Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/COMBLE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 704-705).

COMBLE. s. m. Le haut, le faîte d’une maison. Culmen, fastigium. Il a fait rebâtir cette maison de fond en comble. Les fondemens en sont bons, mais le comble ne vaut rien.

Comble se dit particulièrement de la charpente & de la couverture d’une maison. En Orient les maisons n’ont point de comble, elles sont couvertes en platte forme : en France ils sont pointus, ou en combles droits ; & maintenant on en fait de brisés, ou à la mansarde, qu’on appelle combles coupés. On appelle comble pointu, celui dont la plus belle proportion est un triangle équilatéral par son profil, & qu’on nomme aussi à deux égoûts. Comble à pignon, celui qui est soûtenu d’un mir de pignon en face. Comble à croupe, celui qui est à deux arrêtiers & avec un ou deux poinçons. Comble de pavillon, celui qui est à deux croupes, & à un, ou deux, ou quatre poinçons. Comble coupé, ou brisé, celui qui est composé du vrai comble, qui est roide, & du faux comble, qui est couché, & qui en fait la partie supérieure. Comble en dôme, celui dont le plan est rond, ou ovale, & le profil en pente droite. Comble à l’impériale, celui dont le contour est en manière de talon renversé. Comble plat, celui qui n’est pas plus haut que la proportion d’un fronton triangulaire. Comble à potence, une espèce d’appentis fait de deux, ou plusieurs demi-fermes d’assemblage, le tout porté sur le mur contre lequel il est adossé. Comble en patte d’oie, une espèce d’auvent à pans, & à deux, ou trois arrêtiers pour couvrir un puits, un pressoir. Comble entrapeté, ou entrapezé, celui qui ayant une large base, est coupé pour en diminuer la hauteur, & couvert d’une terrasse de plomb un peu élevée vers le milieu, où il y a d’espace en espace des trapes, qu’on leve pour donner du jour à un corridor, ou autre pièce interposée. Comble à terrasse, qui, au lieu de s’élever en faîte, est coupé, & forme une terrasse au haut du toit d’un logis. Les pignons d’un logis s’appeloient autrefois combles, ou combres ; & ils ont été ainsi nommés, à cause qu’il étoient couverts de chaume, à culmis, vel calamis, selon le témoignage de Servius.

☞ On dit figurément qu’un homme est ruiné de fond en comble' ; pour dire, qu’il a tout perdu ; qu’on lui a fait perdre son bien, ou son honneur, ou son crédit, ou tout cela ensemble. On le dit de même d’une ville, d’une province, d’une famille. &c. Fortunis omnibus eversus.

Comble se dit figurément en Morale ☞ du dernier période, du plus haut point où les choses peuvent aller. C’est le dernier surcroît, soit du bien, soit du mal. Cumulus, fastigium, summum, culmen. Dans toutes les disgraces, c’est le comble de l’infortune que d’avoir toujours été heureux. S. Evr. Il est parvenu au comble des honneurs, de la fortune. Dieu fut obligé d’envoyer le Déluge, à cause que la nature humaine étoit parvenue au comble de l’iniquité. Le comble de la misere, c’est de ne la sentir pas. Nicol.

Mais c’est où peut monter la derniere fureur,
D’être au comble du crime, & n’en voir par l’horreur.

Quint.

Et par les envieux un génie excité,
Au comble de son art est mille fois monté. Boil.

☞ Scuderi dans ses Observations sur le Cid avoit condamné cette expression, je ne sais trop pourquoi. L’Académie dans ses sentimens sur cette Tragi-Comedie, observe qu’on dit très-bien, c’est le comble de ma douleur, de ma joie. si ces mots n’étoient pas admis, il ne faudroit plus faire de vers. Elle est même d’usage en prose, dans le style noble, ainsi que dans le style ordinaire.

Pour comble. Façon de parler, qui signifie, pour surcroît. Après avoir essuyé une furieuse tempête, pour comble de malheur, il fut pris par des Corsaires. Alexandre vainquit Porus, &, pour comble de gloire, il lui rendit ses Etats.

Comble, terme de mesureur. s. m. Ce qui peut tenir au dessus des bords d’une mesure, d’un vaisseau déja plein. Le comble d’un minot, d’un boisseau, &c. Il a donné cela pour le comble.

Comble, adj. m. & f. terme de Mesureur. Il se dit de ce qui reste au dessus des bords de la mesure après que le Mesureur l’a remplie. Supereminente cumulo plenus. Il y a deux manières de mesurer : l’une à mesure comble ; l’autre à mesure rase. Le blé se vend à mesure rase, l’avoine à mesure comble. On donne le grain au Meûnier en mesure rase, & il le doit rendre en mesure comble.

☞ Ce mot comble ne de sit que des mesures des choses seches, comme les grains, & ne peut avoir lieu pour les mesures des choses liquides.

☞ On dit au figuré que la mesure est comble ; pour dire, que les fautes, les crimes, les outrages, &c. sont portés jusqu’à l’excès.

Comble, en termes de Blason, se dit d’un chef rétréci, comme les haméides sont des fasces rétrécies. Coronis contracta.

On dit au Manège, qu’un cheval a le pied comble, lorsqu’il a la sole arrondie par dessous, ensorte qu’elle est plus haute que la corne. Excedens.