Dictionnaire de Trévoux/6e édition, 1771/BANIANES ou BANIANS

Jésuites et imprimeurs de Trévoux
(1p. 737).
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BANIANES, ou BANIANS. s. m. pl. Banianes. Osorius les appelle Baneanes en latin, & son Traducteur Baneanes en françois ; & Ludolph, Baneani en latin. Ce sont des Idolatres des Indes qui croient à la Métempsychose, & qui sont si supersticieux, qu’ils ne mangent d’aucun animal qui ait vie. Ils ne veulent pas même tuer des pous ; au contraire, ils les rachetent, quand ils les voient entre les mains des étrangers. Ils ont tant de peur d’avoir quelque communication avec d’autres nations, qu’ils cassent leurs pots, si quelqu’un d’une autre religion y a bu, ou y a seulement touché. Ils font écouler toute l’eau d’un étang, s’il s’y est lavé. S’ils se touchent même entr’eux, il faut qu’ils se lavent, & se purifient avant que de boire ou manger, ou rentrer seulement dans leur maison. Osorius dit, L. IV, de Reb. gest. Emman. qu’il portent pendue au cou une pierre de la grosseur d’un œuf, percée par le milieu, d’où sortent trois filets ; qu’ils disent que cette pierre représente leur grand Dieu ; que pour cela ils sont fort respectés de tous les Indiens, & que cette pierre si révérée se nomme Tambarane. On a imprimé un livre de la Religion des Banianes, traduit de l’anglois de Henri Loyd.

☞ Les Banianes Baneasnes, Banians, ou Banjans ont beaucoup d’adresse. Ils se mêlent ordinairement de trafic. Les Hollandois & les Anglois s’en servent pour courtiers & pour truchemens dans le commerce qu’ils font aux Indes. On leur donne souvent le nom de Cherafs, c’est-à-dire Banquiers ; parce qu’ils facilitent le négoce, en faisant la fonction d’Agens de change. Il n’y a point de métier qu’ils n’exercent, ni de marchandises qu’ils ne vendent, excepté la chair des animaux & le poisson, & en général tout ce qui a eu vie ; parce que, croyant à la métempsychose, ils craignent de vendre un corps dans lequel pouroit avoir passé l’ame de leur pere. Ils portent le scrupule jusqu’à avoir des valets qui agitent l’air avec un éventail, pendant qu’ils mangent, afin d’éloigner les moucherons qui sont en grand nombre dans les Indes. Ils sont divisés en plusieurs sectes principales, qui se multiplient presqu’à l’infini, chaque famille ayant ses superstitions & ses cérémonies particulières. Mor. qui cite Mandesso, t. 2.

☞ Tavernier dit qu’on trouve en Perse beaucoup de Banianes qui y vont trafiquer. Il paroît donner ce nom aux Indiens qui trafiquent en Perse, de quelque secte qu’ils soient.

Arbre des Banianes. C’est un arbre de l’Inde & de la Perse, qui d’un seul tronc fait une petite forêt, parce que ses branches pendant jusqu’à terre, elles y prennent racine, & produisent un nouveau tronc, dont les branches en produisent d’autres de 15 pas en 15 pas, jusqu’à 300 pas à la ronde. Les Anciens, & entr’autres Quint-Curce, ont parlé de cet arbre. Il porte un fruit de la grosseur d’une noix ; la peau en est rouge, & renferme une graine semblable au millet. Il y a de grosses chauvesouris qui en mangent, & qui font leurs nids sur ces arbres. Elles ne branchent point, mais elles s’accrochent à ces arbres, & s’y pendent par le pied ayant la tête en bas. Les Persans appellent cet arbre lul, les Portugais, arbol de Reves, arbre des Rois, & les François, arbre des Banianes, parce que les Banianes se retirent dessous, & y bâtissent des Pagodes & des Caravanseras. Voyez Tavernier, Voyage de Perse ; & Lifl.