Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BOL ou BOLUS

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 952).
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BOL, ou BOLUS. s. m. Terme de Médecine. Petite boule de drogues médicinales qu’on prend seule ou sous quelque enveloppe. Bolus. Il a été inventé principalement pour les malades qui ont de la répugnance à boire les remèdes, ou qui n’en peuvent supporter le goût ni l’odeur : on y a recours aussi pour faire mieux avaler certains remèdes, qui par leur pesanteur resteroient au fond du verre, s’ils étoient mêlés dans des liqueurs, comme feroient diverses préparations de mercure, d’antimoine, &c. Il y en a de plusieurs sortes. On les fait avec des électuaires, des confections, des conserves, des pulpes, des poudres, des sels, des huiles, des essences, des extraits, des sirops, & avec une infinité de remèdes, dont il faut qu’il y en ait qui aient assez de solidité, ou assez de sécheresses pour donner de la consistance à ceux qui sont trop liquides, ou trop mous. On les prend à la pointe d’un couteau ; mais le plus souvent on les enveloppe de pain à chanter, de sucre, de poudre de réglisse, de fruits cuits ou crus, ou de quelque confiture ou autre matière, qui puisse empêcher en quelque façon qu’on ne sente l’odeur & le goût des médicamens, dont les bols sont composés.

Plus ne m’enquiers de quelle drogue avez
Formé ce bol par qui seroient bravés
Bien plus de maux, plus de pestes encore
Que parmi nous n’en apporta Pandore ;
Nul mal ne tient contre ce bol divin.

Bol Bolus. s. m. Sorte de terre qui est ordinairement en morceaux rougeâtres, quelquefois jaunâtres, ou blanchâtres. Elle est grase au toucher, onctueuse, stipique au goût, & astringente. Elle s’attache facilement àa la langue, & se fond dans l’eau. Il y a plusieurs espèces de bols. Il s’en trouve du rouge & du jaune aux environs de Lyon : auprès de Montpellier il y en a de fort rouge ; près de Paris on en trouve d’incarnat, mais moins pur que les précédens. Le bol qui nous est apporté d’Arménie est le plus estimé. Il se font aisément dans la bouche, il est plus fin & plus pur, sur-tout lorsqu’il est bien choisi. Les Alchimistes font grand cas des deux autres espèces de bols, qu’ils nomment Axungia solis, & axungia lunæ. Le premier vient des mines d’or de Silésie ; le second vient apparemment de quelques mines d’argent, ou bien son nom se prend peut-être de sa blancheur. Le bol rouge est astringent, stipique. On l’applique extérieurement pour arrêter les hémorragies des plaies, intérieurement pour les dyssenteries, les aigreurs, les cours de ventre & les pertes. Il entre dans la composition de quelques emplâtres stipiques & astringens. Agricola, Vormios, Charleton, ont parlé de ses différences.

☞ On doit regarder le bol comme un composé ou mixte, que l’on trouve en plusieurs endroits, surtout dans les mines de fer. Quand on le décompose par le moyen d’un acide, on y trouve des parcelles de ce métal, & souvent de l’or, comme dans le bol de Tokay. On lave le bol en sortant de la carrière, & l’on en fait des pâtes rondes ou plates comme des tronçons, appelées bol en bille, qui doit être doux, friable, & sans aucun sable.

Beaucoup de gens confondent le bol d’Arménie avec la terre Lemnienne. Les Marchands les falsifient, & les vendent l’un pour l’autre. On le tire en certaines baumes ou cavernes de Cappadoce, & on l’apporte en la ville de Sinope, d’où il a pris son nom. Mathiole dit qu’on le trouve dans les mines d’or, d’argent, de cuivre & de fer. Voyez Faloope, Agricola, Cardan, Scaliger, qui en ont traité amplement. On l’appelle aussi terra Lemnia, parce que ce sont les habitans de l’île de Lemnos qui en font le trafic.

On trouve dans la Province de Machicore, en Afrique, une terre rouge, qui est aussi bonne, ou qui est la même que celles que les Apothicaires appellent Bol d’Arménie ; on l’appelle dans la langue du pays Tamene. Dapper.