Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DIADÊME

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 316-317).
DIADÊMÉ  ►

DIADÊME. s. m. C’étoit autrefois un bandeau Royal tissu de fil, de laine, ou de soie, qui étoit la marque de la Royauté, parce que les Rois s’en ceignoient le front, pour laisser la couronne aux Dieux. Diadema, fascia candida. Il étoit d’ordinaire blanc & tout simple ; mais quelquefois il étoit de broderie d’or, chargé de perles & de pierreries. On entortilloit quelquefois le diadême autour des couronnes & des chapeaux de laurier, & on le portoit en diverses parties du corps : car Phavrionus témoigne que Pompée fut soupçonné d’aspirer à la Tyrannie, à cause qu’il portoit une jarretière blanche, pour servir de ligature à un ulcère qu’il avoit à la jambe. Pline, liv. 7. chap. 5. dit que Bacchus fut le premier inventeur des diadêmes. Athénée dit que les buveurs s’en servoient pour se garantir des fumées du vin en se serrant la tête, & que depuis on en a fait un ornement royal. On ne convient pas du tems où les Empereurs Romains prirent le diadême, qui étoit la marque de la souveraineté. On dispute si ce fut Caligula, ou Aurélien, ou le Grand Constantin. Il est certain du moins que les premières effigies des Empereurs Romains sont ornées de diadêmes, ou de bandeaux seulement. Depuis ils prirent des couronnes rayonnées, pour représenter l’éclat de la Divinité.

Le diadème est plus ancien que la couronne. C’est le propre ornement des Rois, qui n’est devenu que dans le bas-Empire celui des Empereurs. Je sais qu’un Savant a prétendu que le diadême étoit un privilége attaché à la qualité d’Auguste. Jornandès dit qu’Aurélien est le premier des Empereurs Romains qui ait pris le diadême. C’est un tissu tantôt plus & tantôt moins large, dont les extrémités, nouées derrière la tête, tombent sur le col. Ce n’est que depuis Constantin, que les Empereurs Romains s’en sont servis (sur les médailles) en le relevant par des perles, ou par des diamants, ou simples, ou à double rang, & ont permis aux Impératrices de le porter ; ce qui ne s’étoit point vu dans le haut-Empire, où jamais tête de femme ne fut couronnée. Je dis dans l’Empire & dans le haut-Empire, parce que nous trouvons des Reines sur les médailles Grecques, & dans le bas-Empire, qui portent le diadême, ou la couronne, témoin Josape, Théodora, Galeria, Valeria. P. Jobert. Les Rois de Syrie, d’Egypte, du Pont, de Bithynie, & autres d’Asie, portent aussi le diadême sur leurs médailles.

Le jeune Victor dit qu’Aurélien prit le diadême, ce qu’aucun Empereur Romain n’avoir encore osé faire ; car, quoique le même Victor écrive que Caligula l’avoit fait, on voit par Suétone qu’il en avoit seulement eu la pensée, & on l’empêcha de l’exécuter. Héliogabale en prit un ; mais ce ne fut que dans le Palais, & non pas pour paroître en public : Jornandès en attribue même le commencement à Dioclétien. Néanmoins il y a une médaille d’Aurélien, avec une couronne assez semblable à celle de nos Ducs, soutenue par une bordure de perles, qui a grand rapport à un diadême ; & ceux qui ont expliqué cette médaille, disent que c’en est un : Spanheim convient aussi qu’il le prit. Ses successeurs l’imitèrent ; & néanmoins cet ornement Royal ne devine commun & ordinaire que sous Constantin. Tillem.

Un Auteur du V. siècle dans Bollandus, Jan. T. I, p. 45. A. prétend que Constantin a porté le premier le diadême, & qu’il ne le prit d’abord que pour serrer ses cheveux, & les tenir en état. Cela a peu d’apparence ; & il est certain au moins que quelques Empereurs ont porté le diadême avant lui, comme Aurélien & Carin. Eusebe l’attribue à Constance Chlore, lors même qu’il n’étoit encore que César ; & cela se vérifie par une de ses médailles, où on le voit avec un diadême orné de rayons ; quoique, même depuis Constantin, & depuis que le diadème fut devenu un ornement ordinaire des Augustes, on ne le donnât pas toujours aux Césars. On le trouve dans quelques médailles de Julien encore César ; & néanmoins il ne l’eut point qu’étant Auguste. M. du Cange ne veut point soutenir que Constantin ait pris le premier le diadême ; mais qu’il en a fait le premier une espéce de casque, ou de couronne fermée, comme on le voit dans quelques-unes de ses médailles, & dans celles de ses successeurs. Tillem.

Le mot de diadême vient de diadema, en Grec διάδημα, qui veut dire, une bandelette qui entoure la tête : dans son origine il veut dire, ce qui lie, ce qui entoure, & διάδημα vient de διαδέω alligo, verbe composé de la préposition διὰ & δέω je lie.

Diadême, se prend en général pour la dignité Royale, ou la souveraineté, sur-tout en poësie. On lui a offert le diadême. Refuser le diadême.

Nul n’a porté si haut l’honneur du diadême, Bens.

En vain l’orgueil du diadême.
Veut qu’on soit insensible à ces cruels revers. Quin.

Son ame est au-dessus de sa grandeur suprême,
La vertu brille en lui plus que le diadême. Flech.

Il parle de Louis le Grand.

Et dégoûté du diadême,
Aima mieux régner sur lui-même,
Que de régner sur l’Univers.

Nouveaux choix de vers.

Qui sauroit bien ce que c’est qu’un diadême,
Il choisiroit aussitôt le tombeau,
Que d’affeubler son chef de ce bandeau ;
Car aussi bien il meurt lors à soi-même. Pybrac.

Diadême, en termes de blason, se dit aussi des ceintres, ou cercles d’or qui servent à fermer les couronnes des Souverains, & à porter la fleur-de-lis double, ou le globe croisé qui leur sert de cimier. Les couronnes des Souverains diffèrent, en ce qu’elles sont fermées d’un plus grand, ou d’un plus petit nombre de diadêmes. Les prélats portoient aussi autrefois une espéce de diadême ; puisque Baronius écrit que S. Jacques Apôtre portoit sur le front une lame d’or pour marque de sa dignité Episcopale. On nomme aussi quelquefois en blason diadême, ou tortil, le bandeau qui ceint les têtes de More sur les Ecus.