Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CHALAND

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 397-398).
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CHALAND. s. m. Bateau plat, de moyenne grandeur, dont on le sert pour amener à Paris les marchandises qui descendent par la rivière. Cymba. On appelle bateaux Marnois, ceux qui sont construits vers la source de la Marne ; la forme des Marnois est plus courte, mais plus large. Chaland se dit plus particulièrement des bateaux de la Loire qui sont fort légers, & qui vont à la voile, qui ne sont bâtis que de planches encouturées l’une sur l’autre, jointes à des pièces de liûres qui n’ont ni plats-bords, ni matières, pour les tenir fermes. Ce sont ceux qui viennent par le canal de Briare. Il y en a de douze toises de long, de dix pieds de large, quatre pieds de hauteur de bord.

Ce mot, selon Borel, vient du grec κᾶλον, qui signifie lignum. Mais selon Du Cange, il vient du grec χηλάνδιον, qui étoit une espèce de petite Galère qui alloit à rames. Ugurio dit qu’on l’a appelée celandria, quia currit velociter in ὕδρῳ, c’est-à-dire, aqua. On l’a appelée dans la basse latinité, chelandium, chelandrium, chelindrus & salandra.

CHALAND. ANDE. s. f. Celui ou celle qui a coutume d’acheter à une boutique chez un même Marchand. Apud eumdem emtor assiduus. Adventor. Le plus grand secret du commerce, c’est de savoir bien entretenir les chalands. Le marchand a ses chalands, l’Ouvrier a ses pratiques.

☞ On le prend quelquefois simplement pour acheteur. Un nouveau chaland. Attirer les chalands.

Nicot croit que ce mot vient du grec καλῶ, voco, parce que les Marchands ont coutume d’appeler leurs chalands.

Chaland, se dit au figuré & par raillerie, pour signifier celui ou celle qui va souvent en de certains lieux, pour se divertir d’une manière qui tient un peu du libertinage. Ses sœurs n’étoient pas alors en âge de lui donner des chalands ; toutes maintenant sont grandes, & en la fleur de leur jeunesse. Patru.

On appelle pain chaland, le gros pain que les Boulangers de la ville fournissent aux bourgeois leurs chalands, à la différence de celui qu’apportent les Boulangers de dehors pour vendre au premier venu. Ce pain est fait d’une pâte forte, qu’on pétrit avec les pieds. Il est blanc, haut de mie & gros de croûte. Il n’y a guère que les pauvres gens de Paris & des fauxbourgs qui mangent du pain chaland. Panis secundarius. D’autres croient qu’on appelle ce pain chaland, à cause qu’il venoit par des bateaux nommés chalands, comme il en vient encore de Corbeil, de Ville-neuve-saint-Georges, &c. En ce sens chaland est adjectif.