Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DÉGOÛTER

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 177).

☞ DÉGOUTER. v. a. Oter l’appétit, faire perdre le goût. Fastidium & satietatem afferre, creare, parere. On dégoûte les gens en leur donnant trop à manger. Trop d’avoine dégoûte un cheval.

Dégoûter, se dit figurément, pour Donner de l’éloignement pour une chose ou pour une personne, faire qu’on cesse de la trouver à son gré. Fastidium, satietatem afferre, creare. Ce jeune homme avoit quelque goût pour les Lettres ; mais à force de lui en parler, on l’en a dégoûté. Ce Novice avoit d’abord beaucoup de zèle pour la Religion ; mais les trop grandes austérités l’en ont dégoûté. La Comédie ne sert qu’à rendre le vice aimable, & à dégoûter de la vertu. S. Evr. Le peu d’utilité qu’on tire de la vertu dans le monde, dégoûte des fatigues où elle expose. Bail. La vie fatigante des Courtisans, & les rebuts qu’ils souffrent, ne les dégoûtent point de la Cour. M. Esp.

☞ Il est aussi réciproque. Se dégoûter, prendre du dégoût, de l’aversion, cesser de trouver une chose à son gré. Alicujus rei fastidio satietate affici. Il s’est dégoûté de son métier, de son emploi, de la vie champêtre, de sa femme. Puisqu’on se dégoûte quelquefois de soi-même, il est encore plus aisé de se dégoûter des autres. S. Evr.

Dégoûté, ée. part. & adj. Il ne faut pas être dégoûté, sous prétexte d’être délicat. Alicujus rei fastidio ac satietate affectus. Menag. Il se prend quelquefois substantivement. Il y a des gens d’une délicatesse affectée, qui prétendent se mettre au-dessus des autres, en faisant les difficiles & les dégoûtés. Bell.

☞ On dit en proverbe, & par contre-vérité, c’est un bon dégoûté, c’est-à-dire, un homme de bonne humeur, de bon appétit, qui aime la bonne chère.