Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CONQUÊTE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 817-818).
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CONQUÊTE. s. f. acquisition de la souveraineté que fait un Prince étranger d’une certaine étendue de pays, d’une Province, d’un Royaume, par la supériorité de ces armes. On le dit de l’action de conquérir & du pays conquis, c’est à dire obligé de se soumettre à une domination étrangère. Bello quæsita, parta, Imperio addita, adjecta. Les conquêtes d’Alexandre s’étendirent bien loin, & avec une extrême rapidité. La conquête est un brigandage dès qu’on y attache le pouvoir destructif. Ben. L’usurpation d’une Province à force ouverte, est revêtue du beau nom de conquête. S. Evr. Il y a des crimes qui deviennent glorieux par leur éclat : de-là vient que prendre des Provinces injustement, s’appelle faire des conquêtes. Rochef. Le droit de conquête, dit M. de Montesquieu, est un droit nécessaire, légitime, & malheureux, qui laisse toujours à payer une dette immense, pour s’acquitter envers la nature humaine.

Conquête se dit figurément, sur tout en termes de galanterie, quelquefois en style de spiritualité. Conciliatio animorum. On dit qu’une belle femme fait bien des conquêtes ; pour dire, qu’elle a bien gagné des cœurs ; qu’un tel est sa conquête ; pour dire, qu’il est son amant. Le saint homme ne songeoit qu’à faire des conquêtes de charité, & à ramener les brebis égarées dans la bergerie. P. d’Ori. Ce n’est pas l’ajustement qu’on censure dans les femmes, c’est l’intention de plaire, & l’ambition de faire des conquêtes. S. Evr. Nos prudes & vertueuses aïeules ne connoissoient point l’art d’enchaîner les cœurs, & de faire des conquêtes galantes. M. Scud. Cet habile Prédicateur sait rassembler toutes ses forces pour faire la conquête du pécheur qui résiste. Une conquête amoureuse fait aujourd’hui toute l’ambition des Romains, amollis par les douceurs d’une vie délicieuse. S. François Xavier eut besoin d’un grand courage & d’une grace bien puissante, pour tenter une conquête aussi périlleuse que celle des Idolâtres du Japon. On dit proverbialement qu’un homme est en pays de conquête, qu’il vit comme en pays de conquête ; pour dire, qu’il y vit à discrétion, qu’il traite les habitans avec dureté.

Conquête, (La) terme de Fleuriste. C’est un œillet violet-brun admirable, sur un blanc de neige. Sa fleur est très-large, n’est point sujette à crever, & porte graine volontiers. Sa plante est robuste, mais les marcottes ont peine à prendre racine : sur la fin il coffine ses fleurs. Il peut souffrir 4 boutons. Quelques-uns ont cru que c’étoit le Primo ; il n’y a point de différence dans la fleur, mais seulement dans le fanage. Morin. Conquête Bacquelan, est un pourpre & blanc fort détaché & large, sujet au blanc ; ses marcottes sont délicates mais sa fleur est riche, portant des panaches de pièces emportées. Id. Conquête du Sautoir, est un violet pourpre & blanc, régulièrement panaché, large & rond, garni de feuilles, qui graine, & ne creve point. Sa fleur est assez jardine, sa plante assez vigoureuse. Il a pris naissance à Lille chez M. du Sautoir. Id. Conquête d’Estrées, est un violet & blanc qui porte une grosse fleur, qui pourtant ne se fend point. Sa plante est délicate. Id. Conquête de verdiere, violet foncé sur un fin blanc. Sa plante est délicate, sa fleur n’est point hâtive. Conquête constant, c’est ce qu’on appelle Médor. Conquête de Laube, est un violet-brun sur un grand blanc. Il est fort rond & garni de feuilles, sa fleur est large & bien tranchée ; mais sa plante, qui est délicate, ne produit point beaucoup de marcottes. Il porte le nom d’un Fleuriste de Lille chez qui il a pris naissance. Conquête des Prés, est un violet blanc, qui porte une grosse fleur avec de gros panaches. Conquête malin, est un cramoisi haut sur un blanc passable, assez large, sa plante robuste. Conquête rouge, est une même espèce d’œillet que le Bel Inconnu, & la Belle Ecossoise. La Conquête de Los est de couleur d’ardoise. Morin.