Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/DÉBONNAIRE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 123).

DÉBONNAIRE. adj. m. & f. Doux, Bienfaisant. C’est là proprement l’idée que présente ce mot. Pius, lenis, humanus : mais il n’est d’usage que dans le style noble ou sérieux, en parlant des Princes : partout ailleurs il se prend en mauvaise part, ou en plaisantant. Louis le Débonnaire, ou le Pieux, Roi de France, étoit fils de Charlemagne. M. Châtelain, dans son Martyrologe, dit aussi Antonin le Débonnaire. Nos Antiquaires disent Antonin Pie. Le même Auteur avec Baillet dit : Saint Sulpice le Débonnaire, d’autres disent le Pieux.

Saint Louis étoit un Prince débonnaire. Un homme débonnaire est un homme facile, foible, & bon jusqu’à l’excès. M. Esp. Il n’est plus guère en usage en bonne part, suivant ce qu’a dit Balsac : Ils ont nommé le débonnaire, celui qu’ils n’ont osé nommer le sot. En parlant de cette vertu, que J. C. a canonisée, & qui va à souffrir & à pardonner les plus grands outrages, on peut dire : Les vrais Chrétiens sont débonnaires. Hors de-là, je ne voudrois pas m’en servir, & aujourd’hui un visage débonnaire signifie une physionomie niaise. Du tems de Montagne il signifioit quelque chose de doux & d’humain. Il y a, dit-il, quelque art à distinguer les visages débonnaires, d’avec les niais. Bouh. Quand on appelle quelqu’un débonnaire, on ne sait si c’est pour le louer, ou pour le blâmer. M. Esp. La mollesse des personnes débonnaires fait leur débonnaireté. Id.

On appelle un mari débonnaire, un mari qui souffre patiemment la mauvaise conduite de sa femme.

Pasquier, après Henri Etienne, dit que ce mot est composé de ces trois mots, de bon aire. Mais Ménage, à cause que cette signification est trop éloignée, tient qu’il vient de bonus & bonarius.