Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CAUSTIQUE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 335-336).
CAUSUS  ►

CAUSTIQUE. adj. de t. g. Qui a la propriété de brûler, qui est corrosif. Le suc de tithymale est fort caustique. Caustions, acturens. L’arsenic n’est poison, que parce qu’il est caustique, qu’il corrode & perce les parties où il s’attache. Il y a des remèdes caustiques & corrosifs, qu’on appelle aussi pyrotiques, qui par leur substance âcre, mordante & terrestre, corrodent, brûlent & détruisent la peau & la chair pour pénétrer au-dedans des corps durs & calleux, & fondent & liquéfient les humeurs ; comme alun brûlé, éponges, cantharides, & autres vésicatoires. Les caustiques qui font escarre, sont appelés ruptoires ou cautères. Les cristaux de lune & pierre infernale, qu’on fait avec l’argent & l’esprit de nitre, sont caustiques, par cette union. On met aussi au rang des caustiques l’orpiment, la chaux vive, le vitriol, la cendre de figuier & de frêne, la cendre de lie de vin, le sel de lessive dont on fait le savon, le mercure sublimé, &c. Ce mot vient du grec ϰατϛιϰὸς (katsikos), urens, qui vient de ϰαίω (kaiô), uro.

☞ On appelle sel caustique, un sel alcali. Voyez Alcali.

☞ Ce mot est aussi emploié substantivement ; comme dans l’article précédent. Faire usage des caustiques, La pierre infernale est un puissant caustique.

Caustique perpétuel. Causticum perpetuum. On donne ce nom à la pierre infernale.

Caustique se dit dans le sens figuré, d’un homme mordant & satyrique, qui parle avec malignité. Mordax, qui iniquo mordet dente. C’est un homme très-caustique ; il a l’humeur caustique.

☞ On le dit aussi substantivement pour causticité. Les satyres de Juvénal n’approchent pas de la mordacité & du caustique de la plume de Pogge dans ses ouvrages appelés invectives. Journ. des Sav, 1720.

Caustique est aussi substantif féminin, comme terme de dioptrique & de catoptrique. On appelle caustique, la courbe sur laquelle se rassemblent les rayons réfléchis ou rompus par une surface. Caustica. Un rayon soit réfléchi, soit rompu par une courbe quelconque, doit être coupé en quelqu’un de ses points par un autre rayon semblable, & infiniment proche de lui ; de même ce second rayon doit être coupé par un troisième, & ainsi à l’infini. La suite de tous ces points d’intersection forme une ligne courbes que M. Tschirnhaus a appelée caustique ou brûlante, parce qu’il est visible que les rayons ne sont en aucun autre endroit si ferrés & si capables de brûler, que sur la circonférence de cette courbe, où ils se coupent. Si les rayons sont réfléchis, la courbe s’appelle caustique, par réflexion ; & s’ils sont rompus, caustique par réfraction. Une caustique peut se réduire toute en un point. Ainsi, si des rayons parallèles à l’axe d’une parabole tombent sur sa concavité,& s’y réfléchissent, ils vont tous se réunir au foyer de cette courbe, & ce point seul est toute la caustique. Dans un demi-cercle dont la concavité réfléchit des rayons perpendiculaires à son diamètre, & parallèles entr’eux, ou venus du soleil que l'on suppose infiniment éloigné, la caustique est une courbe assez étendue, qui coupe précisément par le milieu un rayon perpendiculaire au diamètre. C’est dans ce point, qui est par conséquent un quart du diamètre d’une sphère, ou d’un miroir concave, que l’on établit communément son foyer ; mais il ne faut pas croire que ce foyer, ou la caustique, soit alors ce seul point.

Toutes les courbes qui sont couvertes du côté du point lumineux, au lieu de rassembler les rayons réfléchis, les écartent & les rendent divergens, & alors on voir que leur caustique est du côté opposé à celui où se fait la réflexion, que celle d’une demi-sphère convexe, par exemple, est du côté de sa concavité, que par conséquent, les rayons se réfléchissent sur la convexité, comme s’ils étoient partis de cette caustique, située du côte convexe, c’est-à-dire, en un mot, qu’ils s’écartent après la réflexion. Il y a des cas où les courbes ont aussi les rayons réfléchis sur leur concavité, mais cela dépend de la situation du point lumineux à leur égard, & alors la caustique ne manque pas de passer du côté de la convexité. Un des plus grands avantages de la méthode des caustiques, c’est qu’elle donne la rectification ou la longueur des courbes, toutes les fois que celles qui les produisent font géométriques. Ainsi l’on voit que la caustique par réflexion formée dans un demi-cercle, qui a reçu, comme on vient de le dire, des rayons perpendiculaires aux rayons du diamètre qui la termine, est au diamètre de ce demi-cercle comme trois à deux. De même la caustique par réflexion d’une demi-circonférence circulaire, qui a reçu des rayons parallèles à son axe, est au diamètre de cette demi-circonférence, à peu près comme cinq à trois.

Comme toutes les caustiques sont produites par des rayons soit réfléchis, soit rompus, & que leur réflexion ou leur réfraction dépend de leur incidence, les caustiques changent nécessairement, selon que les rayons incidens ont une direction différente. Dans la caustique par réflexion formée au-dedans du demi-cercle, les rayons incidens sont supposés perpendiculaires au diamètre qui termine ce demi-cercle. Mais si ces rayons partoient tous d’une extrémité de ce diamètre pour aller frapper différens points de la circonférence concave, & qu’ils en fussent tous autant de cordes, il naîtroit une autre caustique. Elle seroit au diamètre de son demi-cercle générateur, comme quatre à trois, au lieu que la première étoit comme trois à deux.

M. Carré a donné dans les Mémoires de l’Académie 1703, pag. 183, la rectification des caustiques circulaires, des caustiques cycloïdales & paraboliques, & de leurs développées avec la mesure des espaces qu’elles renferment. On dit ordinairement, les caustiques de M. Tschirnhaus, comme on dit la Spirale d’Archimède, la Conchoïde de Nicomède, la Cissoïde de Dioclis, & les Développées de M. Huygens. Fontenelle.