il est bon à faire des ciseaux, des rasoirs, des instrumens de Chirurgie, &c. Ces deux sortes d’Acier d’Allemagne sont les meilleures dont on se serve en France.

L’Acier de grain, ou l’Acier de Motte, ou de Mondragon, est apporté d’Espagne par grosses masses. Quand il est bien choisi & bien affiné, il est propre à acérer des outils qui doivent être durs, & avec lesquels on travaille à des ouvrages pénibles, comme à couper le marbre.

L’acier de Damas, est celui qui vient de Damas en Syrie, qui a un grain si fin, qu’il coupe le fer sans être trempé. On dit qu’un Cavalier qui le tient à la main, & qui fait le moulinet en courant, lui donne la trempe par la seule impression de l’air. On le trempe aussi sur un chamois mouillé, en passant le tranchant dessus, comme si on vouloit couper le chamois.

Acier tiré. Terme d’Horlogerie. C’est une verge d’acier passée par une filière cannelée, qui la rend propre à faire des pignons de différens membres, suivant la filière par où il a passé. Traité de l’Horlogerie par Thiout.

Une bille d’acier est une pièce d’acier qui a quatre ou cinq pouces de long, & deux ou trois lignes d’épaisseur. On envoie aussi de l’acier en barre, & d’autre en pains larges & plats, de différentes grandeurs & épaisseurs. Il n’y a point d’acier en Barbarie ; celui qu’ils emploient, est fait de fer qu’ils étendent en de longues verges, & qu’ils mettent dans des tinettes de terre, où ils lui donnent la trempe avec de l’eau, du sable & des herbes ; puis le font recuire, afin qu’il soit dur comme de l’acier : mais il n’est pas si bon que celui qu’on leur porte d’Europe. Marmol.

Acier, se dit poétiquement d’une épée. Un fin acier lui fit voler la tête de dessus les épaules. On l’a dit de même d’une lancette, dans une belle Ode sur le quinquina.

Le monstre, disoit-on, ne sauroit s’appaiser,
Qu’en recevant toujours de sanglans sacrifices.
Sous l’acier subtil & tranchant,
Le sang à grands flots s’épanchant,
Ne laissoit plus d’esprits dans ces canaux arides.
Il fallait s’immoler afin de se guérir,
Et par des conseils homicides,
Pour vivre se faire mourir.

On le dira de même de tout instrument d’acier, sur-tout de ceux qui sont propres à couper & à trancher ; mais en ce sens il ne s’emploie qu’en poësie.

J’ai vu des têtes couronnées,
Par leurs propres Sujets à la mort condamnées,
Tomber sous l’acier d’un bourreau.

Regn. Desmar.

Ce mot, selon Ménage, vient de aciarium, dont les Italiens ont fait acciaro, & les Espagnols azcro, qui viennent tous du Latin acies, dont Pline s’est servi pour le mot de chalybs. D’autres disent qu’il a été aussi nommé ex iterata ustulatione, tanquam Assarium, ou Assatum. Papias dit que le mot aciare a signifié acier dans la basse Latinité. Les Latins l’appeloient chalybs, à cause de la trempe qu’ils lui donnoient dans un fleuve d’Espagne, appelé Chalybs ; ou à cause des Chalybes, peuples de Cappadoce, dont Virgile a dit : At Chalybes nudi ferrum, &c. Festus dit que les haches d’airain, dont on se servoit dans les sacrifices, s’appeloient Aciers. Acieris, securis ærea, &c.

☞ ACIERIE. s. f. C’est ainsi qu’on appelle l’usine où l’acier reçoit sa première façon après la fonte.

☞ ACINIFORME. adj. Terme d’Anatomie. Acinosa tunica. Nom d’une membrane de l’œil, appelée aussi Uvée. Voyez ce mot.

ACIS. s. m. Terme de Mythologie. C’est le nom d’un fils de Faune & de la Nymphe Simæthis. Son extrême beauté lui attira la bienveillance de la Nymphe Galatée, qui étoit aimée de Polyphême. Ce Cyclope en devint si jaloux, qu’il écrasa son rival d’un morceau de rocher, dans le temps qu’il étoit avec Galatée. La Nymphe pénétrée de douleur, métamorphosa son amant en une fontaine, ou rivière qui fut nommée de son nom, & qui coule dans la mer de Sicile. Ovide, Métamor. L. 13. Quelques Mythologistes disent que ce qui engagea le Géant Polyphême à tuer le Berger Acis, c’est parce qu’il refusoit de répondre à son amour.

ACK.

☞ ACKEMIN, AKMIN, AQUEMIN, ou ECHEMIN. Ville de la haute Egypte, sur une petite hauteur, à un mille du Nil, & à trois ou quatre journées de Taata.

☞ ACKEN. Petite ville d’Allemagne, dans le cercle de la basse Saxe, dans le Duché de Magdebourg.

☞ ACKRAM. Ville d’Afrique en Guinée, sur le bord d’une rivière peu éloignée de Bregu, où les François vont souvent faire le commerce.

ACL.

ACLE. Village de l’Angleterre septentrionale. Aclea. Il est sur la rivière de Skern, dans le diocèse de Durham. Le Concile d’Acle, tenu sous le Pape Adrien I, a fait connoître ce lieu.

ACM.

☞ ACME. Terme de Médecine, du Grec, ἀϰμὴ pointe, signifie particulièrement le plus haut point, ou le fort d’une maladie. Quelques-uns divisent les maladies, sur-tout les maladies aigues, en quatre états ou périodes. 1.o L’arche, qui est le commencement ou la première attaque. 2.o L’anabasis, qui est l’augmentation du mal. 3.o L’Acme, qui est le plus haut point. 4.o Le paracme qui en est le déclin.

☞ ACMELLA. Plante de l’Ile de Ceylan, à laquelle on attribue la propriété de guérir la pierre, en la dissolvant. Sa racine est fibreuse & blanche, la tige carrée & haute d’environ un pied ; elle se divise en plusieurs branches ; ses feuilles sont longues, pointues, raboteuses, & un peu découpées. Ses fleurs naissent aux extrémités des branches.

ACMON. s. m. Etoit chef d’une Colonie de Scythes, qui s’établit en Phénicie & en Syrie : il mourut pour s’être trop échauffé à la chasse, & fut mis au rang des Dieux sous le nom de Très-Haut, Ὑψιστὸς. Ses enfans furent Uranus & Titée, dont les noms signifient le Ciel & la Terre, & donnerent lieu à la Fable des Phéniciens, qui font Acmon père du Ciel & de la Terre. Hesychius dit qu’il étoit père d’Ouranos ou du Ciel, & il ajoute aussitôt que c’est le Ciel même, ou Saturne. Eustathe donne ce nom tout à la fois au Ciel & à l’Océan, (in Il. 18, 410.) En quoi il est démenti, aussi-bien qu’Hesychius, par Simmias de Rhodes, qui dans son petit Poëme des Ailes, donne le surnom d’Acmonide, c’est-à-dire, de fils d’Acmon, à l’Amour, qu’il suppose aussi ancien que le monde. On peut voir par là que le nom d’Acmon est un de ceux dont les Anciens ont fait tout ce qu’ils ont voulu, & dont on ne doit faire l’application à rien. Il y en avoit, dit Strabon, (l. 10.) qui donnoient ce nom à l’un des Dactyles Idéens, & il en témoigne son mécontentement, parce qu’ils ne faisoient qu’ajouter des choses incertaines à d’autres qui l’étoient déjà assez. Ce mot ἄκμων signifie une enclume ; mais quand on en a fait un nom propre, on a voulu qu’il signifiât infatigable, de l’α privatif & de ϰάμνω, je suis abattu : Ἄκμων, quasi ἀκαμων, indefessus. Ce nom convient fort au Ciel, à cause de son mouvement, que la suite des siècles ne peut ni ralentir, ni accélérer.

ACO.

☞ ACOCATS. s. m. pl. Terme de Soierie. Ce sont des linteaux de deux pieds de longueur environ, & d’un pouce d’épaisseur, taillés en dents, faites en V, à leur partie supérieure. Quand on travaille du velours ciselé, ils servent à porter un bâton rond, auquel le battant est suspendu, & au moyen des entailles qui sont dans leur longueur, on peut avancer, ou reculer le battant, selon le besoin. Encyc.

ACŒMÈTE, ou ACEMETE. s. m. & adj. Acœmetus. Qui ne se couche ni jour, ni nuit. Ce mot est Grec, ἀϰόιμητος, formé de l’α privatif, & de ϰοιμάω, Je suis couché, je dors dans un lit. Ce nom fut donné par les Grecs à certains Moines, non pas qu’ils ne dormissent jamais, mais parce que jour & nuit, sans interruption, ils chantoient l’office divin dans leurs églises, se partageant pour cela en trois bandes ou parties, dont l’une venoit relever l’autre, & commencer le même office quand la première l’avoit fini. Ainsi, par exemple, quand les premiers avoient fini Matines, les seconds venoient les commencer ; ils étoient ensuite relevés par les troisièmes, qui chantoient aussi Matines à leur tour. Quand ils avoient fini, les premiers revenoient chanter Prime, & ainsi du reste ; en sorte que jour & nuit, les exercices pieux ne discontinuoient point dans leurs églises. Ainsi ce qui est dit dans la vie de S. Jean Calybite, imprimée par Lipoman, qu’ils furent appelés Acœmètes, parce qu’ils ne se couchoient jamais, ou qu’ils ne prenoient que très peu de sommeil, chantant toujours les louanges de Dieu, comme l’ont cru Canisius & Ferrarius dans le catalogue des Saints d’Italie, n’est pas vrai. L’instituteur des Acœmètes fut, si l’on en croit Nicéphore, l. i, v. c. 23, un Marcellus, que quelques Auteurs modernes appellent Marcellus d’Apamée, quoique Nicéphore ne lui donne point ce surnom en cet endroit-là, qu’il n’en dise rien au Liv. XII. Ch. 27, où il parle de Marcellus d’Apamée, & que Marcel d’Apamée vécût 50 ans ou plus, avant qu’il y eût des Acœmètes. On trouve dans Bollandus au 15 de Janvier la vie de S. Alexandre, fondateur des Acœmètes, inconnus avant lui, dit l’Auteur qui étoit disciple de ce Saint, & témoin oculaire de ce qu’il écrit. Ce Saint vivoit, selon Bollandus, vers l’an 430. Le premier Monastère d’Acœmètes fut bâti par ce Saint sur les bords de l’Euphrate. Pendant sa vie, ses disciples en érigèrent plusieurs semblables en différens lieux : lui-même en alla établir un à Constantinople, qui après la mort du Saint fut transféré à Bithynie, par Jean son successeur. A Jean succéda Marcellus, que Nicéphore a cru être l’Instituteur des Acœmètes. Sous ce Marcellus ce pieux institut s’étendit beaucoup, dit Bollandus ; & c’est là apparemment ce qui a fait que Nicéphore l’en a cru fondateur. Ce fut de son temps que Studius vint de Rome à Constantinople, y bâtir un Monastère, & y mit des Moines, qu’il tira des Monastères Acœmètes. Ce fut là l’origine des Studites, qui conséquemment viennent des Acœmètes. Saint Jean Calybite se retira dans un Monastère d’Acœmètes, & non pas d’Aromètes, comme le dit la Saussaye dans le Martyrologe de France. Quoique les Acœmètes aient fleuri sur-tout en Orient, il y en a cependant eu quelques-uns en Occident. Le P. le Cointe prétend, à l’endroit que je citerai, qu’il n’y a eu que le Monastère de Luxeuil, Luxoviense, celui de Remiremont, Habendense, & celui de S. Salaberge à Laon, où l’on ait dit perpétuellement l’Office de la manière que nous l’avons expliqué. Le P. Mabillon soutient qu’il y faut ajouter celui de S. Maurice, Agaunense, fondé par Sigismond, Roi de Bourgogne, celui de S. Marcel de Châlons, & celui de S. Denys en France. D’autres ajoutent encore celui de S. Riquier, &c. Il n’est pas vrai que S. Eucher Evêque d’Orléans se fit Moine Acœmète, comme l’a dit Canisius. Ce fut dans un Monastère de Bénédictins, à cinq lieues de Rouen, qu’il se retira, comme l’a remarqué Bollandus. T. i. de Janv. p. 1019.

On a aussi appelé Acœmètes les Stylites, & quelques autres Moines de la Palestine, mais dont l’institut étoit fort différent de celui des Acœmètes. On pourroit aujourd’hui appeler Acœmètes les Religieuses du S. Sacrement, qui ont l’adoration perpétuelle. Si se relèvent jour & nuit, ensorte qu’il y en ait toujours devant le Saint Sacrement à prier.

Outre Nicéphore & Bollandus, dont j’ai parlé, Théodore Lecteur, L. I, Evagrius, L. III. Chap. 18 & 21. Théophane, Cédrenus, l’Auteur de la vie de S. Alexandre. Dans Bolland. 15 Janv. & Jacobus Canisius dans le Ribadeneira latin au 20 Février, Baronius à l’an 459, M. du Fresne dans son Glossaire, le Cointe Annal. T. I. an. 536, n. 224 & suiv. Le P. Mabillon, Act. Sanct. Bened. sæc. IV, p. 2. Præf. ont écrit des Acœmètes.

ACOINT, TE. adj. mot suranné, qui veut dire familier, selon Nicod. Amicus familiaris.

ACOINTABLE. adj. m. & f. Voyez Accointable.

ACOINTIER. Vieux v. a. Accueillir, fréquenter. Poës. de Thibaut, Roi de Navarre.

Acointier. Vieux adv. A la rencontre, à la première vue.

ACOLALAN. s. m. Insecte de l’île de Madagascar. Il ressemble à une punaise. Il est plus gros. Il prend des ailes en grossissant. Les cases des Nègres sont infectées de ces animaux qui rongent tout ce qu’ils trouvent, principalement les étoffes. Quelques-uns donnent le nom d’acolalou à cet insecte.

☞ ACOLASTRE. Petite rivière de France dans le Nivernois, qui se jette dans la Loire, près de Jaugenai.

☞ ACOLIN. Rivière de France, qui vient du Bourbonnois dans le Nivernois, passe à Cocaye, à Dorne, à Thoury, à Luray, & se rend dans la Loire après s’être jointe à l’Abron.

ACOLYTAT. s. m. Acolytatus. Ordre, rang d’Acolyte : c’est le premier des quatre Ordres mineurs, & non pas des quatre moindres Ordres, comme disent les Vocabulistes ; c’est-à-dire, celui qui précède immédiatement le sous-diaconat.

ACOLYTE, mieux qu’ACOLYTHE. s. m. Terme Ecclésiastique. Acolytus. Les Grecs donnoient ce nom à ceux qui étoient inébranlables dans leurs résolutions. C’est par cette raison que les Stoïciens furent appelés Acolytes ; parce qu’ils persistoient dans l’opinion qu’ils avoient une fois embrassée, sans que rien ne pût les en détacher. Ils trouvoient même qu’il y avoit de la lâcheté à en changer. Depuis, l’Eglise chrétienne a consacré ce nom, en l’appliquant à ceux qui se dévouent au service de Dieu. Anciennement les jeunes gens qui aspiroient au ministère ecclésiastique, accompagnoient & suivoient les Evêques par-tout, soit pour les servir, soit pour être les témoins de leur conduite. Cette assiduité à suivre les Evêques les fit appeler Acolytes. Saint Cyprien dit lui-même, qu’il avoit des Acolytes. Aujourd’hui les fonctions des Acolytes sont bien différentes de la première institution. Un Acolyte est celui qui a seulement reçu le premier & le plus considérable des quatre Ordres Mineurs dans l’église ; dont l’emploi est d’allumer les cierges, de porter les chandeliers, la navette où est l’encens, de préparer le vin & l’eau pour le sacrifice, & de rendre d’autres services à l’autel. Autrefois les Acolytes ramassoient dans un sac ce que les fidèles avoient offert, & ce qui avoit été béni pendant la messe ; & après qu’elle étoit finie, ils le donnoient aux Prêtres qui devoient le diviser. Le devoir des Acolytes est d’accompagner l’Evêque, ou le Prêtre, & de leur rendre service dans les fonctions ecclésiastiques. Voyez encore lecteur, exorciste & portier. Il y avoit à Rome trois sortes d’Acolytes. Les Acolytes du Palais, Palatini, qui servoient le Pape ; les Acolytes Stationaires, Stationarii, qui servoient dans les Eglises, où il y avoit Station ; les Acolytes Régionaires, Regionarii, qui servoient avec les Diacres dans les différens quartiers de la ville. On trouve aussi des Acolytes parmi les Officiers Auliques de Constantinople ; & Curopalates dit que le Capitaine, ou Chef de la cohorte impériale de Byzance, étoit nommé Acolyte.

Dans l’Eucologe des Grecs on trouve les leçons qu’on lit lorsqu’on ordonne des Lecteurs ; mais il n’y est point parlé des autres petits Ordres ou mineurs, qui sont, l’Ordre de Portier, d’Exorciste, & d’Acolyte ; ce qui pourroit faire croire que les Grecs ne confèrent point ces Ordres-là aujourd’hui. Le Père Goar dans ses notes sur l’Eucologe, répond qu’on ne peut pas douter que ces trois moindres Ordres n’aient été connus de l’ancienne Eglise Grecque, & qu’elle n’ait eu des Ministres qui les avoient, puisqu’il en est fait mention dans Saint Denys, Saint Ignace Martyr, Saint Epiphane, dans les Conciles de Laodicée & d’Antioche, dans les Novelles de Justinien, dans Photius, &c. Il ajoute, qu’il semble que les Grecs d’aujourd’hui ont des Acolytes sous le nom de Députés & de Céroféraires. Les Missionnaires Latins, qui sont en Grèce, disent que les Grecs ont aujourd’hui des Acolytes, & les autres Ordres mineurs ; & on doit plus les en croire que le Pere Martène, qui assure que l’Ordre des Acolytes a été tout-à-fait inconnu à l’Eglise d’Orient. Voyez le Pere Goar sur l’Eucologe, le Pere Martène, le Pontifical, l’Ordre Romain, &c.

Ce mot vient du Grec ἀκολυθεῖν qui signifie, Suivre, & Acolyte, un suivant. C’est ainsi que l’expliquent le Glossaire grec & latin, & Macer ; mais Dominique son frere le tire de l’α privatif, & de κωλύω, empêcher.

ACOMA. San-Estevan d’Acoma, S. Etienne d’Acoma. Ville du Nouveau-Mexique, à cinquante lieues au nord-ouest de Santa-Fé.

ACOMAS. s. m. Arbre qui croît dans les îles Antilles, & dont le bois s’emploie aux ouvrages de menuiserie. Cet arbre est à-peu-près de la hauteur de nos pommiers ; ses feuilles sont assez longues & lisses, son fruit est de la grosseur d’une prune, qui devient jaune dans sa maturité ; son amertume empêche qu’on ne le mange : il n’y a que les pigeons ramiers qui puissent s’accommoder de ce fruit ; mais leur chair en retient si fort le goût, qu’on ne peut les manger dans le temps qu’ils s’en nourrissent. L’écorce de cet arbre est raboteuse, cendrée, & elle donne un suc laiteux lorsqu’on l’incise. Son bois est pesant, de couleur rouge, tirant sur le jaunâtre ; le cœur est d’un rouge tirant sur le violet. Ces couleurs varient suivant son âge ; & tout le bois prend fort bien le poli. Rochefort. Le Pere du Tertre rapporte qu’un Nègre l’avoit guéri d’un grand mal de dents, en lui frottant les tempes & le derrière des oreilles avec le lait qui se tire de l’écorce de l’Acomas franc. Car ce Pere, Histoire des Antilles, Traité 3. C. 4. §. 3. distingue trois sortes d’Acomas ; l’Acomas franc, qui est un des plus gros, & des plus hauts arbres des Antilles, & le meilleur de tous pour les bâtimens ; l’Acomas bâtard, qui croît à la Capsterre de la Guadeloupe, qui n’est ni si beau, ni si bon à bâtir que le précédent ; & le troisième qui croît aux environs de la grande Ance, semblable au premier, sinon que le cœur en est rouge.

ACOMMICHER. v. a. Vieux mot François, qui vouloit dire Communier, donner la Communion. Et fit le Roi dire grand planté de Messes, pour acommicher ceux qui dévotion en avoient. Froissard.

ACOMPARAGER. v. a. Ce mot, selon Nicod, veut dire, Comparer. Conferre, comparare.

ACOMPTE. s. m. Voyez Compte.

ACON, ou ACCON. s. m. Cymba. Terme de Marine. Petit bateau plat, sans quille, ni mât, ni voile, ni gouvernail, qu’un homme seul fait couler sur la vase, quand la mer est retirée, ayant un pied dedans & l’autre dehors, pour aller chercher le poisson qui se trouve arrêté dans les filets & engins qui sont tendus à l’ouverture des bouchots, & prendre les moules qui se nourrissent & se multiplient sur les pieux & clayonnages de ces bouchots. Les bouchots sont des parcs ou pêcheries établies sur les côtes.

ACONA. Lieu de Toscane, en Italie. Acona. Le B. Tolomeï, à qui ce lieu appartenoit, y fonda l’Ordre de Notre-Dame du Mont d’Olivet, dont il fut Instituteur. Ce lieu est à quinze milles de Sienne. P. Helyot. T. VI. p. 192.

ACONIT. s. m. Aconitum. Plante vénéneuse. Les anciens Botanistes ont attribué ce nom à plusieurs plantes de différens genres. Celles dont il s’agit ici, ont leurs fleurs irrégulières, composées de plusieurs pétales, dont l’assemblage représente assez bien un casque ouvert, c’est-à-dire, que la pétale supérieure fait le casque du heaume, les deux latérales tiennent la place des deux oreillettes, & les deux inférieures représentent la mentonnière. Les espèces qu’on nomme tue-loup, Lycoctonum, Λυκοκτόνον, ont leur casque allongé en manière de toque, ou de bonnet à la Polonoise. Les fruits qui succèdent aux fleurs, sont composés de plusieurs graines, qui s’ouvrent selon leur longueur, & renferment des semences anguleuses, & chagrinées. Ses feuilles sont arrondies & découpées plus ou moins profondément. Ce genre d’aconit comprend plusieurs espèces, qu’on peut ranger sous trois principales classes. La première est de celle dont toute la fleur est bleue, ou violette, & la pétale supérieure de la fleur forme un casque. On la nomme Napel, Napellus, à Napo, à cause que ses racines sont en navets. Le Napel est très-dangéreux ; mais on a trop exagéré sa qualité vénéneuse. La seconde est de celle qui a ses fleurs tout-à-fait semblables à celles du Napel, hormis qu’elles sont jaunes. Elle s’appelle Anthora. Anthi-Thora, c’est-à dire, plante souveraine contre les mauvais effets du Thora. Elle est aussi vénéneuse que le Napel. Il est faux que l’Anthora croisse toujours auprès du Thora, ou du Napel. L’aconit de la troisième classe se distingue des deux précédentes par la figure allongée de son casque. Ses fleurs sont pâles ou jaunâtres.