Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BILE

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 902-903).

BILE. s. f. Humeur jaune & amère au goût, qui est dans le corps des animaux, dont la secrétion se fait dans le foie. Bilis. Le réceptacle de la bile est une petite vessie située au dessous du foie. Il y a deux sortes de bile, la bile jaune, Bilis lurida, flava ; & la bile noire, qu’on nomme autrement mélancolie. Atra bilis. On appelle bile porracée, celle qui est verdâtre & de couleur de porreau, porracea bilis.

On distingue encore deux sortes de bile ; l’une subtile, qui est portée par les conduits biliaires dans la vésicule, qui la dégorge ensuite dans les intestins ; & l’autre qui est grossière, laquelle ayant été séparée par les glandes du foie qui sont aux extrémités des rameaux de la veine porte, est portée par de petits canaux dans le cholidoque, & de-là dans le canal commun, où l’une & l’autre se rencontrent, & vont de compagnie se rendre dans les boyaux. Il y a des Modernes qui prétendent que la bile subtile est apportée dans le fond de la vésicule par trois endroits différens, & que même elle est composée du mélange de trois biles différentes. La première est celle qui y est apportée par les conduits biliaires, c’est celle dont nous venons de parler. La seconde est celle qui y est portée par un conduit que Blasius appelle singulier, & qu’il dit se glisser entre deux tuniques pour s’insérer dans le fond de la vésicule. Il assure qu’il a une valvule qui permet à la bile d’en sortir, & qui empêche qu’elle ne régorge dans le même conduit. Et la troisième, suivant Malpighi, est celle qui est filtrée & séparée par les glandules qui sont entre les deux tuniques de la vésicule. Dionis. La bile étant un dissolvant très-puissant, elle achève de briser dans les premiers intestins les parties de l’aliment qui ne l’avoient pas été suffisamment dans l’estomac. Id. Quand la veine-porte a reçu le sang qui a été poussé par les artères dans la rate, l’épiploon, le mésantère & les intestins, elle se divise en plusieurs rameaux dans le foie, où le sang laisse un suc âcre qu’on nomme bile. Tauvry. P. I, c. 9, où il décrit la situation de la bile dans le foie. Voyez Foie.

Borelli, Médecin Napolitain, dans un ouvrage intitulé de motu animalium, prétend qu’une partie de la bile qui est épanchée dans les intestins, rentre dans les veines mésaraïques, & se mêle avec le sang de la veine porte, pour se cribler de nouveau dans le foie. Voila une circulation particulière qu’il donne à la bile dans le bas ventre. Si la bile n’étoit qu’un excrément, & qu’elle n’eût son conduit dans les intestins, que pour être évacuée avec les impuretés du bas ventre, la nature auroit dû mettre ce conduit dans les gros boyaux, & non pas au commencement des grêles, où la plus grande partie se mêlant avec le chyle, est portée dans le sang. Dionis. Le canal commun de la bile est formé par la jonction du cholidoque & du pore biliaire. Tous les animaux qui n’ont point de vésicule du fiel, ne laissent pas d’avoir de la bile, leur foie se trouvant amer. Id. La bile, qui est peut-être une des principales causes de la soif, quand elle se mêle au suc salivaire, est extrêmement amortie par tous les aigres. Tauvry.

Ce mot vient du latin bilis, que quelques-uns font venir du grec βία, violence ; parce que les bilieux sont sujets à la colère. Les autres font venir ce mot de bullire, bouillir.

Bile, signifie figurément, la colère. S’émouvoir, échauffer la bile de quelqu’un. Un satyrique décharge sa bile sur le papier. Il est aisé d’émouvoir la bile des Poëtes & des Auteurs.

Notre Muse souvent paresseuse & stérile,
A besoin pour marcher, de colère & de bile. Boil.