Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/COLLIER

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 689-690).
◄  COLLIEGE
COLLIÈRES  ►

COLLIER, s. m. ornement que les femmes portent à leur cou, fait d’un tour de choses précieuses enfilées. Monile. Un collier de perles fines. Un collier d’ambre. Un collier de corail.

☞ On appelle aussi colliers, certains ornemens de cou, composés d’un ruban seul, ou d’un tissu de crin garni de rubans, de blonde, &c. ornemens qui changent de forme & de nom tous les jours.

Ce mot vient du latin collare.

Collier se dit aussi d’une marque naturelle en forme de cercle, qui se voit quelquefois autour du cou des animaux & des oiseaux, & est différente du reste de leur poil ou de leur plumage. Un merle au collier. Un chien noir qui a un collier blanc.

Collier, s. m. terme de Conchyliologie. C’est ce qui forme tout le contour de la coquille du limaçon. La différence de ses cribles forme les différentes couleurs de la coquille.

Collier est aussi un ornement particulier que portent les Chevaliers des Ordres militaires, qui s’étend bien avant sur leur manteau, & dont ils mettent la figure autour de leurs armes. Torques, Torquis. C’est une chaîne d’or émaillée, souvent avec plusieurs chiffres, au bout de laquelle pend une croix, ou une autre marque de leur Ordre. Le collier du S. Esprit, de S. Michel, de S. Lazare. Ordinis Equitum S. Spiritûs, S. Michaelis, S. Lazari torquis. Maximilien a été le premier des Empereurs qui ait mis un collier d’Ordre autour de ses armes, étant devenu chef de celui de la Toison : en France, c’est Louis XI qui le premier a entouré ses armoiries du collier de l’Ordre qu’il avoit institué.

Ordre du Collier. Les Chevaliers du Collier, ou de S. Marc, ou de la Médaille. Ordre de Chevalerie dans la République de Venise ; c’est le Doge & le Sénat qui le confèrent. Les Chevaliers n’ont point d’habit particulier ; ils portent seulement le Collier ou la chaîne que le Doge leur met au cou, ou une médaille, sur laquelle est représenté le lion aîlé de la République. L’abbé Justiniani en parle dans son premier tome, c. 11, p. 123 & suiv. de l’édit. in-folio.

L’Ordre du Collier. C’est le nom que porta d’abord l’Ordre des lacs-d’amour, institué en 1355, par Amédée, Comte de Savoie. Voyez Favin, Guichenon, Hist. de Savoie, le P. Hélyot, T. VIII, C. 48.

Collier céleste du Rosaire. Le P. F. Arnould, Jacobin, dans un livre qu’il a intitulé : Institution de l’Ordre du Collier céleste du saint Rosaire, imprimé à Lyon en 1645, prétend qu’à sa sollicitation la Reine Anne d’Autriche, veuve de Louis XIII, institua en 1645, un Ordre sous le nom de Collier céleste du Rosaire : ce collier devoit être composé d’un ruban bleu, enrichi de roses blanches, rouges & incarnates, entrelacées en chiffres des lettres capitales de l’Ave, A & V, & du nom de la Reine qui s’appeloit Anne ; la croix devoit être d’or, d’argent ou d’autre métal, & à huit rais ; où, d’un côté, il y auroit eu l’image de la Sainte Vierge, & de l’autre, celle de S. Dominique, chaque rayon pommeté & avec une fleur-de-lis dans chacun des angles de la croix qui devoit être attachée à un cordon de soie, & pendre sur la poitrine. L’Ordre devoit être composé de cinquante filles dévotes, sous une intendante ou supérieure. Cet Ordre n’a point eu de suite, quoique le P. Arnould prétende avoir obtenu des lettres patentes du Roi.

Collier est aussi un cercle de fer ou de cuir, ou une chaîne que portent les esclaves, les mores, les chiens pour les attacher, ou marquer leur servitude. Cet homme a été dix ans esclave, on voit encore la marque de son collier. Les Grands Seigneurs ont des mores auxquels ils mettent des colliers d’argent. Les petits chiens ont des colliers de cuir garnis de grelot, pour empêcher qu’ils ne se perdent. Les chiens qui vont à la chasse au loup, ont de gros colliers garnis de cloux, pour empêcher que le loup ne les étrangle. Collare clavis præfixum munitum.

En ce sens, on appelle au propre ; un chien au grand collier, un chien d’attache, ou un chien qui conduit les autres : figurément il se dit d’un habile homme, qui a du crédit en sa compagnie, & qui entraîne les autres en son opinion. Antesignanus. Scarron a aussi dit,

De ces Auteurs au grand collier,
Qui pensent aller à la gloire,
Et ne vont que chez l’Epicier.

On appelle aussi un collier de mores, un ustensile de table, fait en forme de collier de mores, qui sert à élever ou porter un plat ou une assiette volante.

On appelle à la boucherie, collier de bœuf, une partie de l’épaule de bœuf, qui contient le premier & le second travers, & la joue du bœuf, dont le premier morceau contient la veine grasse, qui est fort recherchée. Jugulum.

On appelle, en Architecture, colliers de perles ou d’olives, de petits ornemens qui se mettent au-dessous des oves, qu’on appelle autrement, patenostres. Monilia.

Collier, terme de charpenterie. On appelle colliers, deux pièces de bois chacune de douze pieds de long, & de dix pouces de grosseur, posées au-dessus du pan de bois du premier étage d’un moulin, l’une devant, l’autre derrière, assemblées dans les poteaux corniers. On appelle aussi du même nom, deux autres pièces de bois assemblées au haut des poteaux corniers. Elles ont chacune quinze pieds de long, & huit ou neuf pouces de grosseur.

Collier de cheval est une pièce de bois & de cuir rembourrée, qu’on passe autour du cou des chevaux de charrette, de coche, de labour, où l’on attache les traits pour tirer la charrette, le coche, la charrue. Collare. Et on appelle un cheval franc du collier, un cheval qui est prompt à tirer sans le secours du fouet. Un coup de collier, c’est une secousse, un effort que fait un cheval pour tirer. Jamais ce cheval n’a refusé un coup de collier. Si les chevaux avoient donné encore un coup de collier, la charrette étoit hors du mauvais pas. Liger.

En ce sens, on dit figurément, qu’un homme est franc du collier, lorsqu’il sert proprement ses amis, qu’il embrasse leur querelle franchement, & sans marchander, ni se faire prier. On le dit aussi d’un homme de guerre qui ne crains point de s’exposer dans l’occasion, & qui y va de bonne grace. On dit aussi figurément, donner un coup de collier ; pour dire, faire un nouvel effort pour réussir dans quelque entreprise.

On appelle proverbialement, collier de misère, le travail pénible qui est l’occupation ordinaire de quelqu’un. Pensum, opera, labor. Ainsi on dit, après s’être bien diverti, il faut aller reprendre le collier de misère ; pour dire, son travail accoutumé. Quelques-uns appellent aussi le mariage, le collier de misère. Toutes ces expressions figurées ne sont que du style familier.

Collier d’étai, en terme de Marine, est une grosse corde que l’on met en rond comme une boucle, pour y amarrer l’étai.

Collier de ton est un lien de fer en forme de demi-cercle, qui sert conjointement avec le ton, à tenir les mâts de hune & de perroquet.

Collier se dit aussi en Botanique, par comparaison, avec les colliers que les femmes portent à leur cou ; mais les Fleuristes, en parlant des anémones doubles, entendent par ce terme, un cordon d’étamines qui se trouve à quelques-unes de ces fleurs, & en diminue le mérite.

Collier. C’est aussi, en terme de Pêcheurs, la corde qui tient le bout du verveux, & qui l’arrête au pieu fiché dans l’endroit des rivières & autres eaux où l’on veut tendre.