Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CAROTTE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 280).
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CAROTTE. s. f. Daucus sativus. Pastinaca sativa, tenui folio. Carota. Plante ombellifère, dont la racine est un pivot long d’un pied, rarement branchu, qui donne peu de fibres ; cassant, charnu, succulent, doux & aromatique au goût ; tantôt rouge, tantôt d’une couleur de pourpre foncé, tantôt jaune, & tantôt blanc ; épais à son collet d’environ un pouce & demi, d’où sortent plusieurs feuilles disposées en rond, longues de huit à neuf pouces, découpées en plusieurs segmens qui sont encore subdivisés en une infinité d’autres étroits & longs. Elles sont vertes, velues, & d’une odeur aromatique. La tige, qui s’élève du milieu de ses feuilles, est haute de quatre à cinq pieds, branchue, & garnie de feuilles alternes, pareilles à celles du bas, mais plus petites. Elle est creuse, cannelée, velue, & terminée, aussi-bien que ses branches, par des ombelles, garnies à leurs naissances de plusieurs brins de feuilles découpées en lanières longues & étroites. Ces ombelles sont composées de fleurs à cinq pétales, blanches, inégales, échancrées, & disposées en fleur-de-lis de France, Le calice qui soutient la fleur, devient un fruit gros comme le grain d’anis, fermé par deux semences aplaties par l’endroit qu’elles se touchent, presque ovales, arrondies sur leurs dos, cannelées, & garnies de poils courts & blanchâtres, rangés en manière de fils. On mange les racines de carotte. On les fait cuire dans l’eau, & ensuite on les apprête avec le beurre, le poivre, le sel & un peu de vinaigre. On les met aussi dans la soupe. Ses semences sont diurétiques. On appelle dans quelques provinces du Royaume carotte la betérave ; & pour la carotte on la nomme Pastenade.

Carotte se prend souvent pour la racine de la plante de carotte.

☞ On seme les graines de carottes au mois d’Avril ou de Mai sur planches. On les éclaircit s’il est nécessaire. Pour les avancer, on coupe les montans à la mi-aout, à un demi-pied de terre.

On dit proverbialement de ceux qui font mauvaise chère, qu’ils ne mangent que des carottes.

On appelle une carotte de tabac ou du tabac en carotte, celui qui est configuré comme la racine de la plante qui porte ce nom. Pour faire du tabac en carotte, on assemble 50, 60, 80, ou cent feuilles de tabac, selon que l’on veut les carottes grosses ou menues, dont on fait une botte que l’on presse avec une corde, depuis un bout jusqu’à l’autre, mais en commençant par le milieu. Comme les feuilles sont beaucoup plus larges par le milieu que par les deux bouts, le milieu de cette botte se tient toujours plus gros, & va toujours en diminuant du côté des bouts. Quand cela a séjourné quelque temps, on en ôte la corde, & l’on couvre cette figure de navette de papier ordinairement marbré, que l’on colle dessus, de peur que le tabac ne s’éfeuille à la poche ; & en coupant ce tabac par le milieu, chaque bout produit une carotte de tabac, parce qu’il est fait comme la racine de la carotte.