Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CHORÉVÊQUE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 555-556).
CHORGES  ►

CHORÉVÊQUE. s. m. l’h ne se prononce pas. Chorepiscopus. Les Savans demandent quelle étoit la fonction du Chorévêque dans la primitive Eglise. M. de la Roque soutient que les Chorévêques étoient les Evêques de la campagne, & qu’ils avoient la même autorité dans leurs villages, que les Evêques des grandes villes dans leurs Diocèses. Mais dans la prospérité les Evêques dédaignerent ces retraites solitaires & champêtres. Ils s’imaginèrent que l’Episcopat étoit avili, & devenoit méprisables dans la bassesse du village. Ainsi le Concile de Sardique défendit de consacrer des Evêques à la campagne, ou dans les petites villes, afin que la dignité Episcopale fût toujours relevée par l’éclat des grandes villes. Voyez M. de Marca. Les Chorévêques exerçoient dans les Bourgades la plûpart des fonctions Episcopales ; mais ils n’étoient pas ordonnés comme les Evêques, & n’étoient pas revêtus de la même autorité. Ils étoient seulement au dessus des simples Prêtres. Du Bois.

L’office de Chorévêques, auxquels les Doyens ruraux ont succédé, étoit de veiller sur les Paroisses de la campagne. On les a abolit, parce qu’ils usurpoient l’autorité des Evêques. Le Mait.

Quelques-uns disent que les Chorévêques n’étoient proprement que les Evêques que nous appelons aujourd’hui in partibus, lesquels, en qualité de suffragans, sont commis à l’administration des Diocèses, dont les Evêques sont absens. Cette idée n’est pas assez juste. Ce qu’ils ajoutent est mieux, que du moins l’institution des Chorévêques semble avoir donné lieu à celle de ces autres Evêques, qui ont pourtant des avantages que les Chorévêques n’avoient pas.

D’autres croient que les Chorévêques n’étoient que des Prêtres à qui l’Evêque donnoit presque toute son autorité pour la campagne. Le dixième Canon du Concile d’Antioche, en 342, ordonne que ceux qui sont dans les bourgs ou les villages, ou que l’on nomme Chorévêques, connoissent les bornes qui leur sont prescrites. Ils peuvent ordonner des Lecteurs, des Soudiacres & des Exorcistes ; mais non pas des Prêtres, ou des Diacres, sans l’Evêque de la ville dont ils dépendent. Le Chorévêque sera ordonné par l’Evêque de la ville. Ce Canon semble donner aux Chorévêques le caractère Episcopal, en leur permettant d’ordonner des Prêtres & des Diacres, au moins avec l’Evêque dont ils dépendent, ce que quelques-uns croient n’être pas sans difficulté. Quoi qu’il en soit, le Concile de Néocésaree, tenu vers 314, can. 14, leur donne la prééminence sur les Prêtres ; & le Pape Nicolas, au IXe siècle, dans sa lettre à Raoul, Archevêque de Bourges, déclare que les Chorévêques ont les fonctions Episcopales, & veut que les ordinations de Prêtres & d’Evêques qu’ils auront faites, soient valides. Le 44e Canon du Concile de Meaux, tenu en 845, ordonne que les Chorévêques n’exerceront point les fonctions proprement Episcopales, & qu’ils ne pourront administrer ni la Confirmation, ni le Diaconat. Le Pape Léon VII, dans sa troisième Lettre écrite en 936, ou environ, dit que les Chorévêques ne doivent ni consacrer les Eglises, ni ordonner des Prêtres, ni donner la Confirmation ; ce qui montre ; 1°. Qu’ils le pouvoient, & le faisoient même quelquefois, & 2°. Qu’il y en avoit encore au Xe siècle. Il n’est point parlé de Chorévêques en Orient avant les Conciles d’Ancyre, de Néocésarée & de Nicée, tenus au commencement du IVe siècle ; ni en Occident avant le Concile de Riès tenu en 439. Ils ont cessé en Orient & en Occident dans le Xe siècle.

Ce mot, Chorévêque, est grec, composé de χώρα (chôra), région, petite contrée ; & d’Ἐπίσκοπος (Episkopos) dont s’est fait Evêque.

Chorévêques signifie aussi une dignité qui est dans quelques Cathédrales, principalement en Allemagne, & c’est la même chose que Chori Episcopus, c’est-à-dire, l’Evêque du chœur. Molamus fait mention de ces Chorévêques dans son livre de Canonicis. Voyez le Glossaire de M. du Cange. A Utrecht dans l’Eglise de S. Martin, l’Archisoudiacre a le titre de Chorévêque, & fait la fonction d’Archiprêtre. Il y a aussi dans l’Eglise de Treves quatre dignités qui portent encore le titre de Chorévêque. Dans l’Eglise de Cologne, le premier Chantre se nomme Chorévêque, soit par abus, & à cause que dans le Chœur il porte le bâton de l’Evêque pendant l’Office, soit parce qu’il est l’Evêque, l'inspecteur, le supérieur du Chœur. Alors ce mot viendroit non pas de χώρα (chôra), mais de χόρος (choros), Chœur, & d’Ἐπίσκοπος (Episkopos).

Baronius à l’an 357 de J. C. Duaren, de sacris Ecclesiæ Ministris, L. I. Le P. Cellot, De Hierach. Eccl. L. IV, C. 14 ; L. V, C. 13 ; L. VI, C. 10. De Marca, De Concord. Sac. & Imp. L. II, parlent des Chorévêques.