Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CRINON

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 18).
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CRINON. s. m. Sorte de petits vers qui viennent sous la peau des enfans, & qui sont en forme de gros cheveux courts, ou de soie de sangliers. Par le moyen du microscope ils paroissent de couleur de cendre, ayant deux longues cornes, les yeux ronds & grands, la queue longue & velue au bout ; en un mot, horribles à voir. Ils occupent ordinairement les parties musculeuses du dos, des épaules ; du gras de la jambe au-dessous de l’épiderme, & causent une démangeaison continuelle & fâcheuse, qui est très-sensible, & des inquiétudes, des cris & des insomnies aux enfans, qui s’aimaigrissent & tombent enfin en langueur : ce qui fait dire à plusieurs meres que leurs enfans sont ensorcelés. Les enfans foibles & délicats y sont le plus sujets. La cause des crinons est la suppression de la transpiration insensible : la matière retenue se pourrit, & les semences ou les œufs qu’elle contient venant à éclorre par une chaleur douce & modérée, se convertissent en ces petits vers. On les découvre, & on guérit l’enfant en le mettant dans un bain, où on le frotte bien avec du miel. Les crinons sortent avec la sueur, & il est facile de les racler & de les arracher avec un rasoir, ou une croûte de pain, tandis qu’ils montrent la tête. Quelques-uns, au lieu de ce bain, mettent les enfans jusqu’au cou dans une lessive où ils font bouillir de la fiente de poule, & les y laissent suer, en excitant les crinons avec leurs mains enduites de miel. Sitôt qu’ils paroissent, on les racle de la même manière : ce qu’il faut continuer deux ou trois jours, jusqu’à ce qu’on n’en voye plus sortir. On les appelle comedones, du verbe Latin comedere, manger, à cause de la maigreur des enfans dont ils mangent la nourriture ; ou crinones, de crinis, cheveu, parce qu’ils sortent d’ordinaire par les pores de la peau, en forme de cheveux courts, ou de poils noire. Voyez DRACUNCULUS.