Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CHYPRE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 583).

CHYPRE. Cyprus. L’une des plus grandes Îles de la mer Méditerranée. Elle est sur les côtes de l’Anatolie, dont elle n’est éloignée que de seize lieues. On la nomma autrefois Macarie, Macaria, c’est-à-dire, heureuse, fortunée. On prétend que ce fut à cause de sa fertilité, & de l’abondance des métaux qu’elle produisoit. Elle eut aussi les noms d’Acamantis, Cerastis, Amathusa, Aspelia, Cryptos, Colinia, & Spechia. Il y avoit surtout, dit-on, des mines de cuivre, qui a pris son nom Cuprum, de cette île. Les principales villes étoient Salamis & Paphos, dont l’une avoit un temple de Jupiter, & l’autre de Vénus. Toute l’Île étoit consacrée à cette Déesse, que Stésichore & Horace appelle Cyprigénie, c’est-à-dire, née en Chypre. L’an 696 de la fondation de Rome, Caton fut envoyé par les Romains en Chypre, & il la réduisit en Province de la République Saint Paul & Saint Barnabé y portèrent les premiers la foi. Saint Barnabé y mourut & y fut enterré, & son corps y fut trouvé sous l’empereur Zénon. César la donna à Cléopatre. Après sa mort, elle retourna aux Romains. Dans la division de l’Empire elle fut attribuée aux grecs. En 1191, Richard, roi d’Angleterre, allant à la conquête de la Terre-Sainte, prit Chypre, & la donna à Guy de Lusignan. Jean de Lusignan, III du nom, ne laissa que Charlotte, qui fut couronnée à Nicosie en 1458, & peu de temps après, dépossédée par Jacques, son frère batard. Jacques épousa Catherine, fille de Marc Cornato Vénitien, à laquelle le Sénat de Venise assigna une dot en l’adoptant. Jacques mourut, & laissa Catherine grosse d’un fils, qui ne vécut que deux ans. Alors les Vénitiens s’emparèrent de Chypre, malgré les protestations de Charlotte qui vivoit encore, & qui en fit donation à Charles Duc de Savoie son neveu. En 1571, Selim II l’enleva aux Vénitiens. Chypre est un des plus délicieux séjours du monde ; l’air y est si doux, que les jardins y sont remplis de fleurs en tout temps. La capitale de Chypre est Nicosie. Voyez Vigenere sur César.

Quelques-uns aujourd’hui écrivent Cypre, & veulent par conséquent que l’on prononce ainsi. L’usage est partagé ; Chypre paroît mieux. Ce nom, selon quelques Auteurs, vient de Cyprus, fils, selpn Eustahius, & selon Etienne de Byzance, de la fille de Cynyras, dont cependant il n’est parlé ni dans la fable, ni dans l’histoire. Ainsi il est plus vraisemblable que Cyprus vient de כיפּר, nom hébreu de cette Île. Les Turcs l’appellent Cobros.

Nous avons l’histoire de la guerre de Chypre écrite en latin par Antoine Maria Gratiani, & traduite en François par le Peletier, au commencement de laquelle il y a une description de l’Île.

Ordre de Chypre, Chevalier de l’Ordre de Chypre, ou du silence, & appelés aussi Chevaliers de l’Epée. Ordre militaire institué par Guy de Lusignan, Roi de Chypre, dès le commencement de son règne, c’est-à-dire, en 1192. La fin de cet Ordre étoit de s’opposer aux descentes & aux irruptions des Infidèles dans son Île. Il donna aux Chevaliers un collier composé de lacs d’amour de soie blanche entrelassés des lettres R & S en or. Au bout de ce collier pendoit une médaille d’or, dans laquelle il y avoit une épée dont la lame étoit d’argent, & la garde d’or, avec la devise Securitas Regni. Voyez Epée, Menenius, Favin, Justiniani, Hermant, Schornebek, & le P. Hélyot P. J. C. 36.

CHYPRE. Poudre de Chypre. Voyez Poudre.