Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CARAT

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 257).
CARATURE  ►

CARAT. s. m. C’est proprement le nom du poids qui exprime la bonté ou le titre de la perfection ou imperfection de l’or. Nativa auri coctio. Il ne se dit point des autres métaux. Les Monnoyeurs ont fixé à 24 carats le plus haut titre, ou la plus grande perfection de l’or. Cependant quelque soin qu’on prenne pour l’épurer & pour en oter l’alliage, ils ne peuvent jamais l’y faire arriver ; il manque toujours une quart de carat. Ces degrés servent à marquer l’alliage. Les Monnoyeurs appellent un quart de carat un seizième ; ils subdivisent ce seizième en deux huitièmes, & chacun de ces deux huitièmes en deux seizièmes. Sur ce calcul-là, ils disent qu’on peut purifier l’or jusqu’au premier seizième du second huitième, mais point au-delà : on ne peut l’affiner à un plus haut degré de pureté. Le plus fin or est d’ordinaire celui des monnoies. L’or à 22 carats est celui où il y a deux parts d’argent ou d’autre métal sur 22 parts de fin or. Les Orfévres emploient d’ordinaire l’or à 22 carats.

Les Orfévres par l’Ordonnance ne peuvent travailler d’or fin qu’à 23 carats & trois quarts, sans remède & sans soudure ; & en cas de soudure, à un quart de carat de remède, & en ouvrage creux chargé de filets & de rapports, à demi carat de remède : mais si on leur délivre l’or, ils pourront travailler à tous titres, pourvû qu’ils en tiennent registre.

Le carat de fin, est un vingt-quatrième dégré de bonté de quelque portion d’or que ce soit ; & un carat de prix, est une vingt-quatrième partie de la valeur d’un marc fin : comme, si le marc d’or vaut 384 livres, le carat de prix vaudra 16 livres. On a aussi appelé le carat de poids, un poids de la vingt-quatrième partie du marc, qui est de 192 grains. Il a servi autrefois dans la fabrication des monnoies. Le mot de carat, selon Ménage, après Alciat, vient du Grec κεράτιον, qui étoit une espèce de petit poids. Mais Savot le dérive avec plus d’apparence de καράτιον, qui signifioit un denier de tribut, ou une espèce de monnoie qu’on battoit à cette fin, disant qu’il est vraisemblable que comme la division du fin de l’argent a été faite par une espèce de monnoie qu’on appeloit denier ; aussi le titre de l’or a été marqué par une monnoie d’or qu’on appeloit en ce temps-là carat. Meursius & Bulenger le prennent aussi pour une espèce de monnoie. D’autres les dérivent simplement du Latin caracter.

Carat, est aussi le poids dont on use pour peser les diamans, qui est de quatre grains. Le diamant du Grand Mogol pèse 279 carats. Ces grains sont un peu moins pesant que ceux du marc. Ce mot en ce sens est venu du Grec κεράτιον, qui signifie un fruit que les Latins nomment siliqua, & les François carouge ou caroube. Il est contenu en des gousses courbes, de la longueur d’un doigt. Chaque grain de ce légume peut peser quatre gains, soit de blé ou d’orge ; d’il il est arrivé que le nom de siliqua a toujours été pris pour un poids de quatre grains, comme prouvent Poulain en son Glossaire, & Depois Médecin, en son Traité des Medailles. Galien appelle l’arbre qui porte ce fruit Keratonia. Saladin, dans son Livre De Ponderibus, au rapport de Du Cange, dit que ce poids a été appelé chira ou chirast.

Carat se dit aussi des petits diamans qui se vendent au poids. Sa girandole paroît beaucoup de loin, cependant elle n’est que de carat.

Carat se dit aussi au figuré en parlant des choses morales, comme amitié, estime, &c. il ne se dit que dans le style familier, & signifie degré, augmentation. J’espere que pour mon droit d’avis vous augmenterez de quelques carats la précieuse amitié dont vous m’honorez. Costar.

On dit proverbialement, qu’un homme est sot à 24 carats ; pour dire, qu’il est parvenu au plus haut point de sotise.