Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CALICE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 174-175).

CALICE. s. m. Vaisseau sacré qui a une petite coupe posée sur un pied assez haut, & allez large parle bas. Sacer calix. Il sert au sacrifice de la Messe ; c’est dans ce vase que se fait la consécration du vin. Les Calices doivent être d’or ou d’argent dans toutes les Eglises. On en trouve cependant quelques-uns d’étain, mais dont la coupe est dorée, au moins en dedans. Je doute qu’on le souffrit aujourd’hui. Les anciens calices avoient deux anses. Bede assure que le calice dont notre Seigneur le servit à la Cène avoit deux anses ; qu’il étoit d’argent, & de la capacité d’une chopine. Les calices des Apôtres & de leurs premiers successeurs étoient de bois. Le Pape Zéphyrin ordonna qu’on se servit de calices d’or & d’argent. D’autres disent que c’est Urbain I. au troisiéme siècle. Léon IV. a défendu ceux d’étain & de verre. On demanda à S. Boniface Martyr, s’il étoit permis de consacrer dans des calices de bois : il répondit qu’autrefois les Prêtres étoient d’or, & les calices de bois ; mais que depuis, les Prêtres étoient de bois, & consacroient dans des calices d’or. Walafridus Strabo. Il a été jugé qu’un Religieux peut donner, engager, ou vendre son calice, sans que l’Abbé qui succède à sa dépouille le puisse réclamer comme un bien sacré. Papon. Si celui qui brise le calice est impie, celui-là l’est bien davantage qui profane le sang de Jésus-Christ, disent les Pères du Concile d’Alexandrie en 340, En 787 le Concile de Calcuth en Angleterre défendit d’offrir le saint Sacrifice dans des calices, ou des patènes de corne. Du riche butin que l’armée Françoise fit dans le Languedoc, le Roi Childebert se réserva les dépouilles des Eglises Ariennes, qui consistoient en soixante calices, quinze patènes de pur or, & vingt Missels ou livres d’Evangile couverts de lames d’or, & ornés de pierres précieuses. P. Dan.

Les anciens calices étoient beaucoup plus grands que ceux d’aujourd’hui, parce que le peuple communioit alors sous les deux espèces, au lieu que le calice ne sert présentement qu’au Prêtre. Lindanus, qui en avoit vu quelques-uns dans des Eglises d’Allemagne, en fait la description au Liv. IVe de sa Panoplie, ch. 56. Ils avoient deux anses, que le Diacre tenoit lorsqu’il présentoit le calice au peuple pour le communier sous l’espèce du vin. De plus chaque calice avoit un chalumeau, ou tuyau qui y étoit attaché fort proprement, & ce tuyau étoit d’argent, ou de quelqu’autre métal, en sorte qu’on suçoit plutôt qu’on ne buvoit. C’est ce que nous apprenons de Lindanus & de Beatus Rhenanus sur Tertullien, qui avoient vu de ces anciens calices en plusieurs villes d’Allemagne.

Calice de Soupçon. Calix suspicionis, poculum suspicionis. Vansleb, dans son histoire de l’Eglise d’Alexandrie, rapporte qu’autrefois dans l’Egypte, quand les maris (il parle des Chrétiens) soupçonnoient leurs femmes d’infidélité, ils leur faisoient avaler de l’eau soufrée, dans laquelle ils mettoient de la poussière & de l’huile de la lampe de l’Eglise, prétendant que si elles étoient coupablés, ce breuvage leur feroit souffrir des douleurs insupportables, c’est ce qu’on appeloit le Calice de soupçon. Voyez cet Auteur. Ces Chrétiens d’Egypte avoient pris cette épreuve de l’Ecriture, Nomb. V. 14, où Dieu prescrit ce qu’un mari jaloux devoit faire pour connoître si sa femme étoit coupable ou non. Il l’amenoit au Prêtre, offroit pour elle la dixième partie d’un boisseau de farine d’orge. Il ne mettoit dessus ni huile ni encens, comme dans les autres sacrifices. Cette offrande s’appeloit le sacrifice de la zélotypie ou de la jalousie. Ensuite il prenoit de l’eau sainte dans un vase de terre, & jetoit dedans un peu de poussière qu’il prenoit sur le pavé du tabernacle ; & après quelques autres cérémonies & des exécrations, il lui faisoit boire des eaux très-amères, en lui disant que si elle étoit innocente, ces eaux ne lui nuiroient point ; mais que si elle ne l’étoit pas, son corps enfleroit & pourriroit, & l’effet suivoit infailliblement. Telle étoit, dit Moyse, la loi de la Zélotypie ou de la jaloufie. Les Egyptiens crurent que ce seroit la même chose dans le Christianisme, mais cette loi, comme toutes les autres loix cérémoniales, n’avoit été instituée que pour les Israëlites.

Ce mot vient du Grec κύλιξ, qui signifie la même chose.

Calice, en termes de l’Ecriture & de spiritualité, signifie tristesse, affiction, douleur accablante. Cette signification est tirée de l’Ecriture, où Jésus-Christ demande à son Père de ne pas boire le calice de sa passion, & de plusieurs autres endroits. Le calice des Saints se boit avec amertume, il afflige, il révolte la nature. L. d’Abelard. On lui a fait boire le calice jusqu’à la lie. C’est-à-dire, on l’a mortifié Jusqu’à l’excès. Et cela se dit même en matière profane.

On dit proverbialement, qu’il faudra boire, avaler le calice ; pour dire, qu’il faudra souffrir constamment, ou faire quelque chose pour laquelle on a grande répugnance.

On dit aussi des gens dont les habits sont chargés de galons d’or, qu’ils sont dorés comme des calices.

Calice se prend en Botanique pour cette partie extérieure qui enveloppe la fleur lorsqu’elle est en bouton, & qui est différente du pédicule. Calix. On emploie encore le mot de Calice pour exprimer la partie qui soutient & enveloppe tout à la fois quelques autres fleurs, comme dans la rose : ainsi l’on dit qu’un calice devient fruit, abit in fructum, lorsque ce fruit naît de cette partie extérieure qui couvre ou qui soutient simplement la fleur, ou la couvre & la soutient tout à la fois. La couleur verte n’est pas essentielle au calice, puisqu’il y a certaines fleurs dont les calices sont colorés, & quelquefois plus vivement que les pétales mêmes des fleurs qu’elles soutiennent, comme dans l’ellébore. On observe que le calice de plusieurs fleurs tombe presque aussi-tôt qu’elles s’épanouissent, calix deciduus, pendant que d’autres calices subsistent long-temps après la chute des parties de leurs fleurs, calix subsistens. Dans d’autres fleurs le calice est uni si étroitement aux parties de la fleur, qu’elle ne sauroit s’en séparer ; & enfin il y a des fruits auxquels la fleur sert de calice, comme dans le blé noir, & auxquels la fleur est étroitement collée, comme dans la plante appelée cabaret. Certaines espèces de mauves ont double calice, les plantes ombellifères n’ont que quelques dentelures pour calice, & la partie postérieure de ce calice est le jeune fruit. Dans la plûpart des plantes bulbeuses, le calice est une membrane très-fine qui enveloppe toute la fleur, & qui se déchire et se dessêche lorsque la fleur grossit, comme dans les Narcisses. On dit un calice commun à plusieurs fleurs : un calice propre à chaque fleur, lorsqu’un calice renferme plusieurs fleurs qui ont chacune leur calice particulier ; tels sont les calices de toutes les plantes à fleurons, comme le chardon, l’ambrette, &c. Les enveloppes de fruits ne sont pas appelées calices, il n’y en a que certaines qui aient pris ce nom en François, à cause de leur figure : tel est le fruit du chêne, qui est compose d’une calotte qu’on nomme communément calice, en Latin cupula, & d’un gland qui n’y est renfermé qu’en partie dans sa maturité, au lieu qu’il y est entièrement contenu dans le temps qu’il n’est qu’embryon. L’usage du calice est de garantir des injures de l’air les parties les plus délicates de toute la plante, & la plus nécessaire pour la multiplication de l’espèce. La nature est industrieuse dans les divers moyens dont elle se sert pour n’exposer de jeunes embryons, que lorsqu’ils sont en partie en état de résister aux impressions fâcheuses des saisons. Rien n’est plus beau que l’examen de toutes ces précautions, & rien ne prouve davantage que tout cet appareil de pièces d’écailles & de feuillages dont sont garnies les fleurs & les fruits, n’est pas inutile, & que le nombre de tant de parties n’est pas multiplié sans nécessité. Le safran n’a point de calice, & sa fleur sort même de la terre avant les feuilles.

☞ La forme des calices varie beaucoup : les uns sont orbiculaires, d’autres cylindriques, & pour en donner une expression abrégée, on les compare à une calotte, à un godet, à une soucoupe, & il y en a de lisses, de velus, de raboteux, d’écailleux, dont les échancrures sont cannelées ou dentelées, ou laciniées ; ce qu’on exprime par ces termes, orbiculatus, globosus, cylindricus, squammosus, striatus, simbriatus, crenatus, dematus, laciniatus &c.

☞ Linnæus en distingue sept espèces.

☞ 1°. Perianthium, le calice proprement dit, ou l’espèce la plus commune de calice. Il est souvent composé de plusieurs pièces ; ou s’il est d’une seule pièce, il se divise en plusieurs découpures, & il n’enveloppe pas toujours la fleur toute entière.

2°. Involucrum, l’enveloppe qui est un calice commun à plusieurs fleurs, lesquelles ont quelquefois de plus leur calice ou perianthium particulier. Cette enveloppe est composée de plusieurs pièces disposées en rayons, & quelquefois colorées : ceci convient aux fleurs à fleurons, demi-fleurons & radiées.

☞ Linnæus en distingue deux sortes ; involucrum universale, c’est-à-dire, le calice commun qui se trouve à la base des premiers rayons ombellifères ; & involucrum partiale, qui se trouve au bas des ombels particuliers.

☞ 3°. Spata. Le voile. Il enveloppe une ou plusieurs fleurs qui sont ordinairement dépourvues de calice ou perianthium propre. Le voile qui s’observe principalement sur plusieurs liliacées, consiste en une ou deux membranes attachées à la tige. Il y en a de différente figure & consistance.

☞ 4°. Gluma. La balle. Ce terme est consacré à la famille des graminées, & cette espèce de calice est composée de deux ou trois écailles qui font creusées en cuilleron, & membraneuses, de sorte qu’elles sont transparentes, sur-tout à leurs bords.

☞ 5°. Amentum ou julus, le chaton qui est ordinairement formé d’écailles attachées à un filet commun ; & ces écailles servent de calice à des fleurs mâles & à des fleurs femelles.

☞ 6°. Calyptra, la coiffe. C’est une enveloppe membraneuse, souvent conique, qui couvre les parties de fructification. Elle se trouve ordinairement aux sommités de plusieurs mousses. Tournefort emploie ce terme dans une signification plus étendue que Linnæus.

☞ 7°. Volva, la bourse. C’est une enveloppe épaisse, qui d’abord renferme certaines plantes de la famille des champignons. Elle s’ouvre ensuite par le haut pour laisser sortir le corps de la plante.

☞ Les Jardiniers appliquent quelquefois aux pétales le nom de calice, comme quand ils disent qu’une tulipe a un beau calice, c’est-à-dire, que les pétales forment comme la coupe d’un calice.

☞ Linnæus nomme calix auctus, celui que Vaillant a nommé caliculatus ; c’est-à-dire celui où la partie extérieure du calice est entourée de feuilles, comme au Bidens. Du Hamel.