Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BLASONNER

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 925).

BLASONNER. v. a. Peindre des armoiries avec les métaux & les couleurs qui leur appartiennent. Figuras in scuto gentilitio pingere, adumbare. Le Peintre n’a pas bien blasonné ces armoiries.

Blasonner, se dit aussi pour expliquer le Blason, ou les parties des armes d’une Maison ou Province, en termes propres & convenables à l’art. Figuras scuti gentilitii conceptis verbis & ordine recensere, edisserere. Les Armes de France se blasonnent ainsi, trois fleurs de lis d’or en champ d’azur, deux en chef, & une en pointe. Pour bien blasonner un écu, on commence toujours par le champ, & puis on spécifie les figures ou pièces honorables, s’il y en a, & l’on descend ensuite aux autres figures ; & quand il y en a plusieurs, le chef & la bordure sont nommés les derniers.

Toutes les fois que l’on commence à blasonner par d’autres figures que par celle du milieu, on dit qu’elle est en abîme, ou en cœur. Ce qu’il faut observer lorsque dans le milieu de l’écu il se rencontre une pièce plus petite que celle dont elle est accompagnée ; ainsi l’on dit, Condé porte de France le bâton raccourci de gueule péri en cœur ou en abîme. La plus grande difficulté est de blasonner un écu à plusieurs quartiers : voici l’ordre qu’il y faut garder. Il faut compter les quartiers des écartelures, afin de les blasonner par ordre. Le quartier qui est au côté droit de l’écu, s’appelle le premier. Celui qui lui est accolé, ou qui est à son côté de niveau, se nomme le second, & ainsi des autres. Quand il y a quelques quartiers semblables, on les joint ensemble de cette façon : Le Dauphin de France porte écartelé de France & de Dauphiné, au premier & au quatrième, d’azur à trois fleurs de lis d’or, qui est de France, au 2e & au 3e d’or au Dauphin d’azur, 4 oreillé, barbé & loré de gueules, qui est Dauphiné. Quand les quartiers sont différens, on commence par le premier : du premier on va au second & ainsi du reste, toujours en ligne horizontale. S’il se trouve un écusson au milieu de la croisure des quartiers, on le nomme sur le tout.

Blasonner, signifioit aussi, expliquer les symboles, les mystères de l’émail, & des figures du blason. Scuti aream, typos & iis subjectum vim interpretari.

Blasonner, se dit aussi par les Graveurs, quand il s’agit de faire certaines marques ; pour représenter les métaux & les couleurs dont les Peintres blasonnent les armoiries. Incidere in æs aurum, argentum. Le Graveur a fort bien réussi en blasonnant ma vaisselle.

Blasonner, se disoit autrefois figurément, pour signifier parler de quelqu’un, le décrire avec ses bonnes ou mauvaises qualités, & particulièrement avec les mauvaises. Maledicere.

De moy mesdit par tout injustement,
Et me blasonne. Marot

En donnant l’ordre de l’écu aux Chevaliers, on leur commandoit de ne pas ouir blasonner ni médire des Dames, & de ne le pas souffrir. On s’en sert encore dans le style familier. C’est un homme qui blasonne tout le monde, c’est-à-dire, qui blâme, qui critique.

BLASONNÉ, ÉE. Part. Il a les significations de son verbe.