Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BOURG

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(2p. 9-10).
◄  BOUREAU

BOURG. s. m. Gros Village qui a une Paroisse, une Foire & un Marché. Vicus, Pagus. Quelques-uns le restreignent aux lieux qui ne sont fermés ni de murs, ni de fosses. D’autres au contraire, comme Messieurs de l’Académie veulent que ce soit un gros villager fermé de petites murailles ; ☞ Mais ce ne sont point les murs qui distinguent le bourg d’avec la ville ; puisqu’ils y a des bourgs murés & des villes sans murailles. Ce n’est point non plus la quantité plus ou moins grande de maisons ; car il y a de très-grands bourgs & de très-petites villes. La distinction de la ville & du bourg est fondée sur les droits de bourgeoisie & sur les priviléges dont jouissent les habitans d’une ville, & dont ne jouissent pas ceux du bourg. Le bourg releve presque toujours d’une ville, & jamais la ville d’un bourg. Ces observations peuvent servir à rendre plus claires, ou à rectifier les idées que nous attachons aux mots de bourg, village, hameau.

Le hameau est un assemblage de quelques maisons seulement, sans église paroissiale, ni juridiction locale.

Le village, plus grand que le hameau, a une église desservie par un Curé, souvent une espèce de juridiction subalterne, comme d’un Bailli, souvent une foire tous les ans, le jour de la dédicace de l’église ou de la fête du patron. Les habitans du village sont paysans, laboureurs.

Le bourg, plus grand que le village, a une paroisse & quelquefois une espèce de magistrature, &, outre la foire annuelle, un marché à certains jours de la semaine. Les habitans du bourg sont en partie laboureurs, artisans ou marchands en détail. Quelques bourgs sont accompagnés d’un château où demeure le Seigneur. Quelques bourgs ont été fortifiés, soit durant les guerres civiles, soit à cause du voisinage de la frontière ; mais conne en les fortifiant, on n’a rien changé à l’état des habitans, ils ont conservé le nom de bourg, au lieu que les villes dementelées sont demeurées villes, parce que les habitans ont été maintenus dans leurs droits.

La ville est un gros bourg, qui, outre la paroisse, une ou plusieurs foires annuelles, un marché toutes les semaines, a un Magistrat nommé le corps de ville, qui administre la justice de la ville, & a son ressort. Les habitans de la ville sont bourgeois, & jouissent, en vertu de leur naissance, des franchises & priviléges accordés par l’usage ou par la concession du Souverain à la ville dont ils sont bourgeois.

Le mot de Bourgade est moins distinct dans la signification, & on donne ce nom aux lieux dont on ne sçauroit dire s’ils sont villages ou bourgs, & qui sont dans un état douteux entre ces deux qualifications. Il y a peu de fiefs considérables où les Moines n’aient bâti de nouveaux bourgs, du consentement des Seigneurs ; & la fondation des Prieurés a produit cet avantage d’augmenter le nombre des habitans, & de mettre à profit beaucoup de terres incultes ; parce que ces nouveaux bourgs étoient peuplés de nouveaux habitans, & c’étoit une des premières conditions du traité que les Moines faisoient avec les Seigneur. Du reste, les Seigneurs leurs laissoient tout l’exercice de la Justice sur ces étrangers, & n’en exigeoient aucun service, ni aucune corvée, si ce n’étoit celle de travailler à la réparation des ouvrages publics, dont ils avoient l’usage, aussi-bien que les anciens habitans, comme les ponts & les chaussées. Lobineau.

Nicot & Cujas dérivent ce mot du latin pyrgus, venu du grec πύργος, ou du latin burgus. Cambden est à-peu-près de même opinion, Britan. p. 625 & 852. car il prétend que ce nom ne s’est formé que sous les derniers Empereurs, après la translation de l’Empire à Constantinople, du nom πύργος, qui signifie un petit château, un fort ; & que c’est de-là que vient le nom des Bourguignons, parce qu’ils habitoient dans ces sortes de châteaux. Mais ce mot vient de l’Allemand burg, qui est très-ancien dans cette langue, comme on voit par la terminaison de la plûpart de leurs villes. Luitprand, Liv. III. chap. 12. en parlant des Bourguignons, dit, que dans leur langue burgum signifie un amas, ou assemblage de maisons, qui n’est point renfermé de murailles. Les Allemans appeloient burger, ou Burgar, les habitans de ces sortes de lieux. Isidore, Liv. IX. ch. 4. dit Burgarii à burgis dicti. Dans Végéce le mot de burgus signifie seulement tour, ou petit château. Le sentiment le plus vraisemblable, c’est que burgus vient du mot pyrgus, πύργος ; le π se change aisément en b, & l’υ grec se change en u dans plusieurs morts qui ont passé de la langue grecque dans la latine, &c. Ou plutôt πύργος, & burg, sont le même nom. Voyez Cluvier, Germ. Ant. Liv. I. p. 110.

BOURG. Ville de France, capitale de la Bresse. On dit souvent Bourg-en-Bresse. Forum Segusianum. Tanum, Burgus. Messieurs de Mèzirias & Vaugelas, souvent cités dans ce Dictionnaire, étoient de Bourg-en-Bresse.

Bourg-sur-mer, est une autre ville de France en Guyenne, à l’embouchure de la Dordogne dans la Garonne.

Faux-bourg. Assemblage considérable de maisons attenant les portes d’une ville. Suburbium. Les villes de guerre ne doivent point avoir de faux-bourgs ; car ils favorisent les approches des ennemis.

Ce mot vient de fors & bourg, comme qui diroit hors le bourg.

On dit figurément de ceux qui approchent de quelque chose, mais qui ne sont pas dedans, qu’ils sont dans les faux-bourgs.