Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DRESSER

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 465-466).
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DRESSER. v. a. Ce terme se prend dans les arts dans plusieurs acceptions différentes. Nous allons marquer les principales auxquelles on pourra facilement rapporter celles dont le détail seroit trop long.

Dresser. Terme d’architecture. C’est élever à plomb quelque corps. Erigere. Dresser un obélisque, une colonne, une potence.

☞ On dit même dresser la tête, se dresser sur les pieds. Erigere caput, erigere se in pedes.

☞ On dit, d’un cheval, qu’il se dresse, lorsqu’il se lève tout droit sur les pieds de derrière.

☞ On dit, proverbialement, qu’une chose fait dresser les cheveux à la tête, pour dire qu’elle fait horreur : & qu’elle fait dresser les oreilles, quand elle attire notre attention, par les avantages qu’elle fait espérer. Alors dresser est neutre.

Dresser, se prend presque dans le même sens, comme synonyme à ériger, élever. Erigere, ponere. Dresser un trophée, des statues, des autels en l’honneur de quelqu’un.

Dresser, se dit quelquefois pour préparer, mettre une chose en état. Instruere, præparare. Dresser un plan, dresser la minute d’un acte. Dresser une requête, un compte, un inventaire, des articles de mariage, & mettre tout cela dans la forme nécessaire.

Dresser un mémoire, dans le commerce, c’est faire un relevé de tous les articles fournis à crédit, pour en demander le paiement.

Dresser une batterie de canon, en termes de guerre, c’est la mettre en état.

☞ Dans le sens figuré, dresser une batterie, c’est prendre des mesures pour réussir dans quelque entreprise.

Dresser un piége, tendre un piége, dresser des embuches. Parare, struere ; &, au figuré, tendre un piége à quelqu’un, c’est employer la ruse pour le surprendre & le faire tomber dans le faux.

☞ Dans les cuisines, dresser la table, le fruit, &c. c’est le préparer & le disposer dans une propreté convenable. Præparare, disponere. Dresser le potage, c’est versé le bouillon sur le pain, & généralement sur tout ce qui doit être humecté. La soupe est dressée, pour dire, servie. Expression bourgeoise. On a servi la soupe, le fruit, &c.

Dresser, signifie aussi tourner droit vers quelque endroit. Dresser sa route. En termes de marine, le Pilote a dressé le Cap sur un tel Rhumb, a dressé le Cap au Nord. Dirigere.

☞ Au figuré, dresser son intention, c’est la même chose que diriger.

Dresser, se dit aussi, en termes de Menuiserie & de Charpenterie, pour dire, Unir, aplanir, équarrir, mettre en ligne droite. Dirigere. Dresser du bois, dresser une règle.

Dresser, est aussi un terme de Relieur. C’est, Battre uniment un livre. Subigere æqualiter. Ce livre est bien dressé.

Dresser, en termes de chasse, se dit quand les bêtes & les chiens fuient par une route droite : & on dit qu’un chien dresse, & qu’il va le droit, quand il suit la vraie route du cerf, ou de la bête. Feræ vestigia persequi, vestigiis inhærere.

Dresser, est aussi un terme de Paveur. C’est, après avoir posé le pavé & garni les joints, frapper sur les pierres pour les égaler, & faire que tout le pavé soit propre & bien uni. Æquare, exæquare.

Dresser, se dit aussi, parmi les Pâtissiers, des pièces de four qu’on ne met pas dans les tourtières. Dresser un pâté, c’est en faire les bords. Oras circumducere.

En termes de Jardinage, on dit, Dresser en parlant du terrein. Dresser une allée, une terrasse, un parterre, c’est l’aplanir, le mettre de niveau ou en pente, suivant le besoin.

Dresser une palissade, c’est la tondre avec le croissant. Les Vignerons disent aussi dresser une vigne, c’est-à-dire, la trousser proprement. Voilà une vigne bien dressée.

Dresser une forme. Terme d’imprimerie. C’est poser sur le marbre les pages qui doivent composer une forme, à mesure qu’elles sont achevées sur la galée ; & là en faire l’imposition les unes sur les autres, pour en assurer le registre, quand les feuilles se mettent en retiration.

Dresser un drap de laine. C’est le rendre carré & uni, par le moyen de ce qu’on appelle une lame dans les Manufactures de draperie.

Dresser un peigne. C’est, après que les dents ont été approfondies avec l’estadou, les appointer avec la grêle.

Dresser un feutre, signifie, en termes de Chapelier, lui donner la figure d’un chapeau, après qu’il a passé à la foulerie.

Dresser un chapeau. Autre terme de Chapelier. C’est en unir & applanir les bords & le dessus de la tête.

Dresser une pierre. C’est, en termes de Tailleur de pierre, en équarrir les paremens de tous les côtés, pour ensuite lui donne rla figure dont l’Appareilleur a fourni les cartons.

Dresser les aiguilles de lime. C’est les limer, après que les pointes en ont été formées, & qu’elles ont été poinçonnées du poinçon du Maître qui les a fabriquées.

Dresser du linge, chez les Blanchisseuses, synonime de repasser.

Dresser, se dit figurément, & signifie, Instruire, & disposer à faire quelque chose. Instituere, formare. Ce Précepteur a bien dressé cet Écolier. Il a dressé ce valet à tout faire. Il a beau lui faire répéter son rêle de Comtesse, je désespére qu’il la puisse jamais dresser aux grands airs. On le dit aussi par extension des animaux. Dresser un cheval, c’est lui apprendre les exercices qu’on exige de lui. Ce cheval a été dressé par un bon Écuyer. Condocefacere. Les Bâteleurs dressent des chiens, & des singes à faire mille gentillesses. Les Chasseurs dressent les chiens à la chasse.

On dit aussi, que le bon oiseau se dresse de lui-même, pour dire, qu’un bon naturel n’a pas besoin d’instruction.

Dresser, est quelquefois neutre. On dit figurément, les cheveux lui dressèrent à la tête. Voy. les premiers articles.

Dressé, ée, part. & adj. Il a les significations de son verbe, en Latin comme en François.

Dresser, vient de direxare, qu’on a formé de dirigere, & dont les Italiens ont fait drizzare. Mén.