Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CAFIER

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 149-152).
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CAFIER. s. m. Espèce de Jasmin d’Arabie dont la semence nous est connus sous le nom de café. Jasminium Arabicum, Lauri folio, cujus semen apud nos café dicitur, Act. Ac. R. Pan. Cet arbre a été apporté en Europe en 1707 par les Hollandois, & en 1709 il donna des fruits au jardin d’Amsterdam ; avant ce temps-là on ne connoissoit point son caractère ; & les différens sentimens des Auteurs qui avoient traité du café, faisoient naître des doutes qu’on ne pouvoit résoudre que par la vue & la culture de cette plante. Celui qui en a le mieux parlé, est M. Galland, dans une lettre qu’il imprima en 1699 à Caen, & qui contient une Traduction d’un Traité sur le café, composé par Abdalcader Ben Mohammet, qui vivoit l’an 996 de l’Egire, c’est-à-dire, 1587 de J. C. Cet Auteur, à la fin de cet ouvrage, témoigne qu’il a vû à Constantinople les rejetons d’un arbre de café. Un Turc qui avoit pris soins de le cultiver, voyant qu’il avoit gêlé, le coupa par le pied ; mais il poussa des rejetons. Il ajoute que ses feuilles sont vertes toute l’année ; qu’elles ressemblent à celles du Laurier, excepté qu’elles ne sont pas si pointues, mais plus épaisses, & d’un vert plus foncé. M. Nointel, Ambassadeur du Roi, le fit peindre. Le Cafier, qui est garni en tout temps de feuilles, donne beaucoup de branches un peu horisontales, toujours opposées, & chargées d’espace en espace de feuilles opposées deux à deux, à queue fort courte. La figure de ces feuilles est pareille à celle du Laurier, avec cette différence, qu’elles sont plus larges, plus pointues, d’un vert gai & luisant en dessus, plus pâle en dessous, & qu’elles n’ont qu’un goût douceâtre & d’herbe, sans odeur particulière. De l’aisselle de la plûpart de ces feuilles naissent des fleurs jusqu’au nombre de cinq, soutenues par un pédicule fort court. Ces fleurs sont à peu près de la figure & du diamètre des fleurs du Jasmin d’Espagne ; mais elles sont toutes blanches ; leur tuyau est plus court, & leurs découpures plus étroites ; les étamines, outre cela, se trouvent en nombre pareil à celui des découpures de la fleur, ce qui n’est pas ordinaire aux Jasmins. L’odeur de ces fleurs est légère, douce & agréable. Le calice qui soutient la fleur est à quatre pointes, & environne un embryon ou jeune fruit surmonté d’un style fourchu qui enfile la fleur. Ce jeune fruit est terminé par un petit nombril, & devient de la grosseur d’un Bigarreau moyen, vert clair d’abord, puis rougeârre, ensuite d’un beau rouge, & enfin rouge obscur dans sa parfaite maturité. La chair de ce fruit est mince, blanchâtre, glaireuse, & d’un goût assez fade. Ce goût se change en celui de nos petits pruneaux, lorsque cette chair est desséchée. Cette chair sert d’enveloppe commune a deux coques minces, dures cependant, étroitement unies, &c qui gardent la figure de la semence qu’elles contiennent, qui est ovale, plate d’un côté, & creusée de ce même côté, & dans son milieu par un sillon assez profond, arrondie & voûtée du côté opposé. Si une de ces deux semence vient à avorter, celle qui restera, occupera tout le fruit, qui pour lors n’aura qu’une loge. Cette semence, quoique dure & de substance comme de corne, veut être mise en terre aussi-tôt qu’elle est mûre, autrement elle a peine à germer, &c ne sauroit profiter. Cette observation, qui est très-certaine, disculpe les habitans du Royaume d’Iémen, où cet arbre se cultive, de la malice qu’on leur imputoit, de tremper dans l’eau bouillante, ou de passer au four tout le café qu’ils vendent aux étrangers, dans la crainte de perdre un revenu très-considérable que leur produit sa culture. On assure qu’ils en débitent pour plus de cinq millions d’argent chaque année, ce qu’on n’a pas peine à croire, lorsqu’on fait attention à la grande consommation qui s’en fait en Turquie & en Europe. Comme il n’y a point d’hiver dans le Royaume d’Iémen, on est obligé en Europe de conserver le Cafier dans des serres où l’on fait du feu pour y entretenir une chaleur douce. Cet arbre porte beaucoup de fruits, lorsqu’il est jeune. Les Hollandois ont à Batavia des Cafiers qui ont près de 40 pieds de haut, & à Amsterdam ils en ont qui ont déjà 13 à 14 pieds. M. Pancras, Bourguemestre, Régent de la ville d’Amsterdam, envoya au Roi en 1714. un Cafier haut de cinq pieds, qui donna dans la même année des fleurs & des fruits. Prosp. Alp. Commelin, Dufour, Gallant, & Transactions Philos. d’Angleterre. Bligni, Malp.

M. De Jussieu a fait le mot de Cafier pour signifier cet arbre ; mais communément on dit café. Arbre de café, ou à café. Les Malouins ont fait au commencement de ce siècle deux voyages à Moka, pour en apporter du café. Au second voyage, quelques-uns furent députés à la Cour du Roi d’Iémen, à Mouab. On a donné une Relation de ces deux voyages en 1616. à la fin de laquelle on a joint un mémoire concernant l’arbre & le fruit du Café, dressé sur les Observations de ceux qui ont fait le dernier voyage. Voici un précis de ce qu’ils en disent. L’arbre qui produit le café s’éleve depuis 6, jusqu’à 12 pieds de hauteur ; sa grosseur est de dix, douze, jusqu’à quinze pouces de circonférence. Quand il a atteint son état de perfection, il ressemble fort pour la figure à un de nos pommiers de 8 à 10 années. Les branches inférieures se courbent ordinairement, quand cet arbre est un peu âgé, & en même-temps s’étendent en rond, formant une manière de parasol. Le bois en est fort tendre, & si pliant, que le bout de sa plus longue branche peut être amené jusqu’à deux à trois pieds de terre. Son écorce est blanchâtre, & un peu raboteuse. Sa feuille approche fort de celle du Citronier, quoiqu’elle ne soit pas tout-à-fait si pointue, ni si épaisse ; la couleur en est aussi d’un vert un peu plus foncé. L’arbre du café est toujours vert, & ne se dépouille jamais de toutes ses feuilles à la fois : elles sont rangées des deux côtés des rameaux, à une médiocre distance, & presque à l’opposite l’une de l’autre.

Presque dans toutes les saisons de l’année, on voit un même arbre porter des fleurs & des fruits, dont les uns font encore verts, & les autres mûrs ou près de leur maturité. Ses fleurs sont blanches, &. ressemblent beaucoup à celles du jasmin, ayant de même cinq petites feuilles assez courtes ; l’odeur en est agréable, & a quelque chose de balsamique, quoique le goût en soit amer. Elles naissent dans la jonction des queues des feuilles avec les branches.

Quand la fleur est tombée, il reste en sa place, ou plutôt il naît de chaque fleur, un petit fruit fort vert d’abord, qui devient rouge en mûrissant, & est fait à peu près comme une grosse cerise. Il est fort bon à manger, nourrit & rafraîchit beaucoup. Sous la chair de cette cerise, on trouve au lieu de noyau, la fève ou la graine que nous appelons café, envelopée d’une pellicule très-fine. Cette fève est alors extrêmement tendre, & son goût est assez désagréable ; mais à mesure que cette cerise mûrit, la fève qui est dedans, acquiert peu à peu de la dureté, & enfin le soleil ayant tout-à-fait desséché ce fruit rouge, sa chair que l’on mangeoit auparavant, devient une baie, ou gousse de couleur fort brune, qui fait la première écorce, ou l’écorce extérieure du café, & la fève est alors solide, & d’un vert fort clair : elle nage dans une espèce de liqueur épaisse, de couleur brune, & extrêmement amère. La gousse qui est attachée à l’arbre par une petite queue fort courte, est un peu plus grosse qu’une graine de laurier, & chaque gousse ne contient qu’une seule fève, laquelle se divise ordinairement en deux moitiés.

Cette fève est entourée immédiatement, comme nous l’avons dit, d’une pellicule fort fine, qui en est comme la seconde écorce, ou l’écorce intérieure. Les Arabes font beaucoup de cas de l’une & de l’autre, pour composer ce qu’ils appellent leur café à la Sultane.

Les arbres de Café viennent de semaille & non pas de hergne, ou de bouture, comme quelques-uns l’ont dit, par les gousses, c’est-à-dire, le fruit entier, & dans sa parfaite maturité, mis en terre, dont on élève ensuite les plans en pepinière, pour les replanter où l’on veut.

Le pied des montagnes, & les petites collines, dans les cantons les plus ombragés, & les plus humides, sont les lieux destinés aux plantations des cafés. Leur plus grande culture consiste à détourner les eaux de sources, & les petits ruisseaux, qui sont dans les montagnes, & à conduire ces eaux par petites rigoles, jusqu’au tour du pied des arbres ; car il faut nécessairement qu’ils soient arrosés & bien humectés pour fructifier, & pour porter leur fruit à maturité. C’est pour cela qu’en replantant le café, les Arabes font une fosse de trois pieds de large & de cinq pieds de profondeur, qu’ils revêtissent de cailloux, afin que l’eau ait plus de facilité à entrer bien avant dans la terre, dont cette fosse est remplie, & y entretienne la fraîcheur convenable. Cependant quand ils voient sur l’arbre beaucoup de café mûr, ils détournent l’eau de son pied, afin que le fruit sèche un peu sur les branches, ce que la trop grande humidité pourroit empêcher. Dans les lieux exposés au midi, ou qui sont trop découverts, ces arbres se trouvent plantés sous d’autres grands arbres, qui sont une espèce de peupliers, qui leur fervent d’abri, & les mettent à couvert de l’ardeur excessive du soleil. Sans cet ombrage qui entretient la fraîcheur dessous, la fleur du café seroit bientôt brûlée, & ne produiroit jamais aucun fruit. Dans les lieux moins chauds, ils sont à découvert, viennent & rapportent à merveille sans le secours de ces grands arbres qu’on n’y voit point. En quelques endroits, comme sur la route de Moka à Mouab, & dans le canton de Redia, les cafés sont plantés par ordre & en alignement à une même distance l’un de l’autre.

A l’égard de la récolte du café, comme l’arbre qui le porte, est chargé tout à la fois de fleurs, de fruits imparfaits & de fruits mûrs, c’est une nécessité qu’elle soit faite en trois tems différens ; & à cet égard on peut dire qu’il y a trois saisons dans l’année propres à la cueillette du café ; mais ces temps ne sont pas bien fixes & réguliers, de sorte que les Arabes ne reconnoissent de récolte proprement dite, que celle du mois de Mai, parce que c’est la plus grande de toute l’année. Quand ils veulent cueillir le café, ils étendent des pièces de toiles sous les arbres, que l’on secoue ensuite ; tout le café qui se trouve mûr, tombe avec facilité : on le met dans des sacs pour le transporter ailleurs, & le mettre en monceau sur des nattes, afin qu’il sèche au soleil pendant quelque temps, & que les gousses qui contiennent la féve, puissent ensuite s’ouvrir par le moyen de gros rouleaux de pierre ou de bois fort pesans, que l’on passe par-dessus. Lorsque par ce travail le café est sorti de ses écorces, & séparé en deux petites féves, ou plutôt en deux moitiés, qui ne faisoient auparavant qu’une féve, on le met de nouveau sécher au soleil, parce qu’il est encore assez vert, & que le café trop frais & qui n’est pas bien sec, court risque de se gâter sur la mer. On le vanne ensuite dans de grands vans pour le nettoyer, afin que le débit en soit meilleur ; car ceux qui ne prennent pas le soin de rendre leur café bien net & séché à propos, le vendent beaucoup moins.

Le seul royaume d’Iémen, à l’exclusion de toutes les autres régions de l’Arabie, produit l’arbre du café. Encore cet arbre ne se trouve-t-il en grande abondance que dans trois cantons principaux, qui sont ceux de Detelfagui, Senan ou Saana, & Galbany, du nom de trois villes qui sont dans les montagnes. Voyages de l’Arabie heureuse, I, 124.

Les Arabes croient que le café ne croît nulle part ailleurs que dans l’Iémen. On a cru cependant qu’il venoit originairement d’Ethiopie, d’où il a été transporté dans l’Arabie Heureuse. Cette opinion est en quelque sorte confirmée par la Relation d’un voyage qu’a fait Charles-Jacques Poncet en Ethiopie, dans les années 1698, 1699 & 1700 ; & insérée dans le IVe Recueil des Lettres écrites par les Missionnaires Jésuites, imprimé en 1704 à Paris. Ce Voyageur dit qu’on voit des Cafés en ce pays-là, mais qu’on ne les cultive que par curiosité. S’il est vrai que les Abissins soient venus d’Arabie en Ethiopie dès les premiers temps, comme l’écrit Ludolfe, ils auront pû y porter d’Arabie l’arbre du café, qui apparemment n’aura pas beaucoup réussi ; puisqu’il est même fort incertain qu’on en trouve aujourd’hui en Ethiopie. Du Poncet ne paroît pas en avoir vu, tant la description qu’il en fait, est peu ressemblante. D’ailleurs, ni le P. Tellez, Jésuite, dans sa Relation d’Ethiopie, la plus estimée que nous ayons, ni Ludolfe, dans son histoire d’Ethiopie si curieuse & si exacte, ne parlent en aucune manière du café. Voyage de l’Arabie Heureuse, p. 289, 290.

Outre l’Ethiopie, le café croît aussi dans l’Île Bourbon. La féve est un peu plus longue & plus pointue par les deux bouts que celle du café de l’Arabie. Un Jésuite qui partit le 7 Mars 1721, sur la Danaé pour la Chine, & qui passa par l’Île Bourbon, y remarqua cet arbre : & voici ce qu’il en a mandé de l’Île même le 7 Juillet 1721. J’ai remarqué avec soin le café venu de Moka, qu’on y cultive (à l’Île Bourbon), & le sauvage, qui y a été de tout temps, & qui y est très-bon. Ce café sauvage est de vrai café, d’une espèce, à la vérité, un peu différente du café d’Arabie, mais qui n’est ni moins bon, ni moins salutaire, & qui même a des qualités que l’autre n’a pas, ainsi que l’a éprouvé M. de Jussieu, à qui la Compagnie des Indes en envoya pour l’examiner. Voici à peu près le compte que cet habile Botaniste en rendit. Le café de l’Île de Bourbon est un arbre aussi-bien que celui de l’Arabie. Les branches de l’un & l’autre croissent le long de la partie supérieure du tronc, opposées l’une à l’autre, & rangées de manière qu’elles se croisent entre elles. Leurs feuilles suivent la même disposition, & approchent de la figure de celles du Laurier, ou du Citronier, avec cette différence, que celles du Cafier de l’Île Bourbon sont plus courtes & plus ventreuses que celles du café de Moka. La fleur qui dans tous les deux est de même structure, c’est-à-dire, semblable à celle du Jasmin, sort également dans l’un & dans l’autre de ces cafiers, de l’aisselle des feuilles, & ne diffère que très-peu en grandeur. Le fruit de l’un & de l’autre est une baie charnue de la grosseur d’une cerise, qui renferme deux semences enveloppées chacune dans une coque très-mince : & ces semences ont en tout la même figure, excepté que celle du cafier de l’Île Bourbon est beaucoup plus longue, d’une consistance plus compacte que celui d’Arabie, & que sa couleur tire plus sur le vert-brun ou sur le jaune, au lieu que celle de l’autre tire sur le gris.

Toutes ces différences n’établissent pas un nouveau genre d’arbre, mais seulement une espèce différence : ce qui fait voir qu’il pourroit encore se trouver d’autres espèces en différens pays, comme depuis peu nous en avons vu apporter de Bengale, dont l’espèce est plus petite que ces deux-ci : ce qui ne les rend les unes & les autres pas moins d’usage, que le sont chez nous les amandes, les cerises & les pêches, quoique les différences entre leurs espèces soient encore plus considérables.

Mais comme l’expérience & l’usage en doivent décider plus que les yeux, M. de Jussieu fit rotir en même temps parties égales de café de Moka & de celui de l’Île Bourbon, & il observa que l’odeur de celui-ci étoit pour le moins aussi agréable, & aussi pénétrante que celle du premier. Il vit sortir de l’un & de l’autre de ces cafés cette huile dont l’exhalaison produit cette odeur, avec cette différence à l’avantage du café de l’Île Bourbon, qu’il fournit une quantité plus abondante de cette huile, & qu’il conserve plus long-temps ses esprits, parce qu’il est d’une tissure plus ferme. Aussi M. Jussieu remarqua-t-il par la comparaison qu’il fit de quelques-unes de ces semences qu’il avoit fait rotir plus de cinq ans auparavant avec celles que les Directeurs de la Compagnie des Indes lui avoient envoyées tout récemment, que ces premières avoient peu perdu de leur goût dans cet espace de temps, au lieu que celui de Moka ne put soutenir cette épreuve, & qu’après une année de garde, depuis la torréfaction, il se trouve ou éventé ou rance. C’est encore à cette même cause qu’il faut attribuer la vertu qu’a le café de Bourbon par-dessus celui de Moka, de conserver plus long-temps ses esprits, même étant moulu, & d’être moins sujet à se réduire en charbon, quand on le laisse un peu de temps sur le feu.

Le goût de l’infusion de ces semences roties & grossièrement moulues, qui est la dernière marque qui peut mieux faire juger de leur bonté, n’a pas été moins favorable à celui de l’Ile Bourbon, que les autres épreuves que l’on en fit ; car ayant pris un poids égal de la poudre des semences de l’une & de l’autre, roties & pulvérisées en même temps, on le fit cuire dans deux cafetières différentes contenant égale quantité d’eau proportionnée à celle du café ; l’un & l’autre parurent avoir un goût à peu près semblable ; & si l’on y remarqua quelque différence, elle ne fut que de quelques degrés de vivacité que la boisson du café de l’Ile Bourbon parut avoir plus que l’autre. Ce que M. De Jussieu n’a pourtant pas voulu absolument assurer, parce que cela pourroit dépendre de la manière différente dont on pourroit le rotir ou le cuire.

Une dernière épreuve, fut de mêler une partie du café de l’Ile Bourbon avec deux parties de celui de Moka en poudre ; & la boisson que donna ce mêlange ne fut point différente de celle qui se fait ordinairement avec le café d’Arabie tout seul. Quand on mêla deux parties égales de l’une & de l’autre, la différence se fit un peu sentir à ceux qui savoient le mêlange, mais ceux qui ne furent point prévenus, ne s’en apperçurent point. Quelques personnes même ayant pris du café de l’Ile Bourbon, tout seul, sans le savoir, & sans être averties, ne s’apperçurent d’aucune différence.

Il est néanmoins certain que le café de l’Ile Bourbon a une légére amertume. & une petite pointe un peu plus vive que celui d’Arabie. Ce qui ne peut être qu’une bonne qualité plutôt qu’un défaut : puisqu’avec une moindre quantité de ce café long, on fait une infusion aussi colorée & aussi forte qu’avec une plus grande quantité de café ordinaire ; & si l’on veut en mettre infuser une pareille quantité, on la rend avec une dose de sucre proportionnée, tout-à-fait semblable à l’autre. M. De Jussieu a même observé que par le mêlange du lait, l’infusion de cette nouvelle espèce de café est aussi agréable que celle du café de Moka. Toutes ces observations montrent que cette nouvelle espèce peut être aussi agréable & aussi utile à la santé que l’ancienne.

Il croît aussi du café à l’Île de Java. Gaz. 1725, p. 47. On en a aussi porté à la Martinique, & en d’autre Îles de l’Amérique méridionale, où il vient fort bien.