Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CÉRINTHIENS

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 378).
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CÉRINTHIENS. Anciens Hérétiques qui ont pris leur nom de Cérinthe, contemporain de S. Jean. Cérinthe fut un zélé défenseur de la Circoncision, aussi-bien que les Nazaréens & les Ebionites. Saint Epiphane rapporte de lui qu’il fut le chef d’une faction qui s’éleva à Jérusalem contre Saint Pierre, à l’occasion de quelques Incirconcis avec lesquels cet Apôtre avoit mangé. Il est marqué dans l’Histoire des Actes, que les fidèles circoncis disputoient sur ce sujet contre lui ; à quoi Saint Epiphane a ajoûté que Cérinthe fut l’Auteur de cette dispute, lorsqu’il étoit encore du nombre des fidèles. Il croyoit que Jésus étoit un pur homme, fils de Joseph & de Marie ; mais que dans son Baptême une vertu céleste descendit sur lui sous la forme d’une colombe, ensorte qu’il fut alors comme sacré par le Saint Esprit & fait Christ. Ce fut par le moyen de cette vertu céleste qu’il fit tant de miracles ; & comme elle étoit venue du Ciel, elle le quitta après sa passion & s’en retourna au lieu d’où elle étoit venue. Il croyoit donc que Jésus, qui étoit un pur homme, étoit véritablement mort, & qu’il étoit aussi ressuscité ; mais que Christ, qui étoit distingué de Jésus, n’avoit point souffert.

Quelques anciens Auteurs ont attribue à Cérinthe le livre de l’Apocalypse, croyant que, pour autoriser les rêveries touchant le regne charnel de Jésus-Christ sur la terre, il avoit publié des ouvrages sous le titre d’Apocalypses, où il débitoit ses visions touchant ce regne charnel, & il prétendoit être un grand Apôtre, qui avoit reçu de Dieu ces révélations. Voyez Eusebe, Liv. III de son Hist. Ecclesiast, c. 28. S. Epiphane traite Cérinthe d’homme sans entendement, & qui se contredit ; parce qu’il dit que Jésus-Christ a véritablement souffert, & qu’il a été crucifié, mais qu’il ne ressuscitera qu’au temps de la résurrection générale, lorsque tous les hommes ressusciteront. Le même S. Epiphane observe que quand un Cérinthien mouroit sans avoir été baptisé, on baptisoit quelqu’un en son nom ; ils croyoient satistaire par-là au précepte du baptême. C’est le sens qu’ils donnoient à ces paroles de Saint Paul dans sa première Epitre aux Corinthiens, c. 15, v. 29. Si les morts ne ressuscitent point, pourquoi donne-t-on le baptême pour eux.

Les Cérinthiens recevoient l’Evangile de Saint Matthieu, mais ils en avoient ôté la généalogie de Jésus-Christ : ils s’appuyoient sur cet Evangile pour prouver que les Chrétiens devoient être circoncis, puisque Jésus-Christ, qui étoit leur maître, avoit été circoncis ; ils ne recevoient point les Epitres de Saint Paul, parce que cet Apôtre avoit aboli la circoncision. Consultez Saint Epiphane, hær. 18.