Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CIRE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 605-606).

CIRE. s. m. Ouvrage que font les abeilles pour y mettre leur miel. C’est la matière jaunâtre qui reste de leur travail, quand on en a exprimé le miel. Cera. Elle se forme de la partie la plus crasse des fleurs qui leur servent de nourriture.

Les abeilles la ramassent sur les feuilles d’un grand nombre d’arbres & de plantes, & sur la plûpart des fleurs qui ont des étamines. Sur cela & sur la manière dont elles recueillent les deux sortes de cire qu’on trouve dans les ruches, voyez au mot Abeille ce que nous en avons rapporté d’après M. Maraldi & les Mémoires de l’Académie 1712.

On fait des flambeaux de cire, des images, des figures de cire, des chandelles de cire. La cire est jaune, & on la blanchit en la laissant plusieurs jours au soleil, ou à la rosée, après l’avoir rapée en menues parties ; ou bien en la faisant chauffer avec quantité d’esprit de vin, & en la passant par le filtre ; car alors elle se blanchit tout à coup. La cire grénée se blanchit plus facilement que l’autre. Matthiole enseigne une autre manière de blanchir la cire, en la faisant bouillir dans l’eau marine. On appelle cire-vierge, celle qu’on tire des ruches sans avoir passé par le feu. Selon Matthiole, la cire-vierge n’est pas proprement cire, mais comme un fondement pour défendre l’entrée des ruches, & les garantir du froid. Elle est de matière plus épaisse, étant composée de fleurs, & d’une odeur forte ; ensorte qu’on l’emploie souvent pour le galbanum. Sur la rivière des Amazones on voit des mouches à miel dont la cire est noire, qui brûle aussi bien que l’autre. La meilleure est celle qui est jaune, qui sent le storax, qui est ductile en sa siccité, & qui se peut filer comme le mastic. On l’appelle en latin propolis, c’est-à-dire, qui est à l’entrée de la ville. La cire devient verte, noire ou rouge, selon la couleur des choses avec lesquelles on la mêle ; verte, par le mêlange du verdet, noire par le mêlange du papier brûlé ; rouge par le mêlange de l’orcanette. Sa substance est crasse & emplastique. Elle ramollit & digère ; & est la matière des autres médicamens échauffans, ou rafraichissans, avec lesquels on la mêle.

Ce mot, aussi bien que le latin, vient du grec κηρός (kêros) : Κηρός (Kêros), cera, cire, est emprunté du Celte Coir. Pezron.

On appelle en Chancellerie la cire, ce qui sert à sceller. Les Édits se scellent en cire verte, & toutes les autres Lettres qui doivent durer toujours, qui commencent par ces mots, à tous présens & à venir ; comme les offices héréditaires ; tous les actes & commissions de justice, en cire jaune ; les provisions pour le Dauphiné en cire rouge.

☞ Le mot de cire se prend figurément pour le sceau de la Chancellerie. Ainsi l’on dit, la rémission est accordée, il ne faut plus que de la cire.

On dit aussi dans les procès criminels, qu’il faut de la cire ; pour dire, qu’il faut condamner le criminel à faire amende honorable avec une torche au poing.

Cire se dit aussi du luminaire d’une Église. La Sacristie de cette Église dépense tant en cire. La cire de cet enterrement a couté telle somme. Les cires appartiennent au Curé.

☞ On le dit même de la bougie qu’on brûle dans les maisons. On ne brûle que de la cire dans telle maison.

On appelle aussi le droit de cire, certain droit de bougies dont on fait la distribution en plusieurs Communautés, ou à des Officiers. Jus ceræ. ☞ Certains Officiers de la maison du Roi, de la Chancellerie, &c. ont un droit de cire, on leur doit tant de bougies, tant de livres de bougie.

Cire, en terme de Fondeur, se dit de la figure, ou ouvrage de cire ; qui couvre le noyau, & qui est couvert de la chape dans les moules, pour jeter les statues, ou autres ouvrages en métal.

☞ On dit figurément qu’un homme doux & traitable, dont on fait ce qu’on veut, qui reçoit toutes les impressions qu’on lui donne, que c’est une cire molle. C’est l’expression d’Horace. Cereus in vitium flecti.

☞ M. Arnaud, en parlant de l’Écriture, dit que c’est un nez de cire, qu’on tourne comme on veut. Le nez de cire, appliqué à l’écriture, me paroît comique & burlesque.

Moi, j’ai le cœur tout fait comme de cire ;
Doux & traitable, & s’il faut vous le dire :
Je suis volage, inconstant & léger. Voit.

Cire se dit proverbialement en ces phrases. Il est jaune comme cire ; pour dire, il a la jaunisse. On dit aussi d’un homme qui maigrit, qu’il fond comme la cire au soleil, ou le beurre dans la Poële. On dit d’un homme foible & irrésolu, qu’il est mou comme de la cire. On dit encore, aux pélerinages des environs on dépense beaucoup de vin, & peu de cire ; pour dire, qu’on y va plus pour se divertir que par dévotion : ce qui est tiré de l’Espagnol, Romeria di cerca mucho vino y poca cera. On dit aussi cela lui vient comme de cire ; pour dire, fort à propos. On dit aussi de deux personnes qui ont les mêmes humeurs qu’ils sont égaux comme de cire.

Monsieur l’Abbé & Monsieur son Valet,
Sont fait tous deux égaux comme de cire. Marot.

Cire se prend aussi figurément & bassement, pour la chassie qui vient aux yeux des vieilles gens. Ses yeux pleurent de la cire. Ses yeux sont investis de cire. Main.

Cire des oreilles. Cerumen. Humeur épaisse, onctueuse, visqueuse, jaune & amère, qui se sépare du sang dans le conduit de l’oreille par le moyen de petits grains glanduleux appelés glandes cérumineuses.

Cire d’Espagne, cire à cacheter, cera signatoria. Composition faite de laque, de colophane, de cinnabre & autres matières, à laquelle on donne différentes couleurs, & dont on se sert pour cacheter les lettres.