Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CONTEMPLATION

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 851-852).

CONTEMPLATION. s. f. ☞ Dans l’usage ordinaire ce mot est synonime à méditation & signifie l’application de l’esprit par laquelle il s’attache à réfléchir, considérer, & à admirer les merveilles de Dieu & de la nature. Contemplatio. Un Philosophe toujours dans la contemplation ne descend guère aux détails de la vie. La contemplation des ouvrages de Dieu nous remplit d’admiration.

☞ On le dit de l’action par laquelle on considère soit des yeux du corps, soit des yeux de l’esprit. Contemplation des choses Divines. Contemplation des corps célestes.

☞ Ce mot signifie, particulièrement en philosophie, l’action de fixer un même objet dans son entendement, de l’envisager sous toutes ses faces différentes, pour en acquérir une connoissance exacte.

Contemplation, en termes de Spiritualité & de Théologie mystique, est une vue de Dieu ou des choses divines, simple, libre, pénétrante, certaine, qui procède de l’amour, & qui tend à l’amour. 1o. Cette vue est simple. Dans la contemplation l’on ne raisonne point comme dans la méditation. 2o. Elle est libre, parce que pour la produire, il faut que l’ame soit affranchie même des moindres péchés, des affections déréglées, de l’empressement & des soins inutiles & inquiétans. Sans cela l’entendement est comme un oiseau qui a les piés liés, & qui ne peut voler, si on ne le met en liberté. 3o. Elle est claire & pénétrante ; non pas comme dans l’état de gloire, mais aux prix des connoissances de la foi qui sont toujours obscures. Dans la méditation on ne voit les choses que confusément, comme de loin, & d’une manière plus seche. La contemplation nous les fait voir plus distinctement, & comme de près. Elle nous les fait toucher, sentir, goûter, expérimenter dans l’intérieur. 4o. Elle est certaine, parce que son objet sont les vertus surnaturelles, que la lumière divine lui découvre, & lorsque cette manifestation se fait immédiatement à l’entendement, elle n’est point sujette à l’erreur. Quand elle se fait ou par les sens ou par l’imagination, il s’y peut quelquefois mêler quelque illusion. 5o. Elle procède de l’amour & tend à l’amour. C’est l’emploi de la plus pure & de la plus parfaite charité. L’amour en est le principe, l’exercice en est le terme.

Les Mystiques nomment la contemplation un regard simple & amoureux sur Dieu présent. Fen. La contemplation consiste dans des actes si simples, si directs, si uniformes & si paisibles, qu’ils n’ont rien de marqué par où l’ame puisse les distinguer. L’ame doit être entièrement passive à l’égard de Dieu, en sorte qu’elle soit dans un repos continuel, sans secousse & sans agitation : de-là vient qu’on l’appelle une oraison de silence & de quiétude ; en sorte qu’elle doit être exempte de toute l’activité des ames inquiètes, qui s’agitent pour sentir leur opération. Id. La contemplation la plus sublime doit être subordonnée à la science Théologique, & aux règles de l’Eglise. Boss. La contemplation n’est ni un ravissement, ni un saisissement, ni une suspension extatique de toutes les facultés de l’ame : l’état de contemplation passive n’est qu’une paix & une souplesse infinie, pour se laisser mouvoir aux impressions de la grâce, & pour mieux sentir l’impulsion divine. Fenel. Les Contemplatifs disent que les savans sont moins disposés à la contemplation, que les ignorans, parce qu’ils ont moins de foi & d’humilité. Boss. La contemplation est l’exercice du pur amour. Fenel.

Contemplation, (En) signifie, en termes de contrats & de traités, en considération. Habitâ ratione, propter, ob. Cette donation lui a été faite en contemplation de l’alliance qu’il faisoit avec le donateur. Les deux Rois ont relâché de leurs prétentions en contemplation de la paix. En contemplation de ce mariage, le père a donné, cédé, &c. Je fais cela en contemplation de sa prière. Le Maître.

Contemplation, terme de Médecine, c’est un nom qu’on a donné à la catalepsie, parce que ceux qui en sont attaqués, paroissent immobiles & contemplatifs. Voyez Catalepsie.