Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DANUBE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 105).
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DANUBE. Danubius, Ister. Le Danube est le plus grand fleuve de l’Europe après le Volga. Il prend sa source à Eschingen, village de la Principauté de Furstemberg, traverse la Suabe, la Bavière, l’Autriche, la Hongrie, la Servie & la Bulgarie, & se décharge dans la mer noire par deux embouchures. Il en avoit autrefois six, mais quatre ont été bouchées par les sables. Il parcourt six à sept cens lieues de pays, & commence à porter bateau à Ulm dans la Suabe. Il reçoit un grand nombre de rivières : en Allemagne, le Lech, l’Iser & l’Inn à droite ; le Nab & la Morave à gauche : en Hongrie le Raab, la Drave & la Save à droite ; & la Teisse à gauche : en Servie, la Nissava ; & en Bulgarie du côté gauche, l’Olt, le Misowo & le Pruth. Il baigne un fort grand nombre de villes considérables ; en Allemagne, Ulme, Donawert, Neubourg, Ingolstat, Ratisbone, Passaw, Lints, Krembs & Vienne ; en Hongrie, Presbourg, Javarin, Cran, Vicegrad, Bude, Vacie, Pest, Colocz & Bodrog ; en Servie, Belgrade, Sémendrie & Widdin ; & en Bulgarie, Axiopoli & Silistrie.

Homère n’a point parlé du Danube, mais Hésiode en parle, Theogon. v. 339. & c’est le plus ancien Auteur qui en ait fait mention. Des deux noms que ce fleuve a eu dans l’antiquité, Danubius & Ister, le premier se donnoit depuis sa source jusqu’à Belgrade, ou jusqu’à Axiopoli, & le second depuis là jusqu’à la mer. Le Géographe Etienne dit que les Scythes l’appeloient Matoas, qui signifioit la même chose en leur langue que ἄτιος, en Grec, c’est-à-dire, Qui ne fait point mal ; & qu’ils lui donnoient ce nom, parce qu’ils le passoient très-souvent, & toujours sans danger ; mais qu’ayant une fois fait quelque perte en le traversant, ils le nommerent δανουϐις, δανουτις, qui veut dire, Auteur de dommage. C’est de-là, selon cet Auteur, que s’est fait Danubius, mais ce n’est-là qu’une fable. Caton, dans ses Origines, vouloit qu’il eût pris ce nom des Danois, qui vivoient sur ses bords. Quelques-uns disent que ce mot s’est fait de Tonnam, mot Allemand formé de Tonna, Tonnerre, & qu’il lui fut donné à cause du bruit que font ses eaux. Rhénanus & Vadianus disent que Danubius s’est dit pour Abnobius ou Abnovius, & que ce nom lui est venu du mot Abenow, Abnoba, en Suabe, duquel il prend sa source. Cette opinion est la plus probable & paroît sûre ; car on disoit autrefois Abnaw pour Abnow : en ajoutant l’article die, le fleuve s’est appelé die Abnaw, & par contraction, Danaw, comme en effet les Allemands l’appellent encore à présent. Ajoutez que c’étoit vers sa source, comme on l’a dit ci-dessus, qu’il avoit ce nom. Isidore prétend que c’est la quantité de neiges qui grossissent ce fleuve qui l’a fait appeler Danubius, comme si l’on disoit Danivius. D’autres, qu’il s’est appelé Danuf, parce qu’il coule sus, c’est-à-dire, vers des lieux plus élevés que sa source. On peut voir les différentes opinions des Anciens sur la source du Danube, dans Guillaume Stuck, sur Arrien, p. 164. & dans Hoffman au mot Danubius, où il a ramassé presque tout ce qui se peut dire de ce fleuve.