Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/CÉLESTE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 347-348).
CÉLESTIEL  ►

CÉLESTE. adj. m. & f. Qui a rapport au ciel, qui appartient au ciel, qui vient du ciel. Cælestis. Les corps célestes sont incorruptibles. Les influences célestes agissent sur les corps sublunaires. Aristote a admis des intelligences célestes qui faisoient mouvoir les astres. Les Poëtes appellent les astres, les célestes flambeaux. Notre ame a une origine céleste.

Que le plus coupable de nous
Se sacrifie aux traits du céleste courroux. La Fon.

Céleste, (Harmonie) est une harmonie que quelques Philosophes se sont imaginés être produite par les astres, & par leurs mouvemens, & que notre éloignement nous empêchoit d’entendre, comme Platon, Philon Juif, S. Augustin, S. Ambroise, S. Isidore, Boëce & plusieurs autres. Ils disent que le mouvement & l’impulsion des globes célestes, qui se poussent par des intervalles dissemblables, forment des tons dont la variété est tout-à-fait musicale. Il est impossible, selon eux, que des corps si vastes ne forment pas une espèce d’harmonie, en fournissant leur carrière avec tant de rapidité. L’air frapé par la force de leur impulsion, rend nécessairement un bruit proportioné à la violence qu’il a soufferte. Ainsi comme la sphère céleste est müe avec une grande justesse par la main toute-puissante qui y préside, & que tous les globes ne font pas tous le même circuit, & ne roulent pas avec la même vitesse, les tons différens que produit la différence de leurs mouvemens, forment un concert admirable. Mais cette opinion a été résutée d’avance par S. Irenée, & ensuite par S. Basile & S. Epiphane.

En Astrologie on appelle thême ou figure céleste la disposition du ciel à certain moment désigné, comme la naissance d’un enfant, quelque accident signalé de sa vie, de ses actions : & c’est et qu’on appelle autrement horoscope.

On appelle gloire céleste, la béatitude éternelle : les Esprits célestes, les Anges & les Saints qui en jouissent : les inspirations célestes, les graces qui nous viennent du ciel. ☞ Corneille a employé ce mot dans les Horaces,

J’atteste
Le souverain pouvoir de la troupe céleste.

Sur quoi Voltaire remarque que cette expression est hors d’usage, & bannie du style noble, sur-tout depuis que Scarron l’a employée dans le style burlesque.

Céleste se dit aussi par extension pour extraordinaire. C’est une beauté céleste, un esprit céleste.

Et dès qu’on vient à voir vos célestes appas,
Un cœur se laisse prendre & ne raisonne pas. Mol.

Céleste, (Bleu) est un bleu qui est de la couleur du ciel serein. Or ce bleu du ciel vient du grand éloignement où il est de nos yeux, à cause que la lumière se perd dans cette vaste étendue.

On appelle à Paris les Sœurs Célestes, les Religieuses de l’Annonciade, à cause qu’elles sont en partie habillées de bleu. Moniales annunciatæ Virginis ab habitu cælestis coloris, Cælestes appellattæ ; Cælestes sorores, Virgines.

Il y a en Italie des Annonciades que l’on nomme Annonciades célestes, parce que sur une robe blanche & un scapulaire elles portent un manteau bleu. Elles furent fondées en 1604 & 1605 sous Clément VIII & Paul V, qui approuvèrent leurs constitutions. Leur Fondatrice fut la Mère Victoire Fornari. Voyez Annonciade.

CÉLESTE. s. f. Cælestis. Terme de Mythologie. C’étoit une Déesse honorée à Carthage. Tertullien dans son Apologétique, & Philastrius, disent que c’étoit une Déesse d’Afrique ; Philastrius, que c’est celle qu’on appeloit ailleurs Reine & Fortune du ciel. Baronius, qui parle fort au long de cette Déesse sur l’an 399 de J. C., croit que c’étoit l’Astarte des Sidoniens, qu’on appeloit la Reine du ciel. En 399 les Chrétiens de Carthage changèrent le Temple de Céleste en Eglise. On la réprésentoit portée sur un lion ; & si l’on en croit Capitolin, dans la vie de Pertinax, elle rendoit des Oracles dans ce Temple. Lucien, Apulée, Hérodien & plusieurs autres témoignent que l’idole de Céleste portoit le nom de toutes les principales Divinités du monde, c’est-à-dire, comme parle S. Ambroise adv. Symmach. que cette Déesse étoit honorée par différens peuples, & en différens endroits, sous différens noms. Vers l’an 341, l’Empereur Constantius fit ruiner à Carthage le temple de Celeste. Héliogabale fit apporter de Carthage l’idole de Celeste, que toute l’Afrique révéroit extrêmement. On prétendoit que c’étoit la Lune : c’est pourquoi Héliogabale disoit qu’il la vouloit marier avec son Dieu, qu’on prétendoit être le Soleil. Il en fit célébrer les noces à Rome, & dans toute l’Italie, & obligea tous les sujets de l’Empire à lui faire des présens de noces : il avoit fait apporter de Carthage toutes les richesses du temple de Celeste pour avoir de quoi la parer. De Tillem.

CELESTE, s. f Terme de Fleuriste. C’est une tulipe gris lavande avec un peu de rouge & de blanc de lait. Morin.