Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DÉCAN

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 129).
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DÉCAN. Royaume de l’Asie, dans la presqu’Île de l’Inde deçà le Gange. Decanum, Decanum Regnum. Le Décan est borné au midi par le Royaume de Bisnagar, au couchant par l’Océan Indien, au nord par les Etats du Mogol ; au levant les montagnes de Gate le séparent du Royaume de Golconde. Maty dit que la Capitale est Visapour, & le P. Catrou, dans son Histoire générale du Mogol, dit que c’est Oramgabad.

DÉCAN. s. m. Decanus. Les Décans étoient de petits Officiers sous le Chambellan de l’Empereur de Constantinople, qui commandoient chacun à neuf autres. Chastelain. Ce n’étoit pas seulement à la Cour que ce mot étoit en usage ; on appeloit à l’armée Décan un soldat qui commandoit à dix autres (Nous disons Dixainier, ou Dizainier) dans les Monastères, un Moine qui avoit soin de dix autres ; dans les grandes Eglises, un Prébendé, ou Chanoine, qui en avoit dix à sa charge, & qui étoient ordinairement dix Prêtres, d’où vient que ce Décan passoit pour Archiprêtre. Dans la division d’un Evêché, un Prêtre qui avoit inspection sur dix Clercs, ou dix Paroisses, étoit aussi Décan. C’est ce que nous appelons Doyen rural, quoiqu’à présent ils ne soient pas restreints à dix Paroisses, mais qu’ils en aient souvent plus ou moins. Sur les Décans militaires, voyez Végèce, L. II. C. 8. & sur les Décans Monastiques, S. Augustin, De Moribus Eccl. Cath. L. I. C. 31. Il y a dans le Code un titre De Decanis. S. Jean Chrysostome, hom. 13. sur le Ch. VII de l’Epitre aux Hébreux, & S. Ambroise, L. V. ép. 35. parlent aussi des Décans.

Constantin fit à Constantinople un corps de 950 personnes ou familles prises de divers métiers, qu’il donna à l’Eglise cathédrale, en les déchargeant de toutes sortes d’impositions pour qu’ils rendissent gratuitement aux morts les devoirs de la sépulture, particulièrement aux pauvres. On les appeloit Decani & Lecticarii, peut-être parce qu’ils étoient divisés par dizaines, dont chacune avoit une bière, ou litière pour porter les corps. On croit que ce sont ceux que l’on commença sous Constance à appeler Copiates, c’est à dire, des Clercs destinés au travail ; car on leur donne ordinairement rang parmi les Clercs, même avant les Chantres. On les a aussi nommés fossoyeurs à cause qu’ils avoient soin de faire les fosses pour les morts. Il paroît par une loi de l’an 537. qu’il y avoit à Rome de ces Copiates : on le voit de même des Gaules sous Honorius. Mais leur nom qui est tout Grec, fait juger qu’ils venoient originairement de l’Orient, & peut- être de l’établissement que Constantin en avoit fait dans sa nouvelle ville. Tillem.

Ce nom vient de Decanus, dérivé de decem, dix. Et quoique de Décan nous ayons fait Doyen en François, on croit cependant que, quand il s’agit de ces Offices anciens, tant Ecclésiastiques que civils, on fait bien de dire Décan à l’exemple des Auteurs cités ci-dessus, & non pas Doyen ; l’usage a attaché une signification particulière au mot Doyen, qui ne conviendroit pas à ces autres Officiers. Cependant l’Abbé de la Trappe en a usé autrement au Chapitre XXI. de la Règle de S. Benoît, où il est traité des Décans des Monastères que cet Abbé appelle Doyens.