Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BERCEAU

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 860-861).
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BERCEAU. s. m. Sorte de petit lit où l’on couche les enfans à la mamelle, & qui est porté sur deux pieds arrondis en forme de croissant, afin qu’on puisse le balancer aisément. Cuna, incunabula.

Ce mot vient de versus & versullus, à vertendo, selon Ménage. C’est pourquoi il soutient qu’on doit écrire berseau avec un s. On disoit autrefois bers au lieu de berceau ; &c on dit encore le bers d’une charrette, pour signifier les ridelles.

Si l’on a dit bers pour berceau, il y a long-temps : dès le VIIIe siècle on disoit berceau, berciolus, ou barciolus, comme il paraît par la vie de S. Pardulphe, Ch. 18. Acta SS. Bened. Sæc. III, P. I, p. 379, 380. Et in agitario quod vulgo berciolum vacant, pannis constrictum imposuit… per se agitari cæpit berciolus. Dans un autre manuscrit barciolus. Ainsi de versus s’est fait versiolus, ou bersiolus, & non pas versellus, & de là berceau. D’autres le dérivent de son primitif bers, qui est un diminutif de l’hébreu rebez, qui signifie cubile.

On dit figurément qu’on a pris quelqu’un au berceau, ou dès le berceau ; pour dire, dès l’enfance, à cunabulis.

Les puissantes faveurs dont Parnasse m’honore,
Non loin de mon berceau commencèrent leur cours,
Je les possedai jeune, & les possede encore
A la fin de mes jours. Malherbe.

Un Poëte a dit, le berceau d’un fleuve, pour sa source. Fons, cunabula. C’est une expression bien placée dans un pur galimatias.

Et bien loin du pays où l’on voit leurs berceaux,
Ils étendent le règne & le bruit de leurs eaux. P. Le M.

On emploie aussi ce mot pour signifier le moment auquel une chose naît, ou paroît. Etouffer l’hérésie dans son berceau. Patr. On le dit des foibles commencemens d’un art, ou d’une science. Il eût fallu marquer le temps où notre langue a commencé à sortir comme d’un cahos, & la représenter comme en son berceau, ne faisant encore que bégayer. Ablanc. On eût dit que cette Province, qui avoit été comme le berceau du Calvinisme, en devoit être le dernier refuge. Flech.

Berceau en termes d’Imprimerie, se dit de la partie de la presse qui roule sur les bras, où est enclavé le marbre.

Berceau, en termes de jardinage, est une espèce de galerie couverte, formée de treillage, & assez souvent garnie de vigne, ou autres plantes sarmenteuses. Vinea arcuata, camerata. Voilà un berceau de vigne. Cette espèce de treillage est ainsi nommé à cause de sa figure, qui représente un berceau renversé. Liger. On dit aussi qu’une allée couverte forme un berceau.

Berceau, en termes d’Architecture, se dit d’une voûte ronde, & en plein cintre. Arcus, apsis. On appelle berceau surbaissé, une voûte plus basse qu’un demi cercle ; & berceau surhaussé, une voûte qui excède en hauteur un demi-cercle. La grande Salle du Palais a deux beaux berceaux. On dit aussi un berceau d’eau, quand il y a sur deux lignes plusieurs rangs de jets d’eau qui s’inclinent les uns vers les autres, & qui par leurs courbures forment des arcades, & représentent un berceau. Arcus aqueus.

Berceau, se dit aussi d’un instrument dont les Graveurs se servent pour faire ce qu’ils appellent le grainage. Voyez ce mot.