Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CREVETTE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(3p. 10-11).
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CREVETTE, s. f. Espèce d’écrevisse de mer. M. Huet soutient qu’on a dit crevette pour chevrette, parce que ce poisson ressemble à la chèvre par ses cornes. Il y a même des endroits où tout le monde dit chevrette. On dit manger de la crevette, la crevette est si délicate qu’on ne peut la transporter à Paris des côtes de la basse normandie, sans qu’elle se corrompe, à moins qu’on ne la fasse cuire à mi-chemin, en la portant par la poste. Elle est blanchâtre, & elle devient rouge sur le feu, comme l’écrevisse. Il y en a une autre espèce, qui ne rougit pas à la cuisson, qu’on appelle cardon ; l’autre s’appele la crevette franche. Lémery nomme Chevrette ce petit poisson de mer. On l’appelle encore salicot, salicoque, sallicoque & solicoque, ce dernier nom lui est donné, parce qu’on prétend qu’elle engendre les soles, ou du moins que leur frai s’y attache. En effet sous l’estomac de la crevette pêchée récemment, on remarque plusieurs petites vessies inégales collées par une liqueur gluante. Vues au microscope ce sont des embryons de soles : cela a été confirmé par l’expérience. On a pris des crevettes que l’on a gardées dans l’eau de la mer, au bout de quelques jours on y trouva de petites soles : on mit d’un côté des crevettes avec des soles, d’un autre côté des soles sans crevettes : les soles frayerent des deux côtés ; les crevettes avec des soles donnèrent des soles ; les soles sans crevettes ne donnèrent rien.